18 novembre 2018

La Pagode en flammes (1942) de Henry Hathaway

Titre original : « China Girl »

La Pagode en flammes1941. Dans la Chine envahie par les japonais, un journaliste américain, retenu prisonnier par les militaires japonais, parvient à s’échapper avec l’aide de deux de ses compatriotes. Ils se rendent en Birmanie qui sert de base pour des raids contre l’occupant…
Sur un scénario de Ben Hecht et Darryl F. Zanuck, China Girl a été tourné après l’attaque de Pearl Harbour et se révèle donc être un film très manichéen : les japonais sont fourbes et cruels tandis que les chinois sont aidés par des américains volontaires et bienveillants, l’escadrille Flying Tigers (qui a réellement existé). L’intrigue est toutefois assez élaborée, surtout comparée à celle des films de propagande de la même période, mais l’on remarque l’introduction de plusieurs éléments qui ne sont pas exploités (par exemple, le carnet). L’atmosphère est bien restituée, trouble avec des beaux jeux de lumières dans le grand hôtel. Parmi les premiers films de Gene Tierney, China Girl n’est pas le plus connu et cité. L’actrice y interprète une fois de plus le rôle d’une chinoise. Il émane une grande douceur de son jeu. Lynn Bari est, elle aussi, assez remarquable. Ces deux actrices rendent le film intéressant à découvrir.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Gene Tierney, George Montgomery, Lynn Bari, Victor McLaglen
Voir la fiche du film et la filmographie de Henry Hathaway sur le site IMDB.

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Remarque :
* Bizarrement, les soldats japonais portent des casques allemands…

China Girl
Gene Tierney et George Montgomery dans La Pagode en flammes de Henry Hathaway.

1 août 2017

Gunga Din (1939) de George Stevens

Gunga DinA la frontière nord de l’Inde, aux alentours de 1880, l’armée britannique est harcelée par les Thugs qui sabotent leurs installations et pillent les villages. Trois sergents, bagarreurs et amis de longue date, sont chargés d’aller les attaquer avec un petit détachement au sein duquel figure un porteur d’eau indien appelé Gunga Din… Avec l’intention de reproduire l’énorme succès des Trois Lanciers du Bengale (Paramount, 1935), la RKO acquiert dès 1936 les droits sur le poème de Kipling, Gunga Din. L’histoire de base a été écrite par Ben Hecht et Charles MacArthur. Le film est empreint de ce colonialisme primaire caractéristique des années trente mais ce n’est pas pour cette raison qu’il déçoit. Tout d’abord, le mélange de genres paraît bien mal dosé : de l’aventure, des batailles et un humour sans finesse. Les acteurs, visiblement en roue libre, cabotinent et sont hilares y compris dans les situations les plus dramatiques, ce qui leur enlève toute intensité. Ensuite, Georges Stevens n’est indéniablement pas très l’aise dans le film de guerre (ce sera sa seule incursion dans le genre) et l’ensemble manque de rythme et de caractère épique. Enfin faire passer Cary Grant pour un anglais semble possible (après tout, il l’est… ou, au moins, l’était) mais pour Victor McLaglen, c’est franchement « mission impossible » (et pourtant il l’est aussi!) et le film n’essaie même pas : tous ces « britanniques » font très américains. Le mauvais goût culmine avec l’apparition de Kipling dans l’épilogue (la famille de l’écrivain a obtenu que la scène soit retirée dans certaines versions). Le succès fut très important et, bizarrement, le film continue d’être tenu en assez haute estime aujourd’hui.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Cary Grant, Victor McLaglen, Douglas Fairbanks Jr., Sam Jaffe, Eduardo Ciannelli, Joan Fontaine
Voir la fiche du film et la filmographie de George Stevens sur le site IMDB.

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Gunga Din
Cary Grant, Victor McLaglen et Douglas Fairbanks Jr. dans Gunga Din de George Stevens.

Gunga Din
Cary Grant et Sam Jaffe dans Gunga Din de George Stevens.

Remarques :
* Le projet fut d’abord confié à Howard Hawks mais la RKO mais, après le fiasco de Bringing Up Baby, il sera écarté au profit de Georges Stevens. Hawks était également jugé trop lent (donc couteux) mais, au final, Stevens fut encore plus lent que Hawks et Gunga Din fut alors la production la plus coûteuse pour la RKO.
* William Faulkner aurait travaillé sur le scénario.
* Blake Edwards parodie Gunga Din dans la scène d’ouverture de La Party (1969) avec Peter Sellers grimé en indien comme l’est ici Sam Jaffe.
* Remake :
Les 3 Sergents (Sergeants 3) de John Sturges (1962) avec Frank Sinatra, Dean Martin et Sammy Davis Jr., la même histoire transposée dans l’Ouest américain.

21 décembre 2014

Le Mouchard (1935) de John Ford

Titre original : « The Informer »

Le mouchardDans l’Irlande des années 20 sous domination anglaise, Gypo Nolan vit misérablement et rêve de pouvoir impressionner Katie qui désire tant partir en Amérique. Il est ami avec Frankie qui appartient à l’Armée Républicaine clandestine et dont la tête est mise à prix… Il n’est guère surprenant que John Ford ait eu des difficultés à faire accepter cette adaptation d’un roman de Liam O’Flaherty (1). Pour réaliser cette oeuvre anti-commerciale par excellence, John Ford n’eut finalement droit qu’à un plateau de second ordre, un « couloir » dont l’état de vétusté l’obligea à utiliser beaucoup de brouillard. Il demanda à son directeur de la photographie Joseph August de lui donner des tonalités similaires à celle de L’Aurore de Murnau. John Ford donne à cette histoire d’une belle simplicité une très grande force. Victor McLaglen a ici une présence phénoménale. Après des débuts difficiles, le film connut un grand succès et rafla quatre Oscars.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Victor McLaglen, Heather Angel, Preston Foster, Wallace Ford
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Remarques :
* Anecdote célèbre rapportée par Robert Parrish (qui fut figurant et assistant-monteur sur ce film) :
Le premier jour de tournage, John Ford fit réunir toute l’équipe pour présenter le producteur délégué : « Le monsieur que voici est un producteur délégué ». Il lui fit doucement tourner la tête pour que tout le monde puisse le voir de face et de profil. « Regardez-le bien parce que vous ne le reverrez plus sur le plateau d’ici la fin du tournage ! ». Et il serra la main du producteur en lui disant : « Merci d’être venu, Cliff ! Nous nous reverrons au moment des rushes. » (in J’ai grandi à Hollywood de Robert Parrish, Stock 1980). A noter que le producteur en question est Cliff Reid.

* Autre anecdote tout aussi célèbre :
Lorsque, le dernier jour, le même producteur vint sur le plateau pour dire sa satisfaction que le tournage soit fini dans les temps et, chose très imprudente, qu’il trouvait les derniers rushes de la scène de l’interrogatoire fantastiques, John Ford (qui, lui, n’avait pas encore regardé les rushes en question) fit revenir l’équipe : « Ce n’est pas fini : on refait la scène de l’interrogatoire ! » Et le tournage dura deux jours de plus.

* On peut noter l’utilisation ponctuelle de la caméra subjective.

* Précision : 1 livre de 1920 équivaut environ à 50 euros actuel, ce qui met par exemple le prix de la traversée (10 £) à 500 euros.

Précédente adaptation :
The Informer de Arthur Robison (1929) avec Lars Hanson, film anglais mi-muet, mi-parlant.
Remake :
Point noir (Uptight) de Jules Dassin (1968) avec Raymond St. Jacques, l’histoire étant transposée dans le milieu des militants révolutionnaires noirs.

(1) Le film a finalement été financé par Joe Kennedy, le père du futur président, pour la RKO qui pensait que le film pouvait faire office d’oeuvre de prestige.

The Informer de John Ford
Victor McLaglen est le mouchard dans le film The Informer de John Ford.