20 janvier 2011

Point limite (1964) de Sidney Lumet

Titre original : « Fail-safe »

Point limiteLui :
A la suite d’un malfonctionnement, un groupe de six bombardiers américains reçoit l’ordre d’aller bombarder Moscou. L’ordre ne peut être annulé que dans les cinq premières minutes mais les communications semblent brouillées… Point Limite a eu la malchance de sortir quelques mois après le Docteur Folamour de Stanley Kubrick. Tous deux traitent du même sujet, le déclenchement accidentel d’une attaque nucléaire sur la Russie, mais ils le font de façon très différente. Là où Kubrick a brillamment utilisé l’humour en montrant des militaires psychopathes, Sidney Lumet utilise le réalisme, se situant presque à la limite du documentaire. C’est ce réalisme qui rend le film si efficace et terrifiant. A part deux va-t-en-guerre, ses militaires et hommes politiques sont posés, ils prennent de bonnes décisions et pourtant on va droit dans le mur, vers une abominable catastrophe. En ce sens, le film est bien plus antimilitariste que celui de Kubrick. Tourné avec peu de moyen, Point Limite est efficace, même stressant car Lumet bâtit son suspense lentement en jouant avec les lieux clos et les gros plans. On se surprend à suer à grosses gouttes… Adapté d’un roman d’Eugene Burdick et Harvey Wheeler, le film a été tourné peu après l’affaire des missiles de Cuba et le fiasco de la baie des Cochons. En plus de démontrer le risque d’une guerre nucléaire, le film voulait aussi redorer l’image de Kennedy, ce qu’Henry Fonda, en kennedyiste convaincu, faisait de bonne grâce. Hélas le président a été assassiné peu après la fin du tournage. Point Limite n’a donc pas eu de chances avec les dates. C’est la compétition avec le film de Kubrick qui lui a fait le plus de mal : après avoir vu Dr Folamour, le public ne pouvait prendre au sérieux Point Limite. Le film est resté longtemps très largement sous-estimé.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Henry Fonda, Walter Matthau, Larry Hagman, Frank Overton, Edward Binns, Fritz Weaver
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Remarques :
Le film est si réaliste que l’US Army obligea la Columbia à ajouter un avertissement dans le générique de fin précisant que Point Limite est une pure fiction et que de tels évènements ne pourront jamais se produire.

19 janvier 2011

New York – Miami (1934) de Frank Capra

Titre original : « It happened one night »

New York - MiamiLui :
New York – Miami de Frank Capra a apporté un ton nouveau à la comédie américaine. Avec ses dialogues légers et enlevés, ses situations saugrenues basées sur les rapports homme-femme, son excellent rythme dans l’enchaînement des situations, c’est la première « screwball comedy », celle qui a lancé le genre. Personne à Hollywood ne croyait à son succès, qui ne vint d’ailleurs pas aussitôt mais qui fut immense. Il faut dire que l’alchimie entre Claudette Colbert et Clark Gable fait plaisir à voir et que nombre d’américains se sont identifiés à Clark Gable, journaliste sans le sou et débrouillard qui donne une bonne leçon de vie à une fille à papa, riche et capricieuse. Si New York – Miami a bousculé toutes les règles, il en a créé de nouvelles. Ce nouveau genre a engendré des films sans inspiration, pâles copies de l’original, mais aussi certains des plus beaux bijoux de la comédie américaine.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Clark Gable, Claudette Colbert, Walter Connolly
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Remarques :
New York - Miami 1) Dans la fameuse scène du « mur de Jéricho », lorsque Clark Gable retire sa chemise, on voit qu’il ne porte pas de maillot de corps (en réalité, c’était uniquement pour éviter que la scène dure trop longtemps). Il fut instantanément imité par bon nombre d’américains et les ventes de maillots de corps chutèrent. La légende raconte que les fabricants de sous-vêtements menacèrent la Columbia de poursuites.
2) Frank Capra a eu bien du mal à trouver ses deux acteurs vedettes : plusieurs acteurs ont refusé, jugeant le script sans intérêt. Claudette Colbert n’a accepté qu’à la condition que son salaire soit doublé et que le tournage ne dure pas plus de quatre semaines. De son côté, le prêt de Clark Gable de la MGM à la Columbia était une punition : s’estimant surmené, l’acteur avait refusé de tourner un nouveau film pour la MGM. La punition fut donc de l’envoyer tourner un petit film « sans intérêt » chez un concurrent, chose qu’il n’avait pas le droit de refuser.
3) New York – Miami est l’un des très rares films à avoir reçu les 5 Oscars majeurs. On pense que la MGM a manœuvré pour que Clark Gable (qu’ils avaient prêté à la Columbia pour le film) reçoive l’Oscar du meilleur acteur afin de booster sa carrière…

It happened one night

Remakes :
Eve knew her apples de Will Jason (1945) avec Ann Miller et William Wright
L’extravangante héritière (You can’t run away with it) de Dick Powell (1956), comédie musicale  avec June Allyson et Jack Lemmon
Garçon choc pour nana chic (The sure thing) de Rob Reiner (1985) avec John Cusak

18 janvier 2011

Burn After Reading (2008) de Joel Coen et Ethan Coen

Burn After ReadingLui :
Burn after reading est une comédie qui fait plaisir à voir. L’intrigue est passablement complexe, sans être compliquée, disons qu’elle fait intervenir des gens ordinaires un peu nigauds dans une pseudo-affaire d’espionnage. Des évènements insignifiants vont avoir des conséquences passablement démesurées… Les frères Coen font preuve de beaucoup de finesse dans leur humour, ce qui est de plus en plus rare aujourd’hui où la norme semble être de forcer le trait. Burn after Reading est ainsi parfaitement équilibré, une histoire complètement loufoque mais pas totalement improbable, des personnages qui font des choses stupides sans être des imbéciles, un rythme enlevé mais jamais précipité. Les acteurs semblent prendre plaisir à jouer leur personnage (sans crainte de dérouter : le film est déconseillé aux fans de Brad Pitt ou de George Clooney). On notera aussi un certain regard amusant et amusé sur la société américaine. Burn after Reading semble avoir été largement qualifié de « film mineur » par la critique… mais les frères Coen ont toujours excellé sur leurs films soit-disant « mineurs »! En tous cas, mineur ou pas, c’est du cinéma de grand plaisir.
Note : 5 étoiles

Acteurs: George Clooney, Frances McDormand, Brad Pitt, John Malkovich, Tilda Swinton, Richard Jenkins
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17 janvier 2011

Juge et hors-la-loi (1972) de John Huston

Titre original : « The life and times of Judge Roy Bean »

Juge et hors-la-loiLui :
Dans l’ouest du Texas, en 1890, un hors-la-loi ayant échappé de peu à la pendaison par les habitants sans foi ni loi, s’autoproclame juge dans la minuscule bourgade de Vinegaroon. Utilisant des méthodes peu orthodoxes, il parvient à faire régner une certaine loi et les quelques maisons se transforment en une petite cité… Séduit par l’idée de pouvoir reconstituer l’atmosphère du grand Ouest et de développer un certain point de vue sur la perte de l’innocence de l’Amérique (1), John Huston crée un western faussement léger : s’il est doté d’une bonne dose d’humour (comme d’autres westerns tournés en ce début des années soixante-dix), le film n’en est pas moins porteur d’une vraie réflexion. Juge et hors-la-loi Certains ont même vu dans l’épilogue une allusion à la corruption du gouvernement Nixon. Paul Newman a beaucoup apporté au film en s’imprégnant totalement de son personnage haut en couleur et en improvisant partiellement. La liberté de ton se ressent jusque dans la construction elle-même (2). Le scénario est basé sur une légende réelle, celle du Juge Roy Bean « the law west of the Pecos » (= la Loi à l’ouest du Pecos, le Pecos étant un fleuve à l’extrême ouest du Texas), légende déjà portée à l’écran de façon plus sérieuse par William Wyler (3). Juge et hors-la-loi n’eut qu’un succès relatif. Il est certainement encore un peu sous-estimé aujourd’hui.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Victoria Principal, Ned Beatty, Anthony Perkins, Jacqueline Bisset, Ava Gardner
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(1) C’est ainsi que John Huston parle de la génèse du projet dans ses mémoires.
(2) John Huston précise : « Pour appuyer mes effets, j’ai adopté une technique qui, depuis, a fait école, en mêlant à l’action des incidents sans justification logique. Des images survenaient, drôles ou tristes, comiques ou dramatiques, passant du grotesque au sérieux. »
(3) Le cavalier du désert (The Westerner) de William Wyler (1940) avec Gary Cooper et Walter Brennan.

15 janvier 2011

The Black Watch (1929) de John Ford

Traduction du titre : « La Garde Noire »

The Black WatchLui :
Un capitaine de la compagnie écossaise Black Watch est envoyé en mission secrète en Inde en 1914, le jour même où la guerre est déclarée en Europe. Là-bas, il doit prévenir une attaque de fanatiques dirigés par une mystérieuse femme qu’ils suivent aveuglément. The Black Watch est le premier film parlant de John Ford. Bizarrement, la Fox a préféré confier la réalisation des scènes de dialogues à Lumsden Hare, acteur dans le film mais surtout metteur en scène de théâtre. Le résultat est donc hétéroclite : le film comporte de belles scènes d’action (celles dirigées par John Ford) mais les dialogues sont déclamés de façon épouvantable, avec beaucoup d’emphase et de rigidité. Ce film, assez rare, est donc plutôt une curiosité, témoignage des difficultés du passage au parlant.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Victor McLaglen, Myrna Loy, David Torrence, Lumsden Hare, Roy D’Arcy
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Remake :
Capitaine King (King of the Khyber Rifles) de Henry King (1953) avec Tyrone Power et Terry Moore.

11 janvier 2011

Le signal de l’amour (1921) de Frances Marion

Titre original : « The Love Light »

The Love Light Lui :
(Film muet) Sur la côte italienne, une jeune femme et ses deux frères vivent dans une maison isolée près du phare qu’ils allument tous les soirs. Lorsque ses deux frères partent à la guerre, elle reste seule. Un matin, elle sauve un naufragé qui se dit être un américain déserteur. Elle le cache chez elle et en tombe peu à peu amoureux… Frances Marion est l’une des plus grandes scénaristes d’Hollywood (1) et il paraît donc logique que le premier film qu’elle réalise soit une intrigue assez complexe. Aussi incroyable qu’elle puisse paraître dans son développement, elle est basée sur une histoire vraie. Mary Pickford interprète ici un personnage qui convient plus à son âge réel (elle a alors 28 ans), plus mature. The Love Light L’actrice parvient à s’écarter des rôles de jeunes filles espiègles pour montrer qu’elle sait aussi donner une vraie dimension dramatique à son personnage. L’acteur Fred Thomson fait ici ses débuts (2) et se révèle avoir une forte présence à l’écran. Le Signal de l’Amour ne fut qu’un demi-succès, le public étant certainement dérouté de ne pas retrouver la Mary Pickford mutine et turbulente qu’il avait l’habitude de voir. Il avait tort…
Note : 3 étoiles

Acteurs: Mary Pickford, Fred Thomson, Raymond Bloomer
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(1) A côté de ses très nombreux scénarios, Frances Marion n’a dirigé que trois films. Le Signal de l’Amour est hélas le seul qui ait survécu. Les femmes-réalisatrices étaient extrêmement rares à Hollywood à cette époque (et après aussi, d’ailleurs…) A noter que Frances Marion et Mary Pickford étaient très amies dans la vie.
(2) Fred Thomson, qui venait d’épouser Frances Marion, n’avait à priori aucune envie de devenir acteur.  Il se laissa convaincre à la demande pressante de sa femme et de Mary Pickford. Après ces débuts prometteurs, cet acteur au superbe physique tourna une trentaine de films (dont très peu ont survécu) et devint une grande star du western. Sa carrière fut hélas très courte du fait de son décès en 1928 (dû au tétanos).

7 janvier 2011

Vive le roi (1926) de Leo McCarey

Titre original : « Long fliv the King »

Vive le roiLui :
(Muet, 22 minutes) A la suite d’un concours de circonstances assez inhabituel, un américain se retrouve sacré roi d’une petite nation. Un autre prétendant au trône est bien décidé à écarter ce gêneur inattendu… Long Fliv the King est un film assez rare de Charley Chase, acteur comique des années 20 dont la notoriété n’a jamais égalé celle des trois grands (Chaplin, Keaton et Lloyd). Le film est plaisant avec des gags assez originaux mais qui ne sont pas assez soutenus pour fonctionner pleinement. A noter, un petit rôle d’Oliver Hardy.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Charley Chase, Martha Sleeper, Max Davidson, Oliver Hardy
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Remarque :
Le scénario est très proche du film d’Harold Lloyd His Royal Slyness (Le royaume de Tulipatan) (1920).

Long Fliv the King

7 janvier 2011

Les amis (1912) de David W. Griffith

Titre original : « Friends »

FriendsLui :
(Muet 13 min) Dans l’Ouest, une aventurière qui vit au premier étage d’un saloon fréquente un chercheur d’or qui a réussi. Quand celui-ci lui annonce qu’il doit partir vers le nord pour d’autres affaires, la jeune femme se trouve rapidement un nouveau fiancé, en réalité un ami du premier. David W. Griffith a tourné assez peu de westerns. Celui-ci n’est sans doute pas parmi les plus remarquables, l’intrigue (basée sur le thème de deux amis amoureux de la même femme) étant relativement peu développée. Il permet toutefois de voir Lionel Barrymore dans l’un des ses tous premiers films, l’acteur ayant débuté l’année précédente avec Griffith. Ce serait son cinquième film.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Mary Pickford, Henry B. Walthall, Lionel Barrymore
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6 janvier 2011

L’échange (2008) de Clint Eastwood

Titre original : « Changeling »

L'échangeLui :
L’inconcevable histoire de L’échange aurait certainement été difficile à accepter si un carton ne nous avait prévenus dès le début qu’il s’agissait d’une histoire vraie. Clint Eastwood a même respecté de très près le fil réel des évènements. En 1928, la police de Los Angeles est fortement corrompue. Dans une affaire de disparition d’enfant, elle ramène à une mère un enfant qui n’est pas le sien et s’obstine, pour ne pas perdre la face devant la presse. Elle ira assez loin pour accuser la mère de ne pas reconnaitre son enfant. Le film de Clint Eastwood est d’un grand classicisme, s’appuyant sur une belle reconstitution du Los Angeles des années vingt. Mais, le point fort de L’échange est plutôt son équilibre global et sa délicatesse de traitement : aucun excès de dramatisation, ni d’effets faciles, Eastwood trouve le ton juste pour traiter cette histoire émouvante tout en donnant beaucoup d’intensité à son film. La performance d’Angelina Jolie est assez étonnante, bien qu’un peu inégale : son jeu est très plat dans certaines scènes (retrouvailles à la gare) mais parfois beaucoup plus fort (scène de la prison). Elle est tout de même le pivot du film. Le choix d’une telle actrice, plus réputée pour ses côtés people que pour ses talents d’actrice, était passablement audacieux de la part Clint Eastwood.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Angelina Jolie, John Malkovich, Jeffrey Donovan, Michael Kelly, Jason Butler Harner
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5 janvier 2011

La proposition (2009) d’ Anne Fletcher

Titre original : « The proposal »

La propositionLui :
Une directrice de collection littéraire d’origine canadienne force son assistant à l’épouser pour pouvoir rester aux Etats-Unis. Si le scénario de La proposition est aussi improbable que simplet, le film repose sur de solides recettes pour fonctionner : inversion des genres dans la situation de départ, immersion dans un monde de riches, un acteur principal au physique à faire craquer toute la gent féminine et… du rythme, du rythme, du rythme. On ne peut pas dire que le résultat soit mauvais, mais il est très loin d’être bon ! Accessoirement, on s’aperçoit que Sandra Bullock a certainement fréquenté les salles de fitness beaucoup plus assidûment que les cours d’art dramatique.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Sandra Bullock, Ryan Reynolds, Mary Steenburgen, Craig T. Nelson, Betty White
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Homonymes :
La Proposition (The proposition) de l’américaine Lesli Linka Glatter (1998) avec Kenneth Branagh
The Proposition de l’autralien John Hillcoat (2005) avec Guy Pearce et Ray Winstone.