26 octobre 2010

The Spirit (2008) de Frank Miller

The SpiritLui :
The Spirit est un classique de la bande dessinée américaine des années quarante, basé sur un personnage de justicier masqué créé par Will Eisner. Pour son adaptation au grand écran, Frank Miller adopte un type d’images proche de celui de Sin City : un rendu très stylisé en noir et blanc sursaturé avec quelques notes rouges. Tous les personnages ont été filmés sur fond vert pour être ensuite incrustés dans un univers urbain retro-moderne, essentiellement nocturne. Parfaitement réalisé, le film a un indéniable style graphique très personnel. Par rapport aux autres adaptations de comix, The Spirit a l’avantage de ne pas se prendre au sérieux : l’humour est constant, tout est objet de satire, d’exagération. L’histoire est simplette à souhait, les personnages vraiment caricaturaux. Certaines scènes auraient pu être tournées par Mel Brooks (notamment la scène, calquée sur Marathon Man (1), du nazi dentiste, complètement farfelue, ou encore celle de la bagarre dans le marais). Frank Miller s’est visiblement beaucoup amusé et il est compréhensible que les amateurs de la bande dessinée originale aient été déçus par le manque de sérieux et le scénario simpliste. C’est complètement farfelu et gentiment sexy, à déguster au second degré comme un divertissement joliment stylé.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Gabriel Macht, Eva Mendes, Samuel L. Jackson, Scarlett Johansson, Sarah Paulson
Voir la fiche du film et la filmographie de Frank Miller sur le site IMDB.

(1) On ne peut pas dire que l’allusion au film de John Schlesinger soit légère et discrète… Elle donne plutôt dans le genre tonitruant. Plus sobre (quoique… Miller place tout de même une explosion atomique dans le lointain arrière-plan…) est l’hommage au film Kiss me deadly de Robert Aldrich, grand classique du film noir (l’ouverture du second coffre avec l’énorme lueur).

25 octobre 2010

Le roman d’un mousse (1914) de Léonce Perret

Le roman d'un mousseLui :
(Muet, 95 mn) Le Roman d’un Mousse est le troisième long métrage de Léonce Perret. Il s’agit à nouveau d’un scénario construit sur plusieurs épisodes mis bout à bout. Un marquis ruiné et un usurier auquel il doit beaucoup d’argent concluent un pacte secret : le marquis va tout faire pour épouser une riche comtesse, veuve avec un enfant, dans le but d’hériter de sa fortune. Après le mariage, l’usurier parvient à se faire passer pour un précepteur et fait embarquer de force l’enfant sur un terre-neuva en route vers l’Islande dont il ne doit pas revenir… Le film ayant été tourné quelques mois après L’Enfant de Paris, il est bien entendu tentant de les comparer. Si Le Roman d’un Mousse paraît plutôt moins riche sur l’utilisation de gros plans et de cadrages originaux, il bénéficie en revanche d’un scénario bien plus travaillé qui ménage un suspense qui rend le film très prenant. Là encore, Léonce Perret prend le temps d’asseoir ses personnages et de placer la situation de départ ; il parvient ainsi à bien mettre en relief toute la perfidie de l’usurier et du marquis. Une grande partie du film est tournée en extérieurs, la ville de Saint-Malo est l’occasion de belles images sur les remparts. La scène de la tempête tire parti de petites prouesses techniques qui semblent être de la double exposition. D’une manière générale, toutes les scènes en haute mer sont convaincantes et si on les compare avec celles du Mystère des Roches de Kador, tourné un peu plus d’un an auparavant, on mesure les progrès accomplis. Le final dans le Palais de Justice est admirablement construit et maîtrisé. Les évènements des deux derniers tiers du film maintiennent une tension qui ne faiblit pas. Cette tension permet à ce Roman d’un Mousse de traverser les époques.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Adrien Petit, Maurice Luguet, Louis Leubas, Armand Dutertre, Angèle Lérida
Voir la fiche du film et la filmographie de Léonce Perret sur le site IMDB.

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24 octobre 2010

L’enfant de Paris (1913) de Léonce Perret

L'enfant de ParisLui :
(Muet, 2h04) Sur un scénario conçu comme un film à épisodes, Léonce Perret réalise un long métrage d’une durée inhabituellement longue pour son époque. Après le décès de ses parents, une fillette de bonne naissance est placée dans un pensionnat dont elle s’échappe. Elle est alors kidnappée par un petit malfrat qui voit là la possibilité de demander une rançon. En attendant, il la place chez un cordonnier ivrogne. Tel est le point de départ de L’enfant de Paris, une intrigue policière qui verra quelques rebondissements. Le scénario se déroule parfaitement, Léonce Perret prenant le temps de bien asseoir ses personnages et d’intensifier les situations. Sur le plan technique, le film est étonnant de modernisme : nombreux plans différents entremêlés par un montage assez enlevé, gros plans, contre-plongées et même des mouvements de caméra. L'enfant de Paris Ce film est la preuve manifeste de l’avance du cinéma français d’alors sur le cinéma américain. Perret tourne beaucoup en extérieurs, à Paris d’abord puis à Nice où, avec son opérateur Georges Specht, il fait de superbes plans de la ville et de la baie depuis les hauteurs. La semi-errance du Bosco à la recherche de la fillette est vraiment très belle, poétique même. Le jeu des acteurs est bien retenu, ce qui est remarquable pour l’époque, sauf celui de la fillette qui appuie beaucoup trop l’expression de sa tristesse et son désarroi. Plus que tout autre de ses films, L’enfant de Paris montre la maîtrise et le sens artistique de Léonce Perret. Il est bien plus que le simple « second réalisateur de la Gaumont » (derrière Feuillade).
Note : 4 étoiles

Acteurs: Louis Leubas, Maurice Lagrenée, Émile Keppens, Marc Gérard
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23 octobre 2010

Le mystère des roches de Kador (1912) de Léonce Perret

Le mystère des roches de KadorLui :
(Muet, 45 minutes) Le mystère des roches de Kador fait partie des films les plus remarquables de Léonce Perret, réalisateur de plus de 300 films pour Gaumont entre 1910 et 1916. Le film montre en effet un degré de qualité technique et scénaristique assez unique pour un film de 1912. Il s’agit d’une intrigue où un homme (joué par Léonce Perret lui-même) tente de se débarrasser de sa cousine (la toute jeune Suzanne Grandais) afin de toucher son héritage. Le drame se déroule en Bretagne au bord de la mer et c’est là la première nouveauté du film : de nombreuses scènes sont tournées en extérieurs et, malgré quelques approximations (les scènes censées être de nuit en haute mer ont de toute évidence été tournées en plein jour au bord de la plage), le résultat est remarquable. La photographie est d’une qualité rare pour l’époque, qualité d’autant plus évidente aujourd’hui que le film a été merveilleusement restauré. Ce même niveau de qualité se retrouve au niveau du scénario et surtout du découpage et du montage. A noter également, une utilisation originale du « film dans le film » qui nous permet de voir une petite caméra de l’époque à l’œuvre.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Suzanne Grandais, Léonce Perret, Max Dhartigny
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22 octobre 2010

Le voyage dans la lune (1902) de Georges Méliès

Le voyage dans la lune Lui :
(Muet 14 minutes) S’il n’est pas, loin de là, le premier film de Méliès, Le Voyage dans la Lune est celui qui nous le montre à l’apogée de sa créativité et qui le propulsa au sommet de sa notoriété. Inspirée de Jules Verne et de H.G. Wells, cette fantaisie de science-fiction nous montre l’expédition de six savants vers la lune : nous voyons ce qu’ils y découvrent, avant de revenir sur terre. Méliès avait déjà tourné des films assez longs (rappelons qu’à l’époque, les films duraient souvent entre une et quatre minutes) mais jamais il n’avait condensé en un seul film tant de tableaux différents, ni accompli une telle mise en scène. C’est d’ailleurs sur ce point que son impact a été si considérable sur l’évolution du cinéma : Le Voyage dans la Lune a montré l’importance de la mise en scène, de l’invention, de la création. Méliès adjoint à son histoire beaucoup d’humour et de malice… de charme aussi : ce sont des jeunes femmes en maillots de bains qui assurent les préparatifs de lancement! Le film comporte beaucoup des trouvailles techniques du réalisateur qui, cette fois, sont parfaitement intégrées à l’histoire : apparitions et disparitions soudaines, substitutions d’objet ou de décor, fondus-enchaînés et même une séquence d’animation. Le succès fut considérable et particulièrement durable, en France et surtout aux Etats-Unis.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Georges Méliès
Voir la fiche du film et la filmographie de Georges Méliès sur le site imdb.com.
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Remarques :
1) Lors de sa projection, le film était commenté en direct par un bonimenteur. Le commentaire avait été écrit par Méliès.
2) Du fait de la longueur du film et donc de son prix élevé (à cette époque, les films étaient vendus et non loués aux exploitants et le prix était défini au mètre), personne ne voulut l’acheter quand il le proposa aux exploitants forains qui étaient à l’époque ses principaux clients. Méliès dut prêter gracieusement une copie à une baraque de foire. Le succès fut immédiat et les ventes purent se faire.
3) Aux Etats-Unis, Edison fit sans scrupule des dizaines voire des centaines de copies du film pour les vendre à son compte. Méliès alla monter, avec son frère, une succursale à New York pour tenter de faire respecter ses droits. Au final, Edison a gagné beaucoup plus d’argent que Méliès sur l’exploitation du Voyage dans la lune.
Le voyage dans la lune 4) C’est Georges Méliès lui-même qui joue le rôle du professeur Barbenfouillis.
5) Une version en couleurs (peinte à la main) a refait surface en Espagne dans les années 1990. Restaurée par Serge Bromberg, elle ressort en 2011 au Festival de Cannes.

22 octobre 2010

Excursion dans la lune (1908) de Segundo de Chomón

Excursion dans la luneLui :
(Muet 8 minutes) Le succès considérable du Voyage dans la Lune de Georges Méliès entraina l’apparition de nombreuses imitations. Le fait que Pathé décide, 6 ans plus tard, d’en tourner une copie montre bien l’ampleur du succès du film de Méliès. Car cette Excursion dans la Lune n’est pas un remake encore moins une suite, non c’est une pâle copie, un plagiat destiné à profiter de la notoriété d’un autre film. On retrouve ainsi la plupart des scènes-clés du film de Méliès mais tout est bâclé, simplifié, écourté afin d’avoir une durée moindre et donc un prix de vente inférieur à l’original. Les différences les plus visibles sont au niveau de l’alunissage (dans le bouche au lieu de l’œil, l’effet perdant d’ailleurs tout son humour), et au niveau de la partie sur la Lune qui est l’objet d’un petit ballet de danseurs et d’acrobates. Le film reste très intéressant à regarder, ne serait-ce que pour sa valeur historique et c’est une bonne chose de pouvoir le voir aujourd’hui joliment restauré dans une version en couleurs.
Note : 2 étoiles

Acteurs: 
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21 octobre 2010

L’agonie de Byzance (1913) de Louis Feuillade

L'agonie de ByzanceLui :
(Muet 29 mn) Louis Feuillade met en scène l’un des évènements les plus importants de l’Histoire : la chute de Constantinople en 1453 par laquelle les Ottomans mirent fin à la domination chrétienne. Le film est particulièrement ambitieux pour l’époque : certaines scènes comportent des centaines de figurants, plusieurs décors sont utilisés et les costumes sont très travaillés. Une musique symphonique avait même été composée par Henri Février pour être jouée par un orchestre de cent musiciens et de grandes orgues pendant la projection au Gaumont Palace (1). Feuillade parvient parfaitement à maitriser cette grande production, y compris dans les scènes de combat. Tout est filmé à hauteur d’homme et en caméra fixe (principale limitation technique à cette époque) ce qui forçait à utiliser beaucoup d’astuces afin que toute l’action se déroule dans le cadre. Certains points historiques importants sont présents comme ces gigantesques canons (dont on ne voit que l’extrémité) qui permirent aux assaillants de percer les murailles. L’Agonie de Byzance est l’un des films historiques les plus fastueux de son époque.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Luitz-Morat, Georges Melchior, Albert Reusy, Renée Carl
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(1) Pour en savoir plus sur les orchestres au Gaumont Palace :
voir cette page sur le site de la Cinémathèque Française

20 octobre 2010

Weddings and babies (1958) de Morris Engel

Weddings and BabiesLui :
Troisième et ultime film de Morris Engel (1), cinéaste américain qui a préfiguré le cinéma de la Nouvelle Vague. Après l’univers des enfants, il se penche sur celui des adultes. Weddings and Babies est le nom du petit studio de photographie que Al Capetti tient dans le quartier italien de Manhattan. Mais il a d’autres ambitions que de photographier les mariages et les jeunes enfants, il souhaite explorer l’art nouveau du cinéma 8mm. Il vit avec Béa qui, de son côté, désire qu’ils se marient enfin pour avoir des enfants. Al doit-il se résigner et abandonner ses projets par amour pour Bea ? Weddings and Babies nous plonge donc au cœur d’un couple face à une décision importante qui va certainement orienter leur vie dans un sens ou dans un autre. Morris Engel filme cela de façon très authentique, laissant ses acteurs improviser, mêlant des scènes de rues prises sur le vif avec sa fameuse mini-caméra. Le dilemme de Al nous interpelle d’autant plus car il nous paraît extrêmement proche. Malgré un (petit) prix à Venise, Weddings and Babies reste peu connu, Morris Engel n’ayant pu trouver de distributeurs. C’est dommage car le film fait réellement passer quelque chose par son authenticité. A son époque, il était en tout cas un vrai précurseur.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Viveca Lindfors, John Myhers, Chiarina Barile
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(1) En 2019, postérieurement à ce commentaire, un quatrième film de Morris Engel tourné en 1968 mais jamais sorti  est venu s’ajouter : I Need a Ride to California.

19 octobre 2010

La femme en question (1950) de Anthony Asquith

Titre original : « The woman in question »
Autre titre : « Five angles on murder » (USA)

La femme en questionLui :
Dans un quartier populaire d’une ville anglaise de bord de mer, une femme vient d’être retrouvée étranglée dans son appartement. Le commissaire de police mène l’enquête… Tourné peu après la guerre, période assez florissante pour le cinéma britannique, La femme en question est un film policier dont l’originalité réside dans sa construction : chacun des témoignages est l’occasion d’un flashback et, surtout, l’apparence de la victime change totalement selon l’image de chacun. L’intrigue est bien mise en place et la vérité n’est dévoilée qu’à la toute fin ; elle est hélas un peu terne. Le film est néanmoins plaisant avec cette ambiance assez prenante qui fait la force des films britanniques de cette époque. La femme en question est aussi l’occasion de voir Dirk Bogarde, assez jeune, dans un petit rôle.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean Kent, Duncan Macrae, John McCallum, Susan Shaw, Dirk Bogarde
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18 octobre 2010

Bellamy (2009) de Claude Chabrol

BellamyLui :
Comme nous le savons maintenant, Bellamy restera hélas toujours le dernier film de Claude Chabrol. Un commissaire de police en vacances se retrouve à enquêter dans une affaire assez confuse de disparition. L’histoire est inspirée d’un fait divers aussi authentique qu’invraisemblable. Bellamy marque la rencontre deux figures du cinéma français, Gérard Depardieu et Claude Chabrol, rencontre qui, il faut bien l’avouer, déçoit quelque peu. Devenu un véritable colosse, l’acteur adopte ici un jeu assez terne, certes parfaitement contenu pour une fois par son réalisateur, mais devenu étrangement atone. Les tentatives d’introduire un peu de sensualité entre lui et sa femme plus jeune d’une vingtaine d’années ajoute un peu d’improbabilité qui tend à déteindre sur tout le film. Bellamy n’est en tous cas pas idéal pour découvrir, ou mieux connaître, Claude Chabrol.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Gérard Depardieu, Clovis Cornillac, Jacques Gamblin, Marie Bunel, Vahina Giocante
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