23 février 2017

Les cadavres ne portent pas de costard (1982) de Carl Reiner

Titre original : « Dead Men Don’t Wear Plaid »

Les cadavres ne portent pas de costardLes affaires sont calmes pour le détective John Forrest lorsqu’une cliente frappe à sa porte. Il s’agit de la fille d’un scientifique renommé (et fabriquant de fromages) qui vient de périr dans un accident automobile. Elle pense qu’il a été assassiné… L’idée a germé dans les esprits de Carl Reiner, George Gipe et Steve Martin : faire un film parodique qui incorporerait des extraits de films noirs des années quarante. Bien évidemment, il fallait que le film soit en noir et blanc et c’est grâce à l’usage subtil des champs-contrechamps que l’illusion est créée :  nous avons l’impression que ces acteurs des années quarante donnent la réplique à Steve Martin. L’histoire est totalement farfelue, elle est surtout un prétexte non seulement pour inclure les différents extraits mais aussi pour placer une multitude de clins d’œil qu’il est impossible de tous repérer tant il y en a. Les scénaristes ont toutefois réussi à introduire de très bons gags, le plus célèbre étant cette méthode si particulière  de Rachel Ward pour extraire les balles. La voix off contribue à recréer l’atmosphère des films de détective privé. Steve Martin ressemble plus que jamais à Dana Andrews mais l’acteur a pris soin de ne pas calquer son jeu sur tel ou tel acteur pour éviter le mimétisme (par exemple, il aurait pu se gratter l’oreille et on se serait tous pâmé… mais non, il ne le fait pas). Face à lui, Rachel Ward ne présente aucune ressemblance particulière ; par ailleurs, on peut se demander pourquoi il a été choisi de lui laisser une coupe de cheveux typique des années soixante-dix. Même si on ne peut nier que Les cadavres ne portent pas de costard est un film pour cinéphiles (si on ne reconnait pas les acteurs, l’humour tombe, c’est inévitable), il est au final très amusant et unique en son genre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Steve Martin, Rachel Ward, Carl Reiner
Voir la fiche du film et la filmographie de Carl Reiner sur le site IMDB.

Voir les autres films de Carl Reiner chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* L’humour du titre ne passe pas vraiment dans la traduction : « plaid » (morceau de tissu écossais porté) peut être un costume, certes, mais un costume en tissu écossais (qu’il faut être américain pour porter, soit-dit en passant !) Or, les cadavres sont toujours habillés à la morgue avec un costume plus habillé qu’un « plaid ». Une meilleure traduction aurait pu être « Les cadavres ne portent pas de blouson vert » ou  même « Les cadavres portent toujours un costard ». 🙂
* Ceci dit, le titre n’a pas de sens particulier (même si Steve Martin arrive à le placer dans une scène). C’est une parodie des titres de romans policiers.
* La série Dream On a repris un peu le principe dans les années 90 mais différemment : les extraits de films servent à exprimer les pensées intérieures du personnage principal.

Les cadavres ne portent pas de costard
Rachel Ward et Steve Martin dans Les cadavres ne portent pas de costard de Carl Reiner.

Les cadavres ne portent pas de costard
Steve Martin censé faire face à Ingrid Bergman dans Les cadavres ne portent pas de costard de Carl Reiner.

Acteurs /extraits de films :
– Alan Ladd dans Tueur à gages (This Gun for Hire) de Frank Tuttle
– Barbara Stanwyck dans Raccrochez, c’est une erreur (Sorry, wrong number) d’Anatole Litvak et Assurance sur la mort (Double Indemnity) de Billy Wilder
– Ray Milland dans Le Poison (The Lost Weekend) de Billy Wilder
– Ava Gardner dans Les tueurs (The killers) de Robert Siodmak et L’Île au complot (The Bribe) de Robert Z. Léonard
– Burt Lancaster dans Les tueurs (The killers) de Robert Siodmak
– Humphrey Bogart dans Le Grand Sommeil (The Big Sleep), Le Violent (In a Lonely Place) et Les Passagers de la nuit (Dark Passage)
– Cary Grant dans Soupçons (Suspicion) d’Alfred Hitchcock
– Ingrid Bergman dans Les Enchaînés (Notorious) d’Alfred Hitchcock
– Veronica Lake dans La Clé de verre (The Glass Key) de Stuart Heisler
– Bette Davis dans Jalousie (Deception) d’Irving Rapper
– Lana Turner dans Johnny, roi des gangsters (Johnny Eager) de Mervyn LeRoy et Le facteur sonne toujours deux fois (The Postman Always Rings Twice) de Tay Garnett
– Edward Arnold dans Johnny, roi des gangsters (Johnny Eager) de Mervyn LeRoy
– Kirk Douglas dans L’Homme aux abois (I Walk Alone) de Byron Haskin
– Fred MacMurray dans Assurance sur la mort (Double Indemnity) de Billy Wilder
– James Cagney dans L’enfer est à lui (White Heat) de Raoul Walsh
– Joan Crawford dans Humoresque de Jean Negulesco
– Charles Laughton et Vincent Price dans  L’Île au complot (The Bribe) de Robert Z. Léonard

Les cadavres ne portent pas de costard
A gauche : Dana Andrews dans Laura (1944). A droite : Steve Martin dans Les cadavres ne portent pas de costard de Carl Reiner. Je suis étonné que personne ne mentionne cette ressemblance vraiment frappante (que Carl Reiner a certainement cultivée).

19 avril 2015

La Clé de verre (1942) de Stuart Heisler

Titre original : « The Glass Key »

La clé de verreHomme politique trouble, Paul Madvig décide de soutenir la candidature à la mairie de Ralph Henry qui veut assainir la ville, rompant ainsi brutalement ses relations avec le patron de maisons de jeux Nick Varda. En réalité, Madvig s’est surtout entichée de la fille de Ralph Henry. Ed Beaumont, le bras droit de Madvig ne voit pas cela d’un bon oeil. Ses craintes se justifient lorsque le fils de Ralph Henry est retrouvé mort dans une ruelle… Comme Le Faucon Maltais, le roman le plus connu des cinéphiles de Dashiell Hammett, La Clé de verre a été porté plusieurs fois à l’écran en moins de dix ans : Frank Tuttle l’avait déjà adapté en 1935 dans une assez bonne version avec George Raft et Edward Arnold. Cette version de 1942 est assez fidèle au roman dans le déroulement de l’histoire, à ceci près qu’elle se concentre sur la relation entre Beaumont et la fille de Henry. Pour la Paramount, l’occasion était trop belle de réunir à nouveau Alan Ladd et Veronica Lake à l’écran, après l’énorme succès de Tueurs à gages quelques mois auparavant, et de jouer sur la tension sexuelle générée par le couple et sur une certaine aura de mystère autour de Veronica Lake. Par rapport au livre, les relations ambigües entre Beaumont et l’homme de main Jeff, fortement teintées d’homosexualité et de sadomasochisme, sont restées (assez bizarrement, du fait de la censure). Sur le fond, le film met le doigt sur la corruption des politiques qui sont aux ordres de la pègre. Au final, on peut donc considérer que cette version de La clé de verre restitue bien l’esprit assez subversif des romans de Dashiell Hammett.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Brian Donlevy, Veronica Lake, Alan Ladd, Richard Denning, Joseph Calleia, William Bendix
Voir la fiche du film et la filmographie de Stuart Heisler sur le site IMDB.

The Glass Key (1942)
Brian Donlevy, Alan Ladd et Veronica Lake dans La clé de verre de Stuart Heisler (photo publicitaire)

Remarque :
* Pendant le tournage, Alan Ladd s’est retrouvé réellement assommé par William Bendix à la suite d’une erreur dans le coup porté par ce dernier. Bendix s’est à tel point confondu en excuses que ce fut le début d’une profonde amitié entre les deux acteurs qui durera jusqu’à leur mort (la même année en 1964).

Autres adaptations :
The Glass Key de frank Tuttle (1935) avec George Raft, Claire Dodd et Edward Arnold
Miller’s crossing des frères Coen (1990) (inspirés de deux romans de Hammett : La Clé de verre et La Moisson rouge)

Veronica Lake
Veronica Lake dans La clé de verre de Stuart Heisler (photo publicitaire)