8 mai 2022

Kundun (1997) de Martin Scorsese

KundunLe film retrace la jeunesse du dalaï-lama Tenzin Gyatso, depuis sa découverte  à l’âge de deux ans par les moines à la recherche de la 14e réincarnation du dalaï-lama en 1937, jusqu’à son exil en Inde en 1959…
Le scénario de Kundun a été proposé à Martin Scorsese par Melissa Mathison, auteure du scénario d’E.T. et elle-même bouddhiste. Certes le cinéaste est plus réputé pour ses films où la violence tient une grande place, mais Scorsese est aussi attiré depuis toujours par le thème de la spiritualité comme en témoignent La Dernière Tentation du Christ (1988), Kundun (1997) et Silence (2016) dans sa filmographie. Tourné au Maroc, il y a fait venir une distribution entièrement composée de Tibétains, la plupart non-professionnels. Hélas, il ne parvient qu’imparfaitement à restituer la dimension spirituelle de sa gouvernance et le récit donne une trop grande place aux protocoles qui finissent par le rendre un peu ennuyeux. La difficulté d’une recherche de paix intérieure dans une période troublée est néanmoins perceptible. Basé sur l’autobiographie du 14e dalaï-lama et sur la quinzaine d’entretiens qu’il a eus avec la scénariste, le film a toutefois un intérêt historique, avec le récit, sans doute un peu succin, de l’invasion du Tibet par la Chine de Mao Tsé-toung. A sa sortie, le film a irrité les autorités chinoises au grand dam de Disney, producteur du film, qui cherchait alors à s’implanter en Chine. Couteuse production, Kundun fut un retentissant échec commercial.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Tenzin Thuthob Tsarong, Gyurme Tethong, Tulku Jamyang Kunga Tenzin
Voir la fiche du film et la filmographie de Martin Scorsese sur le site IMDB.

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KundunTenzin Thuthob Tsarong dans Kundun de Martin Scorsese.

Nota : Le film d’aventures de Jean-Jacques Annaud, Sept ans au Tibet, est sorti la même année.

8 avril 2015

Mississippi (1935) de A. Edward Sutherland

MississippiUn jeune homme du Nord (Bing Crosby), fiancé à la fille d’une famille du Sud, refuse de se battre en duel avec l’un des anciens prétendants de sa fiancée. Il est chassé de la famille et s’engage comme chanteur sur le bateau du pittoresque Commodore Jackson (W.C. Fields)… Mississippi est la version musicale d’une pièce de Booth Tarkington, Magnolia, déjà portée par deux fois à l’écran par la Paramount. Le film était conçu pour plaire, en joignant à une star montante, Bing Crosby, une bonne dose d’humour avec l’inénarrable W.C. Fields. Ce dernier est hélas moins débridé qu’à son habitude, il semble relégué ici à jouer les faire-valoir, le meilleur étant certainement dans une amusante partie de poker aux multiples as où il fait preuve d’une belle dextérité. Mississippi pourra ravir les amateurs de Bing Crosby, qui déploie beaucoup de charme dans les chansons qu’il interprète, mais les autres pourront être aussi déçus que je le fus…
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Bing Crosby, W.C. Fields, Joan Bennett
Voir la fiche du film et la filmographie de A. Edward Sutherland sur le site IMDB.

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Mississippi
Bing Crosby, Joan Bennett et W.C. Fields dans Mississippi d’Edward Sutherland

Remarques :
* Précédentes adaptations de la pièce Magnolia :
Le Capitaine Blake (The Fighting Coward) de James Cruze (1924) avec Mary Astor
River of Romance de Richard Wallace (1929) avec Charles Rodgers et Mary Brian

* Fred Kohler interprétait déjà le Capitaine Blackie dans la version de 1929.

* Wesley Ruggles a réalisé certaines scènes lorsque Edward Sutherland était absent.

* L’une des amies écolières de Joan Bennett est jouée par la jeune Ann Sheridan qui a même une ou deux lignes de texte.

10 juillet 2013

Je suis curieuse (1967) de Vilgot Sjöman

Titre original : « Jag är nyfiken »

1e partie : « Je suis curieuse – Version jaune (Jag är nyfiken – en film i gult) »
2e partie : « Je suis curieuse – Version bleue (Jag är nyfiken – en film i blått) »
Titre français de la 2e partie « Elle veut tout savoir »

Je suis curieuse Je suis curieuseInitialement prévu pour être un film de 3 h30, Je suis curieuse du suédois Vilgot Sjöman est sorti sur les écrans en deux parties : Version jaune et Version bleue. C’est un film à fort contenu politique qui reflète bien les remises en cause et les questionnements en cette fin des années soixante. Le film est très libre dans son contenu mais aussi dans sa forme puisque, si le thème général est l’éveil politique de Lena, une jeune femme de 22 ans, le film mêle réalité et fiction : Vilgot Sjöman peut ainsi apparaître en train de préparer ou de monter son film ou encore les acteurs peuvent prolonger leur relation dans la vie réelle. La première partie, Version jaune, est la plus complète et la mieux équilibrée. Elle aborde plusieurs thèmes politiques, les inégalités de salaires, la non-violence, l’égalité des sexes, la libération sexuelle. En parallèle, nous voyons Lena vivre une aventure avec un homme (qui vote à droite) qui lui cache qu’il a déjà un enfant et qu’il vit en couple. La seconde partie, Version bleue, est plus axée sur la libération dans un sens large, notamment sexuelle, mais aussi sur le plan des religions et des prisons. Le film doit beaucoup à son actrice principale, Lena Nyman. Il faut la voir avec son micro arpenter les rues de Stockholm pour demander avec candeur aux passants : « La société suédoise est-elle une société de classes ? »… ou encore interroger à l’aéroport les voyageurs de retour d’Espagne pour leur demander si cela les avait dérangé de passer leurs vacances dans un pays dirigé par un dictateur… Je suis curieuseJamais agressive mais tout de même obstinée, elle parvient par son naturel et sa candeur à toujours obtenir des réponses ou, au moins, des tentatives de réponse. Sur le plan de la sexualité, le film a pu paraître impudique, abordant largement la question sans tabou, avec liberté et naturel. Vu un demi-siècle plus tard, Je suis curieuse reste un film très intéressant, non seulement (et de façon évidente) sur le plan historique et sociologique, mais aussi pour mesurer à quel niveau ces questionnements restent actuels ou pas, ouvrant ainsi la voie à une réflexion philosophique plus large.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lena Nyman, Vilgot Sjöman, Börje Ahlstedt, Peter Lindgren
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Remarques :
* Le jaune et le bleu sont les deux couleurs du drapeau suédois.

* Assez étrangement, en France, le film ne fit que peu d’effet quand il est sorti, en janvier 1968 (pour la première partie) et en septembre 1968 (pour la seconde). Il n’en fut pas de même aux Etats-Unis où il rencontra un vif succès mais ce sont les scènes de nudité (totale ce qui était alors extrêmement rare en dehors des films pornographiques) qui alimentèrent le bouche à oreille : c’est un film que l’on allait voir ostensiblement pour montrer son ouverture d’esprit. En outre, Vilgot Sjöman ne fait à aucun moment montre d’anti-américanisme (mis à part, quelques mentions très rapides de la guerre au Vietnam).

* Olaf Palme apparaît dans le film, il est interviewé (par le réalisateur) sur l’inégalité des salaires et la non-violence. Il était alors ministre des transports. Martin Luther King et le poète russe Evgueni Evtouchenko sont vus dans des documents d’époque.

* La Suède de 1967 est dirigée par les sociaux-démocrates (socialistes modérés) depuis les années trente. Tage Erlander était alors chef du gouvernement depuis 1946. Olaf Palme lui succédera en 1969. Le gouvernement social-démocrate avait pris un certain nombre de mesures dans les années cinquante et soixante pour réduire les inégalités sociales et accroitre la protection sociale. Le pays était considéré comme l’un des plus avancés en ce domaine.

* Vilgot Sjöman a beaucoup travaillé au théâtre avec Bergman, ce qui laisse supposer qu’il a su parfaitement diriger Lena Nyman. En Suède, l’actrice a reçu le prix de la meilleure actrice aux Guldbagge Awards en 1968 pour cette interprétation.