27 septembre 2023

Crime et châtiment (1935) de Josef von Sternberg

Titre original : « Crime and Punishment »
Autre titre français : « Remords »

Crime et châtiment (Crime and Punishment)Jeune et brillant étudiant, expert en criminologie mais réduit à la pauvreté, Roderick Raskolnikov assassine et vole une vieille prêteuse sur gages, acte qui lui semblait justifié et légitime. Mais, il est rapidement rongé par le remords…
Crime et châtiment est un film américain réalisé par Josef von Sternberg d’après le roman de Fiodor Dostoïevski. Il s’agit du premier film réalisé par le réalisateur après son éloignement de son actrice fétiche Marlene Dietrich et de la Paramount. Son nouveau studio, la Columbia, lui impose à la fois le sujet et le casting comme pour lui rappeler qu’il n’est qu’un exécutant. Josef von Sternberg, connu pour son caractère ombrageux et ses méthodes dictatoriales, est tout sauf un homme qui se laisse diriger. Dans ses mémoires, il dit n’avoir fait qu’un travail de routine. Certes la présence de Peter Lorre et la qualité de la photographie évitent de rendre le résultat trop anodin mais il est indéniable que l’on est loin de ses meilleures réalisations. Le récit est centré sur un jeu du chat et de souris avec l’inspecteur de police ; l’évolution de l’état émotionnel, mental et physique du meurtrier est bien entendu beaucoup moins subtil que dans le roman. La même année est sortie la version du français Pierre Chenal qui lui est bien supérieure.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Peter Lorre, Edward Arnold, Marian Marsh
Voir la fiche du film et la filmographie de Josef von Sternberg sur le site IMDB.

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Edward Arnold et Peter Lorre dans Crime et châtiment (Crime and Punishment) de Josef von Sternberg.

5 août 2019

Nocturnal Animals (2016) de Tom Ford

Nocturnal AnimalsSusan est galeriste d’art à Los Angeles. Un jour, elle reçoit de son premier mari le manuscrit de son roman, juste avant publication. Restée seule lors d’un week-end, elle entreprend de le lire : c’est le récit d’un homme qui, avec sa femme et sa fille, se fait attaquer par trois voyous sur une route isolée du Texas…
Nocturnal Animals est adapté du roman Tony and Susan d’Austin Wright, publié en 1993. Tom Ford est un styliste de mode qui réalise ici son second long métrage après A Single Man (2010). On ne sera donc pas étonné qu’il ait soigné la photographie et l’aspect graphique de son film. L’histoire se déroule dans trois dimensions temporelles : le présent, le passé et le fictionnel. Les allers-retours deviennent vite répétitifs, même agaçants par leur lourdeur. Les allégories et parallèles sont insistants. Tom Ford semble avoir un compte à régler avec l’art moderne, un monde qu’il présente de façon caricaturale, froid, sans âme, sans vie. Le contraste entre cet univers aseptisé et le sordide de l’enquête au Texas est poussé à son maximum. Personnellement, j’ai trouvé le film assez vide et plutôt déplaisant. Ce ne fut pas le cas de tout le monde puisqu’il a été bien reçu aux Etats-Unis, moins bien en France toutefois.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Amy Adams, Jake Gyllenhaal, Michael Shannon, Aaron Taylor-Johnson, Armie Hammer
Voir la fiche du film et la filmographie de Tom Ford sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Lire une analyse plus complète sur le film sur le site Courte-focale.fr.

Nocturnal AnimalsAmy Adams dans Nocturnal Animals de Tom Ford.

Nocturnal AnimalsJake Gyllenhaal et Michael Shannon dans Nocturnal Animals de Tom Ford.

13 février 2018

L’homme que j’ai tué (1932) de Ernst Lubitsch

Titre original : « Broken Lullaby »

L'homme que j'ai tuéParis, 1918. Alors que la signature de l’Armistice est largement fêtée, un jeune français est désespéré d’avoir tué un jeune soldat allemand quelques jours auparavant dans une tranchée. Totalement dévasté, il décide d’aller trouver la famille en Allemagne pour chercher un pardon…
Qu’Ernst Lubitsch ait décidé d’adapter cette pièce de théâtre de Maurice Rostand peut surprendre car ce mélodrame est nettement en dehors de son registre habituel. Il le fait non sans quelques lourdeurs mais parvient à lui donner une belle intensité. Le propos est résolument pacifiste, soulignant le mécanisme de la haine qui alimente les guerres et prônant la réconciliation entre les peuples. Lubitsch nous gratifie de plans inattendus dont il a le secret, tel cette vision d’une longue rangée de bottes des officiers agenouillés à la messe, et parvient même à glisser quelques éléments de comédie : toute la scène des commérages ponctués par le tintement des portes de boutiques que l’on ouvre au passage du « français » est aussi amusante qu’admirable. Le jeu des acteurs, notamment de Phillips Holmes, peut paraître un peu outré aujourd’hui. Malgré un bon accueil critique, le public bouda le film qui fut un échec commercial. Ernst Lubitsch ne tournera aucun autre mélodrame.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lionel Barrymore, Nancy Carroll, Phillips Holmes, Lucien Littlefield, Zasu Pitts
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Remarques :
* Le titre initialement prévu était The Man I Killed. Mais, pour éviter de prêter à confusion sur le type de film, il fut changé à la hâte à sa sortie en The Fifth Commandment puis en Broken Lullaby.
* Autre film inspiré de la pièce de Maurice Rostand :
Frantz de François Ozon (2016) avec Pierre Niney et Paula Beer.

L'homme que j'ai tué
Zasu Pitts, Lionel Barrymore, Phillips Holmes, Louise Carter et Nancy Carroll dans L’homme que j’ai tué de Ernst Lubitsch.

10 janvier 2017

Une si jolie petite plage (1949) de Yves Allégret

Une si jolie petite plagePar un soir pluvieux, un jeune homme triste arrive dans un village côtier du nord de la France. Il prend une chambre dans l’unique hôtel ouvert, une modeste maison tenue par la nièce de l’ancien propriétaire complètement paralysé et muet. Ce dernier semble reconnaitre le nouvel arrivé… Tout comme Dédé d’Anvers (1948), Une si jolie petite plage est issu de la collaboration entre le scénariste Jacques Sigurd et le réalisateur Yves Allégret (qui, rappelons-le, est le jeune frère de Marc Allégret). C’est à nouveau un film très noir avec ce désenchantement qui marque le cinéma français de l’Après-guerre. Accablé par le lourd poids du destin, les personnages de cette histoire n’espèrent plus, du moins pour eux. Il n’y a pas un seul rayon de soleil à l’horizon, au propre comme au figuré puisqu’il pleut continuellement, une grosse pluie qui détrempe tout et semble vouloir s’insinuer partout. La construction est originale car rien n’est expliqué de prime abord : si on comprend rapidement que ce jeune homme a vécu là par le passé, les indices sont ensuite distillés au compte-goutte et nous ne faisons qu’entrevoir les choses. Ce n’est que vers la fin du film que l’on apprendra de sa bouche toute son histoire. Gérard Philipe est parfait dans ce rôle assez taciturne. L’acteur n’est encore qu’au début de sa carrière, son talent explosera aux yeux du plus grand nombre  peu après au théâtre et, par ricochet, au cinéma. La photographie, signée par le grand Henri Alekan, est superbe.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Madeleine Robinson, Gérard Philipe, Jean Servais, André Valmy, Jane Marken, Julien Carette
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Remarque :
* Yves Allégret se permet une amusante petite prouesse technique sur le plan de fin : un couple marche sur la plage, dit une phrase (« Une si jolie petite plage ! »), s’arrête pour regarder la mer et la caméra recule rapidement jusqu’à qu’ils ne deviennent plus qu’un point. Aucune trace n’est visible dans le sable. Sauf erreur de ma part, la seule façon de faire un tel plan est de le filmer à l’envers, le plus délicat étant la synchronisation de la petite phrase.

Une si jolie petite plage
Gérard Philipe et Madeleine Robinson dans Une si jolie petite plage de Yves Allégret.

28 mars 2012

Crime et châtiment (1935) de Pierre Chenal

Crime et châtimentA Saint-Petersbourg, au milieu du XIXe siècle, l’ex-étudiant Rodion Raskolnikov assassine une vieille femme rapace, prêteuse sur gages. La brumeuse théorie, au nom de laquelle il a agi, doit ensuite faire face à ses remords… Grand amateur de littérature russe, Pierre Chenal choisit d’adapter le grand roman de Dostoïevski Crime et châtiment. Il reste très proche du roman, parvenant à bien en restituer le climat par une épuration ou même stylisation des décors et sans jouer sur le misérabilisme. Pierre Blanchar fait un parfait Raskolnikov, exprimant largement son esprit tourmenté, amplifiant juste un peu trop son jeu halluciné, à la limite de la folie. Le moment fort du film est son face à face avec le juge Porphyre, magistralement interprété par Harry Baur qui excelle dans ce jeu du chat et la souris. Cela a sans doute le défaut de donner un peu trop d’importance à l’enquête policière au détriment du tourment intérieur de Rodion qui est, dans le film, bien peu loquace. Il faut aussi saluer Madeleine Ozeray qui fait une Sonia parfaite bien que son rôle soit assez simplifié : il est difficile de percevoir à quel point c’est cette fragile créature qui influe le plus sur Rodion, la fin paraissant un peu expédiée. Crime et châtiment n’est pas un roman facile à adapter à l’écran. Cette version de Pierre Chenal possède une certaine force atemporelle qui rend le film toujours aussi intéressant aujourd’hui.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Harry Baur, Pierre Blanchar, Madeleine Ozeray, Lucienne Le Marchand, Alexandre Rignault, Sylvie, Aimé Clariond
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Autres versions :
Crime et châtiment (Crime and punishment) de Josef von Sternberg (1935) avec Peter Lorre
Crime et châtiment de Georges Lampin (1956) avec Robert Hossein et Jean Gabin
Crime & Punishment, USA de Denis Sanders (1959) avec George Hamilton
Crime et châtiment (Rikos ja rangaistus) d’Aki Kaurismäki (1983)
Crime et châtiment de Menahem Golan (2002) avec Crispin Glover

Les adaptations au petit écran sont nombreuses. A noter que Stellio Lorenzi l’a adapté 2 fois à la télévision française en 1955 (avec Roger Crouzet et Pierre Mondy) et en 1971 (avec François Marthouret et Jean Topart)… et qu’Andrzej Wajda a réalisé une adaptation pour la télévision allemande en 1992 : Schuld und Sühne.