4 janvier 2024

La Femme de Tchaïkovski (2022) de Kirill Serebrennikov

Titre original : « Zhena Chaikovskogo »

La Femme de Tchaïkovski (Zhena Chaikovskogo)Russie, 19ème siècle. Antonina Miliukova, une jeune femme apprentie pianiste admiratrice du compositeur Piotr Tchaïkovski, parvient à se faire épouser par lui. Mais l’amour qu’elle lui porte n’est pas réciproque et elle finit par être rejetée. Consumée par ses sentiments, Antonina va accepter de tout endurer pour rester auprès de lui…
La Femme de Tchaïkovski est un film franco-helvético-russe écrit et réalisé par le russe Kirill Serebrennikov. Cette histoire d’un amour déraisonnable qui pousse vers la folie (rappelant ainsi L’Histoire d’Adèle H. de François Truffaut) apparaît si incroyable que l’on s’empresse d’aller vérifier à la fin de la projection qu’elle est bien basée sur des faits réels. C’est le cas (1). Le drame est puissant car cette femme est, malgré elle, source de malheur pour son mari qu’elle vénère. Tout le film est vu à travers ses yeux, la musique du compositeur n’entre pas dans le champ du propos. La mise en scène de Kirill Serebrennikov est trop travaillée, cherchant la virtuosité de façon démonstrative. Cela peut plaire mais cela peut aussi paraître artificiel. L’atmosphère est très noire, sombre, parfois dérangeante. L’ensemble semble souvent excessif, trop long également, mais le film possède une indéniable puissance.
Elle: 1 étoile
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Alyona Mikhailova, Odin Lund Biron, Filipp Avdeev
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(1) Toutefois l’homosexualité de Tchaïkovski est une invention de scénariste.

Odin Lund Biron et Alyona Mikhailova dans La Femme de Tchaïkovski (Zhena Chaikovskogo) de Kirill Serebrennikov.

29 octobre 2022

The Spacewalker (2017) de Dmitriy Kiselev

Titre original : « Vremya pervykh »

The Spacewalker (Vremya pervykh)Dans les années 1960, durant la guerre froide et la course à l’espace, l’URSS a déjà envoyé un homme dans l’espace et prévoit cette fois de franchir une nouvelle étape : effectuer la première sortie de l’Homme dans l’espace…
The Spacewalker (le titre original russe peut se traduire par « Le temps des premiers ») est un film russe réalisé par Dmitri Kisseliov. Il s’agit du portrait d’Alexeï Leonov, le premier homme à avoir effectué une sortie dans l’espace. C’est la dernière victoire du programme spatial russe qui sera ensuite toujours en retard sur les américains. The Spacewalker est un film à gros budget qui comporte des scènes vraiment spectaculaires (sortie dans l’espace, rentrée dans l’atmosphère, …) Sur ce point, il est très comparable aux grosses productions occidentales. Hélas, le scénario est pauvre, étiré en longueur. Lourdeur et répétition des messages de propagande (exaltation de l’homme russe, de sa capacité à résister à tout) sont évidentes, bien moins subtiles que dans les blockbusters hollywoodiens. Le film connut un grand succès en Russie.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Evgeniy Mironov, Konstantin Khabenskiy, Vladimir Ilin
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The Spacewalker (Vremya pervykh)Evgeniy Mironov dans The Spacewalker (Vremya pervykh) de Dmitriy Kiselev.

Remarque :
Dans la réalité, le problème principal de la mission était différent de celui montré : La combinaison spatiale de Leonov s’était dilatée lors de sa sortie, au point qu’elle l’empêchait de pouvoir passer par l’écoutille pour rentrer.

20 mai 2022

Michel-Ange (2019) de Andreï Konchalovsky

Titre original : « Il peccato »

Michel-Ange (Il peccato)Rome 1512. Michel-Ange termine le plafond de la Chapelle Sixtine mais il est très en retard sur ses autres commandes et les querelles entre les Medecis et les Della Rovere rendent ses choix de plus en plus difficiles…
Michel-Ange (Il peccato, littéralement « Le Péché ») est un film russo-italien coécrit, coproduit et réalisé par Andreï Kontchalovski. Plutôt que réaliser une biographie classique, le cinéaste russe s’est attaché à recréer l’environnement dans lequel Michel-Ange exerçait son art et ses relations avec le pouvoir en place. Il souligne le fort contraste entre la beauté de ses créations et les conditions sordides dans lesquelles il vivait ou encore le peu de noblesse des sentiments humains (jalousie de ses confrères, barbarie des gens de pouvoir). A aucun moment, Kontchalovski ne montre le processus de création, en revanche il s’attache à en détailler les à-côtés. Le morceau de choix du film est une séquence qui nous fait suivre, étape par étape, le transport dangereux d’un monumental bloc de marbre, depuis les hauteurs des montagnes de Carrare. L’artiste est décrit comme un être angoissé et tourmenté. Par extension, le film peut apparaître un peu oppressant. Il est certainement trop long, donnant une trop grande place aux luttes de pouvoir entre les deux familles nobles. Andreï Kontchalovski a tourné en italien avec des acteurs majoritairement non-professionnels.
Elle: 2 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Alberto Testone, Jakob Diehl, Adriano Chiaramida
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Michel-Ange (Il peccato)Alberto Testone dans Michel-Ange (Il peccato) de Andreï Konchalovsky.

Remarque :
* Andreï Kontchalovski a été co-scénariste du très beau film Andreï Roublev (1966) d’Andreï Tarkovski qui se situait dans le même esprit.

4 septembre 2021

Salyut-7 (2017) de Klim Shipenko

Salyut-7En février 1985, la station spatiale soviétique Saliout 7, inoccupée depuis six mois, cesse brutalement de répondre aux signaux. Elle est hors de contrôle. Les autorités redoutent la chute de l’installation sur la Terre qui pourrait causer de nombreuses victimes et jeter un discrédit sur l’URSS. Il est décidé de lancer deux cosmonautes à bord de Soyouz T-13 pour une mission périlleuse : s’arrimer à la station, identifier le problème et réparer…
Salyut-7 est un téléfilm coécrit et réalisé par Klim Chipenko pour la chaîne de télévision russe Rossiya 1. Le scénario s’inspire de l’accident réel de la station Saliout 7 en 1985 et les auteurs se sont basés sur les journaux personnels de Viktor Savinykh, le second cosmonaute de la mission Soyouz T-13. Le réalisateur s’est adjoint les conseils techniques de cosmonautes et de responsables de Roscosmos (la NASA russe). De fait, la simulation est parfaite et les scènes en apesanteur sont très crédibles. Les sorties dans l’espace n’ont que peu à envier à celles de surproductions américaines (Gravity par exemple), la réalisation est de grande qualité. Le suspense est intense et l’on se surprend plusieurs fois à se cramponner à son siège. Seule la partie propagande (qui insinue que l’intention des américains était de s’emparer de la station) fait sourire et le rendez-vous final avec la navette américaine est assez ridicule. Cela n’empêche pas ce téléfilm d’être particulièrement remarquable.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs : Vladimir Vdovichenkov, Pavel Derevyanko, Aleksandr Samoylenko, Mariya Mironova
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 Salyut-7Salyut-7 de Klim Shipenko.

 Salyut-7Vladimir Vdovichenkov et Pavel Derevyanko dans Salyut-7 de Klim Shipenko.

Remarques :
* En réalité, les deux cosmonautes ont mis douze jours pour remettre la station en état et ils y sont ensuite restés trois mois. La station Saliout 7 est, quant à elle, restée active jusqu’en 1991.

* En réalité, il n’y a pas eu de feu à bord de Soyouz 13 et, bien entendu, toute la partie concernant la navette spatiale américaine relève de l’invention scénaristique (ou de la désinformation). Une navette a bien été lancée onze jours après Soyouz T-13 mais elle était pleine et sur une trajectoire qui n’aurait pas permis un rendez-vous. Le cosmonaute français à son bord n’était pas Jean-Loup Chrétien (qui avait précédemment séjourné dans Saliout 7) mais Patrick Baudry.

* L’idée du projet de kidnapping de la station par les américains avait été longuement développée par un documentaire russe de style conspirationniste produit par Roscosmos en 2011. On peut lire un exposé des théories développées et leur réfutation sur le site Space Review : Kidnapping a Soviet space station (en anglais).

* A plusieurs reprises, les personnages parlent de la mise en place d’un système de prohibition. En effet, l’une des premières mesures prises par Makhaïl Gorbatchev qui, en 1985, venait d’arriver au pouvoir, a été de limiter la consommation d’alcool : interdiction dans les lieux publics et augmentation des prix de l’alcool de 30%. Toutefois, la consommation d’alcool n’a jamais été interdite.

10 février 2021

La Couleur de la grenade (1969) de Sergei Parajanov

Titre original : « Sayat Nova »

La Couleur de la grenade (Sayat Nova)La vie de Sayat-Nova (= roi des chansons), poète arménien du XVIIIe siècle, en huit chapitres…
Sayat Nova est un film soviétique réalisé par Sergueï Paradjanov. En ouverture du film, le réalisateur précise qu’il n’a pas cherché à raconter la vie de Sayat-Nova mais plutôt de recréer l’univers imagé de sa poésie. Son film prend la forme expérimentale d’une suite de tableaux vivants inspirés de miniatures arméniennes et persanes, remplis de symboles et de métaphores. Hélas, la signification de ces tableaux échappe totalement au spectateur non initié à cette civilisation, spectateur qui ne peut alors que se laisser glisser dans cet univers visuel sans en trouver le sens. Certains tableaux sont très beaux. Paradjanov a adopté une représentation sans profondeur à la façon des miniatures de l’époque. Le film est presque muet. Un film qu’il faut certainement étudier bien plus profondément pour pouvoir l’apprécier vraiment.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sofiko Chiaureli
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Remarques :
* Dans la démarche et les intentions, le film peut être rapproché de l’Andreï Roublev (1966) de Tarkovski mais la forme est bien plus expérimentale et l’ensemble plus difficile d’accès pour le profane.
* Distribué une première fois en 1969, le film Sayat Nova est rapidement retiré des écrans puis, à nouveau, diffusé dans une version remontée et abrégée par le réalisateur Serguei Youtkevitch, sous le titre La Couleur de la grenade en 1971.

* Les huit chapitres :
I : L’enfance du poète.
II : La jeunesse du poète.
III : Le poète à la cour du prince/Prière avant la chasse.
IV : Le poète se retire au monastère/Le sacrifice/La mort du katholikos.
V : Le songe du poète/Le poète retourne à son enfance et pleure la mort de ses parents.
VI : La vieillesse du poète/Il quitte le monastère.
VII : Rencontre avec l’Ange de la Résurrection/Le poète enterre son amour.
VIII : La mort du poète/Il meurt mais sa poésie est immortelle.

La Couleur de la grenade (Sayat Nova)La Couleur de la grenade (Sayat Nova) de Sergei Parajanov.

23 septembre 2020

Faute d’amour (2017) de Andrei Zvyagintsev

Titre original : « Nelyubov »

Faute d'amour (Nelyubov)Boris et Genia vont bientôt divorcer. Chacun a déjà commencé un nouveau chapitre amoureux et ils ont hâte d’en finir avec les formalités. Aucun des deux ne désire avoir la garde d’Aliocha, leur fils de 12 ans. Un jour, l’enfant part à l’école et disparait sans laisser de traces…
Faute d’amour est le cinquième long métrage du réalisateur russe Andreï Zviaguintsev. Il en a coécrit le scénario avec son scénariste habituel Oleg Neguine. Pour dresser le portrait d’une famille russe moderne, son intention première était de faire un remake de Scènes de la vie conjugale de Bergman mais l’impossibilité d’en avoir les droits et la découverte de l’existence du mouvement « Liza Alert » créé en 2010 l’a orienté sur une autre voie. Cette association très efficace est composée de volontaires bénévoles qui cherchent les personnes disparues, enfants ou adultes car la police, en pratique, ne fait rien. Son film est au final une critique autant sociale que politique. A l’individualisme des deux protagonistes répond l’incurie de la police. Comme dans ses films précédents, Andreï Zviaguintsev sait donner de l’intensité à son récit, il nous offre une image esthétique et ses mouvements de camera sont remarquablement sobres.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Maryana Spivak, Aleksey Rozin, Matvey Novikov
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Faute d'amour (Nelyubov)Maryana Spivak dans Faute d’amour (Nelyubov) de Andrey Zvyagintsev.

Faute d'amour (Nelyubov)Aleksey Rozin dans Faute d’amour (Nelyubov) de Andrey Zvyagintsev.

21 juillet 2020

Une grande fille (2019) de Kantemir Balagov

Titre original : « Dylda »

Une grande fille (Dylda)Leningrad, 1945. Dans une ville éprouvée par trois années de siège, Iya, surnommée « la girafe » (1) du fait de sa grande taille, travaille dans un hôpital où sont soignés des anciens combattants blessés. Elle vit dans un appartement communautaire avec le petit Pashka, âgé de trois ans, qu’elle aime beaucoup. Bientôt, son amie, la rousse Masha, revient du front et elles se retrouvent…
Tesnota, le premier long métrage du jeune réalisateur russe Kantemir Balagov avait été très remarqué en 2017. Son deuxième, Une grande fille, l’a été tout autant. Le livre La guerre n’a pas un visage de femme de Svetlana Aleksievitch, lauréate du prix Nobel, a été sa principale source d’inspiration pour en écrire le scénario. Ses deux personnages principaux, Iya et Masha, sont au centre de cette histoire peu ordinaire, puissante, soutenue par des personnages secondaires auxquels Kantemir Balagov sait donner de l’épaisseur en peu de scènes. La forme est brillante avec ses plans-séquences et ses angles de vue peu communs. La durée de 2h10 finit par peser un peu trop, mais le jeune réalisateur crée l’intensité à partir de cette lenteur. C’est en tous cas un film vraiment remarquable.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Viktoria Miroshnichenko, Vasilisa Perelygina, Andrey Bykov, Konstantin Balakirev, Kseniya Kutepova
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(1) Son surnom est en réalité « la grande perche » (Dylda en russe)

 Une grande fille (Dylda)Viktoria Miroshnichenko et Vasilisa Perelygina dans Une grande fille (Dylda) de Kantemir Balagov.

9 juin 2020

Le Train mongol (1929) de Ilya Trauberg

Titre original : « Goluboy ekspress »
Autre titre français : « L’Express bleu »

L'express bleu (Goluboy ekspress)En Chine, au milieu des années 1920, un train rapide emporte des voyageurs de conditions différentes : les occidentaux et militaires chinois sont en première classe alors que des chinois très pauvres, enrôlés pour servir de main d’œuvre servile dans les industries textiles lointaines, sont entassés en troisième classe dans de simples wagons sans siège. Les deux repris de justice qui les gardent tuent une jeune paysanne en tentant d’abuser d’elle. Les hommes vont se révolter et prendre le contrôle du train…
Le Train Mongol, ou L’Express bleu, est un film muet soviétique de 1929 qui a connu un certain succès dans sa version sonorisée sortie en 1931. C’est le premier film d’Ilya Trauberg, frère de Leonid Trauberg (1). Il a été deux ans plus tôt l’assistant d’Eisenstein sur Octobre. Le propos est assez classique du cinéma soviétique qui portait alors très haut les valeurs du socialisme triomphant (2), avec ce manichéisme que l’on retrouve si souvent dans les films de propagande. Les profiteurs sont clairement montrés du doigt : des occidentaux, notamment anglais, et des dignitaires chinois s’enrichissent alors que le peuple travaille dur pour ne gagner qu’une poignée de riz pour subsister. Mais l’unité de lieu le rend très particulier : tout se passe sur le quai de la gare puis dans le train lancé à grande vitesse que les insurgés vont remonter (le film est donc un lointain ancêtre du Snowpiercer de Bong Joon-ho). Mais le plus remarquable est dans sa forme. Le montage est virtuose, très travaillé, d’une grande vivacité ; à la manière d’Eisenstein dans Octobre, Ilya Trauberg insère de multiples plans très courts sur un objet qui fait office de métaphore (par exemple, les butoirs des wagons qui s’entrechoquent renforcent les images de combat) ou une image explicative pour remplacer un intertitre. Cette rapidité dans les ruptures de plans accroit la tension qui monte sans cesse, le film se terminant par de l’action pure, à l’instar des films d’action occidentaux. Un film étonnant à découvrir.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Sergei Minin, Yakov Gudkin, Ivan Savelyev
Voir la fiche du film et la filmographie de Ilya Trauberg sur le site IMDB.

Lire la présentation du film sur le site Perestroikino

Remarques :
* L’Express bleu (c’est le nom du train) est la traduction du titre original. Le titre Le Train mongol semble être apparu un peu plus tard.
* Ilya Trauberg a réalisé huit longs métrages entre 1929 et 1941. Le plus cité en dehors de celui-ci semble être Fils de Mongolie (1936).
* Le Train Mongol a été diffusé récemment sur Arte dans sa version restaurée par Lobster (intertitres refaits), mais il n’est pas pour l’instant sorti en DVD.

(1) Ilya Trauberg est le frère de Leonid Trauberg, réalisateur soviétique et co-fondateur du collectif d’avant-garde théâtral FEKS, La Fabrique de l’acteur excentrique, en 1921 alors qu’il avait 19 ans. Ce collectif s’étendit rapidement au cinéma où il tint un rôle important.
(2) Pour mieux situer le contexte : entre 1926 et 1930, Staline prend la succession de Lénine et s’installe au pouvoir après avoir supprimé toutes les oppositions.

L'express bleu (Goluboy ekspress)Chu Chai Wan dans L’Express bleu (Goluboy ekspress) de Ilya Trauberg.

10 décembre 2019

L’idiot ! (2014) de Yuriy Bykov

Titre original : « Durak »

L'idiot ! (Durak)Dans une ville de Russie, le jeune plombier Dima Nikitin est appelé pour intervenir dans un immeuble d’un quartier populaire. Il découvre une énorme fissure sur toute la hauteur de l’édifice qui penche dangereusement. Il tente de convaincre les édiles de la ville d’évacuer immédiatement les huit cents locataires…
Cet Idiot n’est pas celui de Dostoïevski mais celui du trentenaire Yuriy Bykov. Son film dénonce la corruption, touchant tous les services et administrations qui se protègent mutuellement. Sa vision est rendue encore plus noire avec la peinture des rapports entre les personnes, y compris au sein d’une même famille, dominés par l’amertume due aux désillusions et espoirs déçus. Les personnes comme Dima « on les traite de romantiques, d’altruistes, d’idéalistes ou simplement d’idiots pour bien marquer qu’ils ne se comportent pas normalement à une époque où le cynisme, la peur et l’indifférence sont devenus la norme » explique le réalisateur. C’est une vision assez épouvantable de la Russie d’aujourd’hui qu’il nous propose. Tout cela est très noir et exprimé avec une force qui nous secoue.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Artyom Bystrov, Natalya Surkova, Yuriy Tsurilo, Boris Nevzorov
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 L'idiot ! (Durak)Darya Moroz et Artyom Bystrov dans L’idiot ! (Durak) de Yuriy Bykov.

9 novembre 2019

La Belle (1969) de Arunas Zebriunas

Titre original : « Grazuole »

La Belle (Grazuole)À Vilnius dans une cour d’immeuble, des enfants jouent au jeu La Belle qui consiste à danser devant les autres et c’est toujours Inga qui gagne. Cette petite fille vit avec sa mère célibataire. Lorsque de nouveaux voisins arrivent, elle est intriguée par l’intérêt du garçon pour quelques branches qui semblent venir d’un vieux balai…
Ce film soviétique inconnu du lituanien Arunas Zebriunas (en 1969, la Lituanie faisait bien partie de l’Union soviétique) a refait surface cinquante ans après sa sortie. C’est un film assez surprenant, sur le thème de l’univers de l’enfance : tout le récit est vu par les yeux de la jeune Inga que l’on suit constamment, elle est de tous les plans (ou presque). C’est l’enfance vue de l’intérieur en quelque sorte et le monde des adultes n’interfère qu’assez peu. Les autres thèmes sont ceux de la beauté, du temps qui passe et qui change les choses de façon irréversible (le chien qui attend le retour son maître noyé, l’homme nostalgique de sa maison détruite) et aussi de l’aspiration à autre chose (la danse, l’espoir de faire renaitre la vie de branches mortes). Arunas Zebriunas parvient à filmer ces enfants de façon très naturelle et délicate, sans chercher les effets. Même si le contenu peut sembler limité, La Belle est un film charmant. La jeune actrice Inga Mickyte est lumineuse.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Inga Mickyte, Lilija Zadeikyte
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Remarques :
* Arunas Zebriunas a réalisé une dizaine de films, tous inconnus en France, souvent centrés sur l’enfance, dont une adaptation du Petit Prince de Saint-Exupéry.
* Un critique a affirmé que le film est un classique en Lituanie. Ce point reste à vérifier car la page du Wikipédia lituanien sur le film est vraiment minimale.

La Belle (Grazuole)Inga Mickyte dans La Belle (Grazuole) de Arunas Zebriunas.

La Belle (Grazuole)Lilija Zadeikyte et Inga Mickyte dans La Belle (Grazuole) de Arunas Zebriunas.