28 août 2023

La Lectrice (1988) de Michel Deville

La LectriceFascinée par Marie, l’héroïne du roman La Lectrice, à laquelle elle s’identifie, Constance décide à son tour de faire de la lecture à domicile à des gens esseulés. Après avoir passé une petite annonce, elle fait la connaissance d’Éric, un adolescent handicapé, et d’autres clients : une fillette espiègle, une veuve de général marxiste dans l’âme, un PDG névrosé qui se fait lire L’Amant de Marguerite Duras, ou encore un magistrat à la retraite, amateur des sulfureux écrits du Marquis de Sade…
La Lectrice est un film français co-écrit et réalisé par Michel Deville d’après le roman de Raymond Jean. Il s’agit d’une comédie ayant pour toile de fond la lecture qui met en scène des interactions amusantes de la jeune lectrice avec ses clients et clientes. Rêves et réalité se rejoignent. L’ensemble est agrémenté d’une petite touche d’érotisme (mais le propos est tout de même plus subtil que l’affiche du film ne le laisserait supposer). Miou-Miou fait une belle prestation, enjouée et libre, très naturelle ; elle est de toutes les scènes. Un élégant divertissement.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Miou-Miou, Patrick Chesnais, Régis Royer, María Casares, Pierre Dux, Marianne Denicourt
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La LectriceMiou-Miou dans La Lectrice de Michel Deville.

29 novembre 2022

Le Paltoquet (1986) de Michel Deville

Le PaltoquetDans le bar français d’une ville portuaire coloniale, quatre hommes se retrouvent chaque jour pour jouer au bridge. Un soir, leur partie est interrompue par le commissaire de police ; il enquête sur le meurtre d’un voyageur inconnu dans un hôtel de passe voisin…
Le Paltoquet est un film français écrit et réalisé par Michel Deville. Il s’inspire du roman On a tué pendant l’escale de Franz-Rudolph Falk (pseudonyme de Philippe du Puy de Clinchamps). C’est un film qui nous surprend par sa forme, d’une grande abstraction, aux accents brechtiens, et nous séduit par la brillance de ses dialogues et de son interprétation. C’est un huis-clos, le bar est en fait un vaste hangar vide avec une unique table et un grand hamac, et Michel Deville parvient à insérer ponctuellement d’autres lieux avec une grande élégance de mouvements de caméra. Du grand art. La musique est utilisée pour ponctuer ou même annoncer l’arrivée d’un personnage. L’ensemble est stylisé, aérien. Les jeux de mots fusent. L’intrigue policière n’est pas le plus important mais joue avec le fait que chacun peut être coupable ou victime. Le fond du propos est plutôt sur l’obsession et le fantasme, avec un épilogue buñuellien. L’interprétation est parfaite, le plus remarquable de tous est certainement Michel Piccoli (Le Paltoquet, c’est lui) dans un personnage étrange aux multiples facettes. Un film surprenant, brillant et espiègle, qui pourra toutefois dérouter…
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Michel Piccoli, Fanny Ardant, Claude Piéplu, Jean Yanne, Daniel Auteuil, Richard Bohringer, Philippe Léotard, Jeanne Moreau, Thuy An Luu
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Le PaltoquetJeanne Moreau, Michel Piccoli, Richard Bohringer, Jean Yanne, Fanny Ardant, Daniel Auteuil et Claude Piéplu dans Le Paltoquet de Michel Deville.

6 décembre 2015

Le Mouton enragé (1974) de Michel Deville

Le Mouton enragéAprès avoir osé aborder une inconnue dans la rue, un modeste employé de banque prend de l’assurance et, suivant à la lettre les conseils d’un ami d’enfance, un écrivain sans éditeur, il quitte sa vie terne pour chercher à « gagner plein d’argent et coucher avec beaucoup de femmes »… Adaptation d’un roman de Roger Blondel, Le mouton enragé est une fable sur l’attrait de la réussite. Si le « mouton docile » va sortir du troupeau, ce n’est que pour tomber sous la coupe d’un arrivisme sans scrupules personnifié ici par cet ami écrivain raté qui vit par procuration. La démonstration est habile mais un peu trop chargée en personnages et en cibles. Tout y passe : machisme, malversations financières, magouilles politiques, presse poubelle, manipulations… Cela finit par faire beaucoup. Trintignant et Cassel sont assez remarquables et, comme toujours, Romy Schneider illumine chacune des scènes où elle figure. De petites notes d’humour viennent ça et là alléger le mordant du propos. Réalisé sous les années Pompidou, Le mouton enragé est une fable assez amère sur l’ambition personnelle et la vanité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean-Louis Trintignant, Jean-Pierre Cassel, Romy Schneider, Jane Birkin, Henri Garcin, Georges Wilson, Florinda Bolkan
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Le mouton enragé
Jean-Louis Trintignant et Jean-Pierre Cassel dans Le Mouton enragé de Michel Deville.

Le Mouton enragé
Romy Schneider dans Le Mouton enragé de Michel Deville.

5 janvier 2014

Ce soir ou jamais (1961) de Michel Deville

Ce soir ou jamaisLaurent, jeune metteur en scène amateur, réunit chez lui quelques amis avec lesquels il met sur pied une comédie musicale. Lorsqu’ils apprennent que l’actrice principale vient d’avoir un accident, il doit lui trouver une remplaçante… Ce soir ou jamais est le second film de Michel Deville, celui avec lequel il débute une belle série de comédies coécrites avec Nina Companeez. Caractérisé par une unité de temps (une seule soirée), une unité de lieu (un appartement sous les toits de Paris) et une unité d’action, le film met en relief les relations entre Laurent (Claude Rich) et Valérie (Anna Karina) qui se testent, mettent dangereusement à l’épreuve leur amour. Légèreté et gravité se mêlent intelligemment et la caméra de Michel Deville apporte une belle vivacité à l’ensemble, passant d’un couple à l’autre, avec de beaux cadrages sur deux ou trois personnages. Les dialogues de Nina Companeez sont souvent assez brillants. Ce soir ou jamais est ainsi un marivaudage élégant illuminé par ses deux acteurs principaux, séduisants à souhait. Françoise Dorléac y fait une apparition courte mais assez spectaculaire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Anna Karina, Claude Rich, Georges Descrières, Jacqueline Danno, Guy Bedos, Françoise Dorléac
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17 février 2012

Bye bye, Barbara (1969) de Michel Deville

Bye bye, BarbaraUne jeune femme, pieds nus en manteau de vison blanc, fait irruption dans un bar de Biarritz. Elle semble en fuite. Le séducteur Jérôme, journaliste sportif frivole, la prend sous son aile et l’héberge pour la nuit. Le lendemain, elle rentre avec lui à Paris mais le soir même, elle est morte… Bye bye Barbara est l’un des films issus de la collaboration de Michel Deville avec Nina Companéez. Ils réussissent à faire une fusion entre la comédie et le film policier mondain tout en jouant les contrastes : face à la froideur et au machiavélisme du monde de Hugo Michelli (Bruno Cremer), ils opposent la légèreté, la désinvolture du journaliste. Le premier est un monde où l’amour enferme, rend esclave, le second est un monde où l’amour libère avec charme et douceur. Philippe Avron manque sans doute un peu de charisme mais il est finalement assez convaincant avec un jeu qui évoque Belmondo. La mise en scène et en images de Michel Deville est superbe, élégante avec une belle harmonie des couleurs. Le rythme est enlevé avec des accélérations appuyées de beaux mouvements de caméra, les dialogues sont assez vifs. Finalement, Bye bye Barbara est loin d’être un film mineur.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ewa Swann, Philippe Avron, Bruno Cremer, Alexandra Stewart, Michel Duchaussoy
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30 janvier 2012

L’ours et la poupée (1970) de Michel Deville

L'ours et la poupéeL’ours est un violoncelliste rêveur et distrait qui vit simplement à la campagne avec ses enfants. La poupée est une ravissante idiote sophistiquée qui paresse en ville entourée d’une faune de snobs. Tout les oppose et pourtant ils vont se rencontrer quand la 2 CV du premier emboutit la Rolls de la seconde… Nina Companéez et Michel Deville se sont inspirés des comédies américaines des années trente (L’impossible Monsieur Bébé n’est pas loin) pour écrire une comédie divertissante. Le choix des acteurs ne se déroulât pas comme prévu (1) mais Brigitte Bardot fut ravie de pouvoir relancer sa carrière d’actrice qui battait de l’aile. Michel Deville misât tout sur l’actrice qui est ici bien mise en valeur : le scénario nous permet de l’admirer aussi bien en fine robe longue qu’avec une jupette de gamine de 10 ans! Michel Deville a soigneusement minuté chaque plan pour que le rythme accélère progressivement. Hélas, le résultat n’est pas à la hauteur du soin apporté et L’ours et la poupée manque de corps et de dialogues relevés. Le film est rapidement ennuyeux.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Brigitte Bardot, Jean-Pierre Cassel, Daniel Ceccaldi, Sabine Haudepin
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Remarques :
(1) Le scénario avait été écrit au départ en pensant à Catherine Deneuve. Maladroitement, Michel Deville proposa le rôle masculin à la fois à Alain Delon et à Jean-Paul Belmondo. Ce dernier fut le premier à refuser mais n’apprécia guère que Deville affirme alors qu’il ne l’avait proposé qu’à Delon. L’affaire devint publique. Résultat : tout le monde refusa, y compris Deneuve.

A lire : un texte intéressant de Philippe Lombard sur l’histoire du tournage

26 décembre 2011

Raphaël ou le débauché (1971) de Michel Deville

Raphaël ou le débauchéAu milieu du XIXe siècle, un dandy cynique se livre à la débauche avec ses amis pour tromper l’ennui. Il est attiré par Aurore, une jeune et jolie veuve, qui repousse dans un premier temps ses avances. Lorsqu’il montre son désintérêt, elle fait tout pour le voir déclarer son amour pour elle… Ecrit par Nina Companéez et réalisé par Michel Deville, Raphaël ou le débauché bénéficie de la parfaite entente/complémentarité de ce duo très talentueux. L’histoire évoque Alfred de Musset, les images, Ingres et Delacroix. Nous sommes là dans un spectacle élégant, hanté par un certain mal de vivre et qui se termine en tragédie. Le film séduit par sa musique, ses décors et costumes splendides mais nous restons un peu étrangers à cette histoire. Maurice Ronnet fait une belle prestation et Françoise Fabian illumine le film par sa beauté.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Maurice Ronet, Françoise Fabian, Jean Vilar, Brigitte Fossey, Jean-François Poron, Anne Wiazemsky
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25 octobre 2011

Benjamin ou Les mémoires d’un puceau (1968) de Michel Deville

Benjamin ou Les mémoires d'un puceauA dix-sept ans, Benjamin, orphelin élevé à l’écart du monde, ignore tout des choses de la vie. Son précepteur le conduit chez sa tante, la comtesse de Valandry, dans l’espoir qu’elle le prenne sous sa protection. Benjamin va y découvrir l’amour… Benjamin ou Les mémoires d’un puceau est le fruit de la collaboration brillante entre Michel Deville et sa femme Nina Companéez qui a écrit le scénario. L’atmosphère de libertinage du XVIIIe siècle est joliment recréée, avec ses futilités, ses jeux du mensonge et de la vérité. La reconstitution est toutefois moderne, par les dialogues d’abord et aussi par une certaine simplification (1). Benjamin ou Les mémoires d'un puceau Le tableau est certes idyllique : toutes les femmes, jusqu’à la moindre soubrette, rivalisent de beauté et tout se déroule joyeusement, même si le jeu peut parfois devenir cruel. L’image de Ghislain Cloquet est de toute beauté, le film formant des sortes de tableaux vivants qui s’étourdissent de mouvement. Michel Deville a trouvé un équilibre subtil, évitant toute lourdeur ou à l’inverse tout excès de légèreté. C’est un enchantement. Le film est également servi par une distribution brillante. A noter que Pierre Clémenti sort ici de ses rôles de mauvais garçons Benjamin ou Les mémoires d'un puceaupour montrer beaucoup de candeur et d’innocence.  Benjamin ou Les mémoires d’un puceau est sorti à la fin des années soixante, une époque où ce marivaudage pouvait trouver certains échos. Le film paraît plus en décalage avec l’époque actuelle, ce qui peut certainement occasionner des réactions négatives. Pour l’apprécier, il faut prendre le film pour ce qu’il est avant tout : un divertissement élégant pour le plaisir des sens.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Michèle Morgan, Michel Piccoli, Pierre Clémenti, Catherine Deneuve, Jacques Dufilho, Francine Bergé, Catherine Rouvel, Odile Versois, Tania Torrens
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(1) Propos de Michel Deville juste avant la sortie du film : « Le XVIIIe est une époque que nous aimons bien, Nina Companeez et moi. Cela dit, ce XVIIIe siècle est, dans Benjamin, très stylisé. Les costumes sont débarrassés de toute dentelle superflue et les femmes ne portent pas de perruques blanches. Jamais nous n’avons essayé non plus de faire, par exemple, des reconstitutions de tableaux célèbres. Nos extérieurs, d’ailleurs, sont  beaucoup plus clairs et ensoleillés que les tableaux de Watteau ou de Fragonard. Là, nous sommes plus près, je crois, et à dessein, du XIXe. C’est à dire, le romantisme. Presque, déjà, l’impressionnisme… »
(…)
« Je voulais qu’en extérieurs mes seconds plans soient margés par la lumière, comme gommés par elle, et qu’en intérieurs ils soient gommés aussi, mais là par leur absence de lumière, de couleurs.  Et puis, toujours dans un but de simplification, à chaque personnage a été attribuée une couleur différente, couleur que le personnage conserve d’un bout à l’autre du film, même s’il change plusieurs fois de robe ou de costume. Ainsi, Michèle Morgan est toujours en bleu turquoise, Catherine Deneuve en blanc, etc. Couleurs que l’on retrouve d’ailleurs dans les décors où les personnages évoluent le plus souvent : la chambre de M. Morgan est bleue, etc. »
(Entretien avec Michel Deville, propos recueillis par Gérard Langlois, Cinéma 68 n°122)