13 avril 2023

Les Amours d’Anaïs (2021) de Charline Bourgeois-Tacquet

Les amours d'AnaïsAnaïs, la trentaine, est étudiante en thèse et vit à cent à l’heure entre son ex-petit ami et un homme d’âge mûr, et marié, qu’elle rencontre lors d’une soirée, ses problèmes domestiques et la recherche de petits boulots. Des événements inattendus vont l’obliger à reconsidérer sa façon de concevoir sa vie…
Les Amours d’Anaïs est un film français écrit et réalisé par Charline Bourgeois-Tacquet qui signe là son premier long métrage. Le film démarre comme une comédie, avec un personnage tourbillonnant et volubile, mais se révèle être ensuite plus que cela. Le propos montre en effet de plus en plus de complexité et de profondeur à mesure que se déroule l’histoire. La réalisatrice explore le thème du désir et de l’attraction qui « nous fait avancer vent debout, malgré les obstacles ». Le montage est très enlevé. Anaïs Demoustier est pleine de vitalité, Valeria Bruni Tedeschi interprète pour une fois un personnage très posé et cela lui va bien.  D’après la réalisatrice, le fait que le personnage principal porte le même prénom que son interprète n’a pas de signification particulière, si ce n’est de brouiller la frontière entre réel et fiction.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anaïs Demoustier, Valeria Bruni Tedeschi, Denis Podalydès
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Les amours d'AnaïsValeria Bruni Tedeschi et Anaïs Demoustier dans Les amours d’Anaïs de Charline Bourgeois-Tacquet.

15 mai 2021

Portrait de la jeune fille en feu (2019) de Céline Sciamma

Portrait de la jeune fille en feuÀ la fin du XVIIIe siècle, Marianne, une artiste peintre, arrive sur une île bretonne. Une comtesse lui a commandé un portrait de sa fille Héloïse, promise à un noble milanais. La jeune fille refuse toutefois de poser pour un portrait car elle ne souhaite pas se marier. Marianne est donc présentée à Héloïse en tant que dame de compagnie, et l’accompagne quotidiennement lors de ses sorties afin d’analyser et de mémoriser ses traits pour les recopier ensuite sur une toile…
Portrait de la jeune fille en feu est écrit et réalisé par Céline Sciamma. Avec seulement quatre personnages, elle réussit à nous captiver grâce à une écriture très précise et une certaine élégance naturelle de l’image. Elle filme merveilleusement les visages de ses deux actrices principales et donne à l’ensemble une alliance rare de douceur et de force. Il y a aussi beaucoup de délicatesse dans sa façon de filmer l’idylle naissante entre ses deux personnages. Adèle Haenel nous donne une interprétation riche et celle de Noémie Merlant est une révélation. L’actrice y est superbe, son personnage est finalement le plus intéressant des deux. Un très beau film.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Noémie Merlant, Adèle Haenel, Luàna Bajrami, Valeria Golino
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Portrait de la jeune fille en feuAdèle Haenel et Noémie Merlant dans Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma.

29 avril 2020

Colette (2018) de Wash Westmoreland

Colette1893. La jeune Gabrielle Sidonie Colette a épousé Willy, un écrivain égocentrique et séducteur, âgé de quatorze ans de plus qu’elle. Willy fait écrire ses livres par des nègres et il encourage Gabrielle à écrire pour lui un roman basé sur ses souvenirs d’enfance. Le succès est immédiat, ce sera le premier d’une série autour du même personnage prénommée Claudine…
C’est donc un réalisateur anglais qui signe le premier long métrage consacré à la vie de Colette (1). Le récit se concentre sur l’émancipation de l’écrivaine, il s’arrête au moment où elle va enfin signer son prochain roman de son nom. La forme est classique mais l’ensemble est intéressant, assez fidèle à la réalité, nullement romancé et sans effet de dramatisation. La relation homosexuelle de Colette avec Missy est montrée avec simplicité. De même, la reconstitution du Paris de 1900 reste sobre tout en montrant un soin évident dans les décors et costumes. La critique a éreinté le film (c’est habituel pour ce style de film). Il nous apprend pourtant à mieux connaitre le parcours de cette grande figure de la littérature et du féminisme.
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Keira Knightley, Dominic West, Fiona Shaw, Denise Gough
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(1) Nadine Trintignant avait toutefois réalisé précédemment un téléfilm pour France 2 en deux parties en 2003 : Colette, une femme libre avec Marie Trintignant dans le rôle-titre (dernier rôle de l’actrice, morte tragiquement peu avant la fin du tournage fin juillet 2003).

 ColetteKeira Knightley et Dominic West dans Colette de Wash Westmoreland.

15 avril 2020

La Belle Saison (2015) de Catherine Corsini

La Belle saison1971. Delphine, fille de paysans, monte à Paris pour s’émanciper du carcan familial et gagner son indépendance financière. Elle rencontre Carole qui vit activement les débuts du féminisme…
Catherine Corsini a écrit La Belle Saison avec l’aide de Laurette Polmanss. C’est à la fois une histoire d’amour-passion et un hommage au féminisme des années 70 (1). La réalisatrice parvient à mêler habilement les deux, sans effets dramatiques et surtout en évitant tous les stéréotypes, ce qui est vraiment remarquable. Et les scènes de nudité ne tombent jamais dans le voyeurisme. Le film est porté par ses deux actrices : Izïa Higelin est remarquable, montrant beaucoup de force apparente tout en cachant ses incertitudes et Cécile de France déborde de vie. Les films sur l’homosexualité féminine sont assez rares et La Belle Saison est probablement le plus beau.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Cécile de France, Izïa Higelin, Noémie Lvovsky, Kévin Azaïs, Benjamin Bellecour
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(1) Les prénoms des deux personnages principaux sont des allusions à deux figures féministes de l’époque, la comédienne Delphine Seyrig et la cinéaste Carole Roussopoulos.

La Belle saisonIzïa Higelin et Cécile de France dans La Belle saison de Catherine Corsini.

7 avril 2020

Olivia (1951) de Jacqueline Audry

OliviaVers la fin du XIXe siècle, l’anglaise Olivia arrive dans une petite pension de jeunes filles tenue à Fontainebleau par deux directrices, Mlle Julie et Mlle Cara, toutes deux très admirées par les élèves. Olivia tombe rapidement sous le charme de Mlle Julie…
Le scénario est inspiré par le roman de Dorothy Bussy (traductrice et amie d’André Gide), roman qui a connu un grand succès en Grande-Bretagne à sa parution en 1949 tout en faisant scandale. Olivia est un film de femmes : Jacqueline Audry est l’une des très rares réalisatrices françaises, les personnages sont exclusivement féminins et surtout il aborde de façon directe et sans porter de jugements moraux l’homosexualité féminine. Certes celle-ci est latente et, bien entendu,  ne se traduit pas explicitement à l’écran mais elle est bien présente, sans ambigüité. Il y a ce couple formé par les deux directrices, montré presque comme un couple classique qui peut « divorcer » devant notaire, et l’amour juvénile d’Olivia qui déstabilise totalement l’une d’elle et dévoile des pulsions jusqu’ici dissimulées avec peine. La réalisation est soignée, avec beaucoup de style et d’élégance, une belle reconstitution de l’époque et un casting de premier choix. Edwige Feuillère fait une prestation remarquable, elle aimante notre regard autant qu’elle attire ses jeune élèves. Moins présente, Simone Simon exprime parfaitement toute la fragilité de son personnage. La jeune débutante Marie-Claire Olivia est une ingénue parfaite. Le film fut bien entendu jugé amoral et même « malsain » à sa sortie mais c’est un vrai plaisir de le découvrir aujourd’hui.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Edwige Feuillère, Simone Simon, Marie-Claire Olivia, Yvonne de Bray, Suzanne Dehelly
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Remarques :
* Après Alice Guy, au tout début du XXe siècle, et Germaine Dulac, dans les années vingt, Jacqueline Audry est la troisième femme réalisatrice française. Olivia est son cinquième long métrage.
* Philippe Noiret (difficile à reconnaitre) est l’amoureux de l’ancienne élève (Danièle Delorme) rencontrée dans le salon de thé parisien. C’est sa seconde apparition de figuration au cinéma, la première étant également dans un film de Jacqueline Audry : Gigi (1949).
* Le jeune Claude Pinoteau est assistant-réalisateur.

OliviaEdwige Feuillère (à gauche) et Marie-Claire Olivia (deuxième à partir de la droite)
dans la salle de classe d’ Olivia de Jacqueline Audry.

9 mars 2019

Battle of the Sexes (2017) de Jonathan Dayton et Valerie Faris

Battle of the SexesEn 1973, la joueuse de tennis Billie Jean King, qui vient d’être classée numéro 1 mondiale, refuse le principe de recevoir des primes huit fois moindres que les hommes alors les finales féminines attirent autant de public. Avec quelques joueuses, elle crée la Women’s Tennis Association…
Battle of the Sexes est le surnom donné à une très célèbre rencontre de tennis qui a vu Billy Jean King gagner face au bravache Bobby Riggs, ex-numéro un mondial, qui à 55 ans affirmait qu’aucune joueuse en exercice ne pouvait le battre. Ce match a beaucoup servi le féminisme, la reconnaissance du lesbianisme et aussi le tennis en général, qui a bénéficié de retransmissions télévisées plus systématiques après ce match. Le duo Jonathan Dayton et Valerie Faris (connu pour Little Miss Sunshine) nous fait revivre cet évènement de façon très vivante. Le plus remarquable dans le film est qu’il n’y a aucune lourdeur dans la démonstration, rien qui ne paraisse exagéré. Emma Stone et Steve Carell ressemblent étonnamment à leur modèle et beaucoup d’humour passe par ce dernier : son personnage est, outre un macho assumé, un incorrigible parieur qui ne prend rien au sérieux. Bien équilibré, l’ensemble est aussi plaisant qu’édifiant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Emma Stone, Steve Carell, Andrea Riseborough, Natalie Morales, Sarah Silverman, Bill Pullman
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Remarques :
* Le machisme a la vie dure et refait toujours surface : 40 ans plus tard, une rumeur, relayée par la chaine de télévision ESPN en 2013, prétend que Bobby Riggs s’est volontairement laissé battre pour une obscure histoire de dette vis-à-vis de la Mafia.

Battle of the sexes
Emma Stone et Steve Carell dans Battle of the Sexes de Jonathan Dayton, Valerie Faris.

Billy Jean King et Bobby Riggs
Les véritables Billy Jean King et Bobby Riggs, ici en 1973.

5 mars 2018

Carol (2015) de Todd Haynes

CarolÀ New York en 1952, la jeune et timide Thérèse, passionnée de photo et vendeuse dans un grand magasin, fait la connaissance d’une riche et séduisante cliente, Carol, mère d’une petite fille et en instance de divorce. Une amitié se noue entre les deux femmes et elles passent de plus en plus de temps ensemble…
Carol est adapté du roman semi-autobiographique The Price of Salt que Patricia Highsmith publia en 1952 sous le pseudonyme Claire Morgan. L’auteure a pris un pseudonyme à la fois pour se protéger et parce qu’il s’agit d’un mélodrame et non d’un roman policier (1). Soixante ans plus tard, l’adaptation a été écrite par son amie Phyllis Nagy. Todd Haynes met en scène cette histoire de façon délicate, élégante, évitant les clichés et sans victimisation excessive. Au delà de la mise en évidence des pesanteurs de la société vis-à-vis de l’homosexualité féminine, il parvient à donner à cette histoire simple une dimension atemporelle et une indéniable beauté. Pour mieux restituer l’atmosphère du début des années cinquante, le film a été tourné en 16 mm. La recherche esthétique est sans doute parfois un peu voyante mais elle est réussie ; les couleurs, notamment, sont très belles. Le film est d’un très beau classicisme.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Cate Blanchett, Rooney Mara, Kyle Chandler, Sarah Paulson
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Carol
Cate Blanchett dans Carol de Todd Haynes.

Carol
Rooney Mara dans Carol de Todd Haynes. L’appareil-photo est un Argus C3 (marque américaine peu connue en Europe), un appareil assez bon marché à mise au point télémétrique (séparée de l’objectif, ajusté avec les grosses molettes) commercialisé entre 1939 et 1966.

Carol
Cate Blanchett et Rooney Mara dans Carol de Todd Haynes.

(1) Le roman connu un grand succès, notamment lors de son édition en livre de poche à la fin des années soixante : près d’un million d’exemplaires furent au final vendus. Patricia Highsmith a nié en être l’auteur pendant 38 ans avant de donner la permission pour une réédition sous son nom avec le titre Carol en 1990.

10 janvier 2012

Quai des Orfèvres (1947) de Henri-Georges Clouzot

Quai des OrfèvresIssue de milieux modestes, la chanteuse Jenny Lamour est bien décidée à faire une belle carrière dans le music-hall. Elle accepte un rendez-vous avec un producteur libidineux qui lui fait miroiter un contrat. Elle déclenche ainsi la colère de son mari jaloux, Maurice, qui profère des menaces de mort à l’endroit du producteur… Quai des Orfèvres est le premier film tourné par Clouzot après la Libération (1). Il revient au genre policier et adapte à nouveau un roman de Stanislas-André Steeman (2). Mais ici, ce n’est pas tant l’intrigue policière qui est le point fort du film, c’est la peinture des personnages dans leur environnement sentimental et social. Les quatre personnages principaux, très différents, sont des personnages complexes, à plusieurs facettes, dont le comportement est régi des forces parfois contradictoires. Grand perfectionniste, Clouzot les replace dans leur élément naturel qu’il décrit avec force détails. La photographie est superbe, Simone Renant et l’éclatante Suzy Delair en sont les premières bénéficiaires. Louis Jouvet est très juste dans son jeu. Quai des Orfèvres dépasse le simple cadre du film policier. C’est un film très humaniste.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Louis Jouvet, Simone Renant, Bernard Blier, Suzy Delair, Pierre Larquey, Charles Dullin
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