17 décembre 2021

Au risque de se perdre (1959) de Fred Zinnemann

Titre original : « The Nun’s Story »

Au risque de se perdre (The Nun's Story) Dans les années 1930, la fille aînée d’un chirurgien réputé de Bruges décide d’entrer dans un couvent. Elle entame avec ferveur son apprentissage de la vie religieuse se forçant à accepter la règle d’obéissance absolue. Devenue sœur Luc, elle suit une formation d’infirmière dans l’espoir d’être envoyée au Congo…
Au risque de se perdre (The Nun’s Story) est un film américain réalisé par Fred Zinnemann. Ce film est une adaptation fidèle du best-seller homonyme de Kathryn C. Hulme en grande partie basé sur la vie d’une de ses amies. Il ne faut pas être rebuté par le sujet car le film est assez passionnant, malgré sa longueur de 2h30. Articulé en trois parties, tout le récit est vu par les yeux de la jeune femme. Nous suivant tout d’abord l’apprentissage de la jeune nonne qui nous est montré avec une précision quasi documentaire. Cette partie nous laisse presque sans voix car il s’agit d’une véritable dépersonnalisation de l’individu qui évoque certains entrainements militaires extrêmes : confinement, discipline implacable, humiliations, bannissement de toute expression pour parvenir à une soumission totale. La deuxième partie se déroule au Congo, une partie qui semble aujourd’hui un peu empreinte de colonialisme paternaliste mais qui voit des développements intéressants. La troisième partie se déroule à nouveau en Belgique. Ce qui est remarquable dans le scénario, c’est l’absence de facilités d’écriture, il n’y a pas d’effets, tout se déroule en douceur, le trait ne semble jamais grossi. Le propos est finalement plutôt philosophique et ne s’égare jamais. Audrey Hepburn est ici assez étonnante, c’est incontestablement l’un de ses meilleurs rôles. La photographie en Technicolor de Franz Planer est superbe. Gros succès à sa sortie.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Audrey Hepburn, Peter Finch, Edith Evans, Peggy Ashcroft, Dean Jagger, Mildred Dunnock, Beatrice Straight, Patricia Collinge
Voir la fiche du film et la filmographie de Fred Zinnemann sur le site IMDB.

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Remarque :
* La scène finale ne comporte pas de musique. D’après Clive Hirschhorn, auteur de Warner Bros Story, il s’agit du seul film Warner sans musique sur le mot « Fin ». Zinnemann a expliqué plus tard qu’il s’agissait de ne froisser personne. Une musique plutôt joyeuse aurait donné l’impression d’approuver la décision de sœur Luc et une partie du public aurait pu s’en offusquer. Une musique triste aurait eu l’effet contraire et aurait froissé une autre partie du public. Initialement farouchement opposé à l’idée, Jack Warner s’est finalement résigné à accepter.

Au risque de se perdre (The Nun's Story)Audrey Hepburn et Edith Evans dans Au risque de se perdre (The Nun’s Story) de Fred Zinnemann.

25 février 2020

Deux jours, une nuit (2014) de Jean-Pierre et Luc Dardenne

Deux jours, une nuitSandra arrive au terme d’un long arrêt de maladie pour dépression. Le patron de l’entreprise a réparti le travail de Sandra sur les seize autres employés et a décidé de soumettre ses employés à un choix : soit Sandra est réintégrée dans son poste, soit ils obtiennent tous une prime de 1 000 euros pour le travail effectué et Sandra est licenciée. Les employés ont voté pour la prime. Une de ses collègues a obtenu de pouvoir faire un nouveau vote à bulletins secrets le lundi matin et Sandra n’a que les deux jours du week-end pour essayer de convaincre ses collègues de voter pour la garder…
Deux jours, une nuit nous raconte une histoire très humaine sur l’exclusion sociale en temps de crise économique. Une fois de plus, les frères Dardenne excellent à nous transmettre une image du réel. Que la situation ne soit pas très crédible et non conforme au Droit du travail n’est pas si important, c’est le combat de cette femme très fragile pour conserver son emploi que nous suivons avec empathie. Marion Cotillard fait une très belle prestation, intense mais sans éclat spectaculaire.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Marion Cotillard, Fabrizio Rongione, Catherine Salée
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Deux jours, une nuitFabrizio Rongione et Marion Cotillard dans Deux jours, une nuit de Jean-Pierre et Luc Dardenne.

19 juillet 2017

Alabama Monroe (2012) de Felix van Groeningen

Titre original : « The Broken Circle Breakdown »

Alabama MonroeDidier joue du banjo dans un groupe de Bluegrass et vénère l’Amérique. Avec Elise, qui tient un salon de tatouages, ils vivent une relation fusionnelle. On découvre que leur fille Maybelle, âgée de sept ans, est atteinte d’un grave cancer… Alabama Monroe est l’adaptation d’une pièce de théâtre écrite par Johan Heldenbergh et Mieke Dobbels, The Broken Circle Breakdown featuring the Cover-Ups of Alabama, qui a connu un énorme succès en Belgique flamande et aux Pays-Bas. Johan Heldenbergh reprend son rôle à l’écran. C’est à la fois une histoire assez dure sur la maladie et qui fustige les réticences d’origine religieuse sur la recherche médicale (1), et une mise en avant de la musique Bluegrass où les morceaux sont intégrés aux évènements et en  sont partie prenante. L’alliance du Bluegrass avec le drame n’est pas totalement incongru (même si les frères Coen avaient plutôt fait l’inverse dans O’Brother). Le réalisateur belge Felix van Groeningen a choisi de déstructurer son récit ; il va hélas beaucoup trop loin dans cette voie, entremêlant passé et même futur au présent, passant allègrement et sans prévenir d’une période à l’autre, ce qui finit par être inutilement perturbant. Belles interprétations de Johan Heldenbergh et de Veerle Baetens, tatouée des pieds à la tête…
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Johan Heldenbergh, Veerle Baetens
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Remarques :
* Le titre original du film fait référence à un morceau emblématique du bluegrass, Will the Circle Be Unbroken, qui est à la base un hymne religieux et qui est chanté par le groupe au début du film. C’est en quelque sorte un retournement du titre (et par ailleurs, en plus de sa signification de « chute », beaucoup de titres d’instrumentaux finissent par breakdown.
* Formé à l’occasion, le groupe de bluegrass The Broken Circle Breakdown Bluegrass Band connaît depuis la sortie du film un énorme succès en Belgique. Les ventes de la musique originale du film ont battu tous les records en ce pays.

(1) En 2006, sur des motivations religieuses, George Bush a mis son veto sur les crédits à la recherche médicale sur les cellules souches embryonnaires votés par le Sénat américain. Ce veto a été levé par Obama en 2009.

Alabama Monroe
Veerle Baetens et Johan Heldenbergh dans Alabama Monroe de Felix van Groeningen.

Alabama Monroe
Veerle Baetens et Nell Cattrysse dans Alabama Monroe de Felix van Groeningen.

Alabama Monroe
Johan Heldenbergh et Veerle Baetens dans Alabama Monroe de Felix van Groeningen.

22 août 2014

Bullhead (2011) de Michaël R. Roskam

Titre original : « Rundskop »

BullheadJacky est le fils aîné d’une importante famille d’agriculteurs et d’engraisseurs non loin de Liège en Belgique. A 33 ans, il apparaît comme un être renfermé et imprévisible, parfois violent. Sa collaboration avec un vétérinaire corrompu lui a permis de se forger une belle place dans le milieu de la mafia des hormones. Alors qu’ils s’apprêtent à traiter avec un nouveau revendeur, un enquêteur fédéral est assassiné… Bullhead est écrit et réalisé par Michaël R. Roskam. Pour son premier long métrage, il a réussi à créer une histoire très forte qui mêle habilement le thriller et le drame : sur fond de trafic d’hormones, c’est tout le passé de Jacky et ses lourds secrets qui refont surface. Le tour de force de Michaël Roskam est de parvenir à rendre attachant un personnage extrêmement bourru et violent (et, qui plus est, hors-la-loi) en nous donnant les clés de sa personnalité et en dévoilant sa grande vulnérabilité intérieure. L’atmosphère est lourde, sans édulcoration ; le récit apparaît très ancré dans ses racines locales donnant ainsi un fort parfum d’authenticité. Bullhead est un film rude, brutal même, mais finalement très convaincant par la profondeur de ses personnages.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Matthias Schoenaerts, Jeroen Perceval, Jeanne Dandoy
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19 janvier 2014

Le Gamin au vélo (2011) de Jean-Pierre et Luc Dardenne

Le gamin au véloCyril est un jeune garçon de 12 ans qui n’a qu’une idée en tête : retrouver son père qui l’a placé dans un foyer. Il rencontre Samantha qui tient un salon de coiffure et accepte de le prendre avec elle, le week-end… Trois ans après Le Silence de Lorna, les frères Dardenne poursuivent dans la voie d’un cinéma moins marqué par une forme brute et percutante tout en restant puissant. L’histoire est assez forte à l’image de l’obstination de ce garçon qui refuse de croire les explications qu’on lui a données, qui refuse même les faits. Le déroulement ne laisse aucun temps mort, avalant parfois quelques ellipses habiles. La force de l’ensemble vient aussi de l’interprétation, y compris et surtout dans les moments avec pas ou peu de paroles. La musique vient souligner quelques scènes, ce qui assez habituel chez les frères Dardenne. Le gamin au vélo est indéniablement émouvant.
Elle: 5 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Thomas Doret, Cécile De France, Jérémie Renier
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29 décembre 2013

À perdre la raison (2012) de Joachim Lafosse

À perdre la raisonA perdre la raison s’inspire d’un fait divers particulièrement tragique survenu en Belgique en 2007, un quadruple infanticide commis par une jeune mère de famille. Joachim Lafosse a pris le parti de nous dévoiler l’issue de ce drame dès les premières minutes, tout le film étant ensuite un flashback. La mise en place est alors assez longue malgré de très grandes ellipses. Il nous fait ensuite suivre la lente descente de cette jeune femme sans excès de sentimentaliste, nous dévoilant plus un faisceau d’indices, de petits éléments qui pris isolément peuvent être considérés inoffensifs et anodins mais qui, ensemble, vont conduire à une issue tragique. Toutefois, il ne parvient pas à fournir réellement d’explication, se refugiant derrière la « perte de raison ». Son film est toutefois assez remarquable par sa façon de montrer comment une tragédie peut avoir été engendrée par ce qui lui est normalement antinomique : la douceur, la sécurité, l’empathie. Sur ce point, le personnage du docteur/père/protecteur tenu par Niels Arestrup est remarquablement bien écrit, avec beaucoup de finesse. Le réalisateur belge fait donc, une fois de plus, preuve d’une grande sensibilité.
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Niels Arestrup, Tahar Rahim, Émilie Dequenne
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3 novembre 2012

La régate (2009) de Bernard Bellefroid

La régateAlexandre, 15 ans, vit seul avec un père violent et mal dans sa peau. Comme échappatoire, Alexandre pratique intensément l’aviron et espère gagner les championnats de Belgique… S’inspirant de son propre vécu, le réalisateur belge Bernard Bellefroid dresse un double portrait, celui de cet adolescent qui cherche à se construire et celui de son père qui a l’impression de ne pas y être parvenu. Il sait éviter tout excès, tout effet de dramatisation, son récit sonne très vrai. Il faut aussi noter les belles interprétations de Joffrey Verbruggen et de Thierry Hancisse, empreintes de force et sans ostentation. La régate est un film fait avec beaucoup de sensibilité.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Joffrey Verbruggen, Thierry Hancisse, Sergi López, David Murgia
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