2 mars 2009

L’Homme perdu (1951) de Peter Lorre

Titre original : « Der Verlorene »

L'Homme perduElle :
(pas vu)

Lui :
L’Homme perdu nous plonge dans l’Allemagne de l’après-guerre. Un homme rongé par le remord revit les évènements qui l’ont amené à commettre l’irréparable. Si les évènements en question ne sont qu’indirectement liés à la guerre, c’est le contexte de la guerre qui les provoque. Le fond du propos est bien évidemment « comment peut-on vivre avec le lourd fardeau du passé ». Il n’est guère étonnant que L’Homme perdu ait été un échec (il ne serait resté sur les écrans qu’une dizaine de jours), il arrivait sans doute soit trop tard soit beaucoup trop tôt : en cette période de reconstruction, personne ne désirait réalimenter les sentiments de culpabilité. De plus le film est très noir, sans espoir. Peter Lorre est l’interprète idéal de cet homme hanté, comme altéré, avec sa voix monocorde et son débit si caractéristique. Il est difficile de ne pas penser au Peter Lorre de M le Maudit qu’il a tourné 20 ans plus tôt peu avant qu’il ne quitte l’Allemagne. Certaines scènes, comme celle de l’escalier, sont presque des liens directs entre les deux films. L’homme perdu sera hélas l’unique film de Peter Lorre en tant que réalisateur. C’est un film très sombre mais aussi très fort et terriblement implacable dans son propos.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Peter Lorre, Karl John, Helmuth Rudolph
Voir la fiche du film et la filmographie de Peter Lorre sur le site imdb.com.

26 février 2009

Pingpong (2006) de Matthias Luthardt

PingpongElle :
Ce jeune cinéaste allemand très inspiré par la musique classique réalise avec une maîtrise étonnante un huis clos qui enveloppe peu à peu ses personnages dans la noirceur. Le jeune Paul qui débarque sans prévenir chez son oncle Stefan, sa tante Anna et leur fils Robert jette le trouble et fait exploser sans le vouloir le calme apparent de cette famille bourgeoise faussement heureuse. Un mari absent et indifférent, une épouse délaissée et autoritaire, un fils pianiste, alcoolique et mal dans sa peau. Les frustrations de chacun éclatent peu à peu au grand jour avec toute l’ambiguïté et la tension que Matthias Luthardt sait instiller en ses personnages. Les évènements créent un flux de résonances malsaines ; l’univers devient étouffant. La présence de l’étang contaminé et de la piscine en construction exacerbent ce climat de mal être et de malaise profond.
Note : 5 étoiles

Lui :
Une maison plutôt cossue entourée d’un jardin, une piscine est en construction, une famille en apparence heureuse. Paul, le jeune neveu, arrive à l’improviste pour chercher une certaine stabilité après avoir vécu un drame dans sa famille. Pingpong est le premier long métrage de l’allemand Matthias Luthardt. Avec un lieu unique et quatre personnages (et un chien), il parvient à réaliser un film particulièrement fort qui monte très graduellement en puissance, montrant ainsi une très grande maîtrise dans le déroulement de son récit. Le climat devient de plus en plus étrange, troublant pour finir perturbant, le tout avec une simplicité et une retenue qui en accroissent d’autant l’intensité. Pingpong nous révèle un cinéaste à suivre et nous laisse espérer un renouveau du cinéma allemand.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Sebastian Urzendowsky, Marion Mitterhammer, Clemens Berg, Falk Rockstroh
Voir la fiche du film et la filmographie de Matthias Luthardt sur le site imdb.com.

Autres films homonymes (mais qui n’ont rien à voir avec celui-ci) :
Ping Pong (1986) du chinois Leong Po-Chih
Ping Pong (2002) du japonais Fumihiko Sori.

12 février 2009

Stützen der Gesellschaft (1935) de Douglas Sirk

Stützen der GesellschaftElle :
(pas vu)

Lui :
Stützen der Gesellschaft, titre souvent traduit par « Piliers de la société », est le troisième long métrage de Douglas Sirk. Il l’a tourné en Allemagne hitlérienne sous son vrai nom, Detlef Sierck, peu avant qu’il n’émigre aux Etats-Unis. Le scénario est tiré d’une pièce du norvégien Henrik Ibsen : une homme riche et sans scrupule est à la tête d’un village de Norvège et de son chantier naval. Le retour au pays de son beau-frère, après 20 ans passés en Argentine, va le mettre dans l’embarras car il avait laissé courir sur lui des bruits qui arrangeaient ses affaires. Stützen der Gesellschaft est bien plus qu’une curiosité car il se révèle étonnamment bien fait, Douglas Sirk exploitant parfaitement cet excellent scénario : il rend cette histoire captivante avec une intensité qui culmine dans la scène finale de tempête, tournée en décors réels, réellement impressionnante (pour l’époque et même encore maintenant). Stützen der Gesellschaft est hélas assez rare.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Heinrich George, Albrecht Schoenhals, Suse Graf
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9 février 2009

De l’autre côté (2007) de Fatih Akin

Titre original : « Auf der anderen Seite »

De l’autre côtéElle :
Entre Brême et Istanbul, sur fond de répression politique, le film donne lieu à un chassé croisé émouvant de destins fragiles qui se cherchent, se croisent parfois sans se voir, attendent sans fin l’être aimé. La mort d’êtres chers ouvre d’autres portes et permet la renaissance. Renaissance d’un fils qui pour expier le crime de son père part en Turquie à la recherche d’Ayten. Renaissance d’une mère pleine de remords après avoir perdu sa fille partie sauver Ayten de la prison. Sur une histoire assez complexe, Fatih Akin parvient à introduire une belle fluidité dans ses images et beaucoup de délicatesse dans les portraits de ses personnages brisés.
Note : 4 étoiles

Lui :
Avec De l’autre côté, Fatih Akin nous propose un film dense, avec deux histoires qui sont entremêlées sans vraiment l’être. Elles semblent se croiser, se répondre l’une à l’autre, se compléter. Le scénario est extrêmement riche, peut-être même un peu trop, et se situe à cheval entre l’Allemagne et la Turquie. La construction est assez originale avec une utilisation particulière des ellipses et des flashbacks. Ces deux histoires sont assez puissantes et dotées d’une forte dimension humaine. Fatih Akin dit considérer De l’autre côté comme faisant partie d’un triptyque : Head-On traite de l’amour, De l’autre côté de la mort et son prochain film du Mal.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Nurgül Yesilçay, Baki Davrak, Tuncel Kurtiz, Hanna Schygulla, Patrycia Ziolkowska
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Voir les autres films de Fatih Akin chroniqués sur ce blog…

30 octobre 2008

Sarajevo, mon amour (2006) de Jasmila Zbanic

Titre original : « Grbavica »

Sarajevo, mon amourElle :
Un film poignant sur le Sarajevo d’après guerre qui connaît la pauvreté, le chômage, les trafics, la mafia. Sa population est meurtrie et traumatisée par les tortures, les disparitions, les décès des maris mais aussi par les viols à la chaîne. La réalisatrice choisit d’évoquer le destin de la mère d’une fille de douze ans, très perturbée par l’absence de son père. La honte la pousse à cacher les origines de sa naissance à sa fille car elle est l’enfant de la haine. Malgré tout, l’amour et la tendresse traversent le film car il permet de survivre. La caméra est sensible et bien maîtrisée notamment sur les portraits de femmes et les extérieurs fantomatiques de Sarajevo sous la neige.
Note : 4 étoiles

Lui :
Sarajevo mon amour nous plonge dans la Bosnie de l’après-guerre avec le portrait d’une femme qui élève tant bien que mal sa fille de 12 ans. La guerre a laissé des traumatismes qui seront longs à effacer et pèsent lourdement. Avec peu de moyens, Jasmila Zbanic est parvenu à réaliser un film centré sur l’humain, avec une importance laissée au quotidien. Elle nous montre bien aussi cette volonté de faire repartir la vie, de retrouver un équilibre psychologique et social. Sarajevo mon amour laisse enfin une grande place aux émotions de ses personnages, ces émotions que l’on a souvent tenté d’enfouir mais qui finissent par ressurgir immanquablement.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Mirjana Karanovic, Luna Mijovic, Leon Lucev
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22 octobre 2008

Waiter! (2006) de Alex van Warmerdam

Titre original : « Ober »

Waiter!Elle :
(pas vu)

Lui :
Edgar est serveur dans un restaurant un peu miteux, il a une épouse malade, des voisins odieux, une maîtresse qui le harcèle… Peu satisfait de son sort, il va se plaindre auprès du scénariste qui est en train d’écrire l’histoire qu’il vit. Telle est la situation de base de Waiter!, une situation qui semble prometteuse. Hélas, si le film comporte des bonnes trouvailles, l’ensemble manque de souffle et repose trop sur les réactions démesurées de certains personnages. C’est parfois très amusant, comme dans la scène du cabillaud, mais ce type de situation revient trop souvent sans que cela forme vraiment un tout. Le réalisateur Alex Van Warmerdam joue lui-même le rôle principal.
Note : 2 eacute;toiles

Acteurs: Alex van Warmerdam, Ariane Schluter, Jaap Spijkers, Thekla Reuten
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16 octobre 2008

Irina Palm (2007) de Sam Garbarski

Irina PalmElle :
Ce film réaliste social, sur une femme qui va au bout de ses limites pour pouvoir sauver son petit-fils de la mort, est assez touchant. Sam Garbarski parvient à teinter son scénario de touches d’humour et de tendresse dans l’univers glauque et sulfureux des sex shops de Soho. Marianne Faithfull est méconnaissable ; elle porte entièrement le film avec une interprétation pudique et juste. On peut reprocher une certaine faiblesse au niveau du scénario qui manque d’étoffe et dont on pressent trop les évènements.
Note : 3 étoiles

Lui :
Cherchant désespérément de l’argent pour payer un ultime traitement à son petit-fils très malade, une veuve de 50 ans accepte de devenir « hôtesse » dans un club de Soho. Elle devient ainsi Irina Palm. Si cette idée de départ a un peu du mal à passer au début du film, le réalisateur polonais Sam Garbarski parvient à trouver le ton juste pour traiter cette histoire à la fois tragique et comique : il gomme tous les aspects un peu sordides de la situation pour dresser un beau portrait de femme particulièrement volontaire et aussi un peu naïve, admirablement interprétée par une Marianne Faithfull qui se retrouve ainsi pour la première fois à porter un film entier sur ses épaules. Irina Palm a tout d’abord un parfum de réalisme social et laisse ensuite de plus en plus de place à la comédie. L’ensemble est plutôt réussi.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Marianne Faithfull, Miki Manojlovic, Kevin Bishop, Siobhan Hewlett
Voir la fiche du film et la filmographie de Sam Garbarski sur le site IMDB.

7 octobre 2008

Pharaon (1966) de Jerzy Kawalerowicz

Titre original : « Faraon »

Pharaon Elle :
(pas vu)

Lui :
Pharaon relate l’accession au pouvoir du jeune Ramsès XIII. Refusant d’entrer dans le jeu des intrigues, il s’oppose aux grands prêtres qui usent de leur pouvoir spirituel pour mieux asseoir leurs positions. Précisons d’emblée que Ramsès XIII n’a jamais existé (le dernier pharaon de la XXe dynastie est Ramsès XI). Non, il s’agit d’un souverain inventé par l’écrivain polonais Boleslaw Prus pour son roman Le Pharaon paru en 1895. Ce film en est l’adaptation. Pharaon est plus une réflexion sur le pouvoir, sur l’oppression du peuple (illustrant ainsi l’oppression du peuple polonais par les Tsars en cette fin du XIXe siècle), thèmes assortis d’un anticléricalisme marqué, ces grands prêtres étant totalement coupés du peuple. La réalisation est assez grandiose, le tournage dans le désert d’Ouzbekistan ayant nécessité deux années de préparation et deux milles figurants prêtés par l’Armée Rouge. Toutefois, à la différence de certains péplums hollywoodiens, le décorum ne prend pas le dessus sur le contenu et cela rend Pharaon d’autant plus passionnant. Cette vision du pouvoir, des forces qui s’y exercent et de ses contradictions est suffisamment profonde pour être marquante.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Jerzy Zelnik, Wieslawa Mazurkiewicz, Barbara Brylska, Piotr Pawlowski
Voir la fiche du film et la filmographie de Jerzy Kawalerowicz sur le site imdb.com.

Pour en savoir plus :
Lire une analyse précise du film et de son contexte sur le site peplums.info

28 septembre 2008

After the wedding (2006) de Susanne Bier

Titre original : « Efter brylluppet »

After the weddingElle :
Ce film émouvant est une histoire humaine qui se passe dans deux univers bien différents. Assortie d’un scénario bien huilé, elle monte en intensité dramatique au fil des minutes. Le monde des démunis et des orphelins d’Inde qui peinent pour survivre s’oppose au monde des nantis qui vivent à leur manière les épreuves de la vie. Cet homme qui se dévoue totalement pour un orphelinat de Bombay, se trouve confronté à son passé et à sa vie personnelle dans le milieu d’un riche industriel du Danemark. Susan Bier dévoile avec subtilité les facettes cachées de cet homme aux manières rustres et aux apparences trompeuses. Les révélations et rebondissements inattendus font que l’on s’attache aux personnages et à leur sort. Sa caméra est très mobile ; elle frôle les visages, les regards qui reflètent la joie, l’amour, l’anxiété, la tristesse ou le malheur. L’être humain qu’il soit pauvre ou riche éprouve les mêmes sentiments vis-à-vis de la mort ou de la vie. Les acteurs sont convaincants.
Note : 5 étoiles

Lui :
Film danois, After the wedding est un drame familial à la fois intense et touchant. Sous des atours de mélodrame, Suzanne Bier parvient à se concentrer sur quelques valeurs essentielles. La cinéaste danoise utilise une camera très mobile, mais sans excès, et parsème ses scènes intimistes de très gros plans. Le même sujet traité par le cinéma américain donnerait certainement un mélodrame bien trop appuyé ; en revanche, il se dégage de After the wedding une authenticité qui lui donne une indéniable force et une toute autre portée.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Mads Mikkelsen, Sidse Babett Knudsen, Rolf Lassgård, Stine Fischer Christensen
Voir la fiche du film et la filmographie de Susanne Bier sur le site imdb.com.

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3 septembre 2008

Grand Prix (1975) de Ivo Caprino

Titre original : « Flåklypa Grand Prix »

Grand Prix d’Ivo CaprinoElle :
(pas vu)

Lui :
Grand Prix du norvégien Ivo Caprino est vraiment une petite perle du film d’animation qui vaut la peine d’être découverte. Grand Prix n’est pas franchement méconnu puisque c’est un film culte dans son pays d’origine où il a fait 5 millions d’entrées (alors que la Norvège ne compte qu’un peu plus de 4 millions d’habitants !) Il aurait, dit-on, inspiré Georges Lucas pour créer sa « Pod Race » de Star Wars La Menace fantôme, 25 ans plus tard. L’histoire est celle d’un inventeur excentrique (il vit en haut d’une montagne avec un canard débrouillard et une grosse taupe dépressive…) qui invente une voiture de course révolutionnaire. C’est une histoire très enfantine et naïve, avec des gentils et des méchants, mais les personnages sont réellement attachants. De plus, l’univers recréé est plein d’appareillages et d’inventions farfelus ce qui a permis à Caprino de parsemer le tout d’un humour tout en finesse assez omniprésent. Il y en a vraiment pour tout le monde, de 5 ans à 95 ans… La technique utilisée est celle du « stop-motion » (petites marionnettes que l’on filme image par image). L’animation est très bien réalisée, à peine moins fluide que les marionnettes en pâte à modeler de Nick Park 20 ans plus tard (Wallace et Gromit, Chicken run, etc…). Grand Prix a été réalisé en 3 ans et demi par une petite équipe de 5 personnes. Ivo Caprino n’a pas réalisé d’autres longs métrages d’animation par la suite. Grand Prix apparaît aujourd’hui comme un film d’animation assez unique, plutôt en avance sur son temps, un de ces films sur lesquels le temps ne semble pas avoir de prise.
Note : 5 étoiles

Acteurs:
Voir la fiche du film et la filmographie de Ivo Caprino sur le site imdb.com.

Homonyme :
Grand Prix de John Frankenheimer (1966), avec James Garner et Yves Montand.