16 octobre 2021

La Nuit venue (2019) de Frédéric Farrucci

La Nuit venueJin, Chinois immigré clandestin à Paris, est un ex-DJ devenu chauffeur de VTC de nuit. Il travaille depuis des années pour la Mafia chinoise afin de rembourser sa dette envers les passeurs. Il rêve du moment proche où il pourra refaire de la musique…
La Nuit venue est un film français coécrit et réalisé par Frédéric Farrucci qui signe ainsi son premier long métrage. Il s’est visiblement beaucoup attaché à créer une esthétique et une atmosphère particulière. Certains plans sont visuellement très réussis, principalement par l’utilisation de touches de couleurs dans un ensemble très sombre. La très grande majorité des scènes se déroulent de nuit. L’atmosphère est très noire et même lourde. Le récit de la romance entre le chauffeur de VTC et une strip-teaseuse ne parvient pas à s’imposer. Les acteurs chinois sont des non-professionnels, y compris Guang Huo qui montre une belle présence. L’ensemble est assez déprimant.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Guang Huo, Camélia Jordana
Voir la fiche du film et la filmographie de Frédéric Farrucci sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Précision à propos des VTC clandestins montrés dans le film :
Le réalisateur Frédéric Farrucci explique qu’en enquêtant sur les taxis de nuit « une légende urbaine revenait régulièrement dans les témoignages : la mafia chinoise équiperait de faux taxis et exploiterait des hommes en les mettant au volant. Cela a créé immédiatement un désir de fiction. C’était une véritable matière de film noir. Notre chauffeur est donc devenu un Chinois sous la coupe de la mafia et le taxi s’est par la suite transformé en VTC, plus en phase aussi avec la perversion ultralibérale de notre société. »

La Nuit venueGuang Huo dans La Nuit venue de Frédéric Farrucci.

5 mai 2013

Le Havre (2011) de Aki Kaurismäki

Le HavreUn ex-écrivain bohème s’est volontairement exilé au Havre où il est cireur de chaussures. Il vit dans un petit quartier avec sa femme. Il trouve sur son chemin un jeune garçon, immigré clandestin d’Afrique Noire recherché par la police… Le Havre est le premier film qu’Aki Kaurismäki tourne en français. C’est une histoire assez universelle et atemporelle qui met en valeur l’humanité et la solidarité. Aki Kaurismäki insuffle beaucoup d’humour dans son récit, ne serait-ce que par le jeu des acteurs, avec des intonations très policées qui donnent une certaine noblesse (et même une certaine grandeur) aux personnages. C’est un style qui peut bien évidemment surprendre mais il suffit de se laisser gagner par l’atmosphère, finalement assez proche d’un conte. Ce style permet d’ailleurs de s’écarter du réalisme qui n’est pas ici recherché. L’histoire étant atemporelle, Kaurismäki mêle les époques, modernisme et nostalgie des années soixante se côtoient. Et l’image est superbe, Kaurismäki n’a pas son pareil pour créer une palette de couleurs subtile, un brin désuète, et dont les grandes masses de couleur peuvent évoquer l’univers de la bande dessinée style ligne claire. Le résultat lui est propre, assez unique et très beau. Sur le fond, Le Havre n’a pas de solution toute faite à donner, il met seulement en valeur les notions humaines d’humanisme et de liberté.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: André Wilms, Kati Outinen, Jean-Pierre Darroussin
Voir la fiche du film et la filmographie de Aki Kaurismäki sur le site IMDB.

Voir les livres sur Aki Kaurismäki

Voir les autres films de Aki Kaurismäki chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Originaire du Havre, Little Bob interprète son propre rôle, ainsi qu’un morceau avec son groupe.
* On remarquera la présence de Pierre Etaix, en improbable docteur, et de Jean-Pierre Léaud en voisin dénonciateur.

2 novembre 2012

Travail au noir (1982) de Jerzy Skolimowski

Titre original : « Moonlighting »

Travail au noirTrois ouvriers et un contremaître arrivent de Varsovie à Londres pour refaire à neuf le pied-à-terre de leur patron polonais. Ils ont un mois pour le faire. Seul Nowak, le contremaître, parle anglais. Un jour, il découvre que les lignes téléphoniques avec la Pologne sont coupées… Pour attirer l’attention sur l’état d’urgence décrété en son pays (1), le polonais Jerzy Skolimowski fait un film très original, à plusieurs niveaux de lecture. Le volet politique n’est pas le plus proéminent dans Travail au noir même s’il est bel et bien là, pesant de tout son poids sur l’évolution de l’histoire. L’action se passe d’ailleurs à Londres et non à Varsovie. C’est plutôt l’observation de ce petit groupe, isolé, presque coupé du monde, où le contremaître Nowak est le seul à pouvoir raisonner, sa position sociale étant renforcée par sa faculté à maitriser l’anglais et donc à communiquer avec le monde extérieur. Il va devoir aller nettement au-delà de ses seules prérogatives, ses trois ouvriers lui étant de fait livrés corps et âme, il va se comporter de façon despotique. Quelle belle allégorie. C’est aussi un film qui montre les petites mesquineries de la société anglaise, faisant preuve d’un certain humour sur ce point. Travail au noir fut réalisé très rapidement (écrit en onze jours et tourné en vingt-trois jours) (2) mais cela ne l’empêche pas d’être un film assez fort, finalement assez complexe, une approche très originale des évènements qui se déroulaient alors en Pologne, mêlant habilement humour et drame ; c’est l’un des films qui ont marqué le début des années quatre vingt.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Jeremy Irons, Eugene Lipinski, Jirí Stanislav
Voir la fiche du film et la filmographie de Jerzy Skolimowski sur le site IMDB.

Voir les autres films de Jerzy Skolimowski chroniqués sur ce blog…

(1) En décembre 1981, face à la montée du syndicat Solidarność et par crainte d’une intervention militaire soviétique en Pologne, le premier ministre le général Jaruzelski déclare la loi martiale. Couvre-feu, arrestation des opposants, grèves brutalement réprimées, l’état de siège durera jusqu’en juillet 1983. Jaruzelski restera au pouvoir jusqu’en 1990, laissant la place à Lech Walesa, fondateur de Solidarność. On sait, depuis l’ouverture des archives soviétiques, que l’URSS n’avait pas l’intention d’intervenir en Pologne. Le général Jaruzelski a été inculpé en 2007 de « crime communiste » pour avoir instauré la loi martiale en 1981.

(2) Travail au noir fut présenté à Cannes en mai 1982, soit seulement cinq mois après l’instauration de la loi martiale en Pologne.

Lire aussi : une bonne analyse du film par Olivier Bitoun sur DVDClassik

7 juillet 2012

Biutiful (2010) de Alejandro González Iñárritu

BiutifulPour permettre à ses enfants de survivre, Uxbal se livre à tout un tas de trafics dans les quartiers polyethniques de Barcelone, aidant des immigrés clandestins à travailler au noir, monnayant de prétendus talents de medium pour communiquer les dernières paroles de défunts. Il découvre qu’il est atteint d’une maladie grave… Contrairement aux précédents films d’Alejandro González Iñárritu, Biutiful est centré sur un seul personnage. Il l’a écrit pour Javier Bardem qui signe ici une belle performance qui ne parvient que partiellement à contrebalancer les excès de style du réalisateur. Très (trop) long, Biutiful est un film très noir dont le personnage semble devoir porter toutes dérives du monde. A vouloir trop en faire, Iñárritu nous détache et nous éloigne.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Javier Bardem, Maricel Álvarez, Hanaa Bouchaib, Eduard Fernández
Voir la fiche du film et la filmographie de Alejandro González Iñárritu sur le site IMDB.

Voir les autres films de Alejandro González Iñárritu chroniqués sur ce blog…