7 octobre 2018

L’évasion de Baruch (1923) de Ewald André Dupont

Titre original : « Das alte Gesetz »

L'évasion de BaruchEn 1860, dans un village juif de Galicie, isolé à la frontière occidentale de l’empire russe, le jeune Baruch se découvre une passion pour le théâtre et rêve de partir à Vienne. Son père, rabbin rigoriste, refuse catégoriquement cette idée totalement contraire aux préceptes de la religion juive…
L’allemand Ewald André Dupont fut l’un des tous premiers critiques de cinéma allemands avant de devenir scénariste puis réalisateur en 1917. C’est avec L’évasion de Baruch qu’il se fera remarquer en 1923 (et aussi avec Variétés, deux ans plus tard). L’histoire est basée sur les mémoires d’Heinrich Laube (1806-1884), dramaturge et directeur de théâtre. Dans son premier tiers, L’évasion de Baruch décrit les coutumes et traditions juives orthodoxes, sans aucune caricature. Par l’ensemble de son film, le réalisateur, lui-même né dans une famille juive, vante les mérites de l’assimilation. L’histoire peut sembler assez classique à nos yeux modernes mais il s’en dégage une grande authenticité. La photographie de Theodor Sparkuhl est assez belle, subtile même : pas d’ombres marquées, la palette est pleine de nuances et de clairs-obscurs. Le film fut un très grand succès à sa sortie. (film muet)
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Henny Porten, Ernst Deutsch, Werner Krauss, Jakob Tiedtke
Voir la fiche du film et la filmographie de Ewald André Dupont sur le site IMDB.

L'évasion de Baruch
Margarete Schlegel et Ernst Deutsch dans L’évasion de Baruch de Ewald André Dupont.

Remarques :
* Le film a longtemps été visible de façon incomplète (sans les intertitres). Lors de la 68e Berlinale, la version restaurée de ce film a été présentée le 16 février 2018, en première mondiale, sous le contrôle de la Deutsche Kinemathek, et avec une musique nouvelle composée par Philippe Schoeller sur une commande de ZDF/ARTE et interprétée par l’Orchester Jakobsplatz München dirigé par Daniel Grossmann.

* La scène de l’audition est assez remarquable : E.A. Dupont nous montre non pas l’acteur-postulant mais les réactions du directeur alors qu’il boit une tasse de thé. C’est un procédé assez nouveau pour l’époque et qui fonctionne ici merveilleusement bien.

L'évasion de Baruch
Henny Porten et Ernst Deutsch dans L’évasion de Baruch de Ewald André Dupont.

21 décembre 2015

Tartuffe (1925) de F.W. Murnau

Titre original : « Herr Tartüff »

Tartuffe(Film muet) Un vieillard riche vit avec sa gouvernante qui lorgne sur sa fortune : elle réussit à faire déshériter son petit-fils qui, pour confondre l’intrigante, organise une projection privée du Tartuffe de Molière… Placer ainsi un film dans le film était un procédé très rare à l’époque : le prologue et l’épilogue se situent donc à la période actuelle avec une image plutôt moderne, des angles de vue innovants et une absence de maquillage des acteurs, alors que le corps du film est situé au XVIIe siècle, avec une image plus classique, adoucie par un flou artistique (ce sont les propres mots employés par l’opérateur Karl Freund interviewé en 1928). Murnau a beaucoup simplifié la pièce de Molière, ne conservant que quatre personnages principaux, mais il en garde bien l’esprit : il s’agit de fustiger l’hypocrisie et la fausse dévotion sur un fond de mise en relief des différences sociales. Les éclairages sont assez travaillés et les très gros plans nombreux. Pour compenser la dramatique réduction des dialogues, Emil Jannings a un jeu très expressif et son interprétation grimaçante de Tartuffe le rend plus inquiétant que ridicule. Du fait de ses connotations anticléricales, le film avait été amputé d’une dizaine de minutes dans sa version américaine. Il a été récemment restauré.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Emil Jannings, Werner Krauss, Lil Dagover
Voir la fiche du film et la filmographie de F.W. Murnau sur le site IMDB.

Voir les autres films de F.W. Murnau chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur F.W. Murnau

Tartuffe
Emil Jannings et Lil Dagover dans Tartuffe de F.W. Murnau

 

21 janvier 2008

Le Cabinet du Docteur Caligari (1919) de Robert Wiene

Titre original : « Das Kabinett des Doktor Caligari »

Le Cabinet du Dr CaligariLui :
Film-manifeste de l’expressionnisme allemand, Le Cabinet du Docteur Caligari tient une place à part dans l’histoire du cinéma. Ce sont bien entendu les décors qui frappèrent en premier les spectateurs : maisons de travers, rues tordues, aucun angle droit dans l’architecture… Ces décors, tout en tentures peintes, sont l’œuvre d’un groupe de peintres expressionnistes Der Sturm qui professait que « les films doivent être des dessins vivants ». Effectivement, nous avons l’impression d’être coupés de la réalité, d’être transportés ailleurs et cette sensation accentue l’étrangeté du récit et le déséquilibre mental du narrateur. La force des décors ne doit pas faire passer au second plan toute la portée du scénario de Carl Mayer et Hans Janowitz. Maintes fois qualifié de visionnaire, ce scénario (écrit juste au lendemain de la guerre de 14-18) fustige l’autoritarisme, celui qui transforme les hommes en automate : certains historiens du cinéma y ont vu une prédiction de la montée du nazisme. Le jeu des acteurs, quant à lui, passe assez nettement au second plan. Le Cabinet du Dr Caligari Sans doute, on peut regretter sur ce point que la réalisation fut confiée à un cinéaste de moyenne envergure (alors qu’initialement, le film devait être tourné par Fritz Lang qui se retira assez rapidement, hélas). Le Cabinet du Docteur Caligari reste remarquable à visionner 90 ans plus tard, le plus bel exemple de l’expressionnisme allemand au cinéma.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Werner Krauss, Conrad Veidt, Friedrich Feher, Lil Dagover
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Wiene sur le site imdb.com.

Le Cabinet du Docteur Caligari eut un remake (peu réussi, plutôt une transposition de l’histoire) : The cabinet of Caligari (1962) de Roger Kay.
Une parodie aurait été réalisée en 1930 : Das Kabinett des Dr. Larifari de Robert Wohlmuth.