6 septembre 2017

Quand la chair succombe (1962) de Mauro Bolognini

Titre original : « Senilità »

Quand la chair succombeA Trieste dans les années vingt, Emilio, un modeste employé de bureau âgé d’une quarantaine d’années, fait la rencontre de la jeune Angiolina dont la beauté le bouleverse. Emilio ne veut s’engager, préférant ne pas bousculer la vie qu’il mène avec sa sœur, solitaire comme lui… Senilità est l’adaptation du roman homonyme d’Italo Svevo. Qu’il s’agisse d’un roman autobiographique (Svevo avait alors 37 ans) témoigne d’une extraordinaire lucidité de son auteur dans le regard qu’il porte sur lui-même. La sénilité dont il est question dans le titre est celle de ce quarantenaire, éternel irrésolu, vieux avant d’avoir vécu. Le récit est assez fort, d’une belle profondeur (contrairement à ce que le titre français pourrait laisser croire). Des quatre acteurs principaux, seule Claudia Cardinale est italienne. Le film pâtit certainement de cette distribution cosmopolite et des doublages induits. La prestation de l’américain Anthony Franciosa n’exprime qu’imparfaitement la complexité de son personnage. La photographie est très belle, assez picturale. Bolignini nous livre un beau portrait de la ville de Trieste, brumeuse et pluvieuse. Senilità est un film sombre et assez remarquable, injustement méconnu.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Claudia Cardinale, Anthony Franciosa, Betsy Blair, Philippe Leroy
Voir la fiche du film et la filmographie de Mauro Bolognini sur le site IMDB.

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Remarque :
* Le film transpose le roman de Svevo dans les années 1920. Le réalisateur explique : « Le livre a été publié en 1898, cependant son édition définitive, très différente de la première, date de 1927. Le succès ne vint pas tout de suite, Svevo ne fut reconnu que dans les années vingt. […] Par ailleurs, il était plus facile de reconstituer la ville pour le tournage : retrouver la Trieste du XIXe siècle aurait été très dur. Le choix des années vingt fut à la fois technique et littéraire. » (Entretien avec Jean A. Gili, Rome décembre 1976 in : Le cinéma italien, UGE 10/18, Paris, 1978)
A noter que la ville de Trieste était encore autrichienne lorsque Svevo y a écrit son roman.
* Doublages :
Romolo Valli double Anthony Franciosa
Adriana Asti double Claudia Cardinale (!)
Lilla Brignone double Betsy Blair
Giuseppe Rinaldi double Philippe Leroy.

Senilità
Anthony Franciosa et Claudia Cardinale dans Senilità de Mauro Bolognini.

Senilità
Nadia Marlowa, Claudia Cardinale et Philippe Leroy dans Senilità de Mauro Bolognini.

Senilità
La ville de Trieste dans Senilità de Mauro Bolognini.

4 septembre 2017

Retour à l’aube (1938) de Henri Decoin

Retour à l'aubeA Thaya, en Hongrie, Anita vient d’épouser le chef de gare. Elle doit se rendre à Budapest pour assister à l’ouverture du testament d’un parent éloigné. Elle va y passer une nuit qui va la marquer à jamais… Après un intermède hollywoodien écourté (l’actrice s’y ennuyait), Danielle Darrieux revient en France. Cette histoire, tirée d’un roman de la romancière autrichienne Vicki Baum, se révèle parfaite pour elle et Henri Decoin va se surpasser pour mettre en valeur son épouse de 21 ans. Plus que tout autre, Retour à l’aube est le film qui révèle Danielle Darrieux en tant qu’actrice : il montre qu’elle peut faire beaucoup plus que porter des belles toilettes, chanter ou faire la moue. Certaines scènes, comme ses crises de nerfs dans le commissariat et la scène finale, prouvent qu’elle peut insuffler à elle seule une forte intensité dramatique dans une scène. Et son jeu est aussi beaucoup plus nuancé. De son côté, Henri Decoin a su profiter du séjour hollywoodien pour améliorer son sens du rythme et du découpage. Une belle réussite pour le metteur en scène et son actrice.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Danielle Darrieux, Pierre Dux, Jacques Dumesnil, Pierre Mingand, Raymond Cordy
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Remarque :
* Le tournage s’est entièrement déroulé en Hongrie.

Retour à l'aube
Pierre Dux et Danielle Darrieux dans Retour à l’aube de Henri Decoin.

Retour à l'aube
Pierre Mingand et Danielle Darrieux dans Retour à l’aube de Henri Decoin.

Retour à l'aube
Jacques Dumesnil et Danielle Darrieux dans Retour à l’aube de Henri Decoin.

Retour à l'aube
Samson Fainsilber, Danielle Darrieux et Louis Florencie dans Retour à l’aube de Henri Decoin.

2 septembre 2017

Les Patriotes (1994) de Eric Rochant

Les patriotesPar idéalisme, un jeune juif parisien de 18 ans décide de partir en Israël. Postulant pour entrer au Mossad, il est finalement recruté par un service indépendant appelé Unité 238. Il est envoyé en mission à Paris… Après le succès, aussi énorme qu’inattendu, d’Un monde sans pitié, Eric Rochant a pu bénéficier d’un budget très important pour tourner cette histoire d’espionnage qui détaille les méthodes impitoyables des services secrets. Le jeune réalisateur a visiblement été très inspiré par John Le Carré pour l’écrire. Le film démarre très bien mais s’essouffle ensuite par manque de rythme. Le restant du film se déroule mollement et paraît bien long ; nous regardons d’un œil presque distrait des évènements pourtant assez extraordinaires. Le film met en scène une fictive « unité 238 », unité sans aucun doute inspirée du « Lekem », service en marge du Mossad et spécialisé dans le renseignement scientifique ; ce service, dont l’existence fut longtemps tenue secrète même en Israël, fut officiellement supprimé en 1986 à la suite de l’affaire Pollard qui est très similaire à celle de Jeremy Pelman dans le film. Eric Rochant se concentre sur la mise en place de la manipulation des individus, plutôt que sur l’action ; en soi, ce n’est pas un problème, bien entendu, mais demanderait un personnage central plus fort. Ce n’est hélas pas le cas et Yvan Attal paraît bien fade. Les seconds rôles sont assez bien tenus ; c’est le premier grand rôle de Sandrine Kiberlain qui montre une belle présence. Le film fut un échec commercial.
Elle: 2 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Yvan Attal, Richard Masur, Yossi Banai, Nancy Allen, Maurice Bénichou, Sandrine Kiberlain, Bernard Le Coq, Jean-François Stévenin, Emmanuelle Devos
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Les Patriotes
Yvan Attal et Richard Masur dans Les patriotes de Eric Rochant.

Les Patriotes
Sandrine Kiberlain dans Les patriotes de Eric Rochant.

1 septembre 2017

La Rose et la flèche (1976) de Richard Lester

Titre original : « Robin and Marian »

La Rose et la flècheAprès la mort du roi Richard Cœur de Lion au siège du château de Châlus-Chabrol (près de Limoges), Robin des Bois et son fidèle Petit-Jean rejoignent l’Angleterre. Ils sont heureux de retrouver leur forêt de Sherwood après vingt années de croisade et de batailles. Ils découvrent que Marianne est devenue religieuse. Elle est sur le point d’être expatriée à la suite des démêlés entre le roi et le pape. Robin s’oppose à son arrestation par le shérif de Nottingham… La Rose et la flèche est un très beau film sur la fin d’un personnage légendaire. Il ne faut surtout pas s’attendre à voir un film classique de cape et d’épée. Le film est en réalité assez difficile à décrire. Le ton général est très mélancolique, élégiaque, avec une touche d’humour. On peut y voir en filigrane une réflexion sur les idéaux, l’âge, la constance. Mais le plus remarquable, à mes yeux, est la sensibilité dont fait preuve Richard Lester et aussi la profondeur des deux personnages joués par Sean Connery et Audrey Hepburn. Les deux acteurs font une très belle interprétation, délicate, empreinte d’une grande humanité. Le final est étonnant par la façon dont Lester y place une scène d’amour qu’il semble avoir constamment repoussée. La Rose et la flèche est un film qui mériterait d’être plus connu.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Audrey Hepburn, Robert Shaw, Richard Harris, Nicol Williamson
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Remarques :
* Richard Lester a 44 ans au moment du tournage, c’est-à-dire l’âge de ses personnages.
* Audrey Hepburn fait ici son retour sur les écrans après neuf ans d’interruption pour élever ses enfants.

La Rose et la Flèche
Audrey Hepburn et Sean Connery dans La Rose et la flèche de Richard Lester.