3 septembre 2020

La Guerre du feu (1981) de Jean-Jacques Annaud

La Guerre du feuIl y a 80 000 ans, au Paléolithique, la tribu des Oulhamr est attaquée par une tribu de néanderthaliens (?) simiesques. Dans leur fuite, ils perdent les quelques braises qu’ils conservaient précieusement. Trois d’entre eux partent à la recherche du feu et vont faire des rencontres inattendues dans leur quête…
La Guerre du feu est un film d’aventure préhistorique adapté du roman homonyme écrit en 1909 par J.-H. Rosny aîné. Bien que revendiquée à sa sortie, la proximité avec les connaissances scientifiques n’est pas le point fort du film. Il condense des évolutions qui se sont étalées sur des dizaines, voire des centaines, de milliers d’années (procédé scénaristique compréhensible), fait coexister différents types d’humanoïdes de périodes différentes et le propos se calque plus sur l’imagerie populaire que sur les connaissances scientifiques (même la possession du feu ne semble plus aujourd’hui être un paramètre si important de l’évolution). Mais l’élément le plus remarquable du film est dans sa forme : il n’y a aucune parole compréhensible, tout est suggéré par le comportement des personnages pour mettre en avant quelques sentiments primaires, tels la peur, la défense, la faim ou l’amour. Ce dernier sentiment peut faire sourire parfois, mais nous sommes ici dans une fiction destinée à un public large et ces ressorts scénaristiques sont excusables (du moins courants). A sa sortie, le film connut un très grand succès et a engendré un certain engouement pour la Préhistoire. Sur le plan cinématographique, il est assez remarquable par sa forme.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Everett McGill, Ron Perlman, Nicholas Kadi
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean-Jacques Annaud sur le site IMDB.

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Remarques :
* Le langage Oulhamr parlé par les membres des trois tribus d’Homo sapiens a été inventé par l’écrivain, musicien et linguiste britannique Anthony Burgess (surtout connu pour être l’auteur du roman L’Orange mécanique). Les dialogues du film sont conçus à partir d’une langue inventée par Burgess réunissant l’anglais, le français, l’italien, le portugais…
* Importante dans le déroulement du récit pour renforcer l’atmosphère et les sentiments suggérés, la musique a été composée par Philippe Sarde.
* Le film a été tourné au Canada, en Ecosse et au Kenya.

 La Guerre du feuRon Perlman, Nicholas Kadi et Everett McGill dans La Guerre du feu de Jean-Jacques Annaud.

5 décembre 2019

ZOO (1985) de Peter Greenaway

Titre original : « A Zed and Two Noughts »

Zoo (A Zed & Two Noughts)Un grand cygne blanc provoque un accident aux portes du zoo de Rotterdam. Les épouses de deux frères zoologistes y ont trouvé la mort. La conductrice a survécu mais a perdu une jambe. Grâce à une femme, Venus de Milo, les deux frères vont se rapprocher l’un de l’autre…
Ecrit et réalisé par Peter Greenaway, ZOO (un Z et deux zéros) est d’une richesse étonnante : références mythologiques (1), la Genèse, la théorie de l’évolution de Darwin, l’exploration de phénomènes naturels viennent alimenter une réflexion à la fois scientifique et philosophique, avec un regard sur le traumatisme de la mort (et une fascination presque morbide de la décomposition des corps). Certains leitmotivs viennent se superposer : l’alphabet, la symétrie, le double. Graphiquement, on retrouve fréquemment les rayures noir et blanc, motif du zèbre, et surtout l’attrait pour les tableaux de Vermeer. La photographie est très belle. Peter Greenaway travaille pour la première fois avec le chef-opérateur Sacha Vierny, complice habituel d’Alain Resnais ; il deviendra son directeur de la photographie attitré. La musique de Michael Nyman est superbe. Toutes ces recherches esthétiques et philosophiques pourront paraître apprêtées à certains spectateurs tandis que d’autres apprécieront cette œuvre filmique qui joue sur nos sens et sur notre esprit. On notera la belle et étonnante prestation d’Andréa Ferréol.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Andréa Ferréol, Brian Deacon, Eric Deacon, Frances Barber, Joss Ackland
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Zoo (A Zed & Two Noughts)Eric Deacon, Andréa Ferréol, Brian Deacon et, au premier plan, Agnes Brulet dans ZOO (A Zed & Two Noughts) de Peter Greenaway.

(1) Dans la mythologie grecque, Leda donne naissance aux jumeaux Castor et Pollux après avoir été séduit par Zeus sous la forme d’un cygne.
(Dans une autre version, Léda conçut deux enfants, Hélène et Pollux, qui naquirent dans un œuf, alors que Clytemnestre et Castor, enfants de son mari Tyndare, naquirent dans un autre œuf).

21 janvier 2017

Phase IV (1974) de Saul Bass

Phase IVUn scientifique anglais découvre que certaines colonies de fourmis dans le désert de l’Arizona ont un comportement étrange et construisent des structures inhabituelles. Avec un spécialiste du langage, ils s’enferment dans une bulle-laboratoire à proximité pour observer leur comportement… Saul Bass est surtout connu pour ses très beaux génériques graphiques (Hitchcock, Preminger, etc.) mais il a aussi réalisé un (unique) film assez hors du commun. On pourrait décrire Phase IV comme l’improbable croisement entre Les Oiseaux d’Hitchcock et 2001 de Kubrick. Avec le premier, il partage le thème de l’animal inoffensif qui se retourne contre l’homme ; avec le second, il partage l’idée que l’homme pourrait bien ne pas être la phase ultime de l’évolution. Hormis une influence cosmique juste évoquée et donc la présence d’une intelligence supérieure, le film ne développe aucune explication fumeuse, ni ne cherche à culpabiliser l’homme. Il décrit et illustre un processus. Saul Bass utilise beaucoup les gros plans pour créer des images très graphiques et donne une bonne place aux images de fourmis filmées en macro par le photographe animalier Ken Middleham. Film étrange, parfois maladroit, Phase IV est presque un film expérimental ; la fin prévue initialement prévue par Saul Bass (voir ci-dessous) allait en ce sens. Elle aurait donné une dimension supplémentaire au film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Nigel Davenport, Michael Murphy, Lynne Frederick
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Remarques :
* Ken Middleham avait déjà filmé les images d’insectes pour la fiction documentaire The Hellstrom Chronicle (Des insectes et des hommes), écrit par David Seltzer et dirigé par Walon Green en 1971. Ce film partage avec Phase IV l’idée que les insectes nous survivront du fait de leur plus grande adaptabilité.

* De façon assez paradoxale, l’artiste du générique Saul Bass n’a pas fait de générique de début à son propre film. Et même le logo Paramount n’apparaît pas.

* En 2012, une copie de la fin originalement prévue par Saul Bass (et coupée par la Paramount) a été retrouvée. Elle prolonge la scène de fin de quelque 4 minutes, montrant avec beaucoup de lyrisme et de recherches graphiques, le prolongement de l’évolution de l’homme. Assez étonnant. Elle a été projetée dans quelques salles aux Etats-Unis. Elle est visible sur YouTube.

Phase IV

Phase IV

Phase IV
Michael Murphy dans Phase IV de Saul Bass.

Homonyme (sans lien avec le présent film) :
Phase IV (2002), un thriller réalisé par le canadien Bryan Goeres.