24 août 2023

Les Poings dans les poches (1965) de Marco Bellocchio

Titre original : « I pugni in tasca »

Les poings dans les poches (I pugni in tasca)Souffrant d’épilepsie, le jeune Alessandro s’est, petit à petit, enfermé dans son monde. Perdu dans l’admiration qu’il a pour son frère Augusto, qui rêve de départ, et l’amour coupable qu’il voue à sa sœur Giulia, Alessandro, entre crises d’épilepsie et débilité congénitale, tente de détruire l’oppression familiale…
Les Poings dans les poches est un film italien écrit et réalisé par Marco Bellocchio. Les films du réalisateur sont très souvent des portraits de rebelles assortis d’une critique sociale et politique. Son premier long métrage ne fait pas exception, bien au contraire il préfigure indéniablement ses films ultérieurs et montre une maturité formelle étonnante. Marco Bellocchio met en scène avec grande intensité les pulsions de mort de l’adolescence et attaque l’institution familiale. Son adolescent cherche des justifications à ses faiblesses en les attribuant aux autres et en se réfugiant dans sa différence , dans sa « folie ». Lou Castel campe son personnage de façon remarquable, le rendant assez inoubliable. L’ensemble est bien dosé, sans excès, le réalisateur a su insuffler une certaine tendresse et une touche de poésie. Très belle photographie en noir et blanc malgré un tout petit budget C’est un film un peu dérangeant mais d’une puissance rare, et toujours intacte.
Elle: 3 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Lou Castel, Paola Pitagora, Marino Masé, Liliana Gerace, Jeannie McNeil
Voir la fiche du film et la filmographie de Marco Bellocchio sur le site IMDB.

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Les poings dans les poches (I pugni in tasca)Paola Pitagora et Lou Castel dans Les poings dans les poches (I pugni in tasca) de Marco Bellocchio.

19 août 2023

Le Dernier Face à face (1967) de Sergio Sollima

Titre original : « Faccia a faccia »
Autre titre français : « Il était une fois en Arizona »

Le Dernier Face à face (Faccia a faccia)Atteint de tuberculose, Brad Fletcher, un enseignant de la Nouvelle-Angleterre, quitte son travail pour aller s’établir au  Texas. Là, il est pris en otage par un hors-la-loi blessé, Solomon Bennet dit Beauregard. Fletcher l’aide à se soigner et tente de lui inculquer quelques principes moraux. Fasciné et intrigué par cette vie de hors-la-loi, il décide de rejoindre la « horde sauvage » de Bennet…
Le Dernier Face à face ou Il était une fois en Arizona (bien que l’histoire se déroule au Texas !) est un western spaghetti coécrit et réalisé par Sergio Sollima. Le cinéaste italien est surtout connu pour avoir réalisé trois westerns ; celui-ci est le deuxième, suivant Colorado (1966) et précédant Saludos hombre (1968). Avec Leone et Corbucci, Sergio Sollima fait partie des « trois Sergio du western italien ». Le film utilise beaucoup de clichés, se montre souvent basique et le montage paraît très brouillon. Si le film retient l’attention, c’est principalement du fait de son scénario que le réalisateur a écrit avec Sergio Donati, scénariste qui a travaillé également pour Leone. Ils ont créé une situation originale pour mettre face à face un professeur, qui a une forte éthique et insiste sur l’importance du libre choix entre le bien et le mal, et un bandit rustre qui ne croit qu’en la force mais est impressionné par l’intelligence du professeur. Cette situation peut paraître classique mais c’est son évolution qui réserve des surprises. Gian Maria Volontè, ici à la fin de sa période western, montre une belle présence et donne de l’étoffe à son personnage. William Berger a également beaucoup de présence. Le film n’est pas parfait, loin de là, mais constitue une belle curiosité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Gian Maria Volontè, Tomas Milian, William Berger, Jolanda Modio
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Remarque :
• Le personnage de Charlie Siringo travaillant pour l’Agence Pinkerton a réellement existé.
• Tomas Milian et William Berger sont doublés dans la version italienne.
• Les relations entre Gian Maria Volontè (membre du Parti Communiste italien) et Tomas Milian (cubain qui a fui son pays à l’accession de Fidel Castro au pouvoir) ont été houleuses sur le tournage.
• Une version réduite à 93 minutes a longtemps été la seule visible. La version complète de 112 minutes est maintenant rétablie (dans la version vue ici, les scènes récupérées sont facilement identifiables car la police des sous-titres est différente).

Le Dernier Face à face (Faccia a faccia)Tomas Milian et Gian Maria Volontè dans Le Dernier Face à face (Faccia a faccia) de Sergio Sollima.

7 août 2023

Les Chiffres (1966) de Wojciech Has

Titre original : « Szyfry »
Autre titre français Parfois utilisé : « Les Codes »

Les chiffres (Szyfry)Après avoir reçu une lettre de son fils, Tadeusz, qui vit en France depuis vingt ans, décide de rendre visite à sa famille en Pologne. Le père et le fils sont maintenant très distants, la femme de Tadeusz est en clinique. Lui, il veut comprendre ce qui est arrivé à son second fils. Est-il vraiment mort pendant la guerre ?
Les chiffres (titre à comprendre dans le sens « langage chiffré ») est un film écrit et réalisé par Wojciech J. Has. Il traite de la question de la mémoire collective polonaise sur la Seconde Guerre mondiale. Le personnage principal, qui a coupé tous liens avec son pays pendant la guerre, cherche à obtenir des informations sur les circonstances de la mort de son fils cadet mais n’obtient pas de réponses franches, y compris de sa propre famille. Les explications données lui paraissent cacher quelque chose, comme s’il s’agissait d’un langage codé. La question soulevée par ce récit est  donc l’attitude de la population durant l’Occupation, une question qui a été évitée en Pologne pendant les vingt ans qui ont suivi, escamotée au profit des faits de combat. A cette histoire, Wojciech Has ajoute un deuxième niveau, qui mériterait tout autant d’être qualifié de « langage codé » : le cinéaste insère des plans oniriques dont le sens profond ne saute pas immédiatement aux yeux (j’avoue avoir eu besoin d’aide pour comprendre, voir le lien ci-dessous). En fait, il aborde par ces séquences le thème de l’occultation faite par les régimes socialistes de la Shoah, le discours officiel étant axé sur la lutte et la souffrance du peuple en tant qu’ensemble unique. Les autorités polonaises de l’époque ont bien perçu le caractère subversif du film puisqu’il fut écarté des circuits de distributions. Les chiffres est un film très riche, son principal défaut est certainement un manque d’accessibilité. Sur le plan cinématographique, c’est une fois de plus remarquable et la façon dont Wojciech Has exprime les rapports empreints de distance entre le père et son fils est admirable.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jan Kreczmar, Zbigniew Cybulski, Ignacy Gogolewski, Irena Horecka, Janusz Klosinski
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Remarques :
* Film vu sur le site de la Cinémathèque polonaise (sous-titres polonais ou anglais seulement).
* Pour appréhender toute la richesse de Szyfry (… et tout comprendre), voir la remarquable analyse du film par Anne Guérin-Castell qui a consacré un site à Wojciech Has.

Les chiffres (Szyfry)Jan Kreczmar et Zbigniew Cybulski dans Les chiffres (Szyfry) de Wojciech Has.

6 août 2023

Adieu jeunesse (1961) de Wojciech Has

Titre original : « Rozstanie »

Adieu jeunesse (Rozstanie)Magdalena, actrice et femme libre, revient dans sa ville natale après de nombreuses années pour les funérailles de son grand-père. Dans le train, elle rencontre un homme bien plus jeune qu’elle. Sur place, elle découvre que la maison de son grand-père va être préemptée par la ville…
Adieu jeunesse (Rozstanie) est un film polonais réalisé par Wojciech J. Has. Le scénario est l’œuvre de Jadwiga Zylinska, une écrivaine polonaise qui avait écrit une nouvelle du même nom. Wojciech Has aurait conçu le film comme une comédie sentimentale ; il y règne surtout un fort sentiment de mélancolie. En revenant dans sa ville natale, cette femme s’y sent étrangère. Elle a acquis une maturité et un modernisme que toutes ses anciennes connaissances n’ont pas ; elle a tourné la page du passé, les autres non. Seul un jeune homme, audacieux et curieux, lui paraît différent ; elle apprécie sa compagnie tout en sachant que cette relation restera sans lendemain. Adieu jeunesse est un film assez étrange car l’histoire ne comporte pas de temps fort et semble n’aboutir sur rien. L’image est belle mais l’ensemble nous laisse sur un sentiment de légère vacuité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lidia Wysocka, Wladyslaw Kowalski, Gustaw Holoubek, Irena Netto, Adam Pawlikowski
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Adieu jeunesse (Rozstanie)Wladyslaw Kowalski et Lidia Wysocka dans Adieu jeunesse (Rozstanie) de Wojciech Has.

4 août 2023

La Rue chaude (1962) de Edward Dmytryk

Titre original : « Walk on the Wild Side »

La Rue chaude (Walk on the Wild Side)En 1930, Dove quitte son Texas natal pour se rendre à La Nouvelle-Orléans, dans l’espoir de retrouver Hallie, son amour perdu. En chemin, il rencontre Kitty, une jeune fille en errance…
Walk on the Wild Side (on peut oublier le titre français, inutilement racoleur) est un film de Edward Dmytryk, adaptation d’un roman de Nelson Algren, paru en 1956 (à noter que ce même roman a aussi inspiré à Lou Reed sa célèbre chanson). Le propos du roman est d’observer que les personnes qui ont souffert, ou qui s’engagent sur un mauvais chemin, peuvent développer un humanisme plus important que ceux qui n’ont jamais souffert. C’est un roman assez âpre qui a été ici édulcoré par John Fante et Edmund Morris avec l’aide de Ben Hecht. L’histoire débute comme un road-movie pour se focaliser ensuite sur des scènes d’intérieur, proches d’un film noir. Le film fut très critiqué pour l’introduction d’un sentimentalisme qui était absent du roman. L’histoire possède néanmoins une force qui n’est hélas pas entièrement retranscrite à l’écran, elle repose sur quatre personnages féminins très différents. Le producteur Charles K. Feldman a réuni un beau plateau d’acteurs : Anne Baxter, Barbara Stanwyck, la jeune Jane Fonda (sa deuxième apparition à l’écran) et sa petite amie du moment, la française Capucine. L’interprétation de Barbara Stanwyck est probablement la plus remarquable car elle parvient à exprimer avec grande subtilité la nature des liens qui la lient à son employée Hollie. Face à elle, Capucine semble avoir un jeu inapproprié mais cela correspond à son personnage, suggérant qu’elle n’est pas à sa place. Seul le choix de Laurence Harvey paraît discutable car il est bien terne. Le film fut méprisé à sa sortie et après, alors qu’il ne manque pas d’intérêt, loin de là.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Laurence Harvey, Capucine, Jane Fonda, Anne Baxter, Barbara Stanwyck, Joanna Moore, Richard Rust
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La Rue chaude (Walk on the Wild Side)Jane Fonda et Laurence Harvey dans La Rue chaude (Walk on the Wild Side) de Edward Dmytryk.

La Rue chaude (Walk on the Wild Side)Capucine et Barbara Stanwyck dans La Rue chaude (Walk on the Wild Side) de Edward Dmytryk.

Remarque :
• Nelson Algren est également l’auteur de L’Homme au bras d’or adapté au cinéma par Otto Preminger en 1955.
• Détail amusant : Bien que le film soit censé se dérouler en 1930, le producteur Charles K. Feldman a imposé que sa petite amie Capucine (qui fut mannequin avant d’être actrice) porte des tenues modernes créées par Pierre Cardin.
• Blake Edwards aurait été recruté par le producteur pour retourner certaines scènes.

• Le générique de début (et de fin) est l’un des plus remarquables qui soit. Il est à la fois simple mais fascinant : un chat noir, filmé au raz du sol, déambule de sa démarche féline dans un environnement que l’on devine urbain et pauvre avant de s’en prendre à un autre chat. Il est l’œuvre de Saul Bass, ce créateur de génie de génériques. Le parcours de ce chat symbolise celui des personnages du film. Le chat fut repris pour figurer sur l’affiche alors qu’il n’est qu’à peine présent dans l’histoire. (Et, accessoirement, je viens enfin de comprendre le logo de la société française Wild Side qui, fort logiquement, a édité un coffret de ce film).

La Rue chaude (Walk on the Wild Side)Le générique de La Rue chaude (Walk on the Wild Side) de Edward Dmytryk est l’oeuvre de Saul Bass

24 juillet 2023

Chambre commune (1960) de Wojciech Has

Titre original : « Wspólny pokój »

Chambre commune (Wspólny pokój)A la fin des années 1920, le jeune Lucjan arrive à Varsovie avec l’espoir de se lancer dans une carrière littéraire. Il emménage dans un appartement à pièce unique sous-loué à plusieurs personnes : il y a là un de ses amis, poète et journaliste à ses heures, un poète, deux étudiants et la sœur de l’un d’eux…
Chambre commune est un film polonais réalisé par Wojciech Has, adaptation, d’un roman de Zbigniew Unilkowski, paru en 1932, qui décrivait les membres du groupe littéraire et poétique « Kwadryga » (1). Le film décrit l’état d’esprit de l’époque de l’entre-deux guerres à travers un petit groupe de co-locataires qui passent leur temps entre leur appartement et le café. Leurs discussions sont marquées par un humour constant, qui se présente comme un dérivatif au fort pessimisme ambiant. Le sentiment d’imminence d’une catastrophe transparaît. La mise en scène de Wojciech Has est très maitrisée avec des cadrages précis et, une fois encore, de très beaux gros plans.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Mieczyslaw Gajda, Gustaw Holoubek, Adam Pawlikowski, Anna Lubienska, Beata Tyszkiewicz
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(1) Actif de 1926 à 1933, Kwadryga est un groupe d’amis, membres du Cercle littéraire de l’Université de Varsovie, créé à l’initiative de Stanisław Dobrowolski (1907-1985). Leurs poèmes, très éclectiques, s’articulent autour des postulats de l’art socialisé, de la justice sociale et de la dignité de travail. Le groupe Żagary (1931-1934) réunit les étudiants de la faculté de belles lettres polonaises de l’Université de Vilnius dont Czesław Miłosz (1911-2004), Jerzy Putrament (1910-1986), Jerzy Zagórski (1907-1984) et (pendant un moment) Stanisław Mackiewicz (1896-1966). Ils recherchent un nouveau chemin poétique, en croyant comme les symbolistes et les romantiques avant eux, à la force des symboles. Leur poésie, remplie d’anxiété, est dominée par un pressentiment funeste de la guerre. La poésie de Miłosz est plus intellectuelle, philosophique, pleine d’élan, de métaphores et des visions de l’apocalypse, tandis que le radicalisme de Putrament le conduit droit au communisme. (extrait de Wikipédia)

Chambre commune (Wspólny pokój)Mieczyslaw Gajda et Gustaw Holoubek dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

Chambre commune (Wspólny pokój)Adam Pawlikowski et Zdzislaw Maklakiewicz dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

Chambre commune (Wspólny pokój)Beata Tyszkiewicz et Adam Pawlikowski dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

14 juillet 2023

La Corruption (1963) de Mauro Bolognini

Titre original : « La corruzione »

La Corruption (La corruzione)Après des études dans un pensionnat suisse, Stefano Mattioli, adolescent timide et sensible, se destine à la prêtrise par idéalisme. Mais son père, grand éditeur milanais, lui fait part de son souhait de le voir lui succéder à la tête de l’entreprise ; il va tout mettre en œuvre pour le faire changer d’avis…
La Corruption est un film franco-italien réalisé par Mauro Bolognini. L’histoire met en scène l’opposition entre les idéaux du jeune homme et le matérialisme de la société, personnalisé par son père. Bolognini dresse un portrait sans concession du consumérisme des années soixante. La critique manque de subtilité, les personnages sont typés, proches de la caricature. L’atmosphère est étrange : est-ce dû aux accords discordants de Giovanni Fusco, ou aux cadrages insolites de Leonida Barboni ? L’ensemble paraît irréel et superficiel. Un film qui me semble mineur dans la filmographie de Mauro Bolognini (mais visiblement tout le monde ne partage pas mon avis).
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Alain Cuny, Rosanna Schiaffino, Jacques Perrin, Isa Miranda
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La Corruption (La corruzione)Rosanna Schiaffino et Jacques Perrin dans La Corruption (La corruzione) de Mauro Bolognini.

3 juillet 2023

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (1965) de Wojciech Has

Titre original : « Rekopis znaleziony w Saragossie »

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Au début du XIXe siècle, en Espagne, pendant les guerres napoléoniennes, un officier français et un partisan espagnol réfugiés dans une auberge découvrent un vieux manuscrit qui, curieusement, relate l’histoire d’Alfonse van Worden, capitaine de la garde wallonne et grand-père de l’officier. Le récit commence alors qu’Alfonse cherchait un raccourci pour traverser une redoutable montagne : la Sierra Morena…
Le Manuscrit trouvé à Saragosse est un film polonais de 182 minutes réalisé par Wojciech Has. Il s’agit de l’adaptation du roman homonyme de Jan Potocki (1761-1815), aristocrate, savant et écrivain polonais. Ce roman, considéré comme une œuvre majeure de la littérature française (car Jan Potocki l’a écrit en français), était réputé inadaptable du fait de sa construction en roman à tiroirs. Il y a en effet plusieurs histoires imbriquées les unes dans les autres (un personnage raconte son histoire dans laquelle un autre personnage raconte une autre histoire) et l’on peut compter jusqu’à cinq niveaux de flashbacks. C’est un conte philosophique et fantastique, surréaliste, libertin, parfois horrifique. On y retrouve aussi le mythe du Juif errant. Le voyage du jeune capitaine prend la forme d’une épreuve initiatique. Le récit est particulièrement riche, surtout dans sa seconde moitié. Il aborde de nombreux thèmes : le Bien et le Mal, le désir, les fantasmes, les croyances. Wojciech Has l’a mis en scène de façon magnifique, avec une belle photographie et de subtils mouvements de caméra. Très original et puissant. L’ensemble évoque l’univers des films de Luis Buñuel qui d’ailleurs adorait le film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Zbigniew Cybulski, Iga Cembrzynska, Elzbieta Czyzewska, Gustaw Holoubek, Beata Tyszkiewicz
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Remarques :
* Le film donne envie de lire le roman qui n’a été découvert en France que tardivement. Il a fallu attendre 1958 pour une première publication en français (un quart environ du roman) et 1989 pour une version complète. Sa traduction polonaise fut publiée dans une version complète dès 1847.

* Jerry Garcia (Grateful Dead) avait adoré ce film à sa sortie. Il a commencé à financer sa restauration dans les années quatre-vingt dix en finançant l’achat de la seule copie sous-titrée connue au monde. Hélas, celle-ci s’est révélée être incomplète.  Martin Scorsese a poursuivi après sa mort, en rachetant la version personnelle de Wojciech Has pour la restaurer.

* A sa sortie, le film de 182 minutes fut réduit à 147 minutes aux Etats-Unis et à 127 minutes au Royaume-Uni.

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Iga Cembrzynska, Zbigniew Cybulski et Joanna Jedryka dans Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie) de Wojciech Has.

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Zbigniew Cybulski et Krzysztof Litwin dans Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie) de Wojciech Has.

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Zbigniew Cybulski  dans Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie) de Wojciech Has.

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Beata Tyszkiewicz dans Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie) de Wojciech Has.

Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie)Beata Tyszkiewicz et Krzysztof Litwin dans Le Manuscrit trouvé à Saragosse (Rekopis znaleziony w Saragossie) de Wojciech Has.

22 juin 2023

Un drôle de paroissien (1963) de Jean-Pierre Mocky

Un drôle de paroissienGeorges Lachaunaye appartient à une vieille famille aristocratique désargentée pour laquelle il n’est pas imaginable d’exercer un travail. Il faut cependant bien se nourrir. Fervent croyant, il se rend dans une église pour adresser une supplique au Seigneur. Il croit voir une réponse dans le geste d’une paroissienne qui met une pièce dans un tronc au même moment. Il va dès lors utiliser différents stratagèmes pour piller les troncs des églises parisiennes…
Un drôle de paroissien est un film français réalisé par Jean-Pierre Mocky, adaptation du roman Deo gratias de Michel Servin. Il s’agit d’une comédie assez farfelue avec une belle prestation de Bourvil, la première collaboration de l’acteur avec Jean-Pierre Mocky. Son personnage, naïf et persuadé de suivre une mission divine, est poursuivi par une brigade de police spécialisée, une véritable bande de pieds nickelés, menée par Francis Blanche. Tout le côté irrévérencieux de l’histoire est un peu émoussé aujourd’hui mais l’ensemble reste très amusant et plein de fraicheur. Le film connut un très grand succès à sa sortie.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Bourvil, Francis Blanche, Jean Poiret, Jean Tissier
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Un drôle de paroissienFrancis Blanche et Bourvil dans Un drôle de paroissien de Jean-Pierre Mocky.

Remarques :
* La scène du rêve est en couleurs alors que le reste du film est en noir et blanc. Jean-Pierre Mocky a expliqué que cette scène fut tournée après coup et ajoutée pour allonger le film de 1 h 19 à 1 h 23, afin de s’approcher du format minimum de 1 h 30 demandé par les exploitants de salles de l’époque.
* Jean-Pierre Mocky fait une courte apparition : c’est le clochard au landau.

19 juin 2023

Comanche Station (1960) de Budd Boetticher

Titre français (Belgique) : La prisonnière des comanches

Comanche StationJefferson Cody se rend chez les Indiens pour leur racheter une femme blanche qu’ils gardent captive. Celle-ci lui apprend se nommer Nancy Lowe. Sur le chemin du retour, ils sont rejoints par Ben Lane et ses deux hommes de main qui apprend à Mrs Lowe que son mari a promis 5 000 $ à quiconque la ramènerait chez lui. Bien que Jeff affirme ne pas avoir connaissance de cette récompense, elle n’en croit pas un mot et perd la gratitude qu’elle avait pour son sauveur…
Comanche Station est un film américain écrit par Burt Kennedy (futur réalisateur de westerns) et réalisé par Budd Boetticher. Il s’agit d’un western assez court (1h10), très simple dans son déroulement et son récit. S’il est simple, il est néanmoins très bien fait avec une belle utilisation des lieux (filmé dans les Alabama Hills en Californie) et seulement cinq personnages. Une tension s’installe rapidement et ne faiblit à aucun moment par la suite. Comme à son habitude, Randolph Scott manque de subtilité dans son jeu et sa prestation repose grandement sur son charisme. Comanche Station est un beau western. Budd Boetticher montre une fois de plus son grand savoir-faire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Randolph Scott, Nancy Gates, Claude Akins, Skip Homeier, Richard Rust
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Comanche StationNancy Gates, Randolph Scott et Claude Akins dans Comanche Station de Budd Boetticher.