4 février 2018

Cet homme est dangereux (1953) de Jean Sacha

Cet homme est dangereuxLemmy Caution se fait passer pour un dangereux criminel américain venu se réfugier sur la Côte d’Azur. Il est en réalité chargé d’infiltrer la bande du caïd Siégalla qui projette d’enlever une jeune et riche héritière…
Cet homme est dangereux est adapté d’un roman (annoncé « célèbre » dans le générique) de Peter Cheyney, auteur anglais de romans policiers publiés en France dans la collection Série Noire. Il s’inscrit dans une série d’une petite dizaine de films mettant en scène le personnage de Lemmy Caution, agent du FBI interprété par Eddie Constantine. Ce redoutable détective a deux armes principales : le charme (pour les femmes) et les poings (pour les hommes). Et c’est un malin… Que ces films aient pu avoir un attrait au moment de leur sortie est compréhensible : le récit prend beaucoup de libertés avec les conventions sociales, les femmes sont entreprenantes, les dialogues sont modernes, le personnage ne boit que du whisky (boisson alors exotique en France). Mais, pour quiconque n’a pas vécu ces émois à l’époque, la vision de ces films risque de n’en provoquer aucun aujourd’hui. Le déroulement de l’histoire est quelque peu confus et la mise en scène laisse deviner une certaine précipitation de tournage.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Eddie Constantine, Colette Deréal, Grégoire Aslan, Véra Norman
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Sacha sur le site IMDB.

Remarque :
* Jean Sacha a été monteur, entre autres sur Othello d’Orson Welles. Bertrand Tavernier, grand amateur de ces films avec Eddie Constantine qu’il a vus dans sa jeunesse, estime que l’on retrouve clairement l’influence de Welles dans la mise en scène de ce film (il fait bien de nous prévenir car ce n’est pas évident…)

Cet homme est dangereuxEddie Constantine dans Cet homme est dangereux de Jean Sacha.

Cet homme est dangereuxVoilà le genre de plans très audacieux qui avaient de quoi émouvoir en 1953 : Les jambes de Colette Deréal et Eddie Constantine dans Cet homme est dangereux de Jean Sacha. Est-ce ce genre de contre-plongée où Tavernier décèle l’influence de Welles ? 🙂

Cet homme est dangereuxVéra Norman et Colette Deréal dans Cet homme est dangereux de Jean Sacha.

8 septembre 2017

Alamo (1960) de John Wayne

Titre original : « The Alamo »

Alamo1836. Le Texas, alors mexicain, lutte pour son indépendance. Le général Sam Houston demande au colonel Travis de tenir coûte que coûte le Fort Alamo vers lequel se dirigent les troupes du dictateur mexicain Santa Anna. Il recevra l’aide de Davy Crockett… A côté de sa carrière d’acteur, John Wayne a également réalisé deux longs métrages. Alamo est le premier d’entre eux (1), écrit sur mesure par James Edward Grant. L’acteur n’est pas réputé pour ses idées progressistes mais, miraculeusement, il abandonne beaucoup de ses partis-pris dès qu’il s’agit de western. Tout en prenant des libertés avec la réalité historique, Alamo prône les valeurs républicaines et met en valeur l’héroïsme de ceux qui sont morts pour elles. Le film a certains atouts mais il paraît interminable (2h40 dans sa version courte) et la bataille tant annoncée se fait quelque peu attendre. Le propos reste basique et les dialogues sont assez pesants. En revanche, les scènes de combat sont réussies avec une impressionnante figuration de 7000 hommes et 1500 chevaux. A noter que les mexicains sont décrits, eux-aussi, comme courageux (2). La photographie est assez belle, ce qui n’est guère étonnant quand on sait qu’elle est l’œuvre de William Clothier qui a si souvent travaillé pour John Ford. Le film a connu un certain succès populaire.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: John Wayne, Richard Widmark, Laurence Harvey, Frankie Avalon, Patrick Wayne, Linda Cristal
Voir la fiche du film et la filmographie de John Wayne sur le site IMDB.

Voir les livres sur John Wayne

Pour lire une présentation (très) enthousiaste : DVDClassik

Remarques :
* John Ford a dirigé certaines scènes mais il est difficile de savoir exactement combien car les témoignages sont contradictoires sur ce point. Cliff Lyons a également réalisé avec une seconde équipe.
* La durée d’Alamo fut réduite de 40 minutes quelques semaines après sa sortie. D’abord considérée comme perdue, la version complète (200 minutes) a refait surface dans les années 80.

(1) Le second sera Les Bérets verts (1968), film réactionnaire et raciste sur la Guerre du Vietnam, et formellement très en deçà d’Alamo.
(2) Rappelons que les deux premières épouses de John Wayne étaient mexicaines (la troisième était péruvienne).

Alamo
Richard Widmark et John Wayne dans Alamo de John Wayne.

Alamo
Un des plus beaux plans d’Alamo : David Crockett et sa troupe émergeant d’une colline où se tiennent ses deux éclaireurs. C’est beau comme du John Ford!

9 novembre 2013

L’aigle vole au soleil (1957) de John Ford

Titre original : « The Wings of Eagles »

L'aigle vole au soleilEn 1919, l’officier Frank « Spig » Wead oeuvre pour renforcer le rôle de l’aviation à l’intérieur de la marine américaine. Il persuade ses supérieurs de participer à différentes compétitions pour accroitre le prestige de la Navy. Mais un bête accident va interrompre sa carrière… Avec L’aigle vole au soleil, John Ford rend hommage à son ami Frank Wead, pionnier de l’aviation qui a dédié sa vie à la Marine et qui, handicapé après un grave accident, a écrit des scénarios pour Hollywood. Autant le film est superbe dans sa forme, avec notamment un déroulement admirable du scénario, autant on peut ne pas adhérer totalement au propos militariste et à la nostalgie de Ford pour la vie militaire (où tout se termine par une bonne bagarre). Tous les évènements décrits dans le film se sont réellement déroulés ainsi a précisé le réalisateur qui s’est mis en scène sous les traits de Ward Bond : plusieurs objets utilisés dans cette scène, l’Oscar, la canne creuse, le pipe, le chapeau sont des objets appartenant au réalisateur lui-même. A noter que le discours tenu par Frank Wead aux membres du Congrès de l’époque (début des années vingt) s’adresse également à leurs homologues de 1957. L’aigle vole au soleil est en effet sorti à une époque où l’armée et la marine voyaient leurs crédits diminuer sous la pression d’une aspiration au pacifisme.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: John Wayne, Dan Dailey, Maureen O’Hara, Ward Bond
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Voir les autres films de John Ford chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Frank Wead est crédité d’une trentaine d’histoires et de scénarios de 1929 jusqu’à sa mort en 1947 : on peut citer Dirigible de Frank Capra (1931), Hell Divers de George Hill (1931), Airmail de John Ford (1932), Test Pilot de Victor Fleming (1938), The Citadel de King Vidor (1938), They were expendable par John Ford (1945).

* Le film visionné par le petit groupe de producteurs est un extrait de Hell Divers (Les Titans du ciel) de George W. Hill (1931) avec Wallace Beery et le jeune Clark Gable, film dont le scénario est basé sur une histoire réellement écrite par Frank Wead.

* La scène où Frank Wead parle à son orteil a inspiré Tarantino pour Kill Bill.

17 janvier 2013

La Belle Aventurière (1949) de Frederick De Cordova

Titre original : « The gal who took the West »

La belle aventurièreUn journaliste enquête sur l’histoire d’une riche famille de l’Ouest américain. On lui raconte comment deux cousins qui se haïssaient depuis toujours tombèrent amoureux de la même femme, une chanteuse venue de l’est… La belle aventurière est une comédie en Technicolor qui n’a d’autres prétentions que de nous divertir. Effectivement, elle ne fait que cela, rien de plus. L’histoire est très simple, elle permet de mettre en valeur la belle Yvonne De Carlo qu’Universal aimait présenter alors comme étant la plus belle femme du monde. Le point le plus original du film est sa construction, peu courante à l’époque, en quatre flashbacks : quatre personnes vont en effet successivement raconter les mêmes évènements, chaque version venant enrichir la précédente en ajoutant certains aspects et nous amènant à tout reconsidérer d’un œil nouveau. Mais cela ne suffit pas pour éveiller vraiment notre intérêt.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Yvonne De Carlo, Charles Coburn, Scott Brady, John Russell
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23 décembre 2012

Mighty like a moose (1926) de Leo McCarey

Titre français : « Le mari à double face »

Le mari à double face(Muet, 22 minutes) Monsieur Moose a une dentition de cheval qui le rend ridicule, Madame Moose a un nez bossu et énorme qui la rend disgracieuse. Sans le savoir, ils vont se faire opérer le même jour et en sont tellement changés qu’ils ne se reconnaissent même pas dans la rue à la sortie et tombent amoureux l’un de l’autre… Produit par Hal Roach,  Mighty like a moose est une petite merveille, un joyau de l’humour du burlesque des années vingt qui excelle dans l’invention et la précision. Comique inspiré entre autres par Max Linder (1), Charley Chase nous régale par ces chassés-croisés réglés au quart de seconde près. C’est un humour légèrement absurde, l’histoire est bien entendu difficile à croire mais elle fonctionne parfaitement. On ne s’ennuie pas une seconde.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Charley Chase, Vivien Oakland, Gale Henry
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Remarque :
Mighty like a moose peut se traduire par « puissant comme un élan ». Est-ce un jeu de mots… ou est-ce une simple référence à la généreuse dentition du héros ?

(1) Plusieurs scènes évoquent le merveilleux Be my wife (Soyez ma femme) de Max Linder (1921).

9 août 2012

La joyeuse suicidée (1937) de William A. Wellman

Titre original : « Nothing sacred »

La joyeuse suicidéeEn quête de sujet émotionnel, un journaliste se rend dans le Vermont pour rencontrer une jeune femme qui est vouée à une mort prochaine après un empoisonnement au radium. Il lui propose de lui faire visiter New York avant de mourir. La jeune femme accepte bien qu’elle ait appris entre-temps que le funeste diagnostic était une erreur… Ecrit par le talentueux Ben Hecht, La joyeuse suicidée est une comédie en Technicolor (1) qui porte un regard plutôt acerbe sur les travers de la presse à sensation. Si l’on peut trouver que l’ensemble manque un peu de naturel et d’authenticité, le film ne manque pas d’humour. La séquence dans la petite ville du Vermont (où tout le monde s’exprime comme dans le Sud) La joyeuse suicidée en est truffée, avec notamment un gag qui a de quoi estomaquer (le journaliste se fait mordre par… un petit chien assez particulier). L’ensemble est bien enlevé, très amusant. Carole Lombard est, ici comme toujours, pleine de charme et ce film nous fait regretter, une fois de plus, que sa carrière ait été si courte (2). La joyeuse suicidée est une bonne screwball comédie. Ce fut un grand succès à l’époque.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Carole Lombard, Fredric March, Charles Winninger, Walter Connolly, Sig Ruman
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Remarques :
* La joyeuse suicidée offre la vision peu courante du survol de Manhattan en avion.
* Le publicité de La joyeuse suicidée a largement utilisé la scène où Carole Lombard et Fredric March se battent. Montrer un homme frappant ainsi une femme est extrêmement rare (précisons que la raison du combat est amusante).
* Il semble que certaines copies utilisées pour les DVD soient de très mauvaise qualité.

(1) La joyeuse suicidée fait partie des tous premiers films en Technicolor.
(2) La carrière de Carole Lombard s’est brutalement interrompue en 1942, l’actrice ayant trouvé la mort dans un accident d’avion. Elle n’avait que 33 ans.

Remake :
C’est pas une vie, Jerry! (Living it up) de Norman Taurog (1954) avec Jerry Lewis et Dean Martin.

25 novembre 2011

Movie Crazy (1932) de Clyde Bruckman

Autre titre (Belgique) : « Silence, on tourne! »

Movie CrazyA la suite d’une méprise, un provincial qui rêve de faire carrière dans le cinéma est convoqué à Hollywood pour faire des essais… Les grands burlesques du cinéma muet ont souffert du passage au parlant. Sans échapper totalement à la règle, Harold Lloyd est celui qui a le mieux réussi à prendre le virage, avec même quelques belles réussites comme ce Movie Crazy. C’est son premier film vraiment écrit comme un parlant (et non comme un muet sonorisé). L’histoire n’est guère originale en soi et pourtant Harold Lloyd parvient à Movie Crazy éviter les situations les plus faciles et nous livre de très bons gags. Les scènes de la piste de danse et de la bagarre finale sont assez mémorables. Movie Crazy montre un bel équilibre entre l’humour et la romance, avec un personnage féminin (joué par Constance Cummings) assez travaillé. C’est inhabituel pour le burlesque muet et témoigne donc de l’évolution d’Harold Lloyd pour aborder le parlant. Le succès fut au rendez-vous, un succès justifié car Movie Crazy est au niveau de ses meilleurs films.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Harold Lloyd, Constance Cummings
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Remarques :
* Le film fut tourné sans le son, les voix étant ajoutées en post-production.
* Bien que Clyde Bruckman soit crédité comme seul réalisateur, le film a été en grande partie dirigé par Harold Lloyd lui-même du fait de l’alcoolisme chronique de Bruckman.

9 août 2011

L’homme tranquille (1952) de John Ford

Titre original : « The Quiet Man »

L'homme tranquilleAu retour dans son village natal en Irlande, un américain tombe amoureux de la sœur de son plus grand ennemi… John Ford se penche avec humour et bienveillance sur les traditions irlandaises, avec leurs codes sociaux et leurs pesanteurs. Il y a beaucoup d’humanité et de chaleur dans son film. Ceci dit, L’homme tranquille n’est pas à recommander aux féministes car, même en considérant tout l’humour et la caricature que John Ford a placé dans son film, on ne peut pas dire que l’image de la femme en sorte vraiment grandie… (1) On peut aussi ne pas adhérer pleinement à sa façon de prôner l’acceptation des pires règles sociales pour parvenir à l’intégration. Mais, comme on le sait, le charme des films de John Ford ne réside pas vraiment dans l’idéologie qu’ils véhiculent… et, du charme, L’homme tranquille en a : une construction parfaite, un déroulement limpide, un bel équilibre entre humour et drame, de superbes images et beaucoup, beaucoup de chaleur. Le réalisateur mit de nombreuses années pour trouver un financement pour L’homme tranquille, une histoire jugée trop simple par les producteurs. Le film connut un très grand succès.
Lui : 4 étoiles

Acteurs: John Wayne, Maureen O’Hara, Barry Fitzgerald, Ward Bond, Victor McLaglen
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(1) Sur ce point, L’homme tranquille a souvent été comparé à La Mégère Apprivoisée, même si le propos est assez différent.

Remarques :
* Le monteur Jack Murray a déclaré n’avoir pratiquement rien eu à faire : John Ford avait tourné le film déjà monté, aucun plan ni aucune image n’avait besoin d’être enlevé.
* Anecdote : La phrase que Maureen O’Hara murmure à l’oreille de John Wayne dans le tout dernier plan et qui nous vaut une authentique expression de surprise de celui-ci, n’a jamais été connue. L’actrice n’a accepté de la dire qu’à la condition expresse qu’elle ne soit jamais divulguée…