16 août 2009

Scarface (1932) de Howard Hawks

Titre original : « Scarface, shame of a nation »

ScarfaceElle :
(pas vu)

Lui :
Public Enemy, Little Caesar et Scarface sont les trois grands films de biographie de gangster du tout début des années trente. Contrairement à ses deux prédécesseurs, Scarface est une production indépendante : Howard Hughes avait acheté les droits d’un livre d’Armitage Trail mais Howard Hawks et Ben Hecht ont réécrit l’histoire en ne gardant pratiquement rien du livre. L’idée de Hawks était de décrire la montée d’Al Capone « comme s’il s’agissait des Borgia venus s’installer à Chicago ». De fait, on retrouve dans le traitement de l’histoire un certain côté de tragédie, notamment par l’introduction des éléments incestueux de l’histoire des Borgia.

La succession de meurtres et l’absence de jugement moral ne plut guère à la censure de l’époque et la sortie du film fut retardée de plusieurs mois et ne put se faire qu’après avoir tourné une nouvelle fin (1), coupé plusieurs scènes, ajouté un avertissement musclé en prologue (2) et accolé le sous-titre « Honte de la nation ». Ces interdictions peuvent faire sourire aujourd’hui où notre tolérance à la violence est bien plus grande (par exemple, la violence dans le remake de Scarface de De Palma en 1983 est sans aucune mesure) mais l’effet à l’époque était assez fort : ainsi, malgré l’énorme succès populaire, Hollywood prit l’engagement de ne plus tourner un tel déploiement de sauvagerie (4). Pourtant, le recul permet de se rendre compte que Scarface est l’un des films de gangsters qui fait le moins l’apologie du crime. Hawks ne rend pas son personnage sympathique, en revanche il réussit à donner à son personnage une dimension qui appartient à la tragédie et fait de Scarface un film totalement à part.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Paul Muni, Ann Dvorak, George Raft, Karen Morley, Boris Karloff
Voir la fiche du film et la filmographie de Howard Hawks sur le site IMDB.

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(1) La fin originelle montrait Scarface abattu par la bande rivale. Elle fut interdite. Hawks en tourna une autre, celle que l’on peut voir actuellement. Toujours insatisfait, le comité de censure exigea de retourner une fin où il était jugé puis pendu. Cette version (où une doublure vue de dos a été utilisée à la place de Paul Muni) a été commercialisée bien qu’entre temps Howard Hughes ait réussi à faire rétablir la seconde fin, la plus puissante, qui donne un petit côté de héros romantique à Scarface du fait de cet amour incestueux impossible.
(2) Cet avertissement trouve un prolongement par une scène au milieu du film où quelques notables réunis dans le bureau d’un directeur de journal réclame l’intervention de l’armée et une législation sur les armes. Cette scène fut ajoutée sur ordre du comité de censure.
(3) Avant Scarface, Georges Raft était surtout un danseur mondain dans les cafés. Voyant son manque d’expérience d’acteur et ses postures figées, Howard Hawks eut l’idée de lui faire lancer une pièce de monnaie en l’air. Cette image est restée célèbre et a été maintes fois copiée, y compris (paraît-il…) par de vrais gangsters.
(4) Dans son livre sur le Film Noir (1979), François Guérif parle de Scarface en ces termes : « Scarface aura été le plus grand film de gangster en même temps que leur chant du cygne. Le destin tragique du gangster allait laisser la place à l’éloge de la loi et de ceux qui la défendent. »
(5) Les journaux de l’époque ayant l’habitude de montrer les emplacements de cadavres par un X sur les photos, Howard Hawks s’est amusé à placer de nombreux X dans tout le film, à commencer par la toute première image du générique. Ensuite, à chaque fois qu’il y a un mort, il y a un X quelque part dans l’écran, un croisillon, un X sur une feuille de score, etc…

Remake :
Scarface de Brian De Palma (1983) avec Al Pacino.

15 août 2009

Les promesses de l’ombre (2007) de David Cronenberg

Titre original : « Eastern promises »

Les promesses de l'ombreElle :
(pas vu)

Lui :
Après la mort d’une jeune fille lors d’un accouchement, un jeune infirmière anglaise tente de trouver le nom de ses proches dans son journal intime écrit en russe. Sans le savoir, elle va trouver face à elle un gang de mafieux russes unis par un fort code d’honneur. Si Les Promesses de l’ombre semblent s’inscrire dans la lignée du film précédent de Cronenberg, A history of violence, ils n’ont pas tant de points communs et surtout il manque à ces Promesses de l’ombre la force de scénario de son prédécesseur. L’histoire est ici assez classique et sans surprises, il faut donc se contenter de la forme, de l’atmosphère lourde et froide que Cronenberg est parvenu à recréer pour nous faire pénétrer dans cette secte, une plongée dans un univers quasi cauchemardesque. Il joue aussi sur la fascination de la mafia et de la violence et effectivement les scènes d’hyper-violence ont fortement contribué à la popularité du film. Bonne interprétation, assez intense.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Naomi Watts, Viggo Mortensen, Vincent Cassel, Armin Mueller-Stahl
Voir la fiche du film et la filmographie de David Cronenberg sur le site IMDB.

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14 août 2009

L’aventure de Madame Muir (1947) de Joseph L. Mankiewicz

Titre original : « The ghost and Mrs. Muir »

L'aventure de Madame MuirL’aventure de Mme Muir est un film comme il y en a peu, inclassable et guère comparable à d’autres films. Contrairement à son habitude, Mankiewicz n’a pas écrit lui-même le scénario, cette adaptation d’un roman d’une femme écrivant sous le pseudonyme R.A. Dick. Une jeune veuve quitte sa belle famille pour venir vivre au bord de la mer. Elle loue une maison qui est, dit-on, habitée par le fantôme d’un capitaine. Entre eux deux vont se nouer des relations assez étroites…
L’aventure de Mme Muir n’a toutefois absolument rien d’un film de fantôme dans le sens classique du terme. Il s’agit plutôt de la rencontre de deux êtres qui, malgré leurs fortes différences, ont beaucoup de choses en commun : la solitude, la quête du bonheur, une certaine mélancolie qui abolit la frontière entre rêve et réalité. L'aventure de Madame MuirTout est parfait dans ce film : la mise en scène, les dialogues, la musique très lyrique de Bernard Herrmann, les décors et bien entendu l’interprétation avec cette fantastique rencontre entre l’imposant Rex Harrison et la fragile Gene Tierney. L’actrice parvient admirablement à exprimer à la fois la douceur, la délicatesse mais aussi la détermination, voire l’obstination, qui caractérisent son personnage ; c’est l’un de ses plus beaux rôles. Oui, L’aventure de Mme Muir est vraiment un film parfait, un film dont chaque vision enchante, un petit chef-d’oeuvre.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Gene Tierney, Rex Harrison, George Sanders, Edna Best, Natalie Wood
Voir la fiche du film et la filmographie de Joseph L. Mankiewicz sur le site IMDB.

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13 août 2009

Cow-boy (1958) de Delmer Daves

Titre original : Cowboy

Cow-boyElle :
(pas vu)

Lui :
On retrouve souvent dans les westerns de Delmer Daves le thème de l’homme qui découvre un autre mode de vie. C’est le cas ici dans ce film adapté du livre autobiographique de Frank Harris. Simple employé d’un hôtel de Chicago, le jeune Frank force la main à un convoyeur de troupeau pour partir avec ses hommes et vivre la vie d’un vrai cow-boy. L’histoire est assez simple mais bien dosée dans sa progression. Le film est avant tout remarquable par sa photographie, Delmer Daves utilisant merveilleusement la flamboyance du Technicolor et de larges mouvements de camera : un vrai régal visuel. Cowboy a par certains côtés l’apparence d’un documentaire tant il nous plonge dans cet univers auquel rêvait le jeune citadin. C’est aussi un film sur l’amitié avec un beau face à face entre l’apprenti cow-boy Jack Lemmon, assez convaincant dans ce rôle pourtant à contre-emploi, et Glenn Ford très à l’aise dans son rôle d’homme aguerri et bougrement séduisant. Cowboy nous offre vraiment un très beau spectacle et un western assez… authentique.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Glenn Ford, Jack Lemmon, Anna Kashfi, Brian Donlevy
Voir la fiche du film et la filmographie de Delmer Daves sur le site IMDB.

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12 août 2009

Le démon de la chair (1946) de Edgar G. Ulmer

Titre original : « The strange woman »

Le démon de la chairElle :
(pas vu)

Lui :
Le titre français Le démon de la chair peut faire sourire mais, pour une fois, ce n’est pas une si mauvaise traduction (strange étant à prendre dans le sens « étrangère » ou même « possédée »). L’histoire est adaptée d’un roman à succès de Ben Ames Williams : la jeune Jenny utilise sa grande beauté pour se sortir de son milieu et échapper à son père alcoolique. Elle épouse un riche commerçant et utilise son argent pour venir en aide aux pauvres de sa ville. Mais elle découvre aussi qu’elle peut manipuler les hommes… Le démon de la chair est donc une histoire de femme fatale, à ceci près qu’elle se déroule le Maine rural du XIXe siècle, un monde fruste et sans le clinquant coutumier à genre d’histoire. Habitué aux productions à très petit budget, Edgar G. Ulmer parvient à bien tirer parti du solide scénario (1). Le film est également porté par son interprétation, notamment par Hedy Lamarr qui s’est largement impliquée dans le projet (2) ; celle que l’on a surnommée « la plus belle actrice d’Hollywood » sait ici jouer avec son image et parvient à mêler parfaitement les côtés ange et démon de son personnage, faisant largement ressortir le côté ange et séducteur… Par son scénario et son interprétation, Le démon de la chair montre une belle et constante intensité.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Hedy Lamarr, George Sanders, Louis Hayward, Gene Lockhart
Voir la fiche du film et la filmographie de Edgar G. Ulmer sur le site imdb.com.

(1) Douglas Sirk aurait réalisé certaines scènes (peut-être même terminé le film) sans être crédité au générique.
(2) L’actrice Hedy Lamarr venait de se libérer de son contrat avec la MGM. Dans son autobiographie « Ecstasy and me », elle présente Le démon de la chair comme un projet assez personnel, une histoire qu’elle avait choisie un an auparavant. De fait, elle a participé au financement du projet. Elle raconte également, les hésitations et incertitudes de Ulmer sur le tempérament de l’héroïne et sur la meilleure façon de l’interpréter.
Elle présente Edgar G. Ulmer comme étant peu connu (« not an expensive talent« ) mais ayant bonne réputation, notamment en Europe (il est d’origine autrichienne tout comme Hedy Lamarr). Elle précise qu’il avait déjà réalisé 128 films auparavant (IMDB n’en liste de 30 avant 1946 mais s’il s’agit de films européens, c’est effectivement possible).

11 août 2009

Les mondes futurs (1936) de William Cameron Menzies

Titre original : « Things to Come »
Autre titre français : « La vie future »

La vie futureElle :
(pas vu)

Lui :
Les Mondes futurs est l’adaptation cinématographique du roman de H.G. Wells « The shape of things to come ». C’est Wells lui-même qui a écrit le scénario (1). Le producteur anglais Alexander Korda confie le projet à William Cameron Menzies, décorateur américain de génie. Les mondes futurs est le film de science-fiction le plus cher et le plus ambitieux des années trente, l’un des tous premiers grands films de ce genre avec Metropolis (2). Le film se déroule sur trois grandes périodes, anticipant ainsi les cent années à venir : 1940 avec le début d’une guerre qui durera 25 ans, 1972 où le monde exsangue est revenu à une civilisation de type féodal et enfin 2036 où règne le culte du progrès sous un régime de technocrates bienveillants.

Outre son côté prophétique (3), ce sont les décors qui sont le plus remarquables, tout particulièrement dans la période 2036 où Menzies montre tout son talent et son inventivité pour créer des illusions de gigantisme et de puissance. La transition vers cette période future est assez étonnante avec plusieurs minutes d’effets visuels de machineries gigantesques, un jeu de superpositions sans cesse renouvelé. Hélas, si Menzies est l’un des décorateurs les plus brillants d’Hollywood, il montre clairement ses limites sur le plan de la direction des acteurs dont le jeu est statique et qui déclament leur texte sans y insuffler suffisamment de vie. Pour cette raison, le film ne révèle pas être à la hauteur des talents mis en œuvre. Toutefois, Les mondes futurs reste l’un des films les plus importants de science-fiction et vaut la peine d’être vu, ne serait-ce que pour la qualité de ses décors et de ses prospectives.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Raymond Massey, Edward Chapman, Ralph Richardson, Margaretta Scott
Voir la fiche du film et la filmographie de William Cameron Menzies sur le site imdb.com.

Voir aussi : un excellent site sur le film Things to come avec notamment une superbe collection de posters et photos de tournage.

Notes:
(1) Wells a écrit « The shape of things to come » en 1933. Après avoir écrit l’adaptation cinématographique, il en a publié le script (ou une version très proche) sous le titre « Things to come: a film story » en 1935, peu avant la sortie du film. Ni l’un ni l’autre ne semblent avoir été traduits en français.
(2) H.G. Wells haïssait le film Metropolis de Fritz Lang (1927) et le disait haut et fort à toute l’équipe.
(3) Les mondes futurs place le début de la seconde guerre mondiale en décembre 1940, ne se trompant ainsi que de 15 mois. On y voit des attaques aériennes surprise sur l’Angleterre. Ce sont des bombes de gaz : à cette époque, la crainte que les allemands utilisent massivement les gaz, comme à la fin de première guerre mondiale, était très forte. La période de 2036 montre une civilisation plutôt pacifique mais gouvernée par des technocrates. Rejetant le progrès, la population se révolte ; il est encore trop tôt pour juger la qualité de cette prédiction… En revanche, le plus discutable est l’utilisation d’un canon géant pour envoyer des hommes sur la lune, faisant ainsi revivre l’idée de Jules Verne (et que Wells avait déjà reprise dans son livre de 1901 « Les premiers hommes sur la Lune » ) : en 1935, Wells devait savoir que ce n’était pas possible.

10 août 2009

Les cerfs-volants de Kaboul (2007) de Marc Forster

Titre original : « The kite runner »

Les Cerfs-Volants de KaboulElle :
Quand Dreamworks s’emmêle en Afghanistan… une vision très hollywoodienne de la réalité de ce pays… certainement un film à oublier très vite.
Note : pas d'étoile

Lui :
Les Cerfs-Volants de Kaboul est l’adaptation d’un best-seller de Khaled Hosseini qui est resté longtemps numéro un des ventes aux Etats-Unis. Dans les années 70, le jeune fils d’un notable de Kaboul est très lié avec le fils des domestiques de la maison. Sous l’effet de la peur, il le trahit un peu honteusement. Vingt ans plus tard, alors qu’il a émigré aux Etats-Unis, il revient dans son pays pour apaiser la culpabilité qui le ronge. Il s’agit donc avant tout d’un film sur le remords, la recherche du pardon plutôt qu’une vision sur la réalité de l’Afghanistan, même si le film met en relief le fort contraste entre l’Afghanistan de 1970 et celui des Talibans. On peut certainement reprocher au scénario  son côté conventionnel (c’est un best-seller…) mais Les Cerfs-Volants de Kaboul est porté par son interprétation assez authentique : les deux enfants sont remarquablement interprétés par deux jeunes apprentis comédiens afghans, et Khalid Abdalla, le héros adulte, donne beaucoup de force à son personnage. La réalisation est classique avec toutefois des scènes de cerfs-volants filmées comme des batailles aériennes. Fait suffisamment rare pour être noté (pour un film américain) : les deux tiers des dialogues sont en langue afghane. Cela contribue certainement à donner cette impression de véracité.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Khalid Abdalla, Homayoun Ershadi, Zekeria Ebrahimi, Ahmad Khan Mahmoodzada, Atossa Leoni, Shaun Toub
Voir la fiche du film et la filmographie de Marc Forster sur le site imdb.com.

9 août 2009

Jeux de dupes (2008) de George Clooney

Titre original : « Leatherheads »

Jeux de dupesElle :
(Abandon)
Note : pas d'étoile

Lui :
En 1925, une équipe de football américain engage un joueur brillant alors qu’une journaliste délurée cherche à le confondre pour un exploit de guerre usurpé. La reconstitution de l’atmosphère des années 20 est très hollywoodienne, une image près proprette avec force filtre sépia, distillée à grandes brassées de jazz New-Orleans ; dès le début du film, le résultat paraît bien artificiel ce qui n’aide pas à se laisser glisser dans son univers. Pour ne rien arranger, l’histoire n’est pas très intéressante, George Clooney jouant à nouveau avec l’image du anti-héro placide. Jeux de dupes peut toutefois intéresser les amateurs de football américain puisqu’il se déroule à l’époque charnière où ce sport s’est doté de règles. Quelques dialogues sont assez bien troussés.
Note : 1 étoile

Acteurs: George Clooney, Renée Zellweger, John Krasinski, Jonathan Pryce
Voir la fiche du film et la filmographie de George Clooney sur le site IMDB.

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8 août 2009

Mirage de la Vie (1959) de Douglas Sirk

Titre original : Imitation of Life

Imitation of LifeElle :
(pas vu)

Lui :
Mirage de la vie est le dernier film de Douglas Sirk. Il s’agit à nouveau d’un remake d’un film de John M. Stahl. Une jeune femme, voulant devenir actrice et vivant seule avec sa fille de 5 ans prend sous son aile une femme noire, veuve elle aussi et mère d’une fillette du même âge, blanche de peau. Nous les retrouvons dix ans plus tard alors que l’actrice connaît un certain succès. Toutes deux ont des soucis avec leur fille devenue adolescente… Douglas Sirk se retire donc avec un grand mélodrame qui tire toute sa force d’une mise en scène sans faille et d’une interprétation pleine de consistance, particulièrement par les quatre actrices principales. La photographie montre une superbe utilisation de la couleur. Pris au premier degré, le fond du propos est passablement conservateur : ce que Sirk appelle un mauvais simulacre de vie (an imitation of life) est à la fois la vie de cette actrice qui préfère sa carrière à un mariage un peu terne et celle de la jeune fille qui refuse (certes maladroitement) les schémas classiques associés à la couleur de peau de sa mère… (1) Malgré les mauvaises critiques qui soulignèrent le côté mélo, le film fut un énorme succès et la carrière de Douglas Sirk put ainsi se terminer avec un certain panache.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Lana Turner, Juanita Moore, Sandra Dee, Susan Kohner, John Gavin
Voir la fiche du film et la filmographie de Douglas Sirk sur le site IMDB.
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(1) Certains commentateurs modernes affirment qu’il faut dépasser le premier degré conventionnel de Mirage de la Vie et y voir une vision assez ironique et critique sur ces conventions sociales, et y voir même un plaidoyer pour l’émancipation de la femme et l’égalité des races. Peut-être… mais l’ennui est qu’il y a bien peu d’indices indiquant qu’il faut prendre tout cela au second degré et que le titre « Imitation of life » paraît sans équivoque. De plus, les propos de Douglas Sirk à Jon Halliday (dans le livre « Conversations avec Douglas Sirk ») ne vont pas dans le sens d’une interprétation au second degré.
(2) Le gospel dans la scène de l’enterrement est interprété et chanté par Mahalia Jackson.

Version précédente :
Images de la vie (Imitation of life) de John M. Stahl (1934) avec Claudette Colbert et Louise Beavers.

6 août 2009

Alexandra (2007) de Aleksandr Sokurov

Titre original : « Aleksandra »

AlexandraElle :
Un film sombre et émouvant dans lequel Alexandre Sokurov porte un regard mélancolique et fataliste sur la réalité de la guerre en Tchétchénie. Alexandra monte au front pour voir son petit fils officier qu’elle n’a pas vu depuis sept ans. Dans ce scénario original aux allures de documentaire, on suit simplement les déambulations de la vieille dame auprès de jeunes soldats lassés par une guerre si longue ou auprès des habitants tchétchènes meurtris par un passé douloureux. On écoute les conversations du quotidien sur la solitude, la vieillesse et la difficulté de survivre dans un monde en chaos. Les jeunes comme les vieux sont en sursis. Les tchétchènes et les russes sympathisent entre eux face à l’absurdité d’un conflit auquel ils ne peuvent plus rien.
Note : 4 étoiles

Lui :
A l’âge de 80 ans et se déplaçant difficilement, Alexandra vient en Tchétchénie rendre visite à son petit fils, militaire de carrière. Elle séjourne ainsi quelques jours dans un campement. Le film d’Alexandre Sokurov est franchement hors du commun : ce n’est absolument pas un documentaire, bien qu’il en ait quelques aspects, c’est en fait une vision sur la guerre qui est autant inhabituelle qu’efficace. Point de fait d’armes, ni de confrontation directe, Sokurov nous montre la vie d’un campement russe vu par les yeux d’une femme de 80 ans. Sa présence nous paraît tout d’abord très incongrue (une femme de cet âge est aussi bien physiquement que moralement aux antipodes d’un militaire, de plus elle se montre passablement réfractaire aux règles de la vie militaire) mais, peu à peu, cette incongruité se transmet à la guerre en elle-même qui, bien que nous ne la voyions pas directement, nous paraît au final absurde et sans justification. Cette prise de position est assez courageuse de la part du cinéaste russe qui refuse ici nettement le nationalisme. La photographie est assez belle, assez monochrome pour accentuer l’effet d’enfermement et de monotonie. Certains clairs-obscurs paraissent même comme dessinés. Alexandra est un film étrange mais particulièrement efficace dans sa dénonciation de la guerre.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Galina Vishnevskaya, Vasily Shevtsov, Raisa Gichaeva
Voir la fiche du film et la filmographie de Aleksandr Sokurov sur le site imdb.com.

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