12 novembre 2016

Lifeboat (1944) de Alfred Hitchcock

LifeboatUn navire américain sombre après avoir été attaqué par un sous-marin allemand. Une poignée de survivants se retrouvent dans une chaloupe de sauvetage. Ils recueillent un allemand, rescapé du sous-marin responsable de l’attaque… Comme on le sait, Alfred Hitchcock aime les challenges : faire un film entier dans un lieu aussi réduit qu’un canot de sauvetage était son idée. John Steinbeck lui a écrit la base de l’histoire qu’il a fait réécrire ensuite par plusieurs scénaristes. Le tournage, en studio dans un large réservoir, fut extrêmement éprouvant pour les acteurs. Hitchcock est resté très rigoureux : la caméra ne sort jamais du canot et il n’y a pas de musique. Réalisé en pleine Seconde Guerre mondiale, Lifeboat se démarque nettement des films de propagande qui ont généralement un ton triomphaliste. Le film fut très critiqué à sa sortie pour le fait qu’il montrait un allemand supérieur aux autres personnages. En fait, l’intention d’Hitchcock était d’alerter du danger que représentait un pays totalitaire, organisé et pragmatique, face à nos démocraties, divisées et indécises. Le message fut le plus souvent mal compris. Lifeboat fait partie des rares films d’Hitchcock qui perdirent de l’argent. Pourtant, il est bien unique en son genre.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tallulah Bankhead, William Bendix, Walter Slezak, Mary Anderson, John Hodiak, Henry Hull, Heather Angel, Hume Cronyn, Canada Lee
Voir la fiche du film et la filmographie de Alfred Hitchcock sur le site IMDB.

Voir les autres films de Alfred Hitchcock chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Alfred Hitchcock

Lifeboat
(de g. à dr.) Canada Lee, John Hodiak, Henry Hull, Tallulah Bankhead, Hume Cronyn et Mary Anderson dans Lifeboat d’Alfred Hitchcock.

Remarques :
* Liste des scénaristes ayant travaillé sur le scénario (dans l’ordre) : John Steinbeck, Jo Swerling, Alma Reville, MacKinlay Kantor, Patricia Collinge, Albert Mannheimer, Marian Spitzer, Ben Hecht (ce dernier ayant retravaillé la fin).

* Plusieurs acteurs durent être soignés pour pneumonie, Tallulah Bankhead deux fois. Hume Cronyn a failli se noyer pendant une scène de tempête. Dans une autre scène, il eut les côtes fêlées.

* Autant Hitchcock appréciait Tallulah Bankhead, autant il n’aimait guère Mary Anderson. Un jour, alors que l’actrice demandait au réalisateur quel était son meilleur profil, Hitchcock répondit imperturbablement : « Ma chère, vous être assise dessus ! »

* Ne pouvant faire sa classique apparition en tant que passant, Alfred Hitchcock eut une idée brillante pour son cameo : il apparaît sur une feuille de journal trouvé flottant, dans une publicité pour un régime amaigrissant. A noter que le réalisateur était réellement en train de suivre un régime, s’étant fixé comme but de passer de 150 kg à 100 kg. Les photos seraient, dit-on, réelles. Certains spectateurs ont écrit au studio pour demander l’adresse de la société Reduco.

Lifeboat
Alfred Hitchcock apparaît pour son traditionnel cameo, dans Lifeboat (1944). C’est pratiquement devenu son cameo le plus célèbre… William Bendix lit le journal.

Lifeboat
Walter Slezak (le rescapé allemand) et Tallulah Bankhead dans Lifeboat d’Alfred Hitchcock.

Remake :
Lifepod (TV, 1993) de Ron Silver, transposé dans l’espace au 22e siècle.

3 novembre 2016

Aventures en Birmanie (1945) de Raoul Walsh

Titre original : « Objective, Burma! »

Aventures en BirmanieEn 1943, un commando de parachutistes américains est lâché en pleine Birmanie pour aller détruire une station-radar japonaise… Objective, Burma! est sorti à chaud en janvier 1945, c’est-à-dire plusieurs mois avant la capitulation du Japon, alors que les opérations de reprise de la Birmanie aux mains des japonais étaient toujours en cours. Par certains aspects, le film de Raoul Walsh peut être qualifié de film de propagande mais il est bien plus que cela car le réalisateur montre une telle perfection à la fois dans le déroulement du scénario, dans l’acuité de la description psychologique des personnages et dans la mise en scène des images que le film est devenu un modèle du genre. Tout est idéalement dosé pour former un ensemble où la puissance du propos est remarquable : montrer la réalité de la guerre et le comportement des soldats face au danger. L’interprétation est juste et sobre, y compris celle d’Errol Flynn. Toutes ces qualités ont permis à Objective, Burma! d’être souvent qualifié, à juste titre, de film atemporel.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Errol Flynn, Henry Hull, James Brown, William Prince, George Tobias
Voir la fiche du film et la filmographie de Raoul Walsh sur le site IMDB.

Voir les autres films de Raoul Walsh chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Raoul Walsh

Objective Burma
Errol Flynn (à droite) dans Aventures en Birmanie de Raoul Walsh.

Remarques :
* Objective, Burma! a été interdit en Grande Bretagne une semaine après sa sortie. Il lui était reproché de montrer les opérations en Birmanie comme étant uniquement américaines alors qu’elles furent essentiellement britanniques. De nombreux soldats britanniques et indiens y ont laissé leur vie. Cette interdiction durera jusqu’en 1952.
On reconnait-là le travers hollywoodien de toujours attribuer tous les mérites aux Etats Unis. Il faut souligner, à la décharge de Walsh, que le tournage a eu lieu à la mi-1944, alors que l’issue était encore incertaine (les opérations alliées de 1943 ont finalement été un échec).

* Dans le même registre, on pourra être assez étonné que l’attaque de la station radar ne laisse aucun survivant ennemi. Vue la différence de nombre, c’est totalement improbable mais il était bien entendu impensable de montrer des soldats américains forcés d’exécuter les éventuels survivants.

* Le film a connu un grand succès en France quand il est sorti peu après la Libération, en novembre 1945.

* Raoul Walsh utilisera une trame assez similaire dans son film Les aventures du capitaine Wyatt (1951), l’action étant située en 1840 en Floride, l’ennemi étant les indiens Séminoles.

Objective Burma
Errol Flynn dans Aventures en Birmanie de Raoul Walsh. Dans 50 ans de cinéma américain, Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier nous font remarquer que les personnages sont souvent partiellement masqués par des feuilles ou autres éléments de nature, une façon pour Raoul Walsh de renforcer de sentiment d’emprisonnement.

18 mai 2014

Le retour de Frank James (1940) de Fritz Lang

Titre original : « The Return of Frank James »

Le retour de Frank JamesAlors qu’il s’était rangé pour vivre anonymement dans une petite ferme, Frank James se lance à la poursuite de Charlie et Bob Ford qui ont lâchement assassiné son frère Jesse James… Le retour de Frank James est la suite du film Jesse James (Le Brigand bien aimé) d’Henry King qui avait rencontré un franc succès l’année précédente. Fritz Lang n’est sans doute pas très à l’aise à l’idée de tourner un western mais il n’est guère en mesure de refuser après l’échec de You and Me (Casier judiciaire, 1938). Il dût même faire des concessions (1). Son western est indéniablement plutôt atypique, le réalisateur étant bien plus créatif dans les scènes assez sombres où il peut jouer avec les ombres et la lumière que sous le grand soleil. Ce sont ces scènes (le hold-up, le train, la grange finale) qui sont les plus remarquables. La présence d’une longue scène de procès est également inhabituelle pour un western. L’ensemble est toutefois un peu terne. Huit acteurs du film d’Henry King reprennent ici leur rôle dont Henry Fonda et Henry Hull. Le retour de Frank James est également le premier film de Gene Tierney, âgée de 19 ans, qui, à défaut de faire une prestation mémorable en jeune suffragette, montre d’indéniables qualités photogéniques.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Henry Fonda, Gene Tierney, Jackie Cooper, Henry Hull, John Carradine
Voir la fiche du film et la filmographie de Fritz Lang sur le site IMDB.

Voir les autres films de Fritz Lang chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Fritz Lang

Remarques :
* La première scène est la reprise de la scène finale de Jesse James (Le Brigand bien aimé) d’Henry King.
* Le retour de Frank James est le premier film en couleurs de Fritz Lang.
* L’histoire s’écarte franchement de la réalité historique puisque Frank James ne s’est jamais lancé à la recherche des assassins de son frère.
* Le scénario prévoyait une histoire d’amour entre Frank James et la jeune journaliste mais Darryl F. Zanuck préféra retirer ces scènes par crainte d’un procès de la veuve de Frank James.

(1) Non seulement, il dut abandonner son légendaire monocle pour de simples lunettes mais surtout il dut présenter des excuses à Henry Fonda pour l’avoir traité quelque peu durement sur le tournage de You Only Live Once (1937) !

3 mai 2012

Nick Carter, Master Detective (1939) de Jacques Tourneur

Nick Carter, Master DetectiveLe détective Nick Carter est envoyé dans une usine d’aviation qui met au point un avion révolutionnaire. Malgré des mesures de sécurité draconiennes, des plans secrets disparaissent … Nick Carter est un personnage de littérature populaire (1) qui avait déjà été adapté au tout début du cinéma en France (2). Nick Carter, Master Detective fait partie des tous premiers films réalisés par Jacques Tourneur aux Etats-Unis en 1939. Ne durant que 59 minutes, c’est le type-même du film de série B, c’est-à-dire prévu pour être présenté avec un autre film. Il est simple mais bien réalisé, avec un petit suspense bien dosé, finalement assez prenant par son histoire. Walter Pidgeon fait un Nick Carter très crédible. Il est aidé (malgré lui) par un petit personnage excentrique joliment interprété par Henry Hull qui apporte une touche d’humour. Très facile d’abord, Nick Carter, Master Detective est un bon divertissement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Walter Pidgeon, Rita Johnson, Henry Hull, Stanley Ridges
Voir la fiche du film et la filmographie de Jacques Tourneur sur le site IMDB.
Voir les autres films de Jacques Tourneur chroniqués sur ce blog…

(1) Nick Carter apparait pour la première fois en 1886 dans un roman bon marché signé John R. Coryell et Ormond G. Smith. Le personnage sera réutilisé dans de nombreuses histoires. Un magazine sera créé : le Nick Carter Weekly qui devient, en 1915, Detective Story Magazine.

(2) Entre 1908 et 1911, les Studios Eclair en France produisent une série de films courts dirigés par Victorin-Hippolyte Jasset. La série se nomme Nick Carter, le roi des détectives. Pierre Bressol y tient le rôle principal. Une quinzaine de films sont réalisés.
* Aux Etats-Unis, le personnage est utilisé dans une série de films courts réalisés par Alexander Hall en 1922. C’est Edmund Lowe qui tient le rôle du détective.
* En 1939/40, la MGM sort trois films mettant en scène Nick Carter interprété par Walter Pidgeon :
Nick Carter, Master Detective (1939) de Jacques Tourneur
Phantom Raiders (1940) de Jacques Tourneur
Sky Murder (1940) de George B. Seitz
* Le personnage a aussi fait une belle carrière à la radio entre 1943 et 1955.
* A noter que le personnage a tenté d’être relancé en France dans les années soixante avec Eddie Constantine :
Nick Carter va tout casser (1964) d’Henri Decoin
Nick Carter revient (1965) de Jean-Paul Savignac.