28 avril 2019

3 Billboards: Les panneaux de la vengeance (2017) de Martin McDonagh

Titre original : « Three Billboards Outside Ebbing, Missouri »

3 Billboards: Les panneaux de la vengeanceLassée de voir piétiner l’enquête pour retrouver le meurtrier de sa fille, Mildred loue trois panneaux publicitaires pour interpeler la police locale…
3 Billboards est le troisième long métrage du réalisateur anglais Martin McDonagh, remarqué pour son brillant Bons baisers de Bruges (2008). Il en a écrit le scénario. Il ne faut pas se focaliser sur la vraisemblance de cette histoire qui est surtout l’occasion de dresser un portrait de l’Amérique profonde avec une bonne dose d’humour noir. Le propos est loin d’être manichéen puisque l’héroïne fait preuve d’une détermination froide et égoïste, elle se révèle être imperméable à tout sentiment (on entrevoit pourquoi en cours de film). Martin McDonagh en fait une guerrière et ce n’est pas pour rien qu’il lui fait porter le même bandeau que De Niro dans Voyage au bout de l’enfer. Son obstination l’entraîne dans une escalade qui ne peut que la mener dans une impasse (en revanche on peut se demander où est la « vengeance » mentionnée dans le titre français). L’écriture est brillante. Beaucoup de critiques ont fait le rapprochement avec le cinéma des frères Coen (et la présence de Frances McDormand, épouse et actrice de Joel Coen facilite ce rapprochement) mais Martin McDonagh n’est nullement dans le mimétisme. Il sait développer un style qui lui est propre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Frances McDormand, Sam Rockwell, Woody Harrelson, Peter Dinklage
Voir la fiche du film et la filmographie de Martin McDonagh sur le site IMDB.

Voir les autres films de Martin McDonagh chroniqués sur ce blog…

3 billboards
Frances McDormand dans 3 Billboards: Les panneaux de la vengeance de Martin McDonagh.

3 billboards
Frances McDormand et Woody Harrelson dans 3 Billboards: Les panneaux de la vengeance de Martin McDonagh.

Remarque :
* Frances McDormand et Sam Rockwell ont été tous deux oscarisés pour leur interprétation dans ce film.

3 billboards
Sam Rockwell et Frances McDormand sur le tournage de 3 Billboards: Les panneaux de la vengeance de Martin McDonagh.

1 février 2019

Wind River (2017) de Taylor Sheridan

Wind RiverMarqué par la mort de sa fille, Cory Lambert est pisteur dans la réserve indienne de Wind River, perdue dans l’immensité sauvage du Wyoming. Un jour, il trouve le corps d’une adolescente dans une région déserte. Le FBI envoie sur les lieux une jeune agente inexpérimentée, Jane Banner. Elle engage Cory pour l’aider dans sa tâche…
Remarqué pour avoir écrit le scénario de Sicario, Taylor Sheridan passe de façon assez brillante à la réalisation. Inspiré de faits réels, son Wind River offre plusieurs niveaux de lecture. C’est tout d’abord un polar, assez sordide, dans les paysages enneigés du Wyoming qui se résout de façon musclée. C’est aussi un film intimiste qui parle de la douleur occasionnée par la perte d’un être cher et de la façon d’y survivre. Enfin, c’est un témoignage sur cette sensation de délaissement des habitants des réserves indiennes. La phrase qui clôt le film est tristement significative : « le FBI ne tient pas de statistiques sur les disparitions de jeunes femmes d’origine amérindienne ». Taylor Sheridan a tourné son film sur place en décors naturels. La photographie est superbe. Wind River est un très beau film, empreint d’un grand humanisme.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jeremy Renner, Elizabeth Olsen, Kelsey Asbille, Graham Greene
Voir la fiche du film et la filmographie de Taylor Sheridan sur le site IMDB.

Wind River
Elizabeth Olsen dans Wind River de Taylor Sheridan.

Wind River
Jeremy Renner dans Wind River de Taylor Sheridan.

Remarque :
Wind River est le dernier volet de la trilogie centrée sur la « frontière américaine moderne » que Taylor Sheridan a amorcée avec Sicario (écrit par Taylor Sheridan et réalisé par Denis Villeneuve en 2015) puis poursuivie avec Comancheria (écrit par Taylor Sheridan et réalisé par David Mackenzie en 2016).

Wind River
Elizabeth Olsen et Graham Greene dans Wind River de Taylor Sheridan.

15 janvier 2019

Sully (2016) de Clint Eastwood

SullyNew York, janvier 2009. Après avoir réussi l’exploit de poser son avion sur l’Hudson, sauvant ainsi tous ses passagers, le pilote de ligne Chesley « Sully » Sullenberger doit affronter une commission d’enquête. Les premiers éléments recueillis montrent qu’il aurait pu rejoindre son aéroport de départ…
Faire un film sur l’exploit de ce pilote qui fit preuve d’une maitrise extraordinaire et d’une grande sureté de jugement est louable et parfaitement justifié. Mais ce n’est pas vraiment le propos de Clint Eastwood qui semble surtout intéressé à porter une charge sévère contre le principe d’une commission d’enquête. « On ne met pas en doute les paroles de l’homme du terrain » semble-t-il nous dire. Il est un peu dommage que Clint Eastwood n’ait pu rendre hommage à ce pilote sans empâter le propos de sa haine des « technocrates » et d’un certain rejet de toute modernité (simulateurs, données informatiques, …) La partie reconstitution de l’accident est toutefois très bien réalisée et Clint Eastwood sait éviter tout pathos, par exemple en s’abstenant de nous faire vivre le crash par les yeux des passagers.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Tom Hanks, Aaron Eckhart, Laura Linney
Voir la fiche du film et la filmographie de Clint Eastwood sur le site IMDB.

Voir les autres films de Clint Eastwood chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Clint Eastwood

Sully
Tom Hanks et Aaron Eckhart dans Sully de Clint Eastwood.

7 janvier 2019

A vingt-trois pas du mystère (1956) de Henry Hathaway

Titre original : « 23 Paces to Baker Street »

À vingt-trois pas du mystèreCélèbre dramaturge américain vivant à Londres, Phillip Hannon est aveugle à la suite d’un accident mais s’efforce de vivre normalement malgré ce handicap. Un jour où il s’est rendu seul au pub, son ouïe fine lui permet d’entendre partiellement une conversation de l’autre côté de la cloison : un homme et une femme semblent planifier un enlèvement…
Le scénario de À vingt-trois pas du mystère est basé sur le roman La Nurse qui disparut de Philip MacDonald. L’élément le plus astucieux, le fait de faire mener l’enquête par un aveugle, a été ajouté par le scénariste Nigel Balchin. C’est un ajout très habile qui rend l’histoire assez remarquable. Elle nous intrigue et sait nous surprendre par des développements inattendus. La trame n’est pas sans évoquer celle de Fenêtre sur cour d’Alfred Hitchcock. Henry Hathaway montre une fois de plus son talent, la réalisation est de bonne facture et il sait donner un excellent rythme qui nous tient en haleine.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Van Johnson, Vera Miles, Cecil Parker, Patricia Laffan, Maurice Denham
Voir la fiche du film et la filmographie de Henry Hathaway sur le site IMDB.

Voir les autres films de Henry Hathaway chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Le titre original est un évident hommage à Sherlock Holmes. Le scénariste a tout de même réussi à la placer dans la bouche de Van Johnson (… de façon un peu parachutée tout de même).
* Ce film américain a été tourné en partie (extérieurs) en Angleterre. Une loi fiscale anglaise incitait alors les studios américains à réinvestir localement les bénéfices tirés de l’exploitation des films en Grande-Bretagne.

23 paces to Baker Street
Vera Miles, Van Johnson et Cecil Parker dans À vingt-trois pas du mystère de Henry Hathaway.

11 novembre 2018

La Veuve noire (1987) de Bob Rafelson

Titre original : « Black Widow »

La Veuve noireUn industriel new-yorkais meurt brutalement, empoisonné habilement par sa jeune épouse qui hérite de toute sa fortune. L’attention de l’agent fédéral Alexandra Barnes est attirée par certaines étrangetés et, lorsqu’un autre cas similaire apparaît quelques semaines plus tard, elle n’a plus de doute sur les intentions criminelles de la jeune épouse…
Bob Rafelson nous avait déjà montré son attirance pour les sujets sulfureux avec son remake inutile d’Un facteur sonne toujours deux fois (1981). La Veuve noire n’est guère plus réussi, reposant sur un scénario paresseux avec une mise en place sans subtilités : nous savons tout tout de suite et le reste de l’histoire n’est qu’un jeu du chat et de la souris, totalement improbable. Les personnages sont particulièrement typés. Bob Rafelson ne parvient pas à installer de tension quelconque, il se contente d’installer une certaine sensualité qui ne fonctionne toutefois pas très bien… A noter tout de même la bonne prestation de Sami Frey. Quant à Dennis Hopper, son rôle est inférieur à une minute.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Debra Winger, Theresa Russell, Sami Frey, Dennis Hopper
Voir la fiche du film et la filmographie de Bob Rafelson sur le site IMDB.

Voir les autres films de Bob Rafelson chroniqués sur ce blog…

Homonyme (sans relation) :
La Veuve noire (The Black Widow) de Nunnally Johnson (1954) avec Ginger Rodgers, Van Heflin et Gene Tierney

Black Widow
Sami Frey et Theresa Russell dans La Veuve noire de Bob Rafelson.

1 octobre 2018

Moka (2016) de Frédéric Mermoud

MokaDiane (Emmanuelle Devos) a perdu son fils, renversé par un chauffard à Lausanne. Devant la lenteur de la police, elle décide de retrouver le conducteur meurtrier, supposé être une femme blonde. Son enquête la conduit sur la rive française du Lac Léman, à Evian-les-Bains…
Adaptation d’un roman de Tatiana de Rosnay, Moka est le second long-métrage du cinéaste suisse Frédéric Mermoud. Le réalisateur se dit influencé par Roman Polanski et Alfred Hitchcock mais son film ne parvient pas toutefois à atteindre la même intensité. Il faut en outre être indulgent avec les invraisemblances et stéréotypes pour apprécier l’atmosphère et le jeu des deux actrices principales. Emmanuelle Devos est particulièrement remarquable, laissant apparaitre toute la complexité des sentiments de son personnage. Nathalie Baye est plus classique dans son interprétation, comme son rôle le demande toutefois. Frédéric Mermoud a une approche assez délicate de cette histoire, peut-être un peu trop car la tension n’est jamais très forte.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Emmanuelle Devos, Nathalie Baye, David Clavel, Diane Rouxel
Voir la fiche du film et la filmographie de Frédéric Mermoud sur le site IMDB.

Remarque :
* La signification du titre n’est pas évidente : en fait, Moka évoque tout simplement la couleur de la Mercedes de Nathalie Baye.


Emmanuelle Devos dans Moka de Frédéric Mermoud.

Moka
Nathalie Baye et Emmanuelle Devos dans Moka de Frédéric Mermoud.

30 août 2018

Maigret voit rouge (1963) de Gilles Grangier

Maigret voit rougeA Paris, un soir, trois hommes dans une voiture américaine tirent sur un homme qui sort de chez lui. Quelques minutes plus tard, l’homme est ramassé par un autre véhicule, presque sous les yeux d’un inspecteur de police…
Adapté du roman de Georges Simenon Maigret, Lognon et les Gangsters, Maigret voit rouge est le troisième (et ultime) film où Jean Gabin incarne le commissaire Maigret. C’est le moins convainquant des trois. L’histoire, guère crédible, joue sur le contraste entre les méthodes brutales américaines et une relative bonhommie française. Gabin compose un Maigret fatigué et montre une grande sobriété dans son jeu. Il n’a pas la présence qu’il montrait dans les opus précédents. Les dialogues sont, eux aussi, moins remarquables (Michel Audiard n’est pas cette fois de la partie). En revanche, la photographie de Louis Page est assez belle.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Françoise Fabian, Roland Armontel, Paul Frankeur, Edward Meeks, Michel Constantin
Voir la fiche du film et la filmographie de Gilles Grangier sur le site IMDB.

Voir les autres films de Gilles Grangier chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Gilles Grangier

Maigret voit rouge
Jean Gabin et Françoise Fabian (et Edward Meeks dans le cadre) dans Maigret voit rouge de Gilles Grangier.

28 août 2018

Maigret tend un piège (1958) de Jean Delannoy

Maigret tend un piègeA Paris, près de la Place des Vosges, plusieurs femmes sont tuées dans des circonstances similaires. Maigret va tendre un piège à l’assassin qui les tient en échec…
Adapté du roman du même nom de Georges Simenon, Maigret tend un piège voit Jean Gabin personnifier pour la première fois le mythique commissaire à l’écran. L’intrigue en elle-même n’est pas des plus mystérieuses car nous sommes très rapidement mis sur la piste du coupable, mais elle se double d’un volet psychologique très développé qui donne au film tout son intérêt et qui permet aux acteurs aguerris, que sont Gabin et Desailly, de montrer une grande richesse. Face à eux, la jeune Annie Girardot se montre parfaitement à la hauteur ; on remarque aussi Lino Ventura dans un petit rôle. Tous les seconds rôles sont bien tenus. L’atmosphère est assez remarquable, un peu poisseuse et étouffante. Les dialogues sont de Michel Audiard mais restent très classiques à l’instar de la réalisation de Delannoy. Assez justement, le film connut un certain succès à sa sortie.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Annie Girardot, Jean Desailly, Lucienne Bogaert, Paulette Dubost, Gérard Séty, Lino Ventura
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Delannoy sur le site IMDB.

Voir les autres films de Jean Delannoy chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Jean Delannoy

Remarque :
* Jean Gabin endossera encore deux fois le costume du commissaire Maigret au cinéma, dans Maigret et l’affaire St Fiacre (1959) et Maigret voit rouge (1963).

Maigret tend un piège
Jean Gabin et Annie Girardot dans Maigret tend un piège de Jean Delannoy.

26 août 2018

Enquête sur une passion (1980) de Nicolas Roeg

Titre original : « Bad Timing »

Enquête sur une passionA Vienne, une jeune femme (Theresa Russell) vient de tenter de se suicider. Elle est entre la vie et la mort. L’homme qui l’a accompagné à l’hôpital (Art Garfunkel) est un jeune professeur en psychanalyse. Un inspecteur de police (Harvey Keitel) cherche à reconstituer le déroulement des faits…
Le britannique Enquête sur une passion (Bad Timing) est un thriller sulfureux dont l’élément le plus remarquable est incontestablement sa construction éclatée : de multiples flashbacks, pas nécessairement dans l’ordre chronologique mais brillamment agencés, forment un puzzle élégant qui dévoile peu à peu la personnalité des personnages. Hélas, l’histoire en elle-même n’est guère intéressante et le fait de placer l’intrigue à Vienne, berceau de la psychanalyse, n’est finalement qu’une façade, car bien mal exploité. Art Garfunkel n’est pas un grand acteur et son interprétation est terne, elle n’exprime rien… même pas l’absence de sentiments de son personnage. En revanche, Theresa Russell, pour sa troisième apparition à l’écran, fait une remarquable prestation, riche, pleine de vie, d’une forte présence à l’écran. Cela ne suffit pas à nous sauver de l’ennui. Toutefois, il faut noter que le film ne manque pas de défenseurs.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Art Garfunkel, Theresa Russell, Harvey Keitel, Denholm Elliott
Voir la fiche du film et la filmographie de Nicolas Roeg sur le site IMDB.

Voir les autres films de Nicolas Roeg chroniqués sur ce blog…

Remarque :
* Nicolas Roeg est tombé amoureux de son actrice principale et l’épousera peu après. Theresa Russell tournera ensuite dans six autres films de Nicolas Roeg.

Bad Timing
Art Garfunkel et Theresa Russell dans Enquête sur une passion de Nicolas Roeg.

4 juillet 2018

La Dame d’onze heures (1948) de Jean Devaivre

La Dame d'onze heuresDe retour d’Afrique, Stanislas Octave Seminario (« S.O.S. » pour les intimes) retrouve la famille Pescara dont il apprécie particulièrement la fille, Muriel, qui vient de se fiancer à un jeune pharmacien. Le père de Muriel reçoit depuis un an d’étranges lettres anonymes et l’atmosphère familiale est devenue très lourde. Stanislas va mener l’enquête…
Deuxième long métrage de Jean Devaivre, La Dame d’onze heures est adapté d’un roman policier de Pierre Apestéguy. L’originalité du film saute aux yeux dès les premières minutes : pas de générique de début mais un petit patchwork presque surréaliste de scènes du film pour nous mettre en appétit. Le ton général du film est lui aussi très original : le scénariste Jean-Paul Le Chanois joue sur l’humour autant dans les situations que dans les dialogues et, avec le recul, le film paraît en avance d’une bonne décennie sur la vague des films policiers humoristiques des années soixante. L’humour n’a d’égal que l’étrangeté des lieux et des personnages rencontrés, l’histoire nous surprend constamment. L’interprétation est à la hauteur avec une belle brochette d’acteurs et un Paul Meurisse qui joue déjà sur le flegme et l’efficacité. La Dame d’onze heures est vraiment un film à découvrir, vraiment surprenant et qui reste très plaisant même après soixante dix ans.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Paul Meurisse, Micheline Francey, Gilbert Gil, Pierre Renoir, Jean Tissier, Jean Brochard, Junie Astor, Palau
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Devaivre sur le site IMDB.

Voir les autres films de Jean Devaivre chroniqués sur ce blog…

La Dame d'onze heures
Paul Meurisse et Jean Tissier dans La Dame d’onze heures de Jean Devaivre.