6 mars 2005

L’ Esquive (2003) d’Abdel Kechiche

L'EsquiveElle :
Abdel Kechiche nous plonge brutalement dans un autre univers, coupé de tout où les adolescents ne communiquent qu’en criant ou en s’injuriant. Leur langage est incompréhensible tant il est haché. La violence des paroles traduit une grande colère qui s’extériorise en permanence. Nous sommes projetés sans ambages au cœur de cet univers d’un quartier de banlieue. Pendant un demi-heure, on se demande où on a atterri tant les échanges verbaux sont violents. Le seul rayon de soleil qui illumine les journées de ces ados est le théâtre. La pièce de Marivaux (Le Jeu de l’Amour et du Hasard) révèle que notre condition sociale d’origine nous colle à la peau et qu’il est très difficile d’en sortir. Le mélange des classes n’existe donc pas. Ce cinéma brut est parfois à la limite du supportable. C’est un constat amer et peu optimiste.
Note : 3 étoiles

Lui :
C’est un film assez étonnant, qui, dans un quartier de la banlieue parisienne, fait jouer à ses jeunes personnages des scènes de Marivaux pour montrer la difficulté de sortir de son milieu. En dehors de ces scènes, on voit une relation tenter de se tisser entre un garçon, utilisant (malgré lui) des méthodes presque mafieuses pour déclarer son amour à sa belle. Le parallèle et l’opposition sont assez brutaux mais efficaces. Le film est très réaliste, utilisant des cadrages serrés sur les personnages dont les dialogues sont le plus souvent vraiment durs à suivre tant ils sont « réalistes ».
Note : 3 étoiles

Acteurs: Sara Forestier, Osman Elkharraz
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5 mars 2005

Dirty Pretty Things (2002) de Stephen Frears

Dirty pretty thingsElle :
Stephen Frears se lance dans une sorte de thriller social qui se passe dans le milieu très cosmopolite des immigrés clandestins de Londres. Ambiance chirurgicale et musique stressante pour témoigner de l’enfer que vivent ces sans-papiers. Cette peinture sociale observe leur quotidien : problèmes de logement, traque de la police, ateliers clandestins, prostitution et trafic d’organes pour pouvoir se payer un passeport. Audrey Tautou est plus convaincante dans ce rôle de jeune turque pourchassée par les services d’immigration ; elle a perdu son sourire d’ingénue. Sergi Lopez en fait un peu trop en grand méchant. Bien qu’un peu trop morbide, le réalisateur a le mérite d’aborder avec sensibilité un sujet peu porteur et de nous ouvrir les yeux sur l’univers souterrain des petites mains (balayeurs, gardiens, couturières).
Note : 4 étoiles

Lui :
En voulant montrer dans quel environnement les clandestins doivent survivre à Londres, Stephen Frears a certainement donné trop d’importance à un trafic d’organes, ce qui tend un peu à occulter (ou du moins faire passer au second plan) la peinture sociale alors que c’est cet aspect qui est le plus réussi dans ce film. Audrey Tautou n’est pas très crédible en immigrée turque avec un jeu très sec et froid. Sergi Lopez en rajoute des tonnes dans son rôle de méchant.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Audrey Tautou, Chiwetel Ejiofor, Sergi López
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3 mars 2005

Le chien enragé (1949) d’ Akira Kurosawa

Titre original : « Nora inu »

ChienenrageElle :
Le Chien Enragé est parmi les premiers films du maître du cinéma japonais. Ce n’est pas le plus abouti mais il laisse augurer du talent et du style du cinéaste dans ses films futurs. Un vol de pistolet d’un inspecteur de police est le pivot du film. Celui-ci dans la crainte de se faire renvoyer, se met à la recherche de l’objet avec une pugnacité étonnante tel un chien enragé. Dans le Japon d’après-guerre, il parcourt sans relâche les bas-fonds de la ville. Cela revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Kurosawa ausculte les tourments de l’âme humaine qui balance entre le Bien et le Mal. Il s’attarde sur les visages perlés de sueur, les corps assoupis, la foule. C’est très bien cadré dans du beau noir et blanc. Ce qu’on peut reprocher c’est certaines longueurs et peut-être une enquête qui manque d’intensité dans ses ressorts.
Note : 3 étoiles

Lui :
Se situant dans les tout premiers films de Kurosawa, ce polar moite et caniculaire apparaît bien moins abouti que d’autres films qu’il réalisera ensuite : L’histoire est moins riche et passionnante et semble surtout un prétexte pour nous montrer les bas quartiers de Tokyo et amener une certaine réflexion sur la notion de bien et de mal. Il y a beaucoup d’humanité dans son propos, humanité qui est appuyée par ses cadrages en très gros plan.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Toshirô Mifune
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2 mars 2005

« Kitchen Stories » (2003) de Bent Hamer

Titre original : « Salmer fra kjøkkenet »

Kitchen storiesElle :
Un film suédois insolite et sensible sur la solitude de vieux garçons et le ridicule de la bureaucratie. Cette curiosité visuelle démarre au quart de tour par l’envoi d’observateurs suédois en Norvège afin d’analyser les trajets quotidiens d’hommes célibataires dans leur cuisine. Ils vivent dans de drôles de caravanes et restent perchés toute la journée sur une très haute chaise afin d’observer leur sujet. Le thème est hors du comment et difficilement crédible tant c’est déjanté Pas de dialogue au début entre nos deux personnages, puis quelques mots échangés et enfin des repas partagés. Le désir de compagnie, d’échange et de partage réduit à néant cette étude sociologique. Le réalisateur parsème l’histoire de bonnes trouvailles visuelles et humoristiques.
Note : 4 étoiles

Lui :
C’est certes une situation très originale pour traiter de la difficulté de communication entre les personnes, mais le film s’étire en longueurs et le côté cocasse s’use très vite.
Note : pas d'étoiles

Acteurs: Joachim Calmeyer, Tomas Norström
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1 mars 2005

Du silence et des ombres (1962) de Robert Mulligan

Titre français : « To kill a mockingbird »

To Kill a MockingbirdElle :
Film méconnu du réalisateur du célèbre Un été 42 qui mérite le détour. Mis à part quelques longueurs et un ton assez moralisateur, Robert Mulligan exalte les valeurs humanistes, l’importance de la famille et plaide pour l’égalité des droits pour les noirs. Pour ce faire, il plante le décor dans une bourgade du fin fond de l’Alabama où un père avocat (Gregory Peck) élève seul ses deux enfants avec courage et modestie. To Kill a MockingbirdIl défend un noir accusé de viol sur une blanche. Pour rendre compte de la complexité de l’âme humaine, il joue avec l’ombre et la lumière, choisit des éclairages de nuit au clair de lune. Ainsi, il crée une ambiance presque mystique pour décrire les peurs infondées, la confrontation des enfants avec le monde des adultes, le racisme féroce des villageois contre le noir accusé de meurtre. Un film à redécouvrir.
Note : 4 étoiles

Lui :
Sans être dénué de qualités, ce film de Mulligan souffre d’une lenteur certaine dans son développement et d’un certain conformisme dans le propos (tout louable qu’il soit). Bonne interprétation, y compris des trois personnages enfants.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Gregory Peck, Robert Duvall
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28 février 2005

Sommaire de février 2005

Hero

(2002) de Yimou Zhang

L’ Enfant au violon

(2002) de Kaige Chen

American Splendor

(2003) de Shari Berman et Robert Pulcini

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon

(1970) d’ Elio Petri

Adaptation

(2002) de Spike Jonze

Bienvenue Mister Chance

(1979) de Hal Ashby

La Planète bleue

(2003) de Andy Byatt et A. Fothergill

Nadia

(2001) de Jez Butterworth

T – Men

(1947) d’ Anthony Mann

Même Dieu est venu nous voir

(2001) de Petar Popzlatev

Terminator 3 : The rise of the machines

(2003) de Jonathan Mostow

Saltimbank

(2003) de Jean-Claude Biette

Cube 2 : Hypercube

(2002) d’ Andrzej Sekula

Jonas qui aura 25 ans en l’an 2000

(1976) d’ Alain Tanner

Aelita

(1924) de Yakov Protazanov

Un coeur ailleurs

(2003) de Pupi Avati

Pinocchio

(2002) de Roberto Benigni

Nombre de billets : 17

28 février 2005

Hero (2002) de Zhang Yimou

Titre original : « Ying xiong »

HeroElle :
Superproduction chinoise avec Maggie Cheung en héroïne, des milliers de figurants, des compositions visuelles élaborées, des jeux de couleur, des combats étonnants où les protagonistes volent et une quantité énorme d’effets visuels. Le réalisateur d’Epouses et Concubines et du Sorgho Rouge privilégie l’esthétique visuelle, les belles images au scénario. L’histoire de ce roi de Qin qui doit être assassiné est terriblement ennuyeuse. Les personnages sont inexpressifs et ne dégagent aucune émotion. Il est vraiment très difficile de s’intéresser au sujet devant cet overdose d’effets esthétisants.
Note : 2 étoiles

Lui :
Basé sur une légende chinoise sur le roi de Qin, cette histoire bénéficie d’une mise en scène spectaculaire qui, si elle nous réserve de belles images très bien composées et des mouvements harmonieux, n’en sombre pas moins dans une surenchère permanente, comme obnubilée par le désir de frapper les esprits. De ce fait, il faut faire un sérieux effort pour s’intéresser à ces combats successifs, incroyablement chorégraphiés. C’est spectaculaire mais l’on s’ennuie…
Note : 2 étoiles

Acteurs: Jet Li, Maggie Cheung
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27 février 2005

L’ enfant au violon (2002) de Kaige Chen

Titre original : « He ni zai yi qi »

Enfant au violonElle :
C’est l’histoire vraie du dévouement sans faille d’un paysan chinois, pour son fils adoptif, jeune prodige au violon. Kaige Chen oppose le Pékin occidentalisé au Pékin des petites gens. Le mépris des nouveaux riches pour les paysans sans éducation est fustigé par le réalisateur. Il fait une satire féroce des nouveaux comportements consuméristes qui tuent les sentiments humains L’histoire de ce jeune violoniste est assez touchante car seuls les gens puissants et riches peuvent réussir dans le milieu musical. Ce père enthousiaste, généreux se débat comme il peut pour le faire réussir en tant que violoniste. On peut reprocher le côté un peu mélo et bons sentiments qui sert à combler un scénario qui manque un peu d’épaisseur.
Note : 3 étoiles

Lui :
Au début du film, une inscription nous précise: « Basé sur une histoire vraie ». C’est bien de le préciser, car cette histoire paraît vraiment bourrée de poncifs. Ceci dit, ces histoires de jeunes prodiges du violon se laissent toujours regarder avec plaisir… Le scénario est un peu confus, on a même l’impression que le film a subi des coupes. Il y a aussi ce côté un peu prévisible et quelques longueurs, mais l’ensemble est plaisant.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Yun Tang, Peigi Liu
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25 février 2005

American Splendor (2003) de Shari Springer Berman et Robert Pulcini

American splendorElle :
Film sympa, original, touchant, inventif visuellement. Le scénario raconte la vie de Harvey Pekar (qui a existé réellement), un archiviste d’hôpital mal dans sa peau qui raconte sa vie dans une célèbre BD intitulée « American Splendor ». Il collabore graphiquement avec le fameux Robert Crumb. Le réalisateur passe habilement du personnage du film à celui de la BD ou encore au vrai Harvey Peckar et tout cela avec une mise en scène incrustée de vignettes, bulles. C’est bien fait. Il y a également une bonne dose d’humour concernant les manies, les angoisses des vieux garçons. Les seconds rôles sont également très bien vus notamment celui de sa petite amie hypocondriaque ou du collègue de travail au phrasé étrange.
Note : 5 étoiles

Lui :
Ce film retraçant la film d’Harvey Pekar, scénariste américain de bande dessinées ayant travaillé avec Crumb, est particulièrement réussi. American Splendor est assez original dans sa forme, puisqu’il inclut des passages où le vrai Harvey Pekar vient nous expliquer certaines scènes ou certains aspects de sa personnalité. Il parvient aussi à bien utiliser (sans en abuser) les effets visuels pour mêler bandes dessinées et film. Il est aussi réussi sur le fond car il parvient à nous dresser un portrait assez intime de Harvey Pekar en le rendant assez touchant et d’une complexité qui attire la sympathie. Son personnage peut ainsi rappeler Woody Allen par certains côtés, tout en étant énormément plus pessimiste et désabusé. Il y a aussi beaucoup d’humour et le film est vraiment agréable à regarder.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Paul Giamatti, Harvey Pekar
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23 février 2005

Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (1970) d’ Elio Petri

Titre original : « Indagine su un cittadino al di sopra di ogni sospetto »

EnquetecitoyenElle :
Je revois ce film pour la deuxième fois et 30 ans plus tard. On est au début des années 70 en Italie et les autorités italiennes se livrent à la chasse aux gauchistes et aux communistes. Elio Piétri se livre à une satire féroce des institutions et de la corruption de la société italienne. Il choisit un commissaire de police assoiffé de pouvoir et pervers pour illustrer son propos. Il tue sa maîtresse, laisse des indices pour se faire accuser, va jusqu’à s’accuser du meurtre mais l’institution policière ne veut pas de remous et ferme les yeux. C’est un portrait sans concession et sans doute un peu trop tranché mais la démonstration est efficace. Gian Maria Volonté interprète brillamment un policier froid, sans scrupules et implacable.
Note : 4 étoiles

Lui :
Vu avec du recul, ce film de Pietri semble bien porter toutes les qualités et les défauts de son époque. Du côté des qualités, il y a ce cinéma très inventif, avec une caméra très libre, un déroulement du scénario parfait et une rigueur certaine dans la mise en scène. Du côté de ses défauts, il y a surtout cette façon de grossir le trait, le personnage principal prenant même certains côtés burlesques tant il est caricatural et poussé à l’extrême. Il n’en reste pas moins que le film est intéressant et au delà de la satire de la police, il y a une certaine réflexion, un peu brute et simpliste tout de même, sur le pouvoir.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Gian Maria Volonte, Florinda Bolkan
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