7 décembre 2019

My Lady (2017) de Richard Eyre

Titre original : « The Children Act »

My Lady (The Children Act)Fiona Maye est juge aux affaires familiales à la Haute Cour de justice d’Angleterre. Accaparée par son métier, elle délaisse son mari qui lui annonce qu’il va la tromper. Dans le même temps, elle doit décider si elle autorise la réalisation d’une transfusion sanguine à un adolescent de 17 ans hospitalisé pour une grave leucémie. Les parents sont des témoins de Jéhovah farouchement opposés à cette intervention nécessaire pour qu’il ait la vie sauve…
Le romancier anglais Ian McEwan a lui-même écrit l’adaptation de son roman L’Intérêt de l’enfant publié en 2014. Le récit est mené assez délicatement par Richard Eyre sans effets ni dramatisation excessive. Emma Thompson donne au film toute son intensité, exprimant de façon harmonieuse puissance et faculté d’écoute et nous laisse percevoir toute la force d’une éthique sous-jacente. Face à elle, la passion perturbatrice et mal définie du jeune et ardent Fionn Whitehead offre un beau contraste. My Lady est un film qui n’est pas spectaculaire mais qui enchante par la qualité du récit et de l’interprétation.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Emma Thompson, Stanley Tucci, Fionn Whitehead, Jason Watkins
Voir la fiche du film et la filmographie de Richard Eyre sur le site IMDB.

Voir les autres films de Richard Eyre chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Le titre original The Children Act (qui est aussi le titre original du roman) fait référence à la loi de 1989 qui a révolutionné le droit de l’enfance en plaçant l’intérêt de l’enfant au-dessus de toute considération, dans le cas d’un conflit familial.
* La production a eu le droit très rarement accordé de filmer à l’entrée et dans le grand hall de la Cour royale de justice (Royal Courts of Justice), imposant édifice de l’époque victorienne, situé sur le Strand dans la cité de Westminster à Londres.

 My Lady (The Children Act)Fionn Whitehead et Emma Thompson dans My Lady (The Children Act) de Richard Eyre.

 My Lady (The Children Act)Emma Thompson et Stanley Tucci dans My Lady (The Children Act) de Richard Eyre.

28 décembre 2014

Harry dans tous ses états (1997) de Woody Allen

Titre original : « Deconstructing Harry »

Harry dans tous ses étatsHarry dans tous ses états (Deconstructing Harry) est une comédie qui a parfois été jugée comme étant un peu plus sombre que les précédentes immédiates mais elle est aussi plus profonde. Le Harry dont il est question est un écrivain qui s’inspire directement de sa vie et des gens qui l’entourent pour écrire des romans à succès, ne faisant plus très bien la différence entre les personnages qu’il invente et ceux de la vie réelle. Ces derniers sont furieux de voir ainsi leur vie privée exposée et leurs secrets dévoilés. Pour ne rien arranger, l’écrivain doit pour la première fois faire face à une panne d’inspiration (1). On retrouve donc ici des thèmes chers à Woody Allen : les affres de la création et la séparation entre réel et fiction : N’est-il pas plus simple pour l’écrivain de vivre dans la fiction ? Harry dans tous ses états est assez ambitieux car les situations sont nombreuses et les personnages le sont encore plus puisque souvent interprétés par deux acteurs différents (un pour le réel et un pour la fiction). L’humour est toujours présent, par petites touches, parfaitement intégré à l’ensemble. Le montage est assez particulier, décousu en apparence pour signifier que la réalité est intrinsèquement décousue, relative (ce que nous croyons être la réalité devient la réalité pour nous), indéterminée, une approche qui favorise la déconstruction de Harry Block (alias Woody Allen ?)
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Judy Davis, Julia Louis-Dreyfus, Woody Allen, Robin Williams, Kirstie Alley, Demi Moore, Stanley Tucci, Elisabeth Shue, Billy Crystal
Voir la fiche du film et la filmographie de Woody Allen sur le site IMDB.
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Le scénario (bilingue) de Deconstructing Harry est sorti en 2000 dans la Petite Bibliothèque des Cahiers du cinéma… Voir le livre

Remarques :
* Harry dans tous ses états évoque Les Fraises sauvages de Bergman (le voyage pour recevoir un hommage), Le Septième Sceau du même réalisateur (la Mort qui vient frapper) et 8 ½ de Fellini (le créateur en panne sur un projet du fait de ses problèmes personnels).

* Le titre original Deconstructing Harry est une référence à la déconstruction, pratique philosophique assez complexe d’analyse textuelle introduite par Heidegger et développée par Derrida. Cet attrait de Woody Allen pour la philosophie européenne moderne était déjà visible dans Une autre femme et dans Crimes et délits.

* Certaines personnes ont reconnu dans le personnage de Harry Block non pas Woody Allen lui-même mais l’écrivain Philip Roth.

Deconstructing Harry
(g. à d.) Woody Allen, Elisabeth Shue et Billy Crystal.

Deconstructing Harry
Mel, un ami acteur, n’est pas dans son assiette : il est flou, comme s’il était en équilibre instable entre réel et fiction (g. à d. : Judy Bauerlein et Robin Williams).

(1) Panne d’inspiration = « writer’s block » en anglais… et l’écrivain s’appelle Harry Block.

29 juillet 2013

Big Night (1996) de Campbell Scott et Stanley Tucci

Titre français (DVD) : « Big night – La Grande Nuit »

Big NightDans le New Jersey des années 50, deux frères italiens, immigrés de fraîche date, ont ouvert un restaurant. Malgré l’immense talent de cuisinier de l’ainé, la clientèle ne vient pas. Un ami restaurateur leur propose de faire venir Louis Prima et qu’ils lui préparent un repas grandiose… Big Night est un peu une histoire de famille : Stanley Tucci l’a écrit avec son cousin, Joseph Tropiano, et ils ont tous deux grandi dans une famille d’origine italienne où la cuisine tenait une grande place. La mère de Stanley Tucci a été food consultant sur le film, la recette du Timpano vient de la grand-mère (1). La seconde partie du film laisse une grande place à cette cuisine, sorte de Festin de Babette italiano-américain. Pour le reste, Big Night est un film plaisant, assez léger dans son regard sur l’esprit des immigrés italiens : l’ainé des deux frères garde un esprit très européen, vieille Europe même car très rigide sur ses principes, alors que le cadet a une approche plus pragmatique et commerciale, déjà conquis par le rêve américain. Cette vision reste donc assez conventionnelle. Les personnages secondaires sont peu approfondis. Mais Big Night est un film positif et chaleureux, il fut très bien reçu aux Etats-Unis.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Tony Shalhoub, Stanley Tucci, Minnie Driver, Isabella Rossellini, Liev Schreiber, Ian Holm
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(1) Le Timpano est un plat typique de la petite ville de Calabre (extrême sud de l’Italie) d’où la famille de Stanley Tucci est originaire. Il s’agit d’un très grand plat en croûte avec de multiples couches de pâtes, de viande, d’oeufs et de fromage (voir photos).

12 juillet 2013

Margin Call (2011) de J.C. Chandor

Margin CallUne grande compagnie financière réduit ses effectifs. Un analyste senior a juste le temps de glisser une clé USB à l’un de ses jeunes collègues avant d’être escorté hors de l’immeuble. Ce dernier découvre que la formule utilisée pour calculer le risque du produit-phare de la compagnie sous-estime ce risque considérablement, mettant la société en péril… Sur un sujet où il est si facile de tomber dans les poncifs et les facilités, J.C. Chandor adopte un angle assez inattendu puisque c’est une tragédie shakespearienne qu’il met en scène. Il met ainsi en avant le facteur humain plutôt que les mécanismes financiers. Le résultat est étonnant par sa puissance. Ce ne sont pas seulement l’unité de lieu et l’unité de temps (puisque le film se déroule essentiellement sur une nuit) qui donnent au film toute son intensité, c’est aussi son interprétation, J.C. Chandor montrant une belle maitrise de la direction d’acteurs pour un premier long métrage.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Kevin Spacey, Paul Bettany, Jeremy Irons, Zachary Quinto, Penn Badgley, Simon Baker, Demi Moore, Stanley Tucci
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Remarque :
Le père de J.C. Chandor a travaillé pendant 30 ans chez Merrill Lynch. Le réalisateur connait ainsi bien cet univers et, surtout, les personnes qui y travaillent.