5 septembre 2021

Marie-Octobre (1959) de Julien Duvivier

Marie-OctobreUn groupe d’ex-résistants, dont certains s’étaient perdus de vue depuis la fin de la guerre, se retrouvent quinze années plus tard. Ils dînent ensemble dans la demeure de leur ancien chef, Castille, qui a été tué par les allemands. Cette soirée est organisée par deux d’entre eux pour percer le mystère de la mort de Castille car ils savent maintenant qu’il y a eu un traitre…
Marie-Octobre est inspiré du roman éponyme de Jacques Robert qui en a écrit l’adaptation avec Julien Duvivier. Il s’agit d’un huis clos avec dix personnages (onze avec la gouvernante) au cours duquel les soupçons vont se porter tour à tour sur chacun. Les dix personnages ont des professions très différentes qui ont parfois une influence. La distribution du film réunit certains des acteurs parmi les plus célèbres du cinéma français de l’époque, chacun restant dans le registre pour lequel il est connu. On est rapidement pris par les discussions et les interrogations qui fusent, d’autant plus facilement que les excellents dialogues sont signés Henri Jeanson. Le film fonctionne tout aussi bien soixante ans après sa sortie. Le récit aborde plusieurs thèmes : le courage, la trahison, la volonté d’oublier. Curieusement, la critique a toujours été très réservée (pour des raisons diverses et un peu confuses) alors que le public l’a transformé en grand succès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Danielle Darrieux, Bernard Blier, Robert Dalban, Paul Frankeur, Paul Guers, Daniel Ivernel, Paul Meurisse, Serge Reggiani, Noël Roquevert, Lino Ventura, Jeanne Fusier-Gir
Voir la fiche du film et la filmographie de Julien Duvivier sur le site IMDB.

Voir les autres films de Julien Duvivier chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Julien Duvivier

Remarque :
* Les scènes ont été tournées dans l’ordre du scénario et les acteurs ne connaissaient pas le nom du traitre avant de tourner la scène finale.

 Marie-Octobre(de g. à d.) Lino Ventura, Paul Frankeur, Robert Dalban, Serge Reggiani, Paul Meurisse, Daniel Ivernel, Danielle Darrieux, Bernard Blier, Paul Guers et Noël Roquevert dans Marie-Octobre de Julien Duvivier.

12 juin 2021

La Maison du mystère (1923) de Alexandre Volkoff

La Maison du mystèreJulien Villandrit est propriétaire d’une usine de textile dont le gérant, Henri Corradin, est son ami d’enfance. Tous les deux aiment la même femme, Régine de Bettigny, qui accorde sa main à Villandrit. Fou de jalousie, Corradin va user de tous les moyens pour briser le couple…
La Maison du mystère fait partie des toutes premières productions d’Albatros, société française de production audiovisuelle créée en 1922 par les russes émigrés Joseph Ermolieff et Alexandre Kamenka (1). Elle adopte le format du serial : 10 épisodes pour une durée totale de plus de 6 heures. Son succès contribuera à lancer la compagnie. Il est basé sur un roman de Jules Mary qui avait déjà connu un grand succès lors de sa parution en épisodes dans Le Petit Parisien. L’histoire contient tous les éléments pour constituer un grand récit haletant : amour, meurtre, trahison, injustice, grands périls, rebondissements… A nos yeux d’aujourd’hui, les situations paraissent bien entendu stéréotypées et les invraisemblances sont innombrables mais le récit parvient toujours à nous tenir en haleine grâce à l’inventivité de Volkoff et à la qualité de la réalisation. Son audace la plus spectaculaire a été de filmer toute une scène de mariage en ombres chinoises (2), mais le film contient bien d’autres scènes étonnantes. L’émotion aussi est bien présente comme dans la scène des retrouvailles entre le père et la fille. Ivan Mosjoukine, formé à la méthode Stanislavski (qui donnera l’Actors Studio), est un acteur hors-pair, il interprète les multiples facettes de son personnage avec aisance et naturel, tour à tour puissant et émouvant. Charles Vanel, lui aussi, campe solidement son personnage : il est parfaitement odieux et haïssable.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Ivan Mozzhukhin, Charles Vanel, Nicolas Koline, Hélène Darly, Vladimir Strizhevsky, Francine Mussey
Voir la fiche du film et la filmographie de Alexandre Volkoff sur le site IMDB.

(1) Véritable plaque tournante de l’avant-garde française, la société Albatros a produit de nombreux films remarquables dans la décennie des années 20, signés Viktor Tourjansky, Jean Epstein, Jacques Feyder, René Clair et Marcel L’Herbier.
(2) Cette séquence évoque les films de Lotte Reiniger, pionnière à partir du début des années 1920 des films d’animation de silhouettes en Allemagne. (Lire plus sur Wikipédia)

La Maison du mystèreIvan Mozzhukhin et Hélène Darly (photo de gauche) / Hélène Darly et Charles Vanel (photo de droite)
dans La Maison du mystère de Alexandre Volkoff.

Serial en 10 épisodes :
Épisode 1 : L’ami félon (52’36)
Épisode 2 : Le Secret de l’étang (29’53)
Épisode 3 : L’Ambition au service de la haine (35’13)
Épisode 4 : L’Implacable verdict (41’19)
Épisode 5 : Le Pont vivant (33’38)
Épisode 6 : La Voix du sang (25’35)
Épisode 7 : Les Caprices du destin (46’48)
Épisode 8 : Champ clos (43’49)
Épisode 9 : Les Angoisses de Corradin (35’50)
Épisode 10 : Le Triomphe de l’amour (46’28)

L’ensemble est visible sur le site Henri de la Cinémathèque française.
« Ce film a d’abord été restauré en 1985 par Renée Lichtig qui établit un matériel de conservation safety et un positif muet de présentation à partir d’un négatif nitrate d’origine. La reconstitution des dix épisodes du serial a été achevée en 1992. »

12 mai 2019

1 homme de trop (1967) de Costa-Gavras

1 homme de tropEn 1943, un commando de résistants d’un maquis des Cévennes prend d’assaut une prison gardée par les allemands dans le but de libérer douze condamnés à mort. L’opération est une réussite mais, dans leur fuite, les maquisards réalisent qu’ils ont libéré treize prisonniers au lieu de douze. Ils se demandent s’il ne s’agirait pas d’un mouchard…
Adapté du roman homonyme et autobiographique de Jean-Pierre Chabrol, 1 homme de trop est le deuxième long métrage de Costa-Gavras. Sans avoir l’efficacité de ses réalisations ultérieures, le film est assez percutant par sa profusion de scènes d’action très réalistes sur les actions des maquisards. Costra-Gavras l’a décrit comme un « western dans le maquis ».  C’est un film sur un groupe, plus que sur des individualités, mais le réalisateur parvient à donner une certaine épaisseur à tous ses personnages. Il est aidé, il est vrai, par un beau plateau d’acteurs. Pas vraiment de contenu politique même sous-jacent, si ce n’est une réflexion sur l’absurdité de la guerre. L’ensemble est très prenant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Charles Vanel, Bruno Cremer, Jean-Claude Brialy, Michel Piccoli, Gérard Blain, Claude Brasseur, Jacques Perrin, François Périer, Pierre Clémenti
Voir la fiche du film et la filmographie de Costa-Gavras sur le site IMDB.

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Voir les livres sur Costa-Gavras

Remarques :
* Le producteur est le canadien Harry Saltzmann, le producteur des premiers James Bond,  car le premier film de Costa-Gavras, Compartiment tueurs, avait très bien marché aux Etats-Unis.
* Le film n’eut que peu de succès à l’époque. Le réalisateur pense aujourd’hui que le refus de s’engager du personnage joué par Piccoli a beaucoup gêné en France parce que le mythe d’une France entière soutenant la Résistance était encore très présent dans les esprits.
* Dans la réalité, l’auteur, Jean-Pierre Chabrol (aucun lien avec le cinéaste), était le treizième homme. Il était beaucoup plus jeune (19 ans) que Piccoli. Il s’est finalement engagé dans la Résistance, dans la brigade du Languedoc formée de soldats issus des maquis du sud, ce qui l’a conduit jusqu’à Berlin.

1 homme de trop
Michel Piccoli, Bruno Cremer et Jean-Claude Brialy dans 1 homme de trop de Costa-Gavras.

3 décembre 2015

Hamlet (1948) de Laurence Olivier

HamletAu château d’Elseneur au Danemark, le spectre du roi défunt apparaît à son fils Hamlet pour lui révéler avoir été assassiné par son propre frère qui s’est ainsi emparé de sa couronne et épousé sa femme. Il demande à Hamlet de le venger… La pièce de Shakespeare Hamlet a été adaptée de multiples fois à l’écran, grand et petit, mais la version de Laurence Olivier reste la plus remarquable et la plus louangée. Si Laurence Olivier opte pour un certain classicisme, c’est pour restituer toute la force, la complexité des personnages et la richesse de l’oeuvre malgré des coupes assez importantes. Les décors sont assez épurés, imposants et noirs, parfois nimbés de brume. Loin d’être statique, la camera est judicieusement utilisée pour multiplier les angles de vue, ce qui donne un aspect très vivant à l’ensemble. Les transitions entre les grandes scènes sont assez innovantes et spectaculaires, à base de grands mouvements tournant. Laurence Olivier fait une très belle interprétation d’Hamlet.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Laurence Olivier, Basil Sydney, Eileen Herlie
Voir la fiche du film et la filmographie de Laurence Olivier sur le site IMDB.

Hamlet
« Etre on ne pas être… » : Laurence Olivier dans le célèbre monologue d’Hamlet, dans son film homonyme de 1948.

Principales adaptations au cinéma et à la télévision :
Hamlet de Laurence Olivier (1948) avec Laurence Olivier
Hamlet de Bill Colleran et John Gielgud (1964) avec Richard Burton
Gamlet de Innokentiy Smoktunovskiy (1964) sur une musique de Shostakovich
Hamlet de Tony Richardson (1969) avec Nicol Williamson
Hamlet de Rodney Bennet (1980, TV BBC) avec Derek Jacobi
Hamlet de Kevin Cline (1990, TV) avec Kevin Cline
Hamlet de Franco Zeffirelli (1990) avec Mel Gibson
Hamlet de Kenneth Branagh (1996) avec Kenneth Branagh
Hamlet de Michael Almereyda. (2000) avec Ethan Hawke
Hamlet de Richard Brook (2002, TV) avec Adrian Lester
Hamlet de Gregory Doran (2009) avec David Tennant

13 février 2015

Othello (1952) de Orson Welles

Ou : « The Tragedy of Othello: The Moor of Venice »

OthelloA Venise, le Maure Othello, général victorieux, épouse Desdémone malgré la ferme opposition du père de la jeune fille. Envoyé à Chypre pour combattre les turcs, Othello est victime du complot de son lieutenant Iago : il insinue que sa jeune épouse le trompe avec Cassio, un autre de ses lieutenants… Othello est la deuxième des trois adaptations de Shakespeare par Orson Welles (1). Le tournage fut difficile et compliqué, principalement par manque d’argent ; il s’étala sur trois années. Orson Welles utilise merveilleusement les décors extérieurs d’une forteresse en bord de mer et multiplie les cadrages audacieux qu’il monte le plus souvent en plans très courts. De la pièce, Welles a fait une adaptation sélective : il a réduit le texte de Shakespeare sans le dénaturer, restant fidèle à l’esprit. Les acteurs ont tous un jeu parfait. L’interprétation d’Orson Welles est magnifique, à la fois puissante et sobre. Othello d’Orson Welles est considéré par beaucoup comme l’une des meilleures adaptations de Shakespeare à l’écran.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Orson Welles, Micheál MacLiammóir, Robert Coote, Suzanne Cloutier, Michael Laurence
Voir la fiche du film et la filmographie de Orson Welles sur le site IMDB.
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Voir la critique sur le site DVDClassiks

Voir les livres sur Orson Welles
Voir le livre Macbeth-Othello sorti chez Carlotta…

Othello d'Orson Welles
Orson Welles (Othello) et Micheál MacLiammóir (le fourbe Iago)

Remarques :
* L’acteur Micheál MacLiammóir (Iago dans le film) a tenu un journal pendant le tournage qu’il a ensuite publié sous le titre Put Money in thy Purse.
* Orson Welles a tourné un documentaire en 1978 pour la télévision allemande : Filming Othello. Ce film de 80 minutes ne contient pas de document d’époque sur le tournage, il s’agit d’une série de réflexions de Welles à postériori sur le tournage d’Othello et sur le cinéma, avec des discussions avec Micheál MacLiammóir (Iago) et Hilton Edwards (Brabantio).
* Les décors sont l’oeuvre du grand chef-décorateur français Alexandre Trauner.

* Principales autres adaptations d’Othello :
Othello de l’allemand Dimitri Buchowetzki (1922) avec Emil Jannings
Othello du russe Serge Youtkevitch (1956) avec Serge Bondartchouk
Othello de l’anglais Stuart Burge (1965) avec Laurence Olivier
Otello de Franco Zeffirelli (1986), l’opéra de Verdi avec Placido Domingo.
Othello d’Oliver Parker (1995) avec Laurence Fishburne
Othello 2003 (« O ») de Tim Blake Nelson (2001), version rajeunie…
Othello de Mikael Kreuzriegler (annoncé pour 2015)

Et aussi :
Othello (A Double Life) de George Cukor (1948) qui, malgré son titre français, n’est pas une adaptation de la pièce de Shakespeare mais une histoire qui a pour personnage principal un acteur jouant Othello au théâtre.

(1) Orson Welles a également adapté Macbeth en 1948 et Falstaff en 1965.