19 septembre 2011

Le cercle rouge (1970) de Jean-Pierre Melville

Le cercle rougeDans le train Marseille-Paris, un gangster échappe au commissaire qui l’escortait. Il se réfugie dans le coffre de la voiture d’un jeune truand, sorti de prison le matin même. Les deux hommes se lient d’amitié. Le commissaire poursuit sa traque… Comme l’indique le titre (1), Le cercle rouge est un film sur la fatalité. C’est aussi un film qui montre la fascination de Jean-Pierre Melville pour les truands de haut vol… et pour Alain Delon qu’il met merveilleusement en scène une nouvelle fois. Comme dans Le Samouraï, son personnage est froid et taciturne mais le spectateur est en totale empathie avec lui. Tout le film est d’ailleurs économe en paroles, et même en musiques, ce silence culmine dans la longue scène (25 minutes) du casse qui se déroule sans un dialogue. Ce casse évoque ainsi celui de Quand la ville dort de John Huston et celui de Du rififi chez les hommes de Jules Dassin (2). A côté de Delon, Bourvil campe un commissaire très crédible, loin des rôles franchouillards qu’il a si souvent tenus, un personnage hors-normes par plusieurs aspects. Gian Maria Volonte et Yves Montand complètent ce beau quarteron d’acteurs sur lequel Melville peut s’appuyer pour mettre en scène cette histoire avec perfection et beaucoup de style.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Alain Delon, Bourvil, Gian Maria Volonté, Yves Montand, François Périer
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Remarques :
(1) Le titre vient d’une citation attribuée à Krishna, placée en épigraphe : « Quand des hommes, même s’ils s’ignorent, doivent se retrouver un jour, tout peut arriver à chacun d’entre eux, et ils peuvent suivre des chemins divergents. Au jour dit, inexorablement, ils seront réunis dans le cercle rouge. »
(2) Melville a affirmé avoir eu l’idée de cette scène en 1950, soit avant la sortie des films de John Huston (1950) et de Jules Dassin (1955), et avoir mis l’idée de côté à cause de ces deux films.

30 juillet 2011

Solo (1970) de Jean-Pierre Mocky

Solo De passage à Paris, un violoniste, voleur de bijoux à ses heures, tente de revoir son jeune frère étudiant. Il découvre qu’il commet des attentats contre la société de l’argent… Solo de Jean-Pierre Mocky est l’un des premiers films de l’après-Mai 68 sur le thème du rejet de la société bourgeoise. Alors que Godard et d’autres montrent une contestation qui s’appuie sur la dialectique, Jean-Pierre Mocky est sur une ligne plus dure : ses étudiants sont n’ont pas une réflexion très développée, ce sont des francs-tireurs, adeptes d’une action violente, tout en restant très naïfs. Mocky traite le sujet à la façon d’un film policier, une longue traque dans la nuit. Deux couleurs ressortent : le rouge et le noir. Le rythme est assez rapide, la tension ne faiblit pas. Jean-Pierre Mocky incarne ce grand frère qui tente de faire revenir son frère à la raison tout en rejetant, lui aussi, le cadre étroit que lui offre la société. Solo est une belle œuvre originale et désespérée.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean-Pierre Mocky, Sylvie Bréal, Anne Deleuze, Denis Le Guillou, René-Jean Chauffard
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Remarques :
A noter également : la musique composée par Georges Moustaki.
Certains décors ont été réalisés par Françoise Hardy.

21 juillet 2011

L’armée des ombres (1969) de Jean-Pierre Melville

L'armée des ombresLui :
Jean-Pierre Melville rend hommage à la Résistance en puisant dans ses souvenirs personnels et dans un livre de Joseph Kessel écrit en 1943. L’armée des ombres n’est pas un film spectaculaire qui montre de glorieux faits d’armes… non, Melville nous fait vivre quelques fragments du parcours d’un grand coordinateur de la Résistance. Il montre l’effacement de l’individu devant la tâche qu’il doit accomplir et le dilemme de sa position : alors qu’il agit pour le collectif, il doit se couper du monde et prendre des décisions sans gloire mais qui doivent être prises. Jean-Pierre Melville (et cela lui a été reproché) transpose certains codes du film policier ce qui ajoute beaucoup de force à son récit. Le film est assez long, mais sans longueur, avec une grande économie de paroles qui accentue le sentiment de solitude. La distribution est parfaite, Lino Ventura a ici l’un de ses rôles les plus forts. A ses côtés, Simone Signoret est l’actrice idéale pour interpréter ce rôle inspiré de Lucie Aubrac. Tous les seconds rôles sont très justes. Sobre et grave, L’armée des ombres est un film d’une grande puissance.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Meurisse, Jean-Pierre Cassel, Claude Mann, Paul Crauchet, Christian Barbier
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Remarques :
* Jean-Pierre Grumbach avait pris comme nom Melville dans la Résistance. Il a gardé ce nom après la Libération dans le monde du cinéma, pour s’appeler Jean-Pierre Melville.
* On ne peut être qu’admiratif face au premier plan du film : un plan fixe de la Place de l’Etoile avec un défilé militaire allemand qui entre dans le champ pour se diriger inexorablement vers nous ; il semble venir nous écraser. En un seul plan, c’est toute l’Occupation qui est symbolisée. Jean-Pierre Melville a déclaré par la suite que c’était l’un des plans dont il était le plus fier de toute sa carrière.

20 juin 2011

Network, main basse sur la T.V. (1976) de Sidney Lumet

Titre original : « Network »

Network, main basse sur la T.V.Lui :
Un présentateur de journal télévisé apprend qu’il va être mis à la porte parce que ses chiffres d’audience sont en baisse. Désespéré, il annonce qu’il va se suicider en direct puis commence à exprimer sa rage. L’audience remonte… Dénoncer une télévision déshumanisée inféodée à l’audimat et aux parts de marché, le propos de Network, main basse sur la T.V. peut paraître banal aujourd’hui mais, en 1976, il était assez nouveau. En France, au moment de sa sortie, le sujet fut même jugé très américain car « Dieu merci, notre télévision n’est pas comme cela ». Nous ne savions pas encore que nous aurions la même quelques années plus tard ! Sidney Lumet étale au grand jour tous les mécanismes de cette nouvelle industrie et met face à face un quinquagénaire pétri d’éthique (William Holden) et une trentenaire ambitieuse et étrangère à tout sentiment (Faye Dunaway), prête à tout pour faire de l’audience ; le tout se déroule sous la bienveillance du grand groupe qui a pris possession de la chaîne. Le film est efficace, à la fois comique et consternant. Sidney Lumet a visiblement poussé ses acteurs car l’interprétation est assez explosive, y compris dans les scènes intimes. Network, main basse sur la T.V.eut beaucoup de succès à l’époque et, avec le recul, le film paraît particulièrement clairvoyant.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Faye Dunaway, William Holden, Peter Finch, Robert Duvall, Ned Beatty, Beatrice Straight
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Remarques :
* On peut se demander pourquoi Sidney Lumet s’égare un peu en montrant la dérive d’un groupuscule d’activistes d’extrême-gauche (le personnage principal est visiblement calqué sur Angela Davis) dont les membres deviennent cupides et arrivistes. Il voulait sans doute montrer que ces activistes nourrissent les médias à sensation et en sont ainsi leurs alliés.
* Dans le film, la chaîne fictive UBS est concurrente de ABC, CBS et NBC. Le film prévoit ainsi la création d’un quatrième groupe (ce sera 11 ans plus tard la chaîne Fox, sur des bases assez similaires). Il se montre aussi prémonitoire à l’irruption de la télé-réalité (ce sera 13 ans plus tard, la série « Cops » sur la Fox).
* L’un des deux tireurs parmi les spectateurs à la fin n’est autre que le tout jeune Tim Robbins, sa première apparition (non créditée) dans un film.

5 juin 2011

Elle (1979) de Blake Edwards

Titre original : « 10 »

ElleLui :
A 42 ans, George Webber est en pleine crise de la quarantaine. Il a beau être riche et célèbre, rouler en Rolls décapotable, il envie son voisin plus jeune dont la vie ressemble à une orgie permanente. En voiture, il croise le regard d’une jeune mariée qu’il considère comme la plus belle fille qu’il ait jamais vue. Il devient obsédé par elle… Cette comédie de Blake Edwards mêle assez habilement l’humour pur et la comédie dramatique chargée d’une certaine mélancolie. Ce sont toutefois les scènes d’humour pur qui sont les plus réussies, elles rattrapent un scénario qui serait passablement ennuyeux sans elles. Le film fut un énorme succès commercial pour d’autres raisons, essentiellement centrées sur la plastique irréprochable de la jeune actrice Bo Derek, courant sur la plage en maillot de bain.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Dudley Moore, Julie Andrews, Bo Derek, Robert Webber
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Remarques :
* C’est ce film qui lança la pratique machiste de noter les femmes de 0 à 10. En réalité, dans le film, c’est le psychanalyste qui demande à George Webber combien il donnerait sur une échelle de 0 à 10 à la jeune mariée qu’il a aperçue, ce à quoi il répond : « onze ».
* Le film donna une nouvelle vie au Boléro de Ravel (la jeune femme ne veut faire l’amour que sur le Boléro de Ravel).
* On ne peut pas dire que Bo Derek ait eu ensuite une grande carrière d’actrice. Il faut préciser qu’elle a essentiellement tourné sous la direction de son mari, John Derek, réalisateur sans talent. Le couple s’est couvert de ridicule, dont le summum fut probablement le film Bolero (1984).
* Un remake est prévu pour 2011… (MAJ: le projet n’a semble t-il pas abouti).

14 mai 2011

Nickelodeon (1976) de Peter Bogdanovich

NickelodeonLui :
Ancien critique cinématographique et grand amoureux du septième art, Peter Bogdanovich rend hommage aux premières années du cinéma, l’époque où les Nickel Odéons (1) avaient un besoin démesuré en petits films rapidement tournés. Il rend aussi hommage à l’humour de type « slapstick » des comédies de Mack Sennett car toute la première partie de son film est dans cette veine de comédie, une partie qui n’est pas exempte de longueurs et de répétitions. Nickelodeon est plus réussi dans son aspect de reconstitution, nous pouvons ainsi voir opérer une petite équipe qui enchaîne les tournages avec des scénarios écrits à la va-vite et rafistolés en cours de route. Ce petit côté documentaire trouve son point d’orgue dans la reconstitution de la première projection de Naissance d’une Nation avec orchestre et bruiteurs tirant des coups de feu en direct. C’est cela qui rend Nickelodeon finalement très intéressant. Le film n’eut aucun succès et Bogdanovich s’interrompit de tourner pendant deux à trois ans.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Ryan O’Neal, Burt Reynolds, Tatum O’Neal, Brian Keith, Stella Stevens, John Ritter, Jane Hitchcock
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Remarques :
Le film de Peter Bogdanovich est dédié à Allan Dwan, réalisateur sur lequel il a écrit un livre en 1971. Allan Dwan aurait tourné plus de 1400 films. Il était encore vivant (91 ans) en 1976.

(1) Les Nickel Odéons sont de petites salles de cinéma qui connurent un énorme succès entre 1905 et 1915 aux Etats Unis. On en comptait plus de 10 000. NickelodeonLe prix d’entrée était un nickel (pièce de 5 cents). Ce faible prix permit leur explosion, elles ne désemplissaient pas.
Toutes ces salles avaient besoin de films régulièrement renouvelés. Un groupe de producteurs mené par Thomas Edison tenta de monopoliser le marché grâce à une série de brevets sur les caméras et les projecteurs. Cette « Patents Company », surnommée « The Trust », faisait la chasse aux producteurs indépendants (l’un d’eux était l’allemand Carl Lemmle, montré dans le film) en utilisant parfois des méthodes brutales, détruisant caméras et laboratoires. Pour leur échapper, des producteurs indépendants décidèrent d’aller s’installer à l’autre bout du pays, en Californie, s’éloignant ainsi le plus possible du New Jersey qui était alors le centre névralgique du cinéma.

29 avril 2011

Taxi Driver (1976) de Martin Scorsese

Taxi DriverLui :
De retour du Vietnam, un ex-marine devient chauffeur de taxi à New York. Il travaille la nuit et ne refuse aucune destination. Mentalement instable, il ressent mal le sordide de certains quartiers et le besoin d’assainir sa ville se développe en lui… Avec Taxi Driver, Martin Scorsese a montré New York comme aucun cinéaste ne l’avait fait avant lui. L’interprétation puissante de De Niro a donné au film toute sa complexité et sa portée. Le propos est complexe : dévastation mentale des anciens du Vietnam, violence sous-jacente, le décalage du discours politique, le besoin d’amour… Il est aussi, comme souvent avec Scorsese, ambigu et le dénouement a été l’objet de controverses. Il est un peu dommage que la réputation du film se soit surtout faite sur la scène finale, cette explosion de violence cathartique, car Taxi Driver est tout de même bien plus complexe que cela… De son côté, la forme est innovante et personnelle, à commencer par ce superbe générique, très graphique, rendu angoissant par la très belle musique de Bernard Herrmann. Très remarqué (à juste titre), le film a définitivement « lancé » aussi bien Martin Scorsese que Robert De Niro.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Robert De Niro, Jodie Foster, Cybill Shepherd, Harvey Keitel, Albert Brooks, Peter Boyle
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Remarques :
* Jodie Foster était effectivement âgée de 12 ans lorsqu’elle a interprété la prostituée de 12 ans dans Taxi Driver. Dans les scènes trop explicites, elle est doublée par sa sœur Connie, âgée de 19 ans.
* Robert De Niro a travaillé un mois comme chauffeur de taxi et a étudié les maladies mentales pour mieux s’imprégner de son personnage. La scène du miroir a été improvisée par lui.
* Martin Scorsese joue le rôle du client qui espionne sa femme.
* Bernard Hermann a (entre autres) également signé la musique de Psychose et de Sueurs froides d’Hitchcock.

12 avril 2011

Stavisky (1974) d’ Alain Resnais

Stavisky...Lui :
Alain Resnais retrace le parcours de Serge Alexandre Stavisky, escroc de l’entre-deux-guerres dont la mort, maquillée en suicide, créa un scandale aux profondes implications politiques (1). Le cinéaste désire surtout montrer comment cet homme, charmeur et enjôleur, avait su se créer des amitiés dans la classe politique dirigeante avant d’être lâché et exécuté (2). Au lieu d’adopter une structure narrative chronologique et continue, Alain Resnais éclate son récit en morceaux épars. Cette construction, très originale et particulièrement audacieuse dans une histoire complexe, s’adapte en réalité très bien à cette affaire aux multiples ramifications et implications : elle permet de nous délivrer de la nécessité de compréhension totale pour mieux nous nous concentrer sur les caractères. Par la même, son film s’écarte franchement du documentaire censé rapporter objectivement les faits. Il adopte une approche plus émotionnelle, s’intéressant à l’image que l’escroc donne de lui, images multiples et attirantes. Et Stavisky est aussi un spectacle : décors somptueux, personnage semi-irréel de la femme (Anny Duperey, superbe en élégante des années trente), il se dégage presque un certain lyrisme des superbes images d’Alain Resnais. Le film fut généralement assez mal reçu (3), souvent mal compris. C’est vraiment regrettable.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Jean-Paul Belmondo, François Périer, Anny Duperey, Charles Boyer, Michael Lonsdale, Roberto Bisacco, Claude Rich
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(1) Largement récupérée par l’extrême-droite, l’Affaire Stavisky provoqua un grand scandale en France en 1934. Des émeutes antiparlementaires éclatèrent. Camille Chautemps, Président du Conseil de la Troisième République, démissionna car son beau-frère, Procureur Général, était directement impliqué pour avoir protégé l’escroc. L’Affaire Stavisky provoqua également un fort regain d’antisémitisme puisqu’il était juif.
Notons qu’Alain Resnais introduit aussi par petites touches, sans le relier directement, l’autre évènement qui mit en effervescence l’opinion publique de l’époque, plutôt l’extrême gauche cette fois : l’exil de Trotski en France.

(2) « Ce qui nous intéressait, c’étaient les mécanismes d’une société qui commence par flatter, sous couvert de libéralisme, ce que l’on pourrait appeler le clown dans l’arène et qui, à partir du moment où ce dernier en fait trop, le supprime froidement. » (interview d’Alain Resnais et Jorge Semprún par Claude Beylie, Ecran 74 n°27)

(3) Beaucoup des critiques furent centrées sur le choix de Jean-Paul Belmondo et sur le fait qu’il ne colle pas vraiment avec l’époque des années trente…. C’est justement pour cela qu’il était un très bon choix : il apparaît ainsi totalement hors-normes, hors du commun, un personnage qui attire par un charisme qui ne lui fait jamais défaut. En outre, Belmondo a produit le film… A propos d’acteurs, il faut noter la présence du merveilleux Charles Boyer, ici dans l’un de ses tous derniers rôles.

L’affaire Stavisky a été précédemment mise en scène au cinéma par Michael Curtiz en 1937 : Stolen Holiday avec Kay Francis et Claude Rains.

7 avril 2011

Les yeux de Satan (1972) de Sidney Lumet

Titre original : « Child’s play »

Child's PlayLui :
Ancien élève, Paul revient dans un petit collège catholique pour prendre son poste de professeur de gymnastique. Il trouve une situation très tendue entre ses deux anciens professeurs. De plus, les élèves se livrent à d’étranges jeux très cruels… Les yeux de Satan est l’un des films les moins connus de Sidney Lumet. Pourtant, comme d’autres de ses films, il s’agit de l’adaptation d’une pièce de théâtre et, comme pour d’autres, il s’agit d’un huis clos, genre où il excelle. Il parvient à créer une atmosphère angoissante, étrange, aux accents surnaturels. Le spectateur est trompé, on manipule nos sentiments, nos impressions : le dénouement ultime (totalement inattendu) nous oblige presque à se repasser mentalement tout le film. Les yeux de Satan a eu si peu de succès que Paramount décida d’interrompre les sorties : il n’est tout simplement pas sorti dans de nombreux pays. L’une des explications souvent avancée est que le film serait trop proche de If, explication étrange car si le lieu est dans les deux cas un collège privé anglais, le propos est très différent. En tous cas, ce film de Lumet ne mérite pas ce mauvais traitement.
Note : 3 étoiles

Acteurs: James Mason, Robert Preston, Beau Bridges
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4 avril 2011

Le Casanova de Fellini (1976) de Federico Fellini

Titre original : « Il Casanova di Federico Fellini »

Le Casanova de FelliniLui :
Le Casanova de Fellini, le titre en lui-même nous en dit long : Fellini s’approprie un mythe pour en donner sa version, il règle ses comptes avec un personnage creux, vide, incapable de sentiments, un « pantin » comme il le décrit lui-même. Par la même, il s’attaque au mythe du mâle latin. Très librement inspiré des Mémoires, son Casanova enchaîne les aventures sexuelles sans y trouver de plaisir, ramenant ses accouplements à des exploits de gymnastique. Il ne connaît pas l’amour. La seule partenaire qui lui apportera du plaisir est une poupée mécanique… Le Casanova de Fellini semble toujours osciller au bord de la mort. Malgré la noirceur du propos, le film est superbe à regarder. Les extérieurs sont joliment vides ou très brumeux, les intérieurs sont peu meublés mais formidablement dessinés, les costumes de Danilo Donati sont merveilleux, outrés, inventifs. Le tournage connut des difficultés du fait du budget important. Le film fut assez mal reçu à sa sortie.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Donald Sutherland, Tina Aumont, Cicely Browne, Carmen Scarpitta, Clara Algranti, Daniela Gatti
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Remarque :
Voici comment Fellini parle des Mémoires : « Lire cet annuaire téléphonique, ce bottin des événements, naviguer dans cet océan de pages arides, écrites sans passion, et qui met en évidence une rigueur de statisticien pédant, méticuleux, pas même menteur, oui cela ne m’a procuré que gêne, dégoût, indifférence. (…) Il n’y a rien dans les Mémoires. On ne se souvient de rien ! (…) Il a fait le tour du monde et c’est comme s’il n’était jamais sorti de sa chambre. (…) On comprend pourquoi il a été mythifié : parce qu’il incarne le vide. »
(Entretien avec Aldo Tassone, 1975, Revue Positif 181/182 mai/juin 1976)