22 décembre 2011

Marchands de poisson (1932) de George Marshall

Titre original : « Towed in a Hole »

Marchands de poisson(Court métrage de 20 minutes) Laurel et Hardy se sont installés à leur compte comme vendeurs de poissons. Ils décident d’acheter un bateau passablement usagé et entreprennent de le remettre à neuf… Après une courte introduction, toute l’action de Towed in a Hole se déroule en un lieu unique, chez un ferrailleur où le bateau est à sec, avec pour seuls et uniques personnages Laurel et Hardy. Cette situation de base est parfaitement utilisée avec une succession ininterrompue de gags, l’ensemble étant parfaitement rythmé. Il faut saluer l’invention dans les gags, les scénaristes ne se contentant du plus évident (le plan avec la scie où Stan Laurel est coincé par le mat est une trouvaille absolument incroyable). Le final est superbe. Towed in a Hole montre Laurel et Hardy dans ce qu’ils font le mieux : une situation simple exploitée à fond avec beaucoup d’interactions entre leurs deux personnages.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Stan Laurel, Oliver Hardy
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Towed in a hole

14 décembre 2011

Le voleur de Bagdad (1924) de Raoul Walsh

Titre original : « The thief of Bagdad »

Le voleur de BagdadA Bagdad, un habile et impertinent voleur a l’habitude de prendre tout ce qui lui fait envie. Une nuit, il parvient à s’introduire dans le palais du Calife et tombe amoureux de la princesse endormie. Pour pouvoir l’approcher, il se glisse parmi les prétendants à sa main en se faisant passer pour un prince… Inspiré des Contes des mille et une nuits, Le voleur de Bagdad est l’une des plus grosses productions des années vingt. Il est produit par Douglas Fairbanks lui-même, il a aussi écrit une partie du scénario (sous son nom de plume : Elton Thomas). Raoul Walsh de son côté n’avait tourné auparavant que des westerns. Ce sont les décors qui frappent en premier : conçus par William Cameron Menzies, ils nous plongent dans un Bagdad reconstitué dans de gigantesques studios.
Le voleur de Bagdad Les costumes ont fait l’objet d’autant de soins ; riches et variés, ils contribuent à créer une ambiance très forte, très exotique. C’est une féérie visuelle. Douglas Fairbanks a pris une part très active dans la réalisation. Il est bien entendu le pivot central du film : bondissant, exubérant, il accomplit de véritables prouesses physiques qui mettent en valeur sa musculature, ici très apparente puisqu’il est torse nu la plupart du temps. Face à lui, Anna May Wong en traitresse et So-Jin Kamiyama, en machiavélique et fourbe prince mongol, font de belles performances. A la fois film exotique et film fantastique, Le voleur de Bagdad est une luxueuse et envoutante production qui, on le comprend aisément, émerveilla le public sur plusieurs générations.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Douglas Fairbanks, Julanne Johnston, Sôjin, Anna May Wong, Brandon Hurst, Snitz Edwards
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Remarques :
* Le grassouillet prince perse est en réalité joué par une femme, la française Mathilde Comont, listée au générique sous le nom M. Comont.
* A noter : le plan final du tapis volant passant devant la lune, 60 ans avant E.T. !

Voir aussi :
Le très beau remake de Michael Powell et Alexandre Korda : Le voleur de Bagdad (1940).

12 décembre 2011

La petite vendeuse (1927) de Sam Taylor

Titre original : « My best girl »

My Best GirlEmployée à la gestion des stocks dans un grand magasin, la jeune Maggie fait connaissance avec Joe, un nouvel employé. Ils tombent amoureux l’un de l’autre. Elle ne sait pas qu’il est en réalité le fils du grand patron, envoyé ici pour faire ses preuves… La petite vendeuse (My Best Girl) est le dernier film muet de Mary Pickford. L’histoire est très gentillette, la fin est particulièrement conventionnelle. Mais le traitement que Mary Pickford et Sam Taylor font de cette histoire rend le film assez intéressant. L’humour est assez présent, il est même omniprésent dans le premier tiers du film qui évolue ensuite avec un peu plus de poésie, notamment dans une scène centrale où les deux amoureux errent dans la grande ville ; cette scène peut faire penser par certains côtés à Sunrise de Murnau. La caméra est souvent assez fuide. Plus que jamais, le jeu de Mary Pickford est riche et complet.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Mary Pickford, Charles Rogers, Mack Swain
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Remarques :
* Mary Pickford épousera Charles Rogers 10 ans plus tard, peu après son divorce avec Douglas Fairbanks.
* Mary Pickford ne tournera ensuite que quelques films parlants avant de mettre un terme à sa carrière d’actrice en 1933.

9 décembre 2011

La jeune fille au carton à chapeau (1927) de Boris Barnet

Titre original : « Devushka s korobkoy » (« Девушка с коробкой »)

La jeune fille au carton à chapeau (Film muet de 61 mn) Natasha est une jeune fille pétillante qui vit à la campagne avec son grand-père. Ils fabriquent des chapeaux qu’elle va vendre à Moscou. Dans la capitale, elle tombe sur un étudiant sans le sou et décide de lui venir en aide… A 25 ans, Boris Barnet reçoit une commande du gouvernement soviétique pour promouvoir la vente de bons d’un emprunt d’état assortie d’une loterie. La jeune fille au carton à chapeau est ainsi son premier long métrage. C’est une comédie légère qui met habilement en relief certains travers de la nature humaine et qui glorifie la jeunesse.Anna Sten Anna Sten est vraiment adorable, éclatante de vie, parfois mutine mais toujours pleine de générosité et de sincérité. Elle a une présence folle à l’écran et illumine toutes les scènes où elle est présente. L’actrice a failli ensuite faire une grande carrière (1). La jeune fille au carton à chapeau est un film très amusant, avec un ton et une légèreté que l’on n’associe pas forcément avec le cinéma soviétique.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Anna Sten, Vladimir Fogel, Ivan Koval-Samborsky
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Remarques :
(1) Anna Sten se fera remarquer quatre ans plus tard dans Les Frères Karamasoff des allemands Erich Engels et Fyodor Otsep. En voyant le film, Samuel Goldwyn s’empressera de lui faire signer un contrat, espérant avoir découvert une nouvelle Greta Garbo ou une nouvelle Marlene Dietrich. Son agent lui retournera le contrat signé sans préciser qu’elle ne parle pas un mot d’anglais. A grands renforts de publicité, Goldwyn lui fera prendre des cours de diction et tourner trois films… qui seront trois flops. L’affaire devenant la risée d’Hollywood, il se séparera d’elle et l’actrice restera ensuite cantonnée à des rôles mineurs.

3 décembre 2011

The Circle (1925) de Frank Borzage

The Circle(film muet) En 1890, Lady Catherine quitte son mari et son fils pour partir avec son amant. 30 ans plus tard, le fils est marié à une jeune femme sur le point de faire la même chose. Mais avant de fuir, la jeune femme invite Lady Catherine à venir dans la maison familiale car elle veut savoir si elle a été heureuse ou malheureuse après sa fugue… The Circle est adapté d’une pièce de Somerset Maugham. Ce genre de sujet, le mari ou la femme volage, faisait fureur en ce milieu des années vingt. Frank Borzage parvient à combler le handicap du manque de paroles (particulièrement criant dans les adaptations de pièces qui reposent sur les dialogues) par des intertitres assez nombreux et surtout des expressions de visages assez marquées, quelquefois trop. L’ensemble est très amusant, vif et relevé. On peut regretter que Borzage ait sacrifié la fin originale de la pièce pour terminer sur un happy end, enlevant ainsi une partie du sens du titre, le cercle symbolisant un éternel recommencement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Eleanor Boardman, Malcolm McGregor, Joan Crawford
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Remarques :
La jeune Lady Catherine, en 1890 donc, est interprétée par Joan Crawford. The Circle est ainsi son premier film tourné sous le nom qu’elle gardera ensuite. Elle avait tourné trois films auparavant, un sous le nom de Lucille Le Sueur (son vrai nom) et deux autres pour lesquels elle ne figurait pas au générique (l’un des deux est La Veuve Joyeuse d’Erich von Stroheim).

Autre adaptation de la pièce de Somerset Maugham:
Strictly Unconventional de David Burton (1930)

21 novembre 2011

L’argent (1928) de Marcel L’Herbier

L'argentSaccard, directeur de la Banque Universelle, subit un revers financier important lorsque son ennemi de toujours, le banquier Gunderman, bloque une augmentation de capital d’une filiale stratégique. Il est proche de la ruine. Pour se remettre en selle, il décide de financer l’aviateur Jacques Hamelin qui projette d’aller exploiter des gisements de pétrole en Guyane… Tourné dans les toutes dernières années du cinéma muet, L’argent est une transposition moderne du roman homonyme d’Emile Zola. Marcel L’Herbier, réalisateur qui a fortement contribué à hisser le cinéma au rang d’art véritable au tout début des années vingt, réussit à mettre sur pied cette ambitieuse production dotée de larges moyens (qui seront d’ailleurs dépassés). Composant, parfois difficilement, avec un producteur pointilleux, il a fortement imprimé sa marque sur le film. L’argent est donc bien un film d’auteur.

L'argent Le plus visible de sa démarche réside dans les audacieux et inventifs mouvements de caméra. Le plus célèbre est un vertigineux traveling vertical au dessus de la Corbeille mais il y a beaucoup d’autres travelings, parfois très rapides, qui apportent beaucoup de mobilité. L’autre aspect le plus visible est l’utilisation des flous, soit pour mieux isoler un personnage, soit pour exprimer un sentiment, un état d’esprit, une situation trouble. Très étonnant. Il faut aussi remarquer le montage avec notamment des plans alternés très efficaces. Toute cette créativité pourrait sembler vaine si elle n’était au service de l’intensité du drame qui se noue devant nos yeux.

L'argentLes décors Art-Déco sont superbes. Star auréolée du succès de Metropolis, Brigitte Helm n’a qu’un second rôle, celui de l’intrigante baronne Sandorf. Lascive et féline, elle distille, dans les scènes où elle apparaît, une forte sensualité qui atteint son paroxysme dans son altercation avec Saccard (1). Pierre Alcover donne beaucoup de corps (!) à son personnage. Ce qui est étonnant à propos de Saccard, c’est l’ambivalence des sentiments qu’il nous inspire : il est à la fois odieux, calculateur, entièrement asservi par l’argent, mais il est parfois sympathique, surtout lorsqu’il laisse transparaître sa fragilité. L’autre banquier, Gundermann, est encore plus machiavélique, un personnage très réussi : froid et inexpressif, il ne cesse de caresser l’un de ses chats à longs L'argentpoils.

Tourné un an avant le krach boursier de 1929, L’argent a été donc assez prophétique dans sa dénonciation du pouvoir extrême de l’argent. Il trouve d’ailleurs un nouvel écho aujourd’hui, 80 ans plus tard. L’argent eut un succès mitigé : à sa sortie, il fut mal considéré par la critique et il faut attendre les années soixante pour le voir réhabilité et remis à sa juste place, c’est à dire parmi les 5 ou 10 plus grands films du cinéma muet.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Pierre Alcover, Brigitte Helm, Marie Glory, Alfred Abel, Henry Victor, Antonin Artaud, Jules Berry
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Remarques :
* Le tout jeune et inexpérimenté Jean Dréville a tourné un film de 40 minutes sur le tournage de L’argent : Autour de L’argent. Ce petit film est passionnant, un document précieux.
L'argent * Les scènes de bourse furent réellement tournées à la Bourse (Palais Brongniart à Paris) que Marcel L’Herbier put avoir trois jours à son entière disposition pendant le week-end de l’Ascension. 2000 figurants (dont certains étaient de véritables opérateurs de bourse), une quinzaine de caméras, le réalisateur ne lésina guère sur les moyens. Le résultat est saisissant : l’effervescence de ce temple de la finance est clairement perceptible.  Pour l’un des plans les plus audacieux de toute l’histoire du cinéma, L’Herbier a fait chuter une volumineuse caméra au dessus de la Corbeille depuis la coupole, soit 22 mètres en quasi-chute libre.

(1) Le film/making-of de Jean Dréville nous montre que cette scène (entrevue entre Saccard et la baronne Sandorf) fut la première à être tournée. C’est assez étonnant lorsqu’on voit l’intensité dramatique et sensuelle qu’elle atteint à l’écran.

Remake :
L’argent de Pierre Billon (1936) avec Nicolas Amato et Pierre Richard-Willm (film perdu?)

21 novembre 2011

Autour de l’argent (1928) de Jean Dréville

Autour de l'argent(Court-métrage de 40 mn) Autour de l’argent est ce que nous appelons aujourd’hui un making-of. Jean Dréville a 22 ans lorsqu’il propose à Marcel l’Herbier de filmer le tournage de son film L’Argent, grosse production de 1928. Nous sommes là dans les toutes dernières années du cinéma muet. Jean Dréville n’a absolument aucune expérience cinématographique, ni pour tourner, ni pour monter, mais il s’appuie sur ses connaissances de photographe amateur. Il s’agit donc de son tout premier film. Autour de l’argent est un document très précieux car il nous montre donc comment Marcel L’Herbier a tourné : le grand studio, les trouvailles ingénieuses, les chariots pour ses mouvements complexes de caméra ; nous voyons tomber la caméra dans la fameuse scène de la bourse, l’incroyable traveling au dessus de la soirée chez Saccard, nous voyons L’Herbier diriger ses comédiens. Toutes ces images sont d’un intérêt extrême, c’est un document inestimable. Il est intelligemment monté en grands chapitres. Initialement muet, un commentaire en voix-off de Jean Dréville a été rajouté en 1971.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs:
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11 novembre 2011

Bromo and Juliet (1926) de Leo McCarey

Bromo and JulietPour faire plaisir à sa fiancée, Charley doit interpréter Roméo lors d’un gala de bienfaisance. Il doit aussi veiller à ce que le père de la jeune fille, assez porté sur la boisson, se présente bien sur scène à l’heure…
Charley Chase est un grand comique du cinéma muet, aujourd’hui hélas oublié. Bromo and Juliet fait partie de ses excellents films : plein d’inventivité dans les gags, avec des situations les plus absurdes et les plus inattendues qui soient. L’acteur joue ici l’homme saoul pendant une bonne partie du film  et, bien que ce ne soit pas vraiment sa spécialité, il s’en sort fort bien. Oliver Hardy a ici un second rôle, sans grande scène comique (1). (muet, 24 minutes)
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Charley Chase, Corliss Palmer, William Orlamond, Oliver Hardy
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(1) A noter que le duo Laurel et Hardy sera vraiment formé en cette même année 1926.

6 novembre 2011

Le baiser (1929) de Jacques Feyder

Titre original : « The Kiss »

The KissLe cœur brisé, Irene doit se résigner à ne plus voir l’homme qu’elle aime en secret car elle ne peut divorcer de son mari âgé, terriblement jaloux, avec qui elle est liée par un mariage sans amour. De plus, un très jeune fils des amis du couple est follement épris d’elle et brûle de se déclarer… The Kiss (Le baiser) est le dernier film muet de Greta Garbo. A l’âge de 24 ans, l’actrice était déjà une très grande star. Le réalisateur d’origine belge Jacques Feyder tourne ici son premier film à Hollywood. Greta Garbo montre une grande richesse dans son jeu ; elle est, comme toujours, très expressive mais c’est surtout l’étendue de la palette de sentiments qu’elle provoque chez le spectateur qui étonne le plus. Il suffit de voir comment elle est capable de passer en quelques secondes du bonheur à la tristesse la plus intense ou encore de modeler son jeu selon la personnalité de son partenaire :The Kiss face au jeune Lew Ayres, elle est beaucoup plus légère et frivole que face à Conrad Nagel, son amant plus âgé. Elle joue avec un naturel confondant, on est sous le charme. A noter que c’est le premier film où elle accomplit un acte violent. The Kiss est pour Lew Ayres, 20 ans, son premier rôle : il montre une belle présence à l’écran (1). Gros succès à l’époque, ce film nous montre à quel point Greta Garbo, « La divine », était bien l’une des plus grandes actrices du muet avant d’être une grande star du parlant. (film muet)
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Greta Garbo, Conrad Nagel, Lew Ayres, Anders Randolf
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Le baiser Remarques :
Jacques Feyder dirigera à nouveau Greta Garbo l’année suivante pour la version allemande du premier film parlant de Greta Garbo : Anna Christie. Il rentrera en France peu après, désillusionné d’Hollywood.

(1) Le deuxième grand rôle de Lew Ayres lui apportera une consécration encore plus grande : A l’ouest rien de nouveau (All Quiet on the Western Front) de Lewis Milestone (1930)

26 octobre 2011

Ben-Hur: A tale of the Christ (1925) de Fred Niblo

Ben-Hur: A Tale of the ChristBen-Hur: A Tale of the Christ est la deuxième des trois adaptations du roman de Lew Wallace. Ben-Hur raconte l’extraordinaire épopée d’un jeune juif au premier siècle de notre ère. A la même époque, Jésus fait naître un grand espoir parmi le peuple opprimé brutalement par les Romains… La toute jeune M.G.M. prenait un risque important avec cette coûteuse superproduction. Le tournage fut difficile : commencé en Italie (troublée à l’époque par la montée de Mussolini) sous la direction de Charles Brabin, il fut repris en main par Fred Niblo et fini à Hollywood. Le film est porté par un grand souffle épique avec deux grandes scènes d’anthologie : la bataille navale (qui est d’ailleurs bien plus réussie que dans la version de 1959, c’est même l’une des meilleures batailles filmées de toute l’histoire du cinéma) Ben-Hur: A Tale of the Christ et bien entendu la course de chars, sauvage et poignante. Toutes les scènes de foule sont impressionnantes, mais d’autres scènes sont très fortes, tel ce face à face entre Ben-Hur et Messala avant la course. Quelques scènes sont en couleurs, un procédé expérimental à deux couches (vert et rouge, pas de bleu) qui demandait un très fort éclairage. Grand film commercial, Ben-Hur: A Tale of the Christ fut un grand succès, l’un des plus importants de la décennie. Cette version muette est supérieure en bien des points à la version parlante de 1959.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Ramon Novarro, Francis X. Bushman, May McAvoy, Betty Bronson, Claire McDowell, Kathleen Key
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Remarques :
Ben-Hur: A Tale of the Christ * La bataille navale fut tournée en Italie par B. Reeves Eason. Lorsque les vents rabattirent la fumée de l’incendie d’un bateau sur un autre, les figurants pris de panique sautèrent tous dans l’eau (la scène a d’ailleurs été gardée pour le film). Or, beaucoup de figurants avaient menti sur le fait de savoir nager. La catastrophe fut évitée de justesse…

* La M.G.M. a choisi de ne jamais montrer le Christ pour lui donner une présence plus spirituelle que charnelle. Nous voyons son bras, mais pas son corps. Dans la (courte) scène de la cène, un personnage s’est assis juste devant la table pour nous bloquer la vue !

Ben-Hur: A Tale of the Christ* Pour la course de chars, la MGM a utilisé 42 caméras, postées à des endroits différents. La course a été terrible : aucune mort de cascadeurs, heureusement, mais plusieurs chevaux sont morts (notamment dans le violent accident dans le virage). Tout Hollywood s’est porté volontaire pour faire de la figuration dans cette scène, la liste est impressionnante : John Barrymore, Lionel Barrymore, Clarence Brown, Gary Cooper, Joan Crawford, Marion Davies, Douglas Fairbanks, George Fitzmaurice, Clark Gable, Janet Gaynor, John Gilbert, Dorothy Gish, Lillian Gish, Samuel Goldwyn (!!), Sid Grauman (oui le Grauman du Grauman Theater Ben-Hur: A Tale of the Christqui avait acheté fort cher une exclusivité de diffusion), Rupert Julian, Harold Lloyd, Carole Lombard, Myrna Loy, Colleen Moore, Mary Pickford, Fay Wray… pour ne citer que les plus connus. A part Myrna Loy qui joue une esclave visible dans une tribune, il est impossible de repérer des visages connus parmi tout ce monde. Clark Gable serait un garde romain (d’autres sources parlent d’un personnage dans la foule).

* Le tournage mouvementé de Ben-Hur est raconté dans l’excellent livre de Kevin Brownlow sur le cinéma muet : La Parade est passée…

* Les trois versions de Ben-Hur :
Ben-Hur de Sidney Olcott (1907) avec Herman Rottger et William S. Hart
Ben-Hur: A Tale of the Christ de Fred Niblo (1925) avec Ramon Navarro
Ben-Hur de William Wyler (1959) avec Charlton Heston