20 septembre 2010

Le récit du colonel (1907) de Louis Feuillade

Le récit du colonelLui :
(Muet, 4mn) Le récit du Colonel est une fantaisie particulièrement débridée. Lors d’un dîner mondain, un colonel se voit prié de raconter une bataille où il s’est illustré. Se laissant emporter par son récit, il commence à mimer l’action avec tant d’ardeur que la salle du dîner se retrouve rapidement mise à sac. Sur le plan cinématographique, il n’y a sans doute rien d’exceptionnel, la caméra reste en place, mais c’est le jeu des acteurs qui rend ce petit film vraiment très drôle : ils sursautent tout d’abord, ensuite la peur les gagne, puis la terreur… Leurs réactions sont parfaitement réglées ; une bonne troupe de comédiens. De plus, il est toujours amusant de voir que l’humour à cette époque pouvait aller assez loin dans l’absurde et même dans une certaine violence : la salle du dîner est en effet totalement dévastée.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Alice Tissot, Maurice Vinot, Renée Carl
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site IMDB.

Voir les autres films de Louis Feuillade chroniqués sur ce blog…

18 septembre 2010

The lonely villa (1909) de David W. Griffith

The Lonely VillaLui :
(Muet 8mn) Ce film a été parfois présenté comme le premier film de Mary Pickford. En réalité, il s’agit de son 10e film avec Griffith. Un gang de malfaiteurs éloigne un père de famille de son domicile pour pouvoir le dévaliser (et pire encore…) On retrouve donc ce thème cher à Griffith de la cellule familiale attaquée par des éléments extérieurs hostiles. Ici, c’est une mère et ses trois filles qui sont gravement en péril. L’aînée des filles est jouée par Mary Pickford, alors âgée de 17 ans. The Lonely Villa (La Villa Solitaire) ne fait sans doute pas partie des films les plus travaillés de Griffith mais montre sa manière de construire le suspense.
Note : 2 étoiles

Acteurs: David Miles, Marion Leonard, Mary Pickford, Gladys Egan
Voir la fiche du film et la filmographie de David W. Griffith sur le site IMDB.
Voir les autres films de David W. Griffith chroniqués sur ce blog…

Remarque :
L’un des malfaiteurs est joué par Owen Moore que Mary Pickford épousera quelques mois plus tard…

17 septembre 2010

L’orgie romaine (1911) de Louis Feuillade

HéliogabaleLui :
(Muet, 8 mn) Entre 1908 et 1913, Louis Feuillade a réalisé un certain nombre de petits films historiques et cette Orgie Romaine en est un bon exemple. En 218 après J.C., l’empereur romain Elagabal mène une vie décadente qui va se retourner contre lui. Précisons tout de suite que l’érotisme promis implicitement par le titre (si on le lit dans le sens moderne du terme) est totalement absent, les danseuses restent très habillées pendant la fameuse orgie. Cependant pour l’époque, la vision de cette vie de plaisirs avait de quoi choquer les esprits par ce qu’elle évoque et sous-entend… Le film est intéressant par ses costumes, nombreux et très travaillés, et aussi par l’utilisation de lions, d’abord dans une fosse où l’on jette un maladroit puis… en liberté dans la scène de l’orgie et donc sur le plateau(!) Etonnant. On peut noter aussi l’évidente cruauté de l’ensemble, même si les scènes dures se déroulent juste en dehors du champ de la caméra. A cette époque, le cinéma français (et aussi, dans une certaine mesure, italien) était bien en avance sur le cinéma américain, en particulier dans le genre du film historique.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean Aymé, Louise Lagrange, Luitz-Morat
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site IMDB.

Voir les autres films de Louis Feuillade chroniqués sur ce blog…

16 septembre 2010

Le coeur et l’argent (1912) de Louis Feuillade

Le coeur et l'argentLui :
(Muet, 18mn) Bien qu’elle soit amoureuse d’un jeune batelier sans le sou, une jeune femme accepte d’épouser un homme riche et âgé sous la pression de sa mère. Le Cœur et l’Argent présente quelques particularité intéressantes : il a été tournée presqu’entièrement en extérieurs en banlieue (qui était encore très champêtre à cette époque), l’image est assez travaillée dans sa composition, Suzanne Grandais dans Le coeur et l'argent il présente une belle utilisation de l’écran partagé (ou split-screen, certainement obtenu ici à l’aide d’une double exposition avec cache) et il nous montre la jeune et fraîche Suzanne Grandais âgée de 19 ans, actrice qui allait devenir une grande vedette avant de périr tragiquement, à l’âge de 27 ans, dans un accident automobile pendant un tournage.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Suzanne Grandais, Renée Carl, Paul Manson
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site IMDB.

Voir les autres films de Louis Feuillade chroniqués sur ce blog…

15 septembre 2010

Erreur tragique (1913) de Louis Feuillade

Erreur tragiqueLui :
(Muet, 24 mn) Un aristocrate est pris de jalousie meurtrière après avoir vu dans un film sa femme avec un autre homme. Erreur tragique donne l’impression de préfigurer la série des Fantômas : le moyen imaginé par le mari jaloux est assez machiavélique et l’acteur René Navarre sera Fantômas. Louis Feuillade joue ici plus sur l’atmosphère générale que sur le suspense proprement dit. Erreur tragique On remarquera l’originalité de mettre un film dans le film, ce qui nous permet de visualiser l’entrée d’un cinéma de l’époque (même s’il est reconstitué en studio). De même, nous voyons la taille d’une bobine de film (étonnamment petite).
Note : 3 étoiles

Acteurs: René Navarre, Suzanne Grandais, Paul Manson
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site IMDB.

Voir les autres films de Louis Feuillade chroniqués sur ce blog…

14 septembre 2010

Chéri (2009) de Stephen Frears

ChériLui :
Stephen Frears adapte l’un des romans les plus célèbres de Colette : Chéri. L’histoire est celle d’un amour fou, au tout début des années 1900, entre une ancienne courtisane et le jeune fils de l’une de ses amies et anciennes collègues. Bien que l’époque ne soit pas la même, il est impossible de ne pas penser aux Liaisons Dangereuses qu’il a adapté avec brio 20 ans auparavant. Le scénariste est d’ailleurs le même : Christopher Hampton. L’histoire en elle-même peut paraître assez classique, mais c’est son traitement qui est remarquable. La reconstitution du Paris de 1910 est un vrai délice visuel avec ses décors art nouveau et la caméra de Stephen Frears y compose des plans de toute beauté. Certains plans sont à couper le souffle. Michelle Pfeiffer montre beaucoup de charme et une très grande présence à l’écran. Face à elle, le jeune Rupert Friend donne une interprétation consistante de son personnage vide et tourmenté. Stephen Frears est un grand cinéaste : de Chéri émane une ampleur et surtout une élégance qui est de plus en plus rare dans le cinéma.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Michelle Pfeiffer, Rupert Friend, Kathy Bates, Iben Hjejle, Frances Tomelty
Voir la fiche du film et la filmographie de Stephen Frears sur le site IMDB.

Voir les autres films de Stephen Frears chroniqués sur ce blog…

Remarque :
La maison où habite le personnage joué par Michelle Pfeiffer est l’Hôtel Messara, sis au 60 rue de la Fontaine à Paris 16e, superbe maison de style Art Nouveau dessinée par Hector Guimard lui-même (le créateur des entrées du métropolitain). L’extérieur et l’intérieur sont de toute beauté.
Voir photos sur le site lartnouveau.com, 3 pages : Extérieurs, Façade et Intérieurs.

Autres adaptations du roman de Colette :
Chéri de Pierre Billon (1950) avec Jean Desailly et Marcelle Chantal
Chéri (TV) de François Chatel (1962) avec Jean-Claude Brialy et Madeleine Robinson.

13 septembre 2010

La troisième génération (1979) de Rainer Fassbinder

Titre original : « Die dritte Generation »

La troisième générationLui :
S’inscrivant dans la série de films de Fassbinder sur la société allemande, La troisième génération traite du terrorisme en cette fin des années soixante-dix, au travers d’une petite cellule d’une petite dizaine de personnes. Fassbinder ne mâche pas ses mots. Tout d’abord, il nous les montre comme des petits bourgeois, sans aucune conscience politique, uniquement attirés par l’excitation de l’action et du risque, ne représentant personne et même insensible au monde qui les entoure : la bande sonore est une superposition continuelle, en bruit de fond il y a toujours une télévision allumée ou une radio qui relate les grands évènements de la planète mais ils n’écoutent pas, totalement accaparés par leurs petites manigances (en plaçant, au début de chaque acte, un intertitre de graffitis obscènes relevés dans les toilettes publiques, Fassbinder montre de manière assez crue à quel niveau il place leurs préoccupations). Ensuite, son deuxième point est de montrer que ces aspirants-terroristes sont manipulés à leur insu par la police et le pouvoir en place. La Troisième Génération est donc un film très direct, Fassbinder ne prend pas de gants pour donner sa vision du terrorisme allemand post-Baader. La forme est très particulière avec notamment ce barrage sonore, les transitions brutales, une forme qui donne beaucoup de force au film.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Hanna Schygulla, Hark Bohm, Bulle Ogier, Margit Carstensen, Eddie Constantine, Udo Kier
Voir la fiche du film et la filmographie de Rainer Fassbinder sur le site IMDB.

Voir les autres films de Rainer Fassbinder chroniqués sur ce blog…

Sous-titre du film :
« Une comédie en six parties, pleine de tension, d’excitation et de logique, de cruauté et de folie, comme les contes (que l’on raconte aux enfants) pour les aider à supporter leur vie jusqu’à leur mort. »

11 septembre 2010

Le retour de Topper (1941) de Roy Del Ruth

Titre original : « Topper Returns »
Autre titre : « Qui est l’assassin? » (Belgique)

Le retour de TopperLui :
Le retour de Topper est le troisième et ultime film d’une série de comédies qui mettent en scène un quinquagénaire à la vie bien rangée face à des bienveillants fantômes. C’est peut-être le meilleur des trois, celui où l’humour par l’absurde est le plus développé. L’histoire est centrée sur une enquête policière dans un grand manoir où c’est le fantôme du mort lui-même qui demande à Cosmo Topper de l’aider à démasquer le coupable. L’ensemble est plaisant, doté de personnages bien typés (parfois un peu trop mais jamais « vraiment trop »). Joan Blondell est parfaite dans son personnage de jeune femme délurée et un peu impertinente : un personnage très américain… On ne s’ennuie pas une seule seconde avec ce divertissement léger car le rythme est bien enlevé. La série connut un grand succès à l’époque. Elle fut adaptée 15 ans plus tard à la télévision.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Joan Blondell, Roland Young, Carole Landis, Billie Burke, Dennis O’Keefe
Voir la fiche du film et la filmographie de Roy Del Ruth sur le site IMDB.

Voir les autres films de Roy Del Ruth chroniqués sur ce blog…

La série des Topper :
Le couple invisible (Topper) de Norman Z. McLeod (1937) avec Constance Bennett et Cary Grant
Fantômes en croisière (Topper takes a trip) de Norman Z. McLeod (1938) avec avec Constance Bennett
Le retour de Topper (Topper returns) de Roy del Ruth (1941)
Dans les trois films, Roland Young joue le rôle de Cosmo Topper et Billie Burke celui de sa femme (mais son personnage change de caractère, ici elle est complètement frivole).
Dans l’adaptation télévisée de 1955 pour CBS, c’est Leo G. Carroll qui interprète Cosmo Topper. Il y eut 39 épisodes de 30mn sur 2 saisons.

10 septembre 2010

L’honneur (1926) de Amo Bek-Nazaryan

Titre original : « Namous »

Namus Lui :
Dès sa création, le cinéma soviétique ne se limite pas au cinéma russe, il comprend aussi une bonne dizaine de courants nationaux. Amo Bek-Nazarov (ou Bek-Nazaryan) est considéré comme le fondateur du cinéma arménien. Un des cartons du générique de l’époque l’annonce fièrement : « Ceci est le premier film réalisé par les Maîtres du cinéma d’Arménie Soviétique ». L’honneur est l’adaptation d’un roman d’Alexandre Shirvanzade : Namus au XIXe siècle, Susanna est promise à Sejran, son ami d’enfance. Les deux jeunes gens ne doivent pas se voir avant le mariage mais ils bravent l’interdiction. Ils violent ainsi le namous (code d’honneur). Se considérant comme déshonoré, le père donne Susanna en mariage à un riche négociant. L’Honneur est donc un film sur le poids des traditions : Bek-Nazarov en présente le mauvais côté, ce carcan étouffant et même mortel, mais aussi le bon côté, par exemple quand il s’agit des traditions culinaires ou des réjouissances lors du mariage. Il faut bien reconnaître que le film n’est pas au niveau des meilleurs films de l’époque, le cadrage est très statique, les acteurs ont un jeu un peu appuyé mais, néanmoins, L’Honneur reste intéressant sur le plan historique, à la fois dans le domaine du cinéma comme témoin de la pluralité du cinéma soviétique renaissant et aussi dans le domaine de l’Histoire en tant que témoin des traditions de l’Arménie des XVIIIe et XIXe siècles.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Hovhannes Abelyan, Hrachia Nersisyan, Samvel Mkrtchyan
Voir la fiche du film et la filmographie de Amo Bek-Nazaryan sur le site IMDB.

8 septembre 2010

Sparrows (1926) de William Beaudine

Titre français parfois utilisé : « Moineaux »

SparrowsLui :
(Film muet) Sparrows est probablement le plus beau film de Mary Pickford, celui où son interprétation force le plus l’admiration. A 33 ans, elle n’a aucun problème pour jouer une fillette de 15 ans, sa petite taille et son visage poupon aidant certainement mais c’est surtout grâce à sa capacité d’exprimer avec force et naturel toute une gamme de sentiments qu’elle y parvient. L’histoire est assez terrifiante, à classer dans le genre des contes d’horreur pour enfants : dans une ferme isolée entourée de marais boueux infestés de crocodiles, une dizaine d’enfants sont retenus prisonniers par un couple de fermiers cruels. Ils doivent travailler dans des conditions de misère extrême. Molly, la plus âgée des enfants, tente de protéger les plus petits du mieux qu’elle peut. L’atmosphère de Sparrows, assez lourde, à la Dickens, est admirablement rendue, sans excès mais avec force. Le thème a souvent été comparé aussi à celui de La Nuit du Chasseur. Malgré la situation oppressante, Mary Pickford parvient à distiller beaucoup de fraîcheur et même des notes d’humour, donnant ainsi au film tout son équilibre et son charme. Sparrows Face à elle, Gustav von Seyffertitz est tout aussi remarquable dans le terrifiant Mr Grimes : c’est la méchanceté personnifiée. La première partie du film met en place la situation et le rythme s’accélère ensuite, le passage dans les marais étant particulièrement intense ; il est difficile de ne pas se cramponner au fauteuil. Seule la scène de la poursuite en bateau est plus faible du fait des maquettes utilisées. Sparrows a dérouté la Critique de l’époque, Mary Pickford jouant sur un registre un peu différent de ses films précédents. Le film ne fut qu’un demi-succès. Pourtant, il peut encore nous faire vibrer et palpiter 80 ans plus tard. Un très beau film (à déconseiller toutefois aux petits n’enfants…)
Note : 5 étoiles

Acteurs: Mary Pickford, Gustav von Seyffertitz, Roy Stewart, Charlotte Mineau
Voir la fiche du film et la filmographie de William Beaudine sur le site IMDB.

Voir aussi : Photos avant/après de la construction du décor

Remarques :
Sparrows * Douglas Fairbanks (mari de Mary Pickford) aurait pris à parti le réalisateur du fait des risques insensés qu’il faisait prendre à l’actrice : les crocodiles auraient été bien trop proches lors du tournage de certaines scènes et, de plus, Mary Pickford tenait dans ses bras un vrai enfant. Devant la colère de Fairbanks, le réalisateur aurait quitté définitivement le tournage.
Cette version des faits, rapportée par certains excellents historiens, est toutefois contestée par d’autres qui affirment que cette histoire a été inventée de toutes pièces par Mary Pickford pour la promotion du film : les alligators ont été ajoutés par surimpression et l’enfant était un mannequin dans certaines scènes.
Toujours est-il que William Beaudine a effectivement quitté le tournage de Sparrows avant la fin. Le film a été terminé par l’assistant-réalisateur : Tom McNamara. Il faut préciser que les tensions entre Beaudine et Mary Pickford, tous deux au sommet de leur popularité (et donc peu enclins à se laisser dicter leur conduite), ont été très fortes pendant tout le tournage.

* Il existait bien des baby farms à cette époque, fermes isolées où des enfants étaient retenus prisonniers. Ces enfants étaient souvent des orphelins. Les baby farms étaient également liées aux rapts d’enfants, alors bien plus fréquents qu’à notre époque.