1 avril 2009

Promets-moi (2007) de Emir Kusturica

Titre original : « Zavet »

Promets-moiElle :
On est bien d’accord, le cinéma de Kusturica est unique. Mise en scène talentueuse, originalité, loufoquerie, extravagance, inventivité, poésie parsèment ses films. Cependant, le scénario de Promets-moi est vraiment trop léger pour me retenir jusqu’à la fin.
Note : pas d'étoile

Lui :
Un jeune adolescent serbe est chargé par son grand-père d’aller à la ville vendre une vache et ramener une fiancée. Avec Promets-moi, Kusturica se livre à une surenchère, comme pour toujours aller plus loin dans le loufoque hystérique. Il s’appuie sur des personnages hauts en couleur, notamment un petit gang de truands d’opérette et un duo de pieds nickelés, sorte de lutins manieurs de mitraillettes. Ça part dans tous les sens, le délire est total avec les clins d’œil cinématographiques de rigueur (de Buster Keaton à Fellini). Il y a bien quelques bons moments mais l’ensemble semble assez gratuit et manque d’un semblant de cohérence.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Uros Milovanovic, Marija Petronijevic, Aleksandar Bercek, Miki Manojlovic
Voir la fiche du film et la filmographie de Emir Kusturica sur le site IMDB.

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28 mars 2009

L’image vagabonde (1920) de Fritz Lang

Titre original : « Das wandernde Bild »

Fritz LangElle :
(pas vu)

Lui :
L’image vagabonde fait partie des tous premiers films muets de Fritz Lang, entre Les Araignées et Dr Mabuse, le joueur. C’est le premier film écrit conjointement avec sa (future) femme Thea von Harbou. Il s’agit d’une intrigue qui ne se dévoile que petit à petit, où une femme, veuve de fraîche date, est poursuivi par un homme jusque dans les montagnes situées autour d’un grand lac. Le film a longtemps été considéré comme perdu mais une copie incomplète (60 minutes environ) a pu être restaurée en 1987. Les intertitres ont été recréés. Fritz Lang montre déjà beaucoup de son talent, jouant remarquablement avec les visages et les personnages. Belle symbolique autour d’une statue de vierge à l’enfant dans la neige qui reprend vie.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Mia May, Hans Marr, Rudolf Klein-Rogge, Harry Frank
Voir la fiche du film et la filmographie de Fritz Lang sur le site IMDB.

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Remarque :
L’image vagabonde a été présenté pour la première fois en France par Patrick Brion en janvier 2009, au ciné-club de FR3.

20 mars 2009

Viridiana (1961) de Luis Buñuel

Viridiana Elle :
(pas (re)vu)

Lui :
Assez paradoxalement, c’est dans son seul film tourné en Espagne franquiste que Luis Buñuel se livre à la diatribe la plus mordante contre l’Etat et la religion. Il va beaucoup plus loin qu’avec son précédent film Nazarin. Le film est plus ou moins basé sur la vie de Santa Viridiana. Une jeune novice est rappelée du couvent par son oncle, juste avant de prononcer ses vœux. La jeune femme va tenter de faire le bien autour d’elle mais cela va se retourner contre elle. Le film est imprégné du début à la fin par une satire intense de la bigoterie et de la bourgeoisie espagnole vieillotte. La première partie oppose Viridiana à son oncle qui vit quasiment reclus sur des principes qui n’ont pas bougé depuis 50 ans. Buñuel met en parallèle le fétichisme religieux de la jeune fille avec le fétichisme érotique passablement macabre du vieil oncle. Viridiana Dans la seconde partie, Buñuel se déchaîne bien plus, notamment avec un groupe de mendiants hébergés par Viridiana, une galerie de trognes hautes en couleur qui semblent sorties de l’univers de Goya ; le film s’achève par une bacchanale délirante qui tourne en véritable orgie. Beaucoup de scènes fameuses parsèment le film d’une multitude d’objets emblématiques ou fétichistes. Toutes les scènes de Viridiana ont un sens, aucune ne semble gratuite ; c’est un film que l’on peut voir et revoir et découvrir de nouvelles choses à chaque vision. Viridiana est sans aucun doute l’un des meilleurs films de Buñuel, l’un des plus mordants et débridés.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Silvia Pinal, Francisco Rabal, Fernando Rey, Margarita Lozano
Voir la fiche du film et la filmographie de Luis Buñuel sur le site IMDB.

Remarque :
Comment Buñuel a-t-il réussi à tourner ce film dans l’Espagne franquiste reste un mystère. Viridiana représentait même l’Espagne au Festival de Cannes 1961 (Buñuel avait toutefois pris soin de n’apporter son film qu’à la toute dernière minute). Le film fut ensuite immédiatement interdit en Espagne, aucun journal n’eut le droit de dire qu’il avait gagné la Palme d’Or. Cette interdiction dura jusqu’à la mort de Franco.
Viridiana déclencha également le courroux du Vatican. Il faut bien avouer qu’il y avait de quoi… ! L’incroyable parodie de la Cène de Léonard Vinci par la troupe de mendiants qui prend la pose devant une femme qui lève sa jupe en guise d’appareil photo est restée célèbre.

2 mars 2009

L’Homme perdu (1951) de Peter Lorre

Titre original : « Der Verlorene »

L'Homme perduElle :
(pas vu)

Lui :
L’Homme perdu nous plonge dans l’Allemagne de l’après-guerre. Un homme rongé par le remord revit les évènements qui l’ont amené à commettre l’irréparable. Si les évènements en question ne sont qu’indirectement liés à la guerre, c’est le contexte de la guerre qui les provoque. Le fond du propos est bien évidemment « comment peut-on vivre avec le lourd fardeau du passé ». Il n’est guère étonnant que L’Homme perdu ait été un échec (il ne serait resté sur les écrans qu’une dizaine de jours), il arrivait sans doute soit trop tard soit beaucoup trop tôt : en cette période de reconstruction, personne ne désirait réalimenter les sentiments de culpabilité. De plus le film est très noir, sans espoir. Peter Lorre est l’interprète idéal de cet homme hanté, comme altéré, avec sa voix monocorde et son débit si caractéristique. Il est difficile de ne pas penser au Peter Lorre de M le Maudit qu’il a tourné 20 ans plus tôt peu avant qu’il ne quitte l’Allemagne. Certaines scènes, comme celle de l’escalier, sont presque des liens directs entre les deux films. L’homme perdu sera hélas l’unique film de Peter Lorre en tant que réalisateur. C’est un film très sombre mais aussi très fort et terriblement implacable dans son propos.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Peter Lorre, Karl John, Helmuth Rudolph
Voir la fiche du film et la filmographie de Peter Lorre sur le site imdb.com.

26 février 2009

Pingpong (2006) de Matthias Luthardt

PingpongElle :
Ce jeune cinéaste allemand très inspiré par la musique classique réalise avec une maîtrise étonnante un huis clos qui enveloppe peu à peu ses personnages dans la noirceur. Le jeune Paul qui débarque sans prévenir chez son oncle Stefan, sa tante Anna et leur fils Robert jette le trouble et fait exploser sans le vouloir le calme apparent de cette famille bourgeoise faussement heureuse. Un mari absent et indifférent, une épouse délaissée et autoritaire, un fils pianiste, alcoolique et mal dans sa peau. Les frustrations de chacun éclatent peu à peu au grand jour avec toute l’ambiguïté et la tension que Matthias Luthardt sait instiller en ses personnages. Les évènements créent un flux de résonances malsaines ; l’univers devient étouffant. La présence de l’étang contaminé et de la piscine en construction exacerbent ce climat de mal être et de malaise profond.
Note : 5 étoiles

Lui :
Une maison plutôt cossue entourée d’un jardin, une piscine est en construction, une famille en apparence heureuse. Paul, le jeune neveu, arrive à l’improviste pour chercher une certaine stabilité après avoir vécu un drame dans sa famille. Pingpong est le premier long métrage de l’allemand Matthias Luthardt. Avec un lieu unique et quatre personnages (et un chien), il parvient à réaliser un film particulièrement fort qui monte très graduellement en puissance, montrant ainsi une très grande maîtrise dans le déroulement de son récit. Le climat devient de plus en plus étrange, troublant pour finir perturbant, le tout avec une simplicité et une retenue qui en accroissent d’autant l’intensité. Pingpong nous révèle un cinéaste à suivre et nous laisse espérer un renouveau du cinéma allemand.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Sebastian Urzendowsky, Marion Mitterhammer, Clemens Berg, Falk Rockstroh
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Autres films homonymes (mais qui n’ont rien à voir avec celui-ci) :
Ping Pong (1986) du chinois Leong Po-Chih
Ping Pong (2002) du japonais Fumihiko Sori.

12 février 2009

Stützen der Gesellschaft (1935) de Douglas Sirk

Stützen der GesellschaftElle :
(pas vu)

Lui :
Stützen der Gesellschaft, titre souvent traduit par « Piliers de la société », est le troisième long métrage de Douglas Sirk. Il l’a tourné en Allemagne hitlérienne sous son vrai nom, Detlef Sierck, peu avant qu’il n’émigre aux Etats-Unis. Le scénario est tiré d’une pièce du norvégien Henrik Ibsen : une homme riche et sans scrupule est à la tête d’un village de Norvège et de son chantier naval. Le retour au pays de son beau-frère, après 20 ans passés en Argentine, va le mettre dans l’embarras car il avait laissé courir sur lui des bruits qui arrangeaient ses affaires. Stützen der Gesellschaft est bien plus qu’une curiosité car il se révèle étonnamment bien fait, Douglas Sirk exploitant parfaitement cet excellent scénario : il rend cette histoire captivante avec une intensité qui culmine dans la scène finale de tempête, tournée en décors réels, réellement impressionnante (pour l’époque et même encore maintenant). Stützen der Gesellschaft est hélas assez rare.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Heinrich George, Albrecht Schoenhals, Suse Graf
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9 février 2009

De l’autre côté (2007) de Fatih Akin

Titre original : « Auf der anderen Seite »

De l’autre côtéElle :
Entre Brême et Istanbul, sur fond de répression politique, le film donne lieu à un chassé croisé émouvant de destins fragiles qui se cherchent, se croisent parfois sans se voir, attendent sans fin l’être aimé. La mort d’êtres chers ouvre d’autres portes et permet la renaissance. Renaissance d’un fils qui pour expier le crime de son père part en Turquie à la recherche d’Ayten. Renaissance d’une mère pleine de remords après avoir perdu sa fille partie sauver Ayten de la prison. Sur une histoire assez complexe, Fatih Akin parvient à introduire une belle fluidité dans ses images et beaucoup de délicatesse dans les portraits de ses personnages brisés.
Note : 4 étoiles

Lui :
Avec De l’autre côté, Fatih Akin nous propose un film dense, avec deux histoires qui sont entremêlées sans vraiment l’être. Elles semblent se croiser, se répondre l’une à l’autre, se compléter. Le scénario est extrêmement riche, peut-être même un peu trop, et se situe à cheval entre l’Allemagne et la Turquie. La construction est assez originale avec une utilisation particulière des ellipses et des flashbacks. Ces deux histoires sont assez puissantes et dotées d’une forte dimension humaine. Fatih Akin dit considérer De l’autre côté comme faisant partie d’un triptyque : Head-On traite de l’amour, De l’autre côté de la mort et son prochain film du Mal.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Nurgül Yesilçay, Baki Davrak, Tuncel Kurtiz, Hanna Schygulla, Patrycia Ziolkowska
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30 octobre 2008

Sarajevo, mon amour (2006) de Jasmila Zbanic

Titre original : « Grbavica »

Sarajevo, mon amourElle :
Un film poignant sur le Sarajevo d’après guerre qui connaît la pauvreté, le chômage, les trafics, la mafia. Sa population est meurtrie et traumatisée par les tortures, les disparitions, les décès des maris mais aussi par les viols à la chaîne. La réalisatrice choisit d’évoquer le destin de la mère d’une fille de douze ans, très perturbée par l’absence de son père. La honte la pousse à cacher les origines de sa naissance à sa fille car elle est l’enfant de la haine. Malgré tout, l’amour et la tendresse traversent le film car il permet de survivre. La caméra est sensible et bien maîtrisée notamment sur les portraits de femmes et les extérieurs fantomatiques de Sarajevo sous la neige.
Note : 4 étoiles

Lui :
Sarajevo mon amour nous plonge dans la Bosnie de l’après-guerre avec le portrait d’une femme qui élève tant bien que mal sa fille de 12 ans. La guerre a laissé des traumatismes qui seront longs à effacer et pèsent lourdement. Avec peu de moyens, Jasmila Zbanic est parvenu à réaliser un film centré sur l’humain, avec une importance laissée au quotidien. Elle nous montre bien aussi cette volonté de faire repartir la vie, de retrouver un équilibre psychologique et social. Sarajevo mon amour laisse enfin une grande place aux émotions de ses personnages, ces émotions que l’on a souvent tenté d’enfouir mais qui finissent par ressurgir immanquablement.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Mirjana Karanovic, Luna Mijovic, Leon Lucev
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22 octobre 2008

Waiter! (2006) de Alex van Warmerdam

Titre original : « Ober »

Waiter!Elle :
(pas vu)

Lui :
Edgar est serveur dans un restaurant un peu miteux, il a une épouse malade, des voisins odieux, une maîtresse qui le harcèle… Peu satisfait de son sort, il va se plaindre auprès du scénariste qui est en train d’écrire l’histoire qu’il vit. Telle est la situation de base de Waiter!, une situation qui semble prometteuse. Hélas, si le film comporte des bonnes trouvailles, l’ensemble manque de souffle et repose trop sur les réactions démesurées de certains personnages. C’est parfois très amusant, comme dans la scène du cabillaud, mais ce type de situation revient trop souvent sans que cela forme vraiment un tout. Le réalisateur Alex Van Warmerdam joue lui-même le rôle principal.
Note : 2 eacute;toiles

Acteurs: Alex van Warmerdam, Ariane Schluter, Jaap Spijkers, Thekla Reuten
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16 octobre 2008

Irina Palm (2007) de Sam Garbarski

Irina PalmElle :
Ce film réaliste social, sur une femme qui va au bout de ses limites pour pouvoir sauver son petit-fils de la mort, est assez touchant. Sam Garbarski parvient à teinter son scénario de touches d’humour et de tendresse dans l’univers glauque et sulfureux des sex shops de Soho. Marianne Faithfull est méconnaissable ; elle porte entièrement le film avec une interprétation pudique et juste. On peut reprocher une certaine faiblesse au niveau du scénario qui manque d’étoffe et dont on pressent trop les évènements.
Note : 3 étoiles

Lui :
Cherchant désespérément de l’argent pour payer un ultime traitement à son petit-fils très malade, une veuve de 50 ans accepte de devenir « hôtesse » dans un club de Soho. Elle devient ainsi Irina Palm. Si cette idée de départ a un peu du mal à passer au début du film, le réalisateur polonais Sam Garbarski parvient à trouver le ton juste pour traiter cette histoire à la fois tragique et comique : il gomme tous les aspects un peu sordides de la situation pour dresser un beau portrait de femme particulièrement volontaire et aussi un peu naïve, admirablement interprétée par une Marianne Faithfull qui se retrouve ainsi pour la première fois à porter un film entier sur ses épaules. Irina Palm a tout d’abord un parfum de réalisme social et laisse ensuite de plus en plus de place à la comédie. L’ensemble est plutôt réussi.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Marianne Faithfull, Miki Manojlovic, Kevin Bishop, Siobhan Hewlett
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