16 septembre 2015

L’Homme de l’Ouest (1958) de Anthony Mann

Titre original : « Man of the West »

L'homme de l'OuestRéservé et apparemment un peu gauche, Link Jones (Gary Cooper) prend le train pour la première fois de sa vie. Il doit se rendre dans une grande ville afin d’engager une institutrice pour son village. Un joueur professionnel lui présente une chanteuse de saloon. Le train est attaqué et ils sont tous trois laissés en rase campagne loin de toute civilisation. Link les conduit dans une maison où il a, dit-il, vécu jadis… L’Homme de l’Ouest est le dernier western d’Anthony Mann. Il vient donc après les « cinq grands » qu’il a tournés avec James Stewart. Mais si le film a un petit côté « fin d’époque », c’est surtout dû à son sujet : un Gary Cooper vieillissant confronté à un hors-la-loi vivant dans le passé, qui n’est plus en phase avec les évènements. Une histoire de résurgence du passé qui prend presque la forme d’une rencontre avec des fantômes dans des paysages eux-mêmes fantomatiques (1). C’est un film également très dur avec des poussées de violence brute, assez primitive. Gary Cooper, ici dans l’un de ses derniers films, impose son personnage par une indéfectible placidité. Lee J. Cobb est assez remarquable dans son personnage à la limite de la folie. L’Homme de l’Ouest est un film quelque peu déroutant mais assez intense.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Gary Cooper, Julie London, Lee J. Cobb, Arthur O’Connell, John Dehner, Royal Dano
Voir la fiche du film et la filmographie de Anthony Mann sur le site IMDB.

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(1) Cette belle formule est de Jacques Lourcelles (qui place le film très haut dans le panthéon des westerns américains).

L'Homme de l'Ouest
Gary Cooper et Julie London dans L’Homme de l’Ouest de Anthony Mann

15 février 2015

Les Fraises sauvages (1957) de Ingmar Bergman

Titre original : « Smultronstället »

Les fraises sauvagesLe professeur Borg, âgé de 78 ans, doit recevoir un prix couronnant ses cinquante années en tant de docteur. Il se rend en voiture à l’Université de Lund avec sa belle-fille Marianne. Pendant le trajet, il revit certains éléments de son passé… Ecrit et réalisé par Ingmar Bergman, Les Fraises sauvages fait partie des oeuvres les plus profondes du cinéma. Cet homme qui se sent proche de la mort porte un regard sur sa vie, à la fois par introspection et par le regard des autres, ce qui génère en lui une foule de sentiments variés, parfois contradictoires, qui le désorientent. La forme est aussi enthousiasmante que le fond car Bergman fait preuve d’une remarquable limpidité et d’une grande simplicité dans sa mise en scène ; rien n’est appuyé et pourtant tout est fort. En 1957, Bergman avait déjà une vingtaine de films à son actif mais il n’avait pas encore quarante ans : tant de maturité dans son cinéma et dans son propos qui aborde de nombreux aspects fondamentaux de la vie est assez exceptionnel. C’est d’autant plus étonnant que l’on sait qu’il y a souvent, dans ses films, une certaine identification de Bergman avec son personnage principal. Ce n’est pas un film sombre et amer, comme en témoigne la très belle fin ; la lucidité de son propos le place au-delà de cette simple problématique. Ce n’est pas non plus un film sur la mort, c’est bien plus un film sur la vie, sur ce qui la constitue, sur l’essence-même du passé. Comme j’ai pu personnellement le constater, Les Fraises sauvages est un film que l’on peut voir plusieurs fois, à des moments différents de notre vie, et ressentir différemment. Sa profondeur le permet.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Victor Sjöström, Bibi Andersson, Ingrid Thulin, Gunnar Björnstrand, Max von Sydow
Voir la fiche du film et la filmographie de Ingmar Bergman sur le site IMDB.

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Les Fraises sauvages d'Ingmar Bergman
Ingrid Thulin et Victor Sjöström dans Les Fraises sauvages d’Ingmar Bergman

Remarques :
* Victor Sjöström avait exactement l’âge de son personnage. Rappelons que Victor Sjöström est l’un des plus grands cinéastes du cinéma muet et, à ce titre, l’un des maîtres de Bergman. Ses films sont hélas assez difficiles à voir aujourd’hui. D’abord en Suède, puis à Hollywood entre 1924 et 1930 où il réalisa de grands films (notamment avec Lilian Gish) qui n’eurent jamais le succès qu’ils méritaient, ce cinéaste a toujours fait preuve d’un grand lyrisme dans ses réalisations mais aussi d’inventivité (voir sa filmographie sur IMDB). Les Fraises sauvages est son dernier film en tant qu’acteur puisqu’il est décédé deux ans plus tard.
* La première scène de rêve au début du film est un hommage au très beau film de Victor Sjöström La Charrette fantôme (1921).

14 mai 2014

Impasse des Deux Anges (1948) de Maurice Tourneur

Impasse des Deux AngesActrice de music-hall, Marianne est sur le point d’abandonner sa carrière pour épouser le marquis Antoine de Fontaines qui lui confie un superbe collier de diamants pour la cérémonie. La veille du mariage, elle voit revenir Jean, l’un de ses anciens amours au passé trouble… Ultime réalisation de Maurice Tourneur, Impasse des Deux Anges n’est pas parfaitement représentatif du talent de ce réalisateur. L’histoire, écrite par Jean-Paul Le Chanois, entremêle une histoire d’amour sur une trame policière avec une peinture sociale, mais aucun de ces trois éléments n’est vraiment convaincant et l’ensemble peut paraître bancal. Le plus réussi est encore l’atmosphère, tout à fait dans la veine du réalisme poétique des années trente. Cette atmosphère est soulignée par un joli effet de double exposition dans les flashbacks qui rend les personnages transparents.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Paul Meurisse, Simone Signoret, Marcel Herrand, Danièle Delorme, Jacques Baumer
Voir la fiche du film et la filmographie de Maurice Tourneur sur le site IMDB.

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29 novembre 2013

The Swimmer (1968) de Frank Perry

Titre français parfois utilisé : « Le Plongeon »

Le plongeonPar un bel après-midi d’été, un homme sort des bois en maillot de bain pour plonger dans la piscine d’une belle propriété du Connecticut. L’homme connait visiblement les propriétaires qui l’accueillent chaleureusement, véritablement heureux de le revoir. De leur terrasse qui domine une petite vallée, il lui prend l’idée de passer de propriété en propriété jusque chez lui, nageant de piscine en piscine… Basé une histoire écrite par John Cheever, The Swimmer est un film très original, un peu déroutant sans aucun doute mais franchement remarquable. Il surprend par sa forme et son contenu, cachant bien son jeu dans le premier tiers du film pour ensuite se dévoiler peu à peu (d’ailleurs, je conseillerais d’en lire le moins possible sur le film avant de le visionner). Pour ne pas trop en dire, disons que l’histoire est en réalité une belle allégorie sur la réussite sociale et le rêve américain ; sur le fond, The Swimmer n’est d’ailleurs sans rappeler d’autres films de la même époque comme Le Lauréat. Si le déroulement du scénario est parfait, le film n’est pas sans défaut sur le plan de la forme : ralentis, transitions, les effets sont souvent trop appuyés. La fin est ratée, l’insistance mélodramatique la rend presque risible. A 55 ans, Burt Lancaster passe tout le film en maillot de bain (quand ce n’est pas moins…) Avec son corps athlétique allié à une séduisante maturité, il porte le film beaucoup plus haut que ne l’aurait fait un autre acteur. Trop déroutant, The Swimmer n’a connu que peu de succès à sa sortie. Il fait aujourd’hui partie de ces films méconnus qui méritent vraiment d’être découverts. Original et étonnant.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Burt Lancaster, Janet Landgard, Janice Rule
Voir la fiche du film et la filmographie de Frank Perry sur le site IMDB.

Remarques :
* Le scénario a été écrit par Eleanor Perry, la femme du réalisateur (elle a écrit le scénario de tous ses films).
* Le film n’est, semble t-il, pas sorti en France à l’époque. IMDB donne bien une date de sortie française en 1968 mais les revues de cinéma de l’époque ne le mentionnent pas. Quoiqu’il en soit, The Swimmer est ressorti en 2010.
* Sydney Pollack a été appelé à la rescousse par le producteur pour retourner une scène avec Janice Rule (l’ancienne amante de Ned).

Lire aussi (mais plutôt après avoir vu le film) l’analyse d’Olivier Bitoun sur DVDClassik.

27 juin 2012

Un balcon sur la mer (2010) de Nicole Garcia

Un balcon sur la merAgent immobilier sur la Côte d’Azur, Marc fait visiter une belle bastide à une cliente potentielle. Après quelque temps, il reconnaît en elle la jeune fille qu’il a connue à l’âge de 13 ans quand ses parents habitaient en Algérie… Réalisé par Nicole Garcia, Un balcon sur la mer est un film plein de délicatesse. Alors qu’il a une petite vie bien réglée, son personnage voit ressurgir un passé qu’il avait, consciemment ou inconsciemment, oublié, un tendre amour de jeunesse dans un environnement particulièrement troublé (la guerre d’Algérie). Quelle est la place à donner à un passé que l’on sait révolu ? Nicole Garcia puise un peu dans son passé personnel, Oran (où toutes les scènes de flashback ont été tournées) est sa ville natale. Jean Dujardin démontre ici qu’il peut tenir brillamment un rôle avec une certaine profondeur et la canadienne Marie-Josée Croze montre une belle fragilité. Un balcon sur la mer est un film délicat et touchant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Dujardin, Marie-Josée Croze, Toni Servillo, Sandrine Kiberlain, Michel Aumont, Claudia Cardinale
Voir la fiche du film et la filmographie de Nicole Garcia sur le site IMDB.

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