5 novembre 2020

The Pillow Book (1996) de Peter Greenaway

The Pillow BookEn souvenir de son père qui calligraphiait son visage à chacun de ses anniversaires, la jeune japonaise Nagiko n’a de cesse de chercher l’amant idéal qui saura écrire sur son corps. Après plusieurs échecs, elle fait la rencontre d’un jeune traducteur anglais qui la convainc d’être le pinceau plutôt que le papier…
Ecrit et réalisé par Peter Greenaway, The Pillow Book est une ode au corps et à l’écriture. Le cinéaste anglais fait montre d’une belle inventivité, montrant autant d’intérêt au langage cinématographique que ses personnages à la calligraphie. Il utilise ainsi différents formats d’écran, incrustations, images dans l’image, sous-titres et autres raffinements. Le film a ainsi une indéniable beauté formelle et même une élégance qui sied parfaitement à son sujet. L’ensemble forme une œuvre originale, séduisante par son audace.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Vivian Wu, Yoshi Oida, Ken Ogata, Ewan McGregor
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Remarque :
* Le titre du film se réfère à l’oeuvre Notes de chevet, une œuvre majeure de la littérature japonaise du XIe siècle, attribuée à Sei Shōnagon dame de compagnie de l’impératrice consort Teishi durant les années 990 et au début du XIe siècle de l’époque de Heian. Ce n’est pas toutefois une adaptation : ce recueil de sentiments et de poésie est simplement lu par la mère à sa fille.

The Pillow BookVivian Wu dans The Pillow Book de Peter Greenaway.

The Pillow BookEwan McGregor et Vivian Wu dans The Pillow Book de Peter Greenaway.

5 décembre 2019

ZOO (1985) de Peter Greenaway

Titre original : « A Zed and Two Noughts »

Zoo (A Zed & Two Noughts)Un grand cygne blanc provoque un accident aux portes du zoo de Rotterdam. Les épouses de deux frères zoologistes y ont trouvé la mort. La conductrice a survécu mais a perdu une jambe. Grâce à une femme, Venus de Milo, les deux frères vont se rapprocher l’un de l’autre…
Ecrit et réalisé par Peter Greenaway, ZOO (un Z et deux zéros) est d’une richesse étonnante : références mythologiques (1), la Genèse, la théorie de l’évolution de Darwin, l’exploration de phénomènes naturels viennent alimenter une réflexion à la fois scientifique et philosophique, avec un regard sur le traumatisme de la mort (et une fascination presque morbide de la décomposition des corps). Certains leitmotivs viennent se superposer : l’alphabet, la symétrie, le double. Graphiquement, on retrouve fréquemment les rayures noir et blanc, motif du zèbre, et surtout l’attrait pour les tableaux de Vermeer. La photographie est très belle. Peter Greenaway travaille pour la première fois avec le chef-opérateur Sacha Vierny, complice habituel d’Alain Resnais ; il deviendra son directeur de la photographie attitré. La musique de Michael Nyman est superbe. Toutes ces recherches esthétiques et philosophiques pourront paraître apprêtées à certains spectateurs tandis que d’autres apprécieront cette œuvre filmique qui joue sur nos sens et sur notre esprit. On notera la belle et étonnante prestation d’Andréa Ferréol.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Andréa Ferréol, Brian Deacon, Eric Deacon, Frances Barber, Joss Ackland
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Zoo (A Zed & Two Noughts)Eric Deacon, Andréa Ferréol, Brian Deacon et, au premier plan, Agnes Brulet dans ZOO (A Zed & Two Noughts) de Peter Greenaway.

(1) Dans la mythologie grecque, Leda donne naissance aux jumeaux Castor et Pollux après avoir été séduit par Zeus sous la forme d’un cygne.
(Dans une autre version, Léda conçut deux enfants, Hélène et Pollux, qui naquirent dans un œuf, alors que Clytemnestre et Castor, enfants de son mari Tyndare, naquirent dans un autre œuf).

13 juin 2016

Que viva Eisenstein! (2015) de Peter Greenaway

Titre original : « Eisenstein in Guanajuato »

Que viva Eisenstein!Quand on connait la passion de Peter Greenaway pour Eisenstein, on ne peut que se réjouir à l’avance de visionner son Que viva Eisenstein! qui nous fait revivre l’escapade américaine puis mexicaine du réalisateur russe au tout début des années trente. Hélas, Peter Greenaway s’est laissé un peu emporter par son sujet, enfin plutôt par sa marotte : nous (dé)montrer que Eisenstein est homosexuel. Du tournage du film inachevé Que Viva Mexico!, on ne saura donc pratiquement rien (on en oublierait presque qu’il est cinéaste), tout le récit est centré sur la relation d’Eisenstein avec son guide mexicain qui lui fait découvrir l’amour physique. Dès les premières minutes, on a happé par un tourbillon d’images et par un Eisenstein montré comme un personnage exubérant, volubile surexcité, explosif, etc. Sur la forme, Greenaway s’est fait plaisir avec tout un lot d’effets visuels assez spectaculaires : il mêle noir et blanc avec la couleur de façon très originale, joue avec les objectifs, multiplie les mouvements tournant de caméra (ceux qui veulent des panoramiques à 360° vont être servis), les effets de miroir, de duplication, les incrustations, etc. Ce n’est pas toujours très beau, c’est souvent un peu fatiguant voire stressant et surtout assez gratuit. Pour réalimenter sa réputation de provocateur, Greenaway a inclus de nombreuses scènes de nudité masculine et une longue scène bavarde de sodomie qui se termine par un plantage de drapeau rouge…! Peter Greenaway a un peu trop appuyé à la fois le côté militant du contenu et l’exubérance de la forme. Cela rend Que viva Eisenstein! un peu fatiguant à visionner.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Elmer Bäck, Luis Alberti
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Remarques :
* Deux autres volets sont en préparation :
1) Walking to Paris prévu pour 2016 qui relatera la visite d’Eisenstein en Europe en 1928 avec Edouard Tissé (son chef-opérateur) et Grigori Alexandrov (son assistant). Greenaway a déjà prévenu qu’il s’intéresserait à la question : « Est-ce qu’Eisenstein couchait avec Alexandrov ? » (Ceci dit, sachant qu’il nous a dit qu’il était puceau au Mexique, deux ans plus tard, on peut se demander comment il va s’en sortir…)
2) Eisenstein in Hollywood prévu pour 2017, qui relatera la suite du voyage, c’est-à-dire en Amérique juste avant d’aller au Mexique.

* En pratique, on manque d’éléments vraiment tangibles sur la sexualité d’Eisenstein. L’homosexualité était bien entendu déjà bannie à l’époque. Eisenstein a épousé sa secrétaire en 1934 mais cela ne prouve rien. Les éléments les plus tangibles sont ses dessins : Eisenstein a toujours énormément dessiné, beaucoup de caricatures et beaucoup de dessins érotiques, assez débridés : il y a de tout des hommes, des femmes, des animaux et même une statue… Certains de ces dessins ont été publiés, y compris en URSS (dans les années 70). Il est peu probable que ce point soit un jour vraiment éclairci.

Que Viva Eisenstein
Luis Alberti et Elmer Bäck dans Que viva Eisenstein! de Peter Greenaway.

 

8 août 2014

Meurtre dans un jardin anglais (1982) de Peter Greenaway

Titre original : « The Draughtsman’s Contract »

Meurtre dans un jardin anglaisEn 1694, dans un manoir anglais où se retrouve la haute société, le dessinateur Mr Neville accepte, à la demande pressante de la maitresse de maison, de faire douze dessins des jardins de la propriété dont son mari est très fier. En contrepartie, il demande pouvoir profiter librement des faveurs de la dame… Meurtre dans un jardin anglais est le film par lequel toute l’originalité de Peter Greenaway a éclaté au début des années quatre vingt. « Raffiné » est certainement le mot qui caractérise le mieux ce film. Ici, l’intrigue, car intrigue il y a, est plus remarquable par son développement que par son dénouement ou son explication (partielle d’ailleurs). Tout le film prend la forme d’un jeu de l’esprit très proche de ceux dont raffolent ses personnages, avec son langage très policé et élégant, ses belles tournures et aussi ses piques mordantes. Costumes, éclairages (en plein jour ou à la bougie), décors, tout est parfait. C’est un vrai délice pour les yeux. Le rythme est remarquablement enlevé, soutenu par la musique entêtante de Michael Nyman. Meurtre dans un jardin anglais est un jeu raffiné qui flatte merveilleusement l’esprit.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anthony Higgins, Janet Suzman, Anne-Louise Lambert, Hugh Fraser, Neil Cunningham
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Remarques :
* Peter Greenaway dit avoir été influencé par Le Caravage et La Tour pour l’image. Pour l’insolite du récit, il dit se placer dans la lignée du Vathek (roman gothique du XVIIIe écrit en français par l’anglais William Beckford) et cite également La Jalousie, le roman d’Alain Robbe-Grillet.
* La version initiale dirait plus de quatre heures. Peter Greenaway n’a pas exclu de sortir un jour cette version.
* Les dessins dans le film ont été faits par Peter Greenaway lui-même (rappelons qu’il était peintre avant d’être réalisateur). Dans les plans où le dessin se forme, ce sont ses propres mains qui sont à l’écran.
* La qualité de la réalisation est d’autant plus remarquable que le budget n’a été que modeste (300 000 livres). Le film a été tourné en Super 16 puis gonflé en 35.