4 octobre 2012

Les chaussons rouges (1948) de Michael Powell et Emeric Pressburger

Titre original : « The red shoes »

Les chaussons rougesLe célèbre impresario Lermontov engage un jeune compositeur talentueux et la jeune Victoria Page pour en faire une danseuse étoile. Il crée un ballet inspiré du conte d’Andersen Les chaussons rouges… Auréolés du succès de leurs films précédents, Michael Powell et Emeric Pressburger avaient alors une certaine liberté de choix de leur sujet, heureusement car faire un film sur le ballet et sans acteur connu était une entreprise plutôt osée. De manière plus générale, Les chaussons rouges est un film sur l’Art : le processus de création, on assiste ainsi à la genèse artistique d’un ballet, et aussi ses exigences, son caractère exclusif. Le talent de Powell et Pressburger est d’en avoir fait un grand spectacle en utilisant une vraie danseuse à l’avenir prometteur, Moira Shearer, et en donnant une large place au ballet avec une scène centrale très travaillée qui dure près de vingt minutes. La judicieuse utilisation du Technicolor et de vastes mouvements de caméra ajoutent à la féerie et au caractère fantastique de l’histoire. L’autre point fort du film réside dans le personnage de Lermontov, ce metteur en scène entièrement dévoué à son art, un personnage charismatique, fort et marquant. A sa sortie, Les chaussons rouges connut un immense succès (sauf en Angleterre toutefois) ; au lendemain de la guerre et de ses laideurs, le film apportait une réconfortante vague de beauté.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anton Walbrook, Moira Shearer, Marius Goring, Léonide Massine
Voir la fiche du film et la filmographie de Michael Powell & Emeric Pressburger sur le site IMDB.

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Remarques :
* Le scénario avait été écrit dès 1937 par Emeric Pressburger qui travaillait alors pour Alexander Korda. L’idée de Michael Powell fut de tourner le film avec de vrais danseurs et d’avoir une longue scène centrale de ballet.
* Michael Powell eut toutes les peines du monde pour convaincre Moira Shearer d’accepter le rôle. La jeune danseuse craignait d’oblitérer ses chances de devenir une grande danseuse (ces craintes se révélèrent être justifiées mais elle fut plutôt victime du succès du film).
* Michael Powell raconte très longuement la production et la réalisation du film Les chaussons rouges dans la première partie de son autobiographie A life in Movies.
* On peut considérer que Les chaussons rouges préfigure ce que seront An American in Paris de Minnelli (1951) et Singing’ in the rain de Stanley Donen (1952).

14 août 2012

La danse rouge (1928) de Raoul Walsh

Titre original : « The Red Dance »

La danse rouge(Film muet) A la veille de la Révolution russe de 1917, le jeune Grand Duc Eugene est envoyé par le tsar dans la campagne russe pour tenter de comprendre pourquoi la population écoute les agitateurs. Il y fait la rencontre d’une jeune femme, fille d’une institutrice assassinée par les Cosaques et dont le père est injustement emprisonné… The Red Dance est un film très rare de Raoul Walsh, c’est l’un de ses tout derniers films muets. Le scénario est plutôt faible, l’histoire est totalement improbable et s’inspire vraiment très librement de faits historiques La danse rouge (comme ce moine noir intriguant qui évoque Raspoutine). Toutefois, le propos politique est plutôt absent ce qui permet au moins d’éviter tout manichéisme, dans un sens ou dans l’autre. L’ensemble manque nettement de force. On appréciera toutefois quelques beaux plans de Dolores del Rio et un très beau second rôle d’Ivan Linow en géant rustre qui révèle une certaine humanité. On peine à discerner la patte de Raoul Walsh dans The Red Dance qui paraît tout de même assez commun.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Dolores del Rio, Charles Farrell, Ivan Linow
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Remarques :
* The Red Dance a été diffusé à la télévision française au Cinéma De Minuit de Patrick Brion en juin 2012.
* Raoul Walsh réutilisera certains plans dans son film parlant Yellow Ticket de 1931.

23 février 2012

Je ne suis pas un ange (1933) de Wesley Ruggles

Titre original : « I’m No Angel »

Je ne suis pas un angeLa belle Tira est danseuse et dompteuse de lions dans une foire ambulante. Par besoin d’argent pour se tirer d’un mauvais pas, elle accepte de faire un numéro dangereux où elle met sa tête dans la gueule d’un lion. Se basant sur les prédictions d’un fakir de foire, elle attend de rencontrer un homme riche et, en attendant, multiplie les conquêtes… Troisième film de Mae West, Je ne suis pas un ange cherchait à capitaliser sur le succès de She Done Him Wrong. L’actrice se remet en tandem avec le jeune Cary Grant et, bien entendu, continue à jouer son personnage de femme provocante au déhanchement exagéré, personnage proche de la caricature qui aligne les répliques à double sens sexuel. L’histoire s’enlise un peu pendant la première moitié du film, où Mae West s’amuse à jouer la dompteuse, Je ne suis pas un ange mais tient ses promesses sur la seconde avec une scène de procès absolument jubilatoire : Mae West décide en effet d’interroger elle-même les témoins de l’accusation et c’est un festival de bons mots. Bien entendu, il y a là largement de quoi réveiller la censure et énerver la League of Decency : les films de Mae West ont indéniablement renforcé leur détermination à agir. Je ne suis pas un ange connut un très grand succès, Mae West apportant un succès supplémentaire à Paramount qui était alors mal en point.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Mae West, Cary Grant, Edward Arnold, Ralf Harolde
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Remarques :
C’est Mae West qui écrivait elle-même ses scénarios et ses dialogues.
Exemple-type de réplique :
– Tira, comment avez-vous fait pour avoir une telle quantité d’hommes dans votre vie ?
– Vous savez, ce n’est pas la quantité d’hommes dans votre vie qui est important, c’est la quantité de vie qu’il y a dans vos hommes !
(It’s not the men in your life that matters, it’s the life in your men.)
D’autres sont plus difficiles à traduire sans casser le jeu de mots :
– Tira, you’ve been very good
– When I’m good, I’m very good. When I’m bad, I’m better.

C’est dans Je ne suis pas un ange que Mae West dit sa célèbre phrase « Beulah, peel me a grape » (Beulah est le nom de sa femme de chambre). Cette phrase lui aurait été inspirée par l’observation de son singe apprivoisé qui raffolait de raisin et qui pelait tous les grains avant de les engloutir. Cette phrase est devenue ultra-célèbre pour exprimer une certaine langueur luxueuse. Dave Frishberg a écrit une chanson intitulée « Peel me a grape », chantée par Anita O’Day dans les années 60 et reprise plus récemment par Diana Krall qui en fait un grand succès.