29 janvier 2021

Bacurau (2019) de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles

BacurauDans un futur proche, au Brésil, les habitants du petit village isolé de Bacurau du Sertão, dans la région du Nordeste, enterrent la matriarche de leur communauté. Peu après, les villageois font face à des événements très étranges…
Bacurau est un film brésilien écrit et réalisé par Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles. Il est difficile de le définir parce qu’il emprunte à plusieurs genres : le thriller, la science fiction, le western, le slasher movie et le film de cangaço (1), un genre typiquement brésilien très lié à l’imaginaire cinématographique du Sertão. L’histoire est assez étrange, surtout dans sa première moitié, et si le film ne réserve pas de grosses surprises, il se révèle très prenant grâce à une tension grandissante. Certaines scènes sont assez violentes dans sa seconde moitié mais sans qu’il y ait toutefois d’insistance excessive sur ces scènes. Bien entendu, le récit est aussi une allégorie politique pour dénoncer les méthodes du gouvernement d’extrême-droite actuel. Le préfet du film ressemble physiquement d’ailleurs quelque peu à Bolsonaro. Le film a été tourné en Panavision en utilisant des objectifs anamorphiques ce qui lui donne une touche cinéma américain des années soixante, originale pour un film brésilien. Grand Prix du Jury à Cannes 2019.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Bárbara Colen, Thomas Aquino, Udo Kier
Voir la fiche du film et la filmographie de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Remarque :
* « Bacurau » signifie en portugais « engoulevent », un oiseau crépusculaire et nocturne qui se camoufle très bien quand il se repose sur une branche d’arbre. Juliano Dornelles dresse le parallèle entre l’animal et le village : « Il ne sera remarqué que s’il a lui-même envie d’apparaître. Le village de Bacurau se porte ainsi, il est intime du noir, il sait se cacher et attendre, et préfère même ne pas être aperçu. » (Extrait du dossier de presse)

(1) Le cangaço a été une forme de banditisme social dans le Nordeste de la fin du XIXe siècle et début du XXe. Dans cette région aride où les inégalités sont fortes, de nombreux hommes et femmes sont devenus des bandits nomades, comme une forme de révolte à la domination des propriétaires terriens et du gouvernement. Le cinéma brésilien des années 1950 et 1960 a beaucoup exploré cette figure. (Extrait du dossier de presse)

BacurauBacurau de Juliano Dornelles et Kleber Mendonça Filho.

4 avril 2018

Vera Cruz (1954) de Robert Aldrich

Vera CruzA la fin de la guerre de Sécession, certains soldats sans attaches ou ayant tout perdu passent au Mexique, alors en pleine guerre civile, pour vendre leurs services au plus offrant. C’est ainsi qu’un ex-officier de l’armée sudiste (Gary Cooper) se voit forcé de faire équipe avec un aventurier rencontré en chemin (Burt Lancaster) dans une mission pour l’empereur Maximilien…
Sur une histoire imaginée par Borden Chase, dont les écrits ont déjà inspirés de grands westerns (Red River de Hawks, Winchester 73 et Bend of the River de Mann… et suivront Far Country toujours de Mann et Man Without a Star de Vidor), Vera Cruz met face à face deux têtes d’affiche pour un film à la réalisation parfaite et au contenu plus complexe qu’attendu. L’histoire est en effet assez simple mais son traitement est très particulier dans le cadre du western classique. Au lieu de montrer une opposition tranchée entre le bien et le mal, entre le bon et le méchant, Vera Cruz adopte une vision plus ambigüe de ses personnages, qui sont à la fois héros et anti-héros. Ainsi, si Gary Cooper montre une grande humanité, il n’hésite pas à trahir ou à tuer pour préserver ses intérêts bassement financiers. Face à lui, Burt Lancaster est bien le méchant de l’histoire mais il est aussi doté d’une indéniable droiture. Il est ambivalent, à l’image de son sourire à la fois carnassier et séducteur, et une utilisation très habile de l’humour le rend plus attirant encore.  Par cette ambivalence, cette façon de proposer des héros imparfaits, Vera Cruz semble ouvrir la voie aux westerns modernes.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gary Cooper, Burt Lancaster, Denise Darcel, Cesar Romero, Sara Montiel, George Macready, Ernest Borgnine, Charles Bronson
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Aldrich sur le site IMDB.

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Vera Cruz
Burt Lancaster et Gary Cooper dans Vera Cruz de Robert Aldrich.

Remarques :
* Vera Cruz a beaucoup influencé Sergio Leone. Il est parfois surnommé « le premier western spaghetti ». A noter que Charles Bronson a un tout petit rôle… où il joue (déjà !) de l’harmonica.

* Gary Cooper était vraiment très mal à l’aise avec son personnage d’anti-héros. Ce serait pour cette raison qu’il a ensuite refusé la proposition de Charles Laughton d’incarner le pasteur dans La Nuit du chasseur, laissant ainsi la place à Robert Mitchum.

* Le film est produit par la société Hecht-Hill-Lancaster formée par Harold Hecht (le producteur, aucune relation avec Ben Hecht le scénariste), James Hill et Burt Lancaster.

* Précision technique : Vera Cruz est le premier (et principal) grand film en SuperScope. L’image est enregistrée en 2:1 puis agrandie (en hauteur) afin d’occuper toute la hauteur du cadre dans les copies d’exploitation. Ce procédé, lancé par la RKO en 1954, ne vivra guère. Son principal avantage était d’éviter l’anamorphose à la prise de vue (tassement horizontal pour occuper toute la surface d’une pellicule 35mm) qui impose d’utiliser des objectifs spéciaux. Son inconvénient est de laisser inutilisée une grande partie de la pellicule (interimage important) et donc d’avoir inévitablement une image finale de qualité inférieure.

Vera Cruz
Burt Lancaster dans Vera Cruz de Robert Aldrich.

Vera Cruz
Ernest Borgnine et Sara Montiel dans Vera Cruz de Robert Aldrich.