7 juillet 2019

Tom of Finland (2017) de Dome Karukoski

Tom of FinlandDans les années 1940, pendant la guerre soviéto-finlandaise, Touko Valio Laaksonen multiplie les rencontres éphémères et fait la connaissance d’un officier, homosexuel comme lui. Démobilisé, il a beaucoup de mal à faire de nouvelles rencontres et projette ses fantasmes dans des dessins très suggestifs…
Le film de Dome Karukoski met en scène la trajectoire d’un dessinateur qui, sous le pseudonyme Tom of Finland, a « influencé la culture gay par ses représentations fantasmatiques et fétichistes d’hommes » (la formule est celle de Wikipédia). Le récit évoque les difficultés à rencontrer d’autres personnes homophiles à une époque où l’homosexualité était passible de prison puis les difficultés à faire éditer des dessins fétichistes dans les années soixante. Hélas, l’ensemble paraît assez terne et, finalement, nous n’apprenons que bien peu de choses que ce soit sur la vie de cet artiste de la contre-culture ou sur les personnes qui l’entourent.
Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Pekka Strang, Lauri Tilkanen, Jessica Grabowsky
Voir la fiche du film et la filmographie de Dome Karukoski sur le site IMDB.
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Tom of FinlandLauri Tilkanen, Jessica Grabowsky et Pekka Strang dans Tom of Finland de Dome Karukoski.

26 janvier 2019

Peppermint frappé (1967) de Carlos Saura

Peppermint FrappéJulián dirige une clinique de radiologie, assisté d’Ana, une infirmière timide. Un soir, il est invité chez un de ses amis d’enfance, Pablo, un aventurier qui vient de se marier avec Elena, une belle jeune femme blonde. Julián croit reconnaître en elle une mystérieuse femme qu’il a vue jouer du tambour lors de la Semaine sainte à Calanda…
Tourné après La Chasse, le premier long métrage d’importance de Carlos Saura, Peppermint frappé met de nouveau en scène les frustrations et fantasmes d’une bourgeoisie étouffée. Tourné sous la dictature de Franco, le film est chargé de symboles et d’allégories. L’atmosphère est puissante, chargée d’un fétichisme latent et marquée par une oscillation permanente entre réalité et fantasme. Le désir semble constamment vouloir poindre sous une indéfectible retenue. Tout cela crée un malaise léger, une sensation d’être en équilibre instable à l’instar de l’Espagne sous le joug de Franco. Carlos Saura vient de rencontrer Geraldine Chaplin et donne d’emblée un double rôle à celle qui deviendra sa compagne et sa muse pendant douze ans. Peppermint frappé a rencontré un certain succès, le premier pour Saura, et le film aurait probablement été récompensé à Cannes 1968 si le festival n’avait été annulé.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Geraldine Chaplin, José Luis López Vázquez, Alfredo Mayo
Voir la fiche du film et la filmographie de Carlos Saura sur le site IMDB.

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Voir les livres sur Carlos Saura

Remarque :
* La scène de la femme au tambour est située à Calanda. C’est de toute évidence un hommage à Luis Buñuel qui est originaire de cette ville. On retrouve d’ailleurs le rite de  La Route du tambour et de la grosse caisse (Ruta del tambor y el bombo) dans plusieurs films de Buñuel. A noter que ce n’est que dans les années 1980 (donc bien après ce film de Saura) que les femmes eurent le droit de jouer d’un instrument dans cette procession.

Peppermint frappé
Geraldine Chaplin (en blonde Elena) et José Luis López Vázquez dans Peppermint frappé de Carlos Saura.

Peppermint frappé
Geraldine Chaplin (en brune Ana) dans Peppermint frappé de Carlos Saura.

28 février 2012

Tourments (1953) de Luis Buñuel

Titre original : « El »

TourmentsEn pleine cérémonie du Jeudi saint dont il est l’un des officiants laïques, un quadragénaire de la haute société remarque une belle jeune femme qui éveille son désir. Il la suit et découvre qu’elle est fiancée à l’un de ses amis. Mais cela ne va pas l’arrêter pour autant… El est un film de la période mexicaine de Luis Buñuel assez comparable en thème et en qualité à La vie criminelle d’Archibald de la Cruz (1955). Librement inspiré d’un roman autobiographique de Mercedes Pinto, il s’agit d’un film psychologique montrant comment la jalousie extrême d’un homme va le conduire à l’impuissance et à la paranoïa (1). Le film est remarquable par le basculement en son milieu : alors que toute la première partie nous fait adopter le point de vue de l’homme prédateur, nous faisant partager son désir, la seconde partie nous fait adopter le point de vue de la femme, nous faisant partager ses souffrances (2). Si Buñuel mêle quelques piques habituelles au clergé et à la bourgeoisie, elles restent assez secondaires, le réalisateur apportant plus de soin à décrire les méandres psychologiques qui transforment le désir en névrose. La tension devient de plus en plus forte pour atteindre un certain paroxysme avec la superbe scène de la machine à écrire. La photographie de Gabriel Figueroa est très belle, les éclairages sont particulièrement travaillés et mettent en relief la beauté de Delia Garcés. El n’eut aucun succès à sa sortie que ce soit en France ou au Mexique (3). Ce n’est que plus tard qu’il sera reconnu comme l’un des tous meilleurs de Buñuel.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Arturo de Córdova, Delia Garcés, Manuel Dondé
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Remarque :
C’est Buñuel lui-même qui joue le rôle du personnage principal devenu franciscain, notamment dans cette fameuse scène ultime (et symbolique) où il s’éloigne en zigzag.

(1) Jacques Lacan a présenté le film à ses élèves à plusieurs reprises.
(2) Pour ce changement de point de vue (et aussi pour la scène du clocher), El a souvent été rapproché de Vertigo qu’Hitchcock tournera quelques années plus tard. Il est vrai que le climat général évoque de nombreux films d’Hitchcock et que Delia Garcés ne déparerait pas parmi les « beautés froides » qu’affectionnait le réalisateur anglais.
(3) Les critiques furent mauvaises. Buñuel raconte dans ses mémoires que Cocteau a déclaré qu’avec El, Buñuel s’était « suicidé ». Il ajoute que Cocteau a changé d’avis quelques années plus tard…

17 janvier 2012

Le journal d’une femme de chambre (1964) de Luis Buñuel

Le journal d'une femme de chambreDans les années vingt en Normandie, Célestine arrive de Paris pour être femme de chambre dans une grande demeure bourgeoise. Elle découvre les travers de chacun… Le journal d’une femme de chambre est le premier film de la dernière période française de Luis Buñuel, l’adaptation d’un roman d’Octave Mirbeau. Le journal d'une femme de chambre Il s’agit d’une peinture acerbe d’une bourgeoisie inutile et vieillissante doublée d’une petite diatribe contre l’extrême-droite avec quelques piques savoureuses contre la religion. Dans sa forme, le film est étonnamment plus sage et plus classique que ses films précédents. Une certaine description du quotidien forme l’ossature du film. Le journal d’une femme de chambre doit beaucoup à Jeanne Moreau, absolument parfaite dans ce personnage assez impénétrable, finalement très énigmatique.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jeanne Moreau, Georges Géret, Michel Piccoli, Françoise Lugagne, Jean Ozenne, Muni
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Remarques :
* A la fin du film, Luis Buñuel fait scander « Vive Chiappe ! » à la manifestation d’extrême-droite « contre les métèques ». Jean Chiappe fut un préfet de police ultraconservateur de la fin des années vingt. En 1930, il fit interdire l’Âge d’Or de Buñuel, interdiction de projection qui ne sera levée qu’en… 1981 !
* Ce film marque la première apparition de Muni (la servante un peu simplette) dans un film de Buñuel. Elle tournera également dans presque tous ses films ultérieurs. Comme le réalisateur le dit lui-meême, ce sera un peu sa mascotte.
* Le curé est interprété par Jean-Claude Carrière qui cosigne l’adaptation avec Buñuel. Là aussi, c’est une première collaboration mais pas la dernière.