19 octobre 2010

La femme en question (1950) de Anthony Asquith

Titre original : « The woman in question »
Autre titre : « Five angles on murder » (USA)

La femme en questionLui :
Dans un quartier populaire d’une ville anglaise de bord de mer, une femme vient d’être retrouvée étranglée dans son appartement. Le commissaire de police mène l’enquête… Tourné peu après la guerre, période assez florissante pour le cinéma britannique, La femme en question est un film policier dont l’originalité réside dans sa construction : chacun des témoignages est l’occasion d’un flashback et, surtout, l’apparence de la victime change totalement selon l’image de chacun. L’intrigue est bien mise en place et la vérité n’est dévoilée qu’à la toute fin ; elle est hélas un peu terne. Le film est néanmoins plaisant avec cette ambiance assez prenante qui fait la force des films britanniques de cette époque. La femme en question est aussi l’occasion de voir Dirk Bogarde, assez jeune, dans un petit rôle.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean Kent, Duncan Macrae, John McCallum, Susan Shaw, Dirk Bogarde
Voir la fiche du film et la filmographie de Anthony Asquith sur le site IMDB.

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11 octobre 2010

L’homme des vallées perdues (1953) de George Stevens

Titre original : « Shane »

L'homme des vallées perduesLui :
Un cow-boy solitaire, qui semble venu de nulle part, vient en aide à une famille de fermiers harcelée par un grand propriétaire qui cherche à les repousser plus loin (1). L’homme des Vallées perdues est un grand classique du western. Sa grande originalité est d’être vu au travers des yeux d’un enfant de dix ans et donc les personnages sont idéalisés, stéréotypés, un peu à l’instar d’une bande dessinée. Le cow-boy au grand cœur (Alan Ladd) est taciturne à souhait, il n’utilise ses armes que pour une bonne cause et il aura face à lui un tueur tout de noir vêtu (Jack Palance), cruel et tellement mauvais que même les chiens préfèrent s’éloigner lorsqu’il paraît… (2) Malgré ces archétypes, le film comporte des aspects très réalistes notamment sur la vie de fermier et sur l’exactitude des lieux, de la ville (quatre maisons alignées), des costumes. Avec des personnages typés et ses vastes étendues, L’Homme des Vallées Perdues est considéré comme un modèle du genre. Le film a rencontré un très grand succès à l’époque et bénéficie toujours d’une très forte aura aujourd’hui.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Alan Ladd, Jean Arthur, Van Heflin, Brandon De Wilde, Jack Palance
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Remarques :
Le film a été tourné en 4/3 (1.33 : 1) puis recadré en 16/9 (1.66 : 1) pour sa sortie afin de ne pas détonner à un moment où le cinémascope avait toutes les faveurs du public.

(1) Une fois de plus, nous sommes à cette période charnière où de petits fermiers, munis d’une concession accordée par le gouvernement fédéral, venaient s’installer dans les grandes plaines de l’Ouest et trouvaient en face d’eux de grands propriétaires partisans de l’open land (c’est à dire aucune clôture) pour faire paître leurs vastes troupeaux.
(2) Nous ne sommes pas loin de Lucky Luke… d’ailleurs le film aurait été une source d’inspiration pour Morris et Goscinny : le personnage Phil Defer est en effet très proche du tueur tout en noir interprété par Jack Palance dans l’Homme des Vallées Perdues.

24 septembre 2010

Lovers and Lollipops (1956) de Morris Engel et Ruth Orkin

Lovers and LollipopsLui :
Une jeune veuve qui vit à New-York avec sa fille de 7 ans retrouve pendant un été un ami de longue date. Une relation se développe entre eux sous les yeux de la fillette…
Lovers et Lollipops (1) est le second film de Morris Engel et Ruth Orkin, trois ans après Le Petit Fugitif, film précurseur de la Nouvelle Vague par sa nouvelle façon de filmer dans un environnement naturel. Lovers and Lollipops contient ainsi de nombreux passages tournés en extérieur à New York même avec une petite caméra 35mm. Le film a une atmosphère très authentique, proche de la vie réelle. Le film oscille entre le regard des deux adultes sur l’enfant et le regard que l’enfant porte sur leur relation naissante. Cette différence entre le monde des adultes et le monde de l’enfance est toutefois moins puissante que dans Le Petit Fugitif et le personnage de la fillette n’a pas la force du petit Joey. Le film a eu moins d’impact que son prédécesseur mais il reste l’un des précurseurs du cinéma indépendant américain.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Lori March, Gerald S. O’Loughlin, Cathy Dunn
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(1) Les « lollipops » sont des sucettes (celles que la fillette plante dans le sable)…

23 septembre 2010

L’enquête est close (1951) de Jacques Tourneur

Titre original : « Circle of Danger »

L'enquête est closeLui :
Un américain arrive en Angleterre pour tenter de connaître les circonstances exactes de la mort de son frère pendant la guerre. Il était membre des commandos spéciaux et ne semble pas avoir été tué par l’ennemi. Production anglaise, L’enquête est close se déroule en partie à Londres et en partie en Ecosse. Le film se présente comme un film noir avec une atmosphère à la Hitchcock période anglaise. L'enquête est close L’enquête en question n’apporte pas franchement de rebondissements si ce n’est dans la dernière demi heure qui est bien construite. Une petite intrigue amoureuse est ajoutée à l’ensemble, pas toujours parfaitement intégrée. Le film garde un certain charme, celui des productions anglaises de l’après-guerre. Bonne prestation de RayMilland qui est, rappelons-le, originaire du Pays de Galles.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Ray Milland, Patricia Roc, Marius Goring, Hugh Sinclair, Naunton Wayne
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31 août 2010

Le petit fugitif (1953) de Morris Engel et Ray Ashley

Titre original : « Little fugitive »

Le petit fugitifLui :
Le Petit Fugitif est un film précurseur. Premier film indépendant américain, il préfigure la Nouvelle Vague française. C’est un film dont on avait toujours entendu parler sans pouvoir le voir, avant qu’il ne ressorte en 2009. La base scénaristique du film est simple : un petit garçon de 7 ans, qui croit avoir tué accidentellement son grand frère, s’enfuit de chez lui pour aller au parc d’amusement de Coney Island. Là, il découvre tout un monde qui le happe par ses attraits multiples. L’originalité du Petit Fugitif est d’avoir été tourné entièrement en situation réelle avec une caméra 35mm expérimentale, bricolée pour être minuscule et facilement cachée. De même, très peu de directives ont été données aux enfants qui jouent le plus naturellement du monde. Il en résulte une fraîcheur et une authenticité qui permettent au film de nous capter entièrement. Nous sommes totalement immergés et l’errance de ce jeune garçon a quelque chose d’attachant. Ce n’est qu’après avoir reçu un prix au Festival de Venise que Le Petit Fugitif a pu être bien distribué et bien accueilli par la critique et le public.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Richie Andrusco, Richard Brewster
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Remarques :
* Le montage a été assuré par Ruth Orkin, l’épouse de Morris Engel.
* Le Petit Fugitif préfigure principalement deux films majeurs de la Nouvelle Vague : Les 400 coups (Truffaut a toujours mentionné Le Petit Fugitif parmi les films qui ont montré la voie) et A bout de Souffle de Godard qui est lui aussi une fuite-errance. Godard a également repris des techniques de tournage de Morris Engel pour les porter plus loin.
* Remake : The Little Fugitive de Joanna Lipper (2006)

28 août 2010

Monsieur Ripois (1954) de René Clément

Titre anglais : « Knave of hearts »

Monsieur RipoisLui :
André Ripois est un jeune français vivant à Londres. Il a épousé une anglaise fort riche qui désire se séparer de lui. Pour tenter de séduire une amie de sa femme, André Ripois lui raconte la vie agitée qu’il a menée avant son mariage. Il désire ainsi lui prouver qu’en dépit de ses nombreuses conquêtes féminines, il n’a jamais aimé auparavant. Avec Monsieur Ripois, René Clément dresse le portrait d’un séducteur terriblement seul, fragile, insatisfait, superficiel… un portrait étonnamment complexe et empreint d’une forte authenticité. Beaucoup de scènes de rue ont été faites en plein Londres, en caméra cachée, ce qui accroît de sentiment de réalisme et de vérité (ce procédé sera repris par la Nouvelle Vague à la fin des années cinquante). Gérard Philippe montre là tout son talent avec un jeu tout en retenue, distillant une certaine ambigüité, donnant beaucoup de profondeur à son personnage.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Gérard Philipe, Valerie Hobson, Natasha Parry, Joan Greenwood, Margaret Johnston, Germaine Montero, Diana Decker
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Monsieur RipoisRemarques :
Les dialogues ont été écrits par Raymond Queneau. Le scénario est librement adapté d’un roman de Louis Hémon. Le film était initialement prévu pour être tourné en anglais. Après le choix de Gérard Philippe pour le rôle principal, il sera finalement tourné en français mais, heureusement, sans aucun doublage, les actrices anglaises jouant elles-mêmes en français avec un fort accent anglais ce qui accentue notre sentiment d’immersion dans le Londres des années cinquante.

8 août 2010

Le bon Dieu sans confession (1953) de Claude Autant-Lara

Le bon Dieu sans confessionLui :
Monsieur Dupont est mort (1). Dans le cortège funéraire, plusieurs de ses proches se remémorent l’homme qu’il était : son concierge, sa femme, sa maîtresse, ses enfants… Le bon Dieu sans confession a ainsi une construction originale, basée sur une série de flashbacks qui ne suivent pas toujours l’ordre chronologique (2). Peu à peu, nous cernons ainsi le caractère de ce Monsieur Dupont qui se dévoile à nous. Cette construction élaborée fonctionne à merveille. Le roman a été largement aménagé pour donner une très large place à Danielle Darrieux qui interprète ici une femme manipulatrice et machiavélique. Elle y est très convaincante mais c’est Henri Vilbert qui se fera surtout remarquer avec ce film : lui, qui est plus habitué aux rôles comiques avec son léger accent méridional, donne ici une vraie dimension dramatique complexe à son personnage (3). Le bon Dieu sans confession est un film bien fait qui se regarde encore aujourd’hui avec plaisir.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Danielle Darrieux, Henri Vilbert, Ivan Desny, Grégoire Aslan, Julien Carette, Claude Laydu, Claude Berri
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(1) Monsieur Dupont est mort est d’ailleurs le titre du roman de Paul Vialar qui a servi de base pour le scénario.
(2) Cette structure narrative fait inévitablement penser à La Comtesse aux pieds nus que Joseph Mankiewicz tournera un an plus tard. Mankiewicz aurait-il vu le film d’Autant-Lara ?
(3) Henri Vilbert eut le prix d’interprétation à Venise pour son rôle dans Le bon Dieu sans confession. A noter également, la toute première apparition au cinéma du jeune Claude Berri (que l’on a un peu de mal à reconnaître d’ailleurs, c’est le jeune homme amoureux de Denise Dupont, la fille). Le futur réalisateur avait alors 18 ans.

1 août 2010

La captive aux yeux clairs (1952) de Howard Hawks

Titre original : « The big sky »
Autre titre français : « Les hommes de l’Ouest »

La captive aux yeux clairsLui :
En 1832, un groupe de trappeurs et de commerçants remonte le fleuve Missouri. Ils veulent aller plus loin, là où personne n’est encore allé, jusqu’à un village indien où ils pensent être bien accueillis : ils ont avec eux la fille du chef indien qui désire rentrer dans son village…
La Captive aux yeux clairs est le deuxième des trois grands westerns tournés par Howard Hawks, réalisateur de génie touche-à-tout. Comme pour le précédent, La Rivière Rouge, il s’agit d’une histoire de pionniers mais aussi (et surtout) une histoire d’amitié forte de deux hommes, amitié ébranlée par l’amour de la même femme. Filmé très sobrement dans des décors naturels, le film est très riche ; le scénario se déroule parfaitement, sans aucun temps mort, nous captivant avec ce subtil mélange de tension et d’humour, d’aventures et de romance. Tout semble à sa place, parfaitement dosé pour créer une atmosphère naturellement forte. Production assez couteuse, La Captive aux yeux clairs ne fut pas vraiment un succès commercial à son époque. Vu aujourd’hui, il apparaît comme l’un de ces films très complets sur lesquels le temps n’a pas de prise.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Kirk Douglas, Dewey Martin, Elizabeth Threatt, Arthur Hunnicutt, Buddy Baer, Steven Geray
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Remarques :
1) A sa sortie, le film durait 140 minutes. Quelques jours plus tard, RKO pratiquait des coupes pour ramener la durée à 122 minutes, c’est cette version qui a été exploitée. D’après Hawks, le public appréciait beaucoup plus la version longue. Les éditions DVD à 2 disques comportent les deux versions.
2) La belle « captive » est interprétée par Elizabeth Threatt, jeune mannequin de père anglais et de mère Cherokee. Malgré sa belle prestation, ce sera son unique film.
3) Bizarrement, Howard Hawks n’appréciait guère ce film. Il en parlait peu et a juste fait part de ses regrets d’avoir choisi Kirk Douglas qui, selon lui, n’est pas parvenu à exprimer les sentiments de forte amitié qu’il souhaitait. Son premier choix était un duo composé de Marlon Brando et Robert Mitchum.
4) Ayant souvent affirmé que tout sujet, toute scène peut être tournée en comédie, Howard Hawks en fait ici la démonstration : il réussit à traiter en comédie la scène d’amputation d’un doigt ! (A noter que cette scène était prévue au départ pour La Rivière Rouge mais John Wayne aurait refusé de la tourner).

16 juillet 2010

Les indomptables (1952) de Nicholas Ray

Titre original : « The Lusty Men »

Les indomptablesLui :
Un ancien champion de rodéo guide un jeune cowboy désireux de gagner rapidement de l’argent ; sa femme et lui rêvent en effet de s’acheter une petite ferme. Mais ces compétitions sont particulièrement dangereuses. Les indomptables a un indéniable côté documentaire sur le monde si particulier des rodéos (1), nous éclairant non seulement sur le déroulement des épreuves mais aussi sur les motivations des concurrents. Mais le film de Nicolas Ray est surtout un double portrait de déracinés : l’ex-champion qui ne parvient pas (ou plus) à trouver quelle peut être sa place et le jeune couple qui aspire à une vie meilleure. Ce thème des déracinés est un thème qui revient souvent dans l’oeuvre de ce cinéaste. Une solide interprétation donne au film toute son intensité, jusqu’au beau et poignant sacrifice final.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Susan Hayward, Robert Mitchum, Arthur Kennedy, Arthur Hunnicutt
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(1) Les scénaristes, l’un d’entre eux étant lui-même un ancien cowboy, ont suivi pendant presque toute année le circuit des compétitions de rodéo pour s’imprégner de l’atmosphère et de la façon de parler de ces cowboys.

15 juillet 2010

Pot-Bouille (1957) de Julien Duvivier

Pot-BouilleLui :
Un jeune arriviste arrive à Paris dans un immeuble bourgeois. Peu scrupuleux, il va séduire les femmes qui passent à sa portée pour se frayer un chemin dans le monde du négoce. Adaptation d’un roman d’Emile Zola, Pot-Bouille (1) est une comédie qui met en relief l’hypocrisie et les mesquineries de la vie bourgeoise. Le ton est particulièrement caustique et les dialogues d’Henri Jeanson sont vifs et relevés, parfois féroces. L’humour y est toujours présent. Que ce soit dans les premiers ou seconds rôles (et ils sont nombreux), l’interprétation est uniformément assez remarquable. Pot-Bouille est bien soutenu par une réalisation sans faille ce qui lui permet de traverser allégrement les époques. Assez bizarrement, le film est souvent considéré comme mineur. Il mérite bien mieux que cela.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Gérard Philipe, Danielle Darrieux, Dany Carrel, Anouk Aimée, Henri Vilbert, Jane Marken
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(1) « Pot-Bouille », dans le langage familier du XIXe siècle, est un synonyme de « popote », le quotidien du ménage. Balzac fut le premier à l’employer (1838) de façon littéraire sous sa forme « faire pot-bouille avec quelqu’un » qui signifie « se mettre en ménage ». Bien plus tard (1882), Zola en fera le titre d’un de ses romans auquel il donnera une suite un an plus tard : « Au bonheur des dames ».