31 mars 2009

Lust, caution (2007) de Ang Lee

Titre original : « Se, jie »

Lust, CautionElle :
Un film soporifique à grand spectacle auquel je suis restée hermétique. De belles images c’est vrai mais ça ne suffit pas. Une première partie longue et ennuyeuse parsemée de flashbacks. Une histoire d’amour sulfureuse totalement prévisible entre cette jeune espionne séductrice et cet homme froid qui se laisse prendre au piège de la beauté. Un film académique qui répond davantage aux codes d’Hollywood et du film à oscar qu’à un cinéma novateur et audacieux. (Abandon au bout d’une heure.)
Note : pas d'étoile

Lui :
A Shanghai, en 1942, sous l’occupation japonaise, une jeune actrice débutante se retrouve impliquée dans un projet d’assassinat par un petit groupe de jeunes résistants. Elle est chargée de séduire l’un des membres les plus en vue de la collaboration. Après plusieurs films à Hollywood, Ang Lee revient en Chine pour tourner Lust, Caution. Cela ne l’empêche pas de bénéficier de moyens importants pour sa reconstitution, assez impressionnante par sa minutie, du Shanghai de 1942. La mise en scène est opulente, parfois même un peu trop démonstrative. Cela n’empêche pas Ang Lee d’insuffler une réelle force à son film, avec une intensité qui monte très lentement mais sans faillir. La fausse légèreté du début de Lust, Caution laisse la place à une montée de la tension entre les deux personnages principaux, tension ponctuée par des scènes d’amour d’une intensité rare. Lust, Caution repose essentiellement sur son duo d’acteurs principaux : Tony Leung, dont on connaît les qualités grâce aux films de Wong Kar-wai, et Tang Wei, nouvelle venue, qui parvient parfaitement à traduire toute l’ambiguïté (et l’ambivalence) de son personnage.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Tony Leung Chiu Wai, Tang Wei, Joan Chen, Lee-Hom Wang
Voir la fiche du film et la filmographie de Ang Lee sur le site IMDB.

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6 février 2009

Comme une épouse, comme une femme (1961) de Mikio Naruse

Titre original : « Tsuma to shite onna to shite »

Comme une épouse, comme une femmeElle :
Comme dans tous les films de Mikio Naruse, les femmes sont ici très émouvantes tant elles sont à la merci des traditions, des codes et de la loi des hommes. L’adultère est une institution que les épouses sont obligées de subir et les maîtresses, hôtesses de bar, se résignent à accepter. Aucune d’entre elles ne peut construire une vie épanouie et les maris vivent en véritable état de bigamie sans se poser davantage de questions. C’est étonnant de voir ce réalisateur rivé à ce thème des femmes soumises et bafouées tout au long de sa carrière alors que les personnages masculins de ses films sont si lâches et égoïstes. Dans ce film, il nous plonge tragiquement au coeur d’une famille vivant dans le mensonge le plus total depuis de longues années tant sur le plan de l’amour que de la naissance des enfants.
Note : 4 étoiles

Lui :
Comme une épouse, comme une femmeComme une épouse, comme une femme débute par la vision d’une famille en apparence heureuse et classique mais plus le film avance et plus la réalité nous apparaît bien plus complexe et, à mi film, nous percevons toute la cruauté et le tragique de la situation. Cette progression dans la mise en place de la tragédie est assez remarquable et témoigne de la grande maîtrise du réalisateur japonais. Mikio Naruse traite une fois de plus de la place de la femme dans la société japonaise, en l’abordant cette fois par l’opposition/complémentarité femme légitime / maîtresse. Une fois de plus, les hommes sont particulièrement lâches, et une fois de plus, ce sont au final des vies gâchées. Comme une épouse, comme une femme est un film fort tout en restant très simple.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Hideko Takamine, Chikage Awashima, Masayuki Mori, Yuriko Hoshi, Tatsuya Nakadai, Kumi Mizuno
Voir la fiche du film et la filmographie de Mikio Naruse sur le site IMDB.
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19 janvier 2009

Secret Sunshine (2007) de Lee Chang-dong

Titre original : « Milyang »

Secret SunshineElle :
Secret Sunshine nous montre l’errance d’une jeune mère à la recherche d’une renaissance intérieure suite au décès de son mari puis de son fils. Sa famille la rejette car son mari l’a trompée et parce qu’elle ne pleure pas lors de l’enterrement de son fils. En plein désarroi et toujours suivie par un ange gardien célibataire et amoureux d’elle, on assiste à son cheminement douloureux pour tenter de retrouver la paix intérieure et le goût à la vie dans cette ville de Milyang qui signifie « lieu ensoleillé » ou « Secret Sunshine ». Pas de demi-mesure, la jeune femme est entière : soit elle reste fermée aux émotions soit elle les manifeste avec excès. Après un passage dans un groupe religieux qu’elle finit par trouver hypocrite, elle tente en vain de trouver le bonheur par le sexe puis en essayant de mettre fin à ses jours. Le réalisateur esquisse avec sensibilité un cheminement chaotique, une voie sans issue au bord de la fêlure et du gouffre. Son cinéma est sombre et sans espoir.
Note : 3 étoiles

Lui :
J’avoue de ne pas avoir été vraiment touché par l’histoire de cette jeune femme qui tente de se redresser après une double tragédie. Ce n’est probablement pas à cause de l’interprétation de Jeon Do-yeon qui donne beaucoup pour son personnage. Non, ce serait plutôt du fait du comportement entier et sans nuances de l’héroïne dont les changements d’attitude sont assez brutaux et mal expliqués et le manque de profondeur des personnages secondaires. La réalisation de Lee Chang-dong, un peu terne, ne rattrape rien. Non, j’ai bien du mal à partager l’enthousiasme qui a entouré Secret Sunshine.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Jeon Do-yeon, Song Kang-ho
Voir la fiche du film et la filmographie de Lee Chang-dong sur le site imdb.com.

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4 janvier 2009

Quand une femme monte l’escalier (1960) de Mikio Naruse

Titre original : « Onna ga kaidan wo agaru toki »

Quand une femme monte l’escalierElle :
Naruse explore sans se lasser et toujours avec autant d’émotion et de subtilité le thème des femmes japonaises victimes de la lâcheté des hommes et de l’organisation très patriarcale de la société japonaise à l’aube des années 60. Avec Quand une femme monte l’escalier, il nous introduit cette fois dans l’univers intimiste des hôtesses de bar qui déployent leurs charmes pour détendre les hommes d’affaires stressés. Il reprend l’actrice au teint de porcelaine Hideko Takamine pour interpréter cette jeune femme perdue entre son désir d’épouser un homme riche qu’elle n’aime pas ou acheter un bar avec l’aide financière de ses clients avec des contreparties à la clé. Un beau film émouvant et superbement mis en scène.
Note : 4 étoiles

Lui :
L’escalier dont il est question dans le titre est celui de ces bars à hôtesses souvent situés au premier étage du centre de Tokyo en ces années 50. Keiko est l’une de ces hôtesses et quand elle monte l’escalier, elle sait qu’elle doit opérer une transformation en elle. Le cinéaste japonais Mikio Naruse montre une fois de plus tout son talent pour nous faire toucher du doigt la condition des femmes dans cette société japonaise de l’après-guerre en prenant pour sujet une femme dont le métier est de divertir les hommes. En apparence, ces hôtesses sont belles, assez libres et gagnent bien leur vie mais en réalité, elles n’ont que peu de choix possibles pour orienter leur futur. Une fois de plus, l’actrice Hideko Takamine parvient à allier puissance et délicatesse dans son jeu, avec une douceur qui convient si bien à la façon de filmer de Naruse. Quand une femme monte l’escalier n’est pas plus tendre avec les hommes que les autres films du cinéaste, bien au contraire : ils sont invariablement lâches, égoïstes et menteurs. Un très beau film qui, sous la fausse légèreté de son sujet, cache le portrait d’une société.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Hideko Takamine, Masayuki Mori, Reiko Dan, Tatsuya Nakadai, Ganjiro Nakamura
Voir la fiche du film et la filmographie de Mikio Naruse sur le site IMDB.

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10 décembre 2008

4:30 (2005) de Royston Tan

30Elle :
Un film immensément triste et émouvant, une histoire de solitude profonde presque atemporelle qui nous plonge à mi-chemin entre réel et imaginaire. Un enfant presque abandonné est confié à un oncle dépressif et alcoolique qui l’ignore tant son chagrin d’amour est profond. Cette indifférence et incommunicabilité entre des êtres a priori proches est souvent le ressort des films asiatiques contemporains. 4:30 est un film quasiment muet qui mise sur les images dépouillées, les portraits de toute beauté, les regards et les larmes, les éclairages subtils, une musique éthérée pour faire passer les émotions et cette lente marche vers l’isolement total. Un déchirement pour cet enfant orphelin des hommes.
Note : 4 étoiles

Lui :
Un jeune garçon singapourien vit quasiment seul dans un appartement, avec un oncle coréen dépressif qui l’ignore totalement. Sa mère l’appelle tous les matins pour vérifier qu’il part à l’école. 4:30 est un film sur la solitude, la solitude de cet enfant qui cherche à parler à cet oncle qui est le seul lien familial auquel il puisse tenter de s’accrocher, et la solitude de cet oncle, qui noie le chagrin d’une séparation douloureuse dans l’alcool et les barbituriques et qui se mure dans une absence totale de communication. Tout le film est donc construit autour de ces deux personnages : il se déroule quasiment sans paroles, une façon pour le réalisateur de s’affranchir des barrières culturelles et ainsi donner une certaine universalité à cette double solitude. Sans nous donner toutes les clés pour comprendre (1), le singapourien Royston Tan filme avec une certaine lenteur qui n’est cependant jamais pesante, c’est là l’expression d’un vrai talent car il parvient à rendre cette histoire particulièrement touchante. Elle est aussi assez terrible.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Xiao Li Yuan, Kim Young-jun
Voir la fiche du film et la filmographie de Royston Tan sur le site imdb.com.

(1) Il n’est pas évident de comprendre que l’enfant et l’oncle ne parlent pas la même langue. On remarque bien, au moment où l’oncle va acheter une glace, qu’il parle au vendeur par gestes et il y a aussi la scène de l’escalier où il prononce enfin quelques mots à son neveu ; mais cela ne saute pas aux yeux. De plus, pour nous occidentaux, on ne peut voir que le petit mot laissé avec le pot de nouilles (« Je pars » ?) est écrit en autre chose que du chinois. Tout comme, nous ne pouvons reconnaître physiquement un coréen d’un singapourien (en supposant que cela soit possible, ce dont je ne suis pas certain).

17 novembre 2008

Courant du soir (1960) de Yuzo Kawashima et Mikio Naruse

Titre original : « Yoru no nagare »

Courant du soirElle :
Un film de Naruse plus inattendu, plus violent aussi sous certains aspects, un peu confus parfois mais intensément beau dans ses couleurs. Un regard nouveau sur le japon des années 60. Les palettes de gris, de bleus argentés, de blanc, de noir, d’ombre et de lumière sont intensément belles tout comme les éclairages, les cadrages très photographiques, les compositions très structurées, les images toute en profondeur grâce aux plans successifs, les scènes très délicates avec les femmes en kimonos. Un regard très esthétique et sensible traverse Naruse et son acolyte. Toujours le thème de la femme soumise au désir, aux caprices et à l’abandon des hommes dans le milieu des geishas qui en s’occidentalisant de plus en plus, perdent leur aura légendaire. A chaque fois que je vois un film de Naruse, je me demande pourquoi il a été éclipsé en occident, par rapport à Ozu par exemple.
Note : 4 étoiles

Lui :
Courant du SoirDans Courant du Soir, on trouve un Naruse un peu plus pimpant qu’à l’habitude, la présence de Yuzo Kawashima (considéré comme l’un des précurseurs de la nouvelle vague japonaise) à ses côtés n’y étant certainement pas étranger. Si le film semble démarrer sur un ton léger avec une fraîcheur étonnante, la suite se révèle plus profonde et dramatique. Courant du Soir traite une fois encore des rapports entre hommes et femmes dans un environnement de type maison de geisha, les protagonistes semblent cette fois beaucoup plus jeunes et insouciantes et, du moins en apparence, subissent moins et choisissent plus. L’environnement est nettement marqué début des années 60. L’opposition est forte entre les traditions profondément ancrées dans les comportements et l’apparente liberté de ce monde moderne. Dans une société japonaise qui oscille encore entre traditions et modernité, Courant du Soir nous montre que subsiste une certaine continuité dans les difficiles rapports de la femme avec les hommes et avec l’amour.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Yôko Tsukasa, Isuzu Yamada, Akira Takarada, Tatsuya Mihashi, Yumi Shirakawa, Takashi Shimura
Voir la fiche du film et la filmographie de Yuzo Kawashima et de Mikio Naruse sur le site imdb.com.

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23 octobre 2008

Au gré du courant (1956) de Mikio Naruse

Titre original : « Nagareru »

Au Gré du CourantElle :
Les femmes des films de Naruse sont toujours très touchantes. Non seulement leur visage laisse souvent transparaître la tristesse mais leur destin est tragique et sans espoir. Naruse nous plonge au coeur d’une maison de geishas qui n’ont qu’un sombre horizon devant elles car elles se font exploiter ou abandonner par leurs amants vociférants et lâches. Cette vision traditionnelle au son du shamisen côtoie un Japon en mutation dans lequel les jeunes femmes s’interrogent sur leur avenir et rêvent de fonder une famille et d’exercer un vrai métier. Dans les petites ruelles, les kimonos et sabots de bois de ces femmes soumises cohabitent avec les tailleurs et les hauts talons à l’occidentale de femmes qui tentent de s’émanciper. Un film fort et émouvant en bordure d’un fleuve qui emportent les rêves.
Note : 4 étoiles

Lui :
Au Gré du Courant se situe entièrement à l’intérieur d’une maison de geishas, sans qu’il ne s’y déroule beaucoup d’évènements ; nous les regardons vivre mais Naruse s’attarde plus particulièrement sur deux femmes : la maîtresse de maison, criblée de dettes, qui ne peut qu’assister impuissante à la lente disparition de sa maison sans pouvoir la transmettre à sa fille, et la nouvelle bonne, une femme veuve arrivée de sa province pour pouvoir subvenir seule à ses besoins. La caméra de Naruse semble faire corps avec la maison, offrant à chaque fois un angle parfait. Le jeu très naturel des acteurs (ou plus exactement actrices puisque les hommes sont quasiment inexistants) contribue à nous faire pénétrer ce microcosme si particulier. Rien de futile dans tout cela, Naruse dresse le portrait de femmes dont le monde s’écroule et Au Gré du Courant semble s’achever sur un chant du cygne.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Kinuyo Tanaka, Isuzu Yamada, Hideko Takamine, Mariko Okada
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6 octobre 2008

Nuages flottants (1955) de Mikio Naruse

Titre original : « Ukigumo »

Nuages FlottantsElle :
Une histoire forte pleine d’intensité dramatique et une femme au visage de porcelaine qui est victime de la muflerie des hommes. Naruse nous invite comme souvent à entrer dans un scénario construit autour de flash back. On remonte ici dans la vie d’une jeune femme qui tombe amoureuse pour toujours d’un homme qui profite d’elle quand il en a besoin et l’abandonne quand il va bien. Elle se sacrifie totalement pour lui. Le cinéaste dénonce la lâcheté et l’égoïsme des hommes. Il nous fait également découvrir la vie des petites rues, l’atmosphère de pauvreté qui règne en cette année 1946. Un film riche et poignant d’une grande beauté visuelle.
Note : 4 étoiles

Lui :
Juste après la fin de la guerre, une jeune femme tente de revoir un homme dont elle s’est éprise alors qu’elle était secrétaire. Cet homme marié lui avait alors promis de vivre avec elle. Nuages Flottants nous montre la vie d’une femme qui ne recherche qu’une chose : vivre avec l’homme qu’elle aime. Hélas, elle se heurtera à son égoïsme. Hideko Takamine est assez bouleversante dans ce rôle, avec ce mélange de candeur et de détermination qui rend son personnage attachant. Beaucoup de résignation aussi et ce, dans tous les personnages féminins. Les hommes, eux, ne sont guère à la fête, lâches, manipulateurs ou pire encore. Sans insister, Mikio Naruse aborde de nombreux sujets difficiles : le viol, la prostitution, l’avortement, les difficultés de l’après-guerre. Très belle (et intense) scène finale.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Hideko Takamine, Masayuki Mori, Mariko Okada, Isao Yamagata
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30 septembre 2008

Still Life (2006) de Jia Zhang Ke

Titre original : « Sanxia haoren »

Still LifeElle :
Still Life est un film d’une grande richesse tant sur le plan de la beauté visuelle, de l’histoire humaine des personnages, des messages qu’il fait passer, de l’atmosphère étrange qui y règne, des interprétations qu’on peut y trouver. C’est une plongée étrange et touchante aux abords de l’énorme barrage des Trois Gorges qui nécessite l’engloutissement des villages par les eaux et un important déplacement de population. Le long du fleuve maudit, on suit un homme qui recherche sa femme qu’il n’a pas vu depuis seize ans et une femme qui n’a plus de nouvelles de son mari depuis deux ans. Les trajectoires de vie sont déstructurées au fur et à mesure que le temps passe, les gens se perdent et se retrouvent, les bâtiments sont détruits à coup de masse. On croise les paysans traditionnels, les anciens Mao et les artisans de la nouvelle Chine qui veulent moderniser le pays en bouleversant le patrimoine et les modes de vie. Un parfum de destruction et de tristesse flotte sur les immeubles béants comme si la guerre les avait rasés. Le réalisateur donne à voir des compositions artistiques étonnantes et de toute beauté en jouant sur les flous, les ombres chinoises, les formes découpées, les contrastes, les symboles avec le funambule ou l’immeuble qui s’écroule. A voir absolument.
Note : 5 étoiles

Lui :
Dans la province de Fengje, la construction du gigantesque barrage des Trois Gorges provoque l’engloutissement de villes entières et provoque des déplacements de population. Dans cet environnement si particulier, Jia Zhang Ke met en parallèle (ou en opposition) deux histoires symétriques (ou complémentaires) : un homme recherche sa femme et sa fille qu’il ne connaît pas, une femme recherche son mari dont elle est sans nouvelle. Still Life nous plonge en plein cœur de la Chine qui détruit pour reconstruire, qui déplace les populations avec les éloignements et drames familiaux qui en découlent. Il est même assez étonnant que ce film ait pu passer la censure chinoise car Still Life nous montre une Chine où l’autorité est désorganisée (à l’image de cet ex-directeur d’usine impuissant) et où l’individu ne compte guère : le rouleau compresseur de la rénovation écrase tout sur son passage. Seul un superbe pont (qu’un nouveau riche vaniteux fait allumer pour épater ses invités) est là pour symboliser la reconstruction… Tout cela n’est guère engageant. Le rythme adopté par Jia Zhang Ke est placide, à l’image de la résignation de ses deux personnages principaux qui montrent toutefois une inébranlable ténacité dans leur quête.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Zhao Tao, Han Samming
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26 septembre 2008

Le vieux jardin (2006) de Im Sang-soo

Titre original : « Orae-doen jeongwon »

Le Vieux JardinElle :
Ce film coréen sombre et émouvant nous plonge dans deux époques différentes : 1980, période de la junte militaire au pouvoir qui fait arrêter et massacrer les opposants et le début des années 2000, moment où un prisonnier politique est libéré. Le scénario imbrique subtilement passé et présent avec la vie de cet homme aux côtés de son amie qu’il finit par quitter pour retourner à ses activités politiques et le retour à la vie au sortir de la prison. La jeune femme laisse filtrer sur son beau visage son amour pour lui. Le cinéaste joue avec le flou, les reflets, les atmosphères atemporelles, les pauses, les regards, la douceur qui enveloppe les visages et la cruauté des scènes de manifestations. Pas un mot de trop, les images parlent d’elles même ; elles sont de toute beauté.
Note : 4 étoiles

Lui :
Le Vieux Jardin est l’adaptation d’un roman qui eut un grand succès en Corée du Sud. Paru en l’an 2000, il retrace la vie d’un militant politique au moment de l’instauration de la dictature militaire au début des années 80. (1) Le film est toutefois bien plus qu’un film politique (même s’il nous montre sans équivoque toute la brutalité du régime militaire) car ses personnages ont une profondeur qui lui donne une dimension humaine très forte. Le Vieux Jardin est d’ailleurs plus centré sur la relation de cet activiste avec son amie. Im Sang-soo déstructure totalement la chronologie du récit, le film se présentant comme un flash-back entremêlé de scènes du présent, ce qui est parfois un peu déstabilisant. Son image est très belle, avec des gros plans sur les visages de toute beauté et des plans américains sur les personnages très travaillés. La grande douceur des images crée un fort contraste avec les quelques scènes de manifestations ou de prison. Tous ces éléments contribuent à donner une indéniable profondeur au film.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Yum Jung-ah, Ji Jin-hee
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(1) Parvenu au pouvoir par un coup d’état fin 1979, le Général Chun Doo-hwan a instauré un état de siège en Corée du Sud et emprisonné un grand nombre d’opposants. Lors de manifestations de la population, l’armée intervient et fait plusieurs centaines de morts. Les autres participants à ces manifestations seront traqués, emprisonnés à vie et torturés.