19 novembre 2011

After hours – Quelle nuit de galère (1985) de Martin Scorsese

Titre original : « After hours »

After Hours - quelle nuit de galèrePaul, informaticien sans histoire, rencontre Marcy un soir dans un snack. Il la rappelle peu après et elle l’invite à venir dans son loft à Soho qu’elle partage avec une artiste. Paul ne sait pas encore qu’il s’apprête à passer la nuit la plus mouvementée de sa vie… Avec After Hours, Scorsese dresse un certain portrait de New York dans ce qu’il a de plus imprévisible et même dérangeant. Dans ce sens, on peut faire un certain parallèle avec Taxi Driver, sauf que le registre est totalement différent : c’est ici plutôt une comédie… d’humour noir, bien entendu. C’est presque une descente aux enfers pour ce garçon bien rangé de l’Upper West Side qui descend à Soho, opposition de deux quartiers, de deux mondes différents. After Hours est remarquable par son montage et sa mise en scène, avec une caméra très mobile, mettant en relief beaucoup de détails qui alimentent l’étrange et le saugrenu. Scorsese fait preuve de virtuosité sur certaines scènes. Belle composition de Griffin Dunne.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Griffin Dunne, Rosanna Arquette, Verna Bloom, Linda Fiorentino, Teri Garr, John Heard
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After Hours - quelle nuit de galère Remarques :
* After Hours est également le titre d’un standard du jazz et aussi le titre d’une chanson chantée par Nico (sur le troisième album du Velvet Underground).
* Dans la boîte Club Berlin, la personne qui manie le projecteur n’est autre que Martin Scorsese lui-même.
* Scorsese eut du mal à trouver une fin satisfaisante. Une autre fin fut tournée avec Paul restant prisonnier de sa statue. Cette fin fut rejetée par le public lors des projections-tests.

12 octobre 2011

La banquière (1980) de Francis Girod

La banquièreFille de petits commerçants parisiens, Emma Eckhert réussit une fulgurante ascension dans le domaine de la finance en prônant l’épargne populaire. Elle va se heurter aux milieux politico-financiers… La banquière est inspiré du parcours de Marthe Hanau dans les années 1920. C’est un portrait édulcoré (1) ajoutant un caractère altruiste qui permet à Romy Schneider de briller dans ce rôle. Elle s’y montre belle et impériale donnant au film toute sa dimension. La reconstitution de Francis Girod est luxueuse et soignée. La liste des acteurs de premier plan dans les seconds rôles est impressionnante… Hélas, La banquière apparaît comme empesé par son ampleur, sage et conventionnel, finalement un peu ennuyeux.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Romy Schneider, Claude Brasseur, Jean-Claude Brialy, Marie-France Pisier, Jean Carmet, Jean-Louis Trintignant, Jacques Fabbri, Daniel Mesguich, Daniel Auteuil, Thierry Lhermitte
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Remarques :
(1) La véritable Marthe Hanau était bien moins philanthrope : elle a escroqué des milliers de petits épargnants. Sa spécialité était de conseiller l’achat d’actions de sociétés fictives dont elle faisait monter artificiellement les cours à l’aide de son journal La Gazette du franc (fondé en 1925). Elle mit en place une escroquerie de type « chaîne de Ponzi » (payer de forts intérêts aux anciens souscripteurs avec l’argent apporté par les nouveaux). Le système s’écroula en 1928, éclaboussant les milieux politiques du Cartel des gauches qui l’avaient soutenue. Elle fut arrêtée, libérée après avoir soudoyé des hommes politiques, puis arrêtée de nouveau. Condamnée à trois ans de prison ferme, elle s’est suicidée en 1935.

10 septembre 2011

Gens de Dublin (1987) de John Huston

Titre original : « The Dead »

Gens de DublinA Dublin, aux alentours de 1900, deux demoiselles âgées et leur nièce reçoivent un petit groupe d’amis et de membres de la famille le soir de Noël… Adapté d’une nouvelle de James Joyce, Gens de Dublin est le dernier film de John Huston. Peu de cinéastes ont pu clore leur filmographie avec un film si accompli. Sous des apparences anodines et sur un ton léger, le film déploie une mosaïque de sentiments et de réflexions sur les liens d’amitié et d’amour, l’art, la nostalgie, le temps qui passe, la mort. Une grande authenticité et surtout beaucoup d’humanité se dégagent de l’ensemble. Nous avons l’impression d’être très proche des personnages. John Huston est entouré de son fils Tony qui signe l’adaptation et de sa fille Angelica qui tient l’un des premiers rôles ;  être ainsi entouré lui a certainement permis d’atteindre cette harmonie empreinte de sérénité. Gens de Dublin se termine par une scène assez bouleversante et un monologue sur un ensemble complexe de sentiments, l’un des plus beaux de toute l’histoire du cinéma. John Huston a dirigé le film en fauteuil roulant, sous perfusion et pourtant tout y est parfait. Le film a une certaine grâce atemporelle.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anjelica Huston, Donal McCann, Dan O’Herlihy, Donal Donnelly, Helena Carroll
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Remarques :
* A la nouvelle de James Joyce, Tony Huston a ajouté le personnage de Mister Grace afin de lui faire lire le poème anonyme irlandais du XVIIIe siècle Donal Óg (= jeune Donald).
Pour le lire (en anglais) : http://www.poets.org/viewmedia.php/prmMID/19457
(traduit du gaélique par Lady Augusta Gregory). Ce poème fait un étonnant écho à la scène finale.

* John Huston est décédé peu avant la sortie du film. Il avait alors 81 ans.

18 juillet 2011

Monty Python, le sens de la vie (1983) de Terry Jones et Terry Gilliam

Titre original : « The meaning of life »

Monty Python, le sens de la vieLui :
Pour leur troisième (et dernier) long métrage, les Monty Python reviennent à leur format de prédilection : le sketch. Monty Python, le sens de la vie est ainsi un ensemble de sketches avec le fil directeur le plus vague qu’ils aient pu trouver… Le plus long sketch est celui qui ouvre le film ; très spectaculaire et original, il a été écrit et réalisé par Terry Gilliam et placé en préambule comme s’il s’agissait d’une première partie (1). Les sketches sont tous très réussis, très peu paraissent plus faibles. Nos six compères se moquent de tout, surtout de toutes les formes d’autorité : médecine, religion, argent, éducation, armée… même la mort. Ils n’hésitent pas à dépasser les bornes, ils refusent toute limite. Dans la grande tradition Monty-pythonienne, certains sketches s’arrêtent brutalement, sans chute. On notera plusieurs satires de films (2). Inusable, insensible au temps, Monty Python, le sens de la vie est toujours aussi hilarant.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Graham Chapman, John Cleese, Terry Gilliam, Eric Idle, Terry Jones, Michael Palin
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Remarques :
(1) Initialement, le sketch de la Crimson Permanent Assurance ne devait durer que 5 minutes. Terry Gilliam s’excuse, non sans humour, d’avoir dépassé les limites de temps (et de budget) en disant que « personne ne lui a dit d’arrêter »…!
(2) Les satires de films les plus visibles sont celles de Zoulou (1964) de Cy Enfield, d’Oliver (1968) de Carol Reed (scène des enfants), du Septième Sceau (1957) d’Ingmar Bergman (la mort). Sans être une satire, les scènes du pensionnat et du match de rugby font vraiment penser à If (1968) de Lindsay Anderson.

Les trois long métrages des Monty Python :
Monty Python sacré Graal (1975)
La vie de Brian (1979)
Le sens de la vie (1983)

25 mai 2011

Il était une fois en Amérique (1984) de Sergio Leone

Titre original : « Once upon a time in America »

Il était une fois en AmériqueLui :
A la fin des années soixante, l’ex-gangster Noodles revient à New York après 35 ans d’éloignement. Il se remémore son passé… Il était une fois en Amérique est librement inspiré du livre autobiographique de Harry Gray. Le projet de Sergio Leone a mis plus de dix ans à éclore et le tournage fut interminable. Après la conquête de l’Ouest et la révolution mexicaine, il s’attaque à une autre grande mythologie américaine, le gangster. Cette vaste fresque est construite en flashbacks allant des années vingt au milieu des années trente, fin de la Prohibition. Le film de Leone est à la fois l’histoire de deux gangsters juifs liés par une forte amitié et une variation sur la représentation/idéalisation du cinéma. Toute cette histoire est d’ailleurs issue d’un cerveau en pleine divagation sous l’emprise de l’opium. Leone use (et abuse parfois) de ses effets, créant la tension par de longs plans d’attente. Son cinéma témoigne ici d’une belle vitalité.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Robert De Niro, James Woods, Elizabeth McGovern, Joe Pesci, Burt Young, Tuesday Weld, Treat Williams
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Remarques :
Il était une fois en Amérique dure 3h40. La version commerciale sortie aux Etats-Unis avait été ramenée à 2h20. Du fait des coupes, elle était, parait-il, très dure à comprendre.

9 avril 2011

Reds (1981) de Warren Beatty

RedsLui :
Produit, coécrit, réalisé et joué par Warren Beatty, Reds est une longue fresque retraçant le parcours entre 1915 et 1920 de John Reed, journaliste idéaliste et politiquement engagé, auteur du célèbre livre sur la révolution russe « Dix jours qui ébranlèrent le monde ». Warren Beatty mêle plusieurs genres dans le même film, essayant de donner la même importance aux aspects politiques qu’aux déboires sentimentaux de John Reed avec Louise Bryant, journaliste féministe. Il ajoute même un côté purement documentaire en insérant de vrais témoignages de personnes qui les ont connus. L’ensemble est très long (3h10), souvent dogmatique, assez lourd dans sa construction mais il comporte de très belles scènes, notamment en Russie au moment de la Révolution d’octobre. Il faut bien entendu saluer l’audace et les convictions de Warren Beatty (1) qui parvint à faire accepter son film, ce type de sujet n’étant pas vraiment courant dans le cinéma américain. Perfectionniste, il multiplia les prises qui se comptaient souvent en dizaines. Il finança en grande partie le tournage qui s’étala sur une année, dans cinq pays différents. Le film reçut un bon accueil de la critique mais le succès fut plus mitigé auprès du public. Que l’on ressente ou pas la longueur et les lourdeurs, Reds reste de toutes façons intéressant pour son côté historique.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Warren Beatty, Diane Keaton, Edward Herrmann, Jerzy Kosinski, Jack Nicholson, Paul Sorvino, Maureen Stapleton, Gene Hackman
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Remarques :
(1) Le film Reds sortit au début des années Reagan (et donc bien avant la chute du mur), une époque qui n’est pas vraiment synonyme de baisse de cette ferveur anticommunisme si caractéristique des Etats-Unis. Ceci dit, le film dénonce la bureaucratie envahissante qui commençait, dès 1920, à dénaturer les idéaux. L’état soviétique fit d’ailleurs pression sur la Finlande pour entraver le tournage du film.

Remarque :
Je dois avouer que nous avions beaucoup plus apprécié le film à sa sortie.

8 mars 2011

Boire et déboires (1987) de Blake Edwards

Titre original : « Blind date »

Boire et déboiresLui :
Pour faire bonne figure lors d’une soirée d’affaires, Walter doit venir accompagné. Son frère le met en contact avec Nadia, une amie de sa femme. Walter ne fait pas assez attention à la seule recommandation qui lui est donnée : ne jamais la faire boire d’alcool car elle peut devenir incontrôlable… Et effectivement, comme on peut s’en douter, elle va devenir franchement incontrôlable ; telle une tornade, elle va détruire rapidement le petit monde bien réglé de cet accro du boulot. Les catastrophes s’accumulent. Avec Boire et Déboires, Blake Edwards prend plaisir à saper les fondements de l’American way of life, de la yuppie culture des années 80 et du machisme. Bien qu’un peu inégal, l’ensemble est bien rythmé et comporte de très bons gags. Assez étonnamment, Blake Edwards change de style au deux tiers du film, à partir de la scène du procès. Si le début était déjà bien mené, le derniers tiers est du grand Blake Edwards, avec un humour bien plus subtil. Toute la scène dans la maison du juge est une petite merveille avec un ballet de portes, de mouvements croisés et de belles trouvailles. Bruce Willis (qui n’avait fait précédemment que de la figuration au cinéma )(1) joue avec retenue. Le film repose aussi sur de très bons seconds rôles, en tête le formidable John Larroquette en ex-amoureux forcené. Bizarrement, Boire et Déboires n’est généralement pas très apprécié. Serait-il trop farfelu…?
Note : 4 étoiles

Acteurs: Kim Basinger, Bruce Willis, John Larroquette, William Daniels, George Coe, Mark Blum, Phil Hartman
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(1) A cette époque, Bruce Willis jouait également dans une série TV, Clair de lune (Moonlighting), qui a connu une certaine notoriété entre 1985-1989.

19 décembre 2010

Full metal jacket (1987) de Stanley Kubrick

Full Metal JacketLui :
Full Metal Jacket est l’avant-dernier film de Stanley Kubrick, un film sur la guerre plus qu’un film de guerre. Dans la première moitié, nous suivons l’entrainement d’un groupe de Marines mené par un sergent gueulard, interprété avec beaucoup d’énergie par un ex-instructeur qui a improvisé une partie des dialogues. Les textes les plus hauts en couleur (un véritable flot d’obscénités) sont toutefois l’oeuvre d’un autre ex-Marine, Gustav Hasford, l’auteur du livre que Kubrick a choisi d’adapter. Cette partie est à la fois drôle et terrifiante. Elle est surtout intense. Kubrick montre sa grande virtuosité de la mise en scène, avec des travelings arrières de toute beauté qui ont largement contribué à la réputation du film. La seconde moitié se déroule au Vietnam. Après un passage à vide montrant les dessous de la presse militaire, le film retrouve toute sa force dans la dernière partie qui nous fait vivre l’affrontement d’une petite escouade de soldats avec un sniper invisible. Full Metal Jacket est un film hors normes, il n’a pas vraiment de héros ni d’histoire au sens classique du mot. Ce n’est pas vraiment un film anti-guerre : Kubrick ne porte pas de jugement, il décrit l’apprentissage de jeunes soldats à la mort. C’est en tout cas un film d’une grande force. Le perfectionnisme de Kubrick s’est traduit en plus de neuf mois de tournage.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Matthew Modine, Adam Baldwin, Vincent D’Onofrio, R. Lee Ermey, Arliss Howard
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Remarques :
* « Full Metal Jacket » (littéralement : entièrement enrobé de métal) est un terme qui s’applique à un certain type de munitions. En choisissant ce titre, Kubrick fait bien entendu l’analogie avec les soldats.
* Le livre de Gustav Hasford s’intitule The Short-Timers.
* La partie Vietnam a été tournée dans la banlieue de Londres, sur deux sites de complexes industriels promis à la démolition. Kubrick a eu toutes les autorisations pour les détruire à loisir.
* Les références à Mickey Mouse peuvent surprendre, notamment dans la scène finale où les soldats marchent dans la ville en flammes en chantant le thème du Club Mickey… Dans le langage des G.I., Mickey Mouse désigne tout ce qui est petit et stupide.

6 septembre 2010

Foxfire (1987) de Jud Taylor

Lui :
Après la mort de son mari, Annie est restée dans sa maison isolée des Blue Ridge Mountains, une maison où elle a toujours vécu. A 80 ans, elle n’a aucune envie de la quitter. La pression d’un promoteur et l’un de ses enfants, chanteur de country, vont-ils la faire changer d’avis? Foxfire a été produit pour la télévision américaine, dans le cadre de la série de dramatiques Hallmark Hall of Fame. Malgré une certaine authenticité, le récit est très convenu, bourré de bonnes intentions mais sans originalité. Le thème global est celui du dépeuplement des campagnes qui perdent leur âme en devenant des villages de résidences secondaires. Les bonnes interprétations de Jessica Tandy et Hume Cronyn ne suffisent pas à relever l’ensemble.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Jessica Tandy, Hume Cronyn, John Denver, Gary Grubbs, Harriet Hall
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Remarques :
* Jessica Tandy et Hume Cronyn sont (ou plus exactement : étaient, puisque tous deux sont maintenant décédés) mari et femme dans la vraie vie également. Hume Cronyn s’est illustré dans de très beaux seconds rôles, surtout dans les années 40 et 50, notamment avec Hitchcock.
* Dans les scènes de concert, le banjoiste est Tony Trischka et le violoniste Kenny Kosek, deux musiciens bien connus des amateurs de bluegrass.
* La série télévisée de dramatiques Hallmark Hall of Fame existe depuis… 1951, soit à ce jour 308 films diffusés sur la chaîne CBS. Elle a été souvent primée.

Homonyme :
Foxfire de Annette Haywood-Carter (1996), collège-movie avec Angelina Jolie.

5 juillet 2010

Lili Marleen (1981) de Rainer-Werner Fassbinder

Lili MarleenLui :
L’histoire est très librement adaptée de la vie de Lale Andersen, chanteuse allemande sans grand talent qui devint l’égérie de l’Allemagne nazie avec la chanson Lili Marleen. Cette chanson eut un destin tout particulier puisqu’elle fut extrêmement populaire aussi bien auprès des soldats allemands qu’auprès des soldats alliés. Lili Marleen fait partie d’un ensemble de films de Rainer-Werner Fassbinder sur l’Histoire récente de l’Allemagne  (1). Pour traiter de la période du nazisme, il choisit l’histoire étrange de cette femme qui, tout en étant amoureuse d’un juif suisse, se retrouve propulsée parmi les plus hautes sphères du nazisme. Fassbinder la met en scène avec beaucoup de distance, sans jugement, sans mise en valeur de l’un de personnages. Cette fausse neutralité vis-à-vis du sujet a parfois été mal comprise, jusqu’à être interprétée comme preuve d’une certaine nostalgie ou du moins d’une fascination/répulsion. En réalité, son film nous questionne sur la conscience et sur les choix ; rien n’est simple. Ce sentiment de distanciation est d’ailleurs amplifié par le doublage en allemand (le film a été tourné en anglais et postsynchronisé en allemand par Fassbinder) ; ce doublage ajoute emphase et fausseté, toutes deux assez inutiles.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Hanna Schygulla, Giancarlo Giannini, Mel Ferrer, Karl-Heinz von Hassel, Erik Schumann, Hark Bohm
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(1) Fassbinder déclarait à la sortie du film : « J’espère vivre assez longtemps pour réaliser une douzaine de films qui recomposeraient l’Allemagne dans sa globalité, telle que je la vois. Chacun représenterait une étape même si l’ordre chronologique n’est pas respecté. Lili Marleen est mon premier sujet sur le IIIe Reich, ce ne sera pas le dernier. Berlin Alexander Platz et Despair se situent avant, Le mariage de Maria Braun et Lola après. Je vais poursuivre jusqu’au temps présent, pas à pas. (…) Je cherche en moi où je suis dans l’histoire de mon pays, pourquoi je suis allemand. » (Le Monde du 17 avril 1981)
Hélas, la mort prématurée de Fassbinder en 1982 (à l’âge de 37 ans) ne lui a permis de mener ce projet à terme.