23 mai 2014

Duel au soleil (1946) de King Vidor et William Dieterle

Titre original : « Duel in the Sun »

Duel au soleilAprès que son père ait tué sa mère par jalousie, la jeune et jolie Pearl, qui a une moitié de sang indien, est confiée à une lointaine cousine qui vit dans un immense ranch au Texas. Là, elle se trouve en présence des deux fils de la maison qui sont immédiatement très attirés par elle… David O. Selznick a écrit et produit Duel au soleil pour être un tremplin à la carrière de sa seconde femme, Jennifer Jones. Désireux d’aller plus loin qu’Autant en emporte le vent, il a délibérément exagéré les sentiments, élargi les espaces et surtout exacerbé les passions. Le personnage de Jennifer Jones est fortement érotisé (tout en restant bien entendu dans le registre « tous publics », le film a fait scandale juste ce qu’il faut) et le manichéisme est poussé à l’extrême. Duel au soleil est surtout un film de Selznick qui est d’ailleurs si présent sur le tournage que King Vidor finit par jeter l’éponge. William Dieterle prendra sa place. Si l’on ajoute les réalisateurs de seconde équipe et les conseillers, pas moins de sept réalisateurs ont travaillé sur le film. Le budget, pourtant colossal, fut largement dépassé et le film devint ainsi le cher jamais réalisé. Côté acteurs, Selznick avait mis toutes les chances de son côté en choisissant deux acteurs très aimés du public, Gregory Peck et Joseph Cotten, auxquels il adjoint deux grandes figures du cinéma : Lionel Barrymore et Lillian Gish. Avec tant de calculs, d’exagérations de moyens et de dramatisation, on peut s’attendre à un résultat hétérogène et artificiel. Il n’en est rien. Le film n’est certes pas sans défaut, sans outrance, il manque parfois de liant mais Duel au soleil reste un grand drame de la passion destructrice et un spectacle magnifique. Il dépasse le cadre du genre western. Le succès populaire fut immense.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jennifer Jones, Joseph Cotten, Gregory Peck, Lionel Barrymore, Herbert Marshall, Lillian Gish, Walter Huston, Charles Bickford
Voir la fiche du film et la filmographie de King Vidor sur le site IMDB.
Voir les autres films de King Vidor chroniqués sur ce blog…
Voir les autres films de William Dieterle chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Parts estimées de réalisation directe par chaque réalisateur :
Réalisateur principal 1 King Vidor : 45%,
Réalisateur principal 2 William Dieterle : 25%,
Seconde équipe Otto Brewer : 20%,
Conseiller pour la couleur Josef von Sternberg : quelques scènes additionnelles 3%
Conseiller et production designer William Cameron Menzies : quelques scènes
Sidney Franklin : ? (seconde équipe ?)
Producteur David O. Selznick : quelques scènes.
Appelée à trancher, la commission d’arbitrage de la Screen Directors Guild décida que seul King Vidor serait mentionné au générique.

* Scènes marquantes :
– L’incroyable scène qui ouvre le film, la danse de la mère de Pearl dans le bar, est de William Dieterle.
– L’étonnante scène où « Le Sénateur » rassemble tous ses cowboys a été tournée par la seconde équipe, donc par Otto Brewer.
– La scène finale, dans sa forme définitive, est l’oeuvre d’au moins trois ou quatre des réalisateurs.

* La voix du narrateur est celle d’Orson Welles

* Le film a été surnommé « Lust in the Dust » (luxure et poussière).

(1) Dans le livre sur les mémos de David O. Selznick, on peut lire le courrier que le producteur a envoyé à King Vidor pour tenter de le faire revenir, jouant beaucoup sur le thème « on ne va pas casser ainsi une amitié de vingt ans ». King Vidor est cependant resté ferme sur sa décision. Dans un autre mémo à un agent, il raconte l’altercation (une scène d’extérieurs à Lasky Mesa non finie à temps parce que Vidor désirait changer l’emplacement de la caméra) qui est visiblement la goutte d’eau qui a fait déborder le vase (ce sont même les termes employés par Selznick). De son côté, King Vidor parle très peu du film dans autobiographie, disant simplement qu’il s’agit surtout d’un film de David O. Selznick.