10 septembre 2008

Johnny Guitare (1954) de Nicholas Ray

Titre original : « Johnny Guitar »

Johnny GuitareJohnny Guitare est souvent présenté comme un western baroque. Baroque, il l’est d’abord par son scénario qui met au centre du film une femme, ce qui est rarissime pour un western, et même deux femmes dont l’une nourrit une haine féroce envers l’autre. Il l’est aussi par ses lieux, un immense saloon sans client, une montagne qui est à la fois un refuge et qui explose sous les charges de dynamite d’une équipe de terrassiers. Il l’est enfin par ses couleurs : Johnny Guitare fut tourné en TruColor, un procédé qui fit long feu car trop imparfait ; Nicholas Ray a cherché à supprimer les bleus (que le TruColor rendaient très mal) pour jouer sur les noirs et blancs… et sur les rouges qui sont éclatants, omniprésents et qui alourdissent une atmosphère déjà très tendue. Johnny Guitare est en effet un film d’une très forte tension, à peine relâchée lors des scènes plus intimes entre Joan Crawford et Sterling Hayden, une tension qui nous laisse presque pantelant à la fin du film. Les sentiments s’expriment très fortement, la haine qui se lit à l’état brut sur le visage de Mercedes McCambridge nous glace le sang. L’amour, quant à lui, ne semble au premier abord n’exister que dans le passé mais nous vaut quelques dialogues superbes. Nicholas Ray a introduit aussi quelques notes anti-maccarthyste par l’intermédiaire des fermiers en colère. Le film fut mal reçu et compris à sa sortie, mais il est devenu depuis l’un des films les plus admirés par sa personnalité et son anti-classicisme. A juste titre.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Joan Crawford, Sterling Hayden, Mercedes McCambridge, Scott Brady, Ernest Borgnine, John Carradine
Voir la fiche du film et la filmographie de Nicholas Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Nicholas Ray chroniqués sur ce blog…

Johnny Guitar

4 septembre 2008

La rue rouge (1945) de Fritz Lang

Titre original : « Scarlet street »

La rue rougeElle :
(pas vu)

Lui :
Pour quelles raisons Fritz Lang a-t-il voulu tourner un remake de La Chienne de Jean Renoir? On peut effectivement se poser la question mais il est certain que sa vision du roman de Georges de La Fouchardière diffère de celle de Renoir en bien des points. Tout d’abord, La Rue Rouge ne baigne pas dans le réalisme populaire, l’atmosphère est ici presque atemporelle, hors de la réalité quotidienne, un climat assez lourd bâti sur les tensions. Et surtout, alors que Renoir mettait l’homme au centre de son film, Fritz Lang montre la noirceur des sentiments, la passion qui entraîne vers le malheur avec notamment cette fin pesante, tragique, présentée comme inévitable. L’histoire est pourtant la même : un caissier sans envergure et peintre du dimanche se laisse prendre dans les filets d’une jeune femme sans scrupule qui lui fait croire qu’elle l’aime. Une même histoire, deux traitements différents. Malgré tout le talent de Fritz Lang, force est de constater que La Rue Rouge pâlit quelque peu de la comparaison avec son modèle.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Edward G. Robinson, Joan Bennett, Dan Duryea
Voir la fiche du film et la filmographie de Fritz Lang sur le site imdb.com.

Voir les autres films de Fritz Lang chroniqués sur ce blog…

Bien que particulièrement tragique, la scène finale (le portrait dans la vitrine) est un amusant clin d’oeil au superbe La femme au portrait (The Woman in the window, 1944) que Lang avait tourné un an plus tôt avec… Edward G. Robinson, Joan Bennett et même Dan Duryea.
Fritz Lang réalisera un second remake d’un film de Renoir 10 ans plus tard : Désirs humains (Human Desire, 1954) remake de La Bête Humaine (1938).

2 septembre 2008

Vous avez un message (1998) de Nora Ephron

Titre original : You’ve got mail

Vous avez un messageElle :
(En bref) Enième comédie à la recette américaine. La craquante Meg Ryan (une pauvre petite libraire) et le sémillant Tom Hanks (puissant dirigeant d’une chaîne de magasins dédiés au livre) se détestent dans la vraie vie mais vont sans le savoir nouer des relations d’un tout autre type grâce au courrier électronique. Le film se laisse regarder mais c’est tout de même très léger.
Note : 2 étoiles

Lui :
(En bref) Film gentillet et divertissant, le genre de comédie qui vaut plus par ses acteurs que par son scénario (il faut tout de même garder à l’esprit que le fait que le scénario pouvait paraître en 1998 beaucoup plus inattendu et original que 10 ans plus tard). Ceci dit, Vous avez un message est en fait l’adaptation d’une pièce de Miklós László écrite à la fin des années 30.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Tom Hanks, Meg Ryan, Greg Kinnear
Voir la fiche du film et la filmographie de Nora Ephron sur le site IMDB.
Voir les autres films de Nora Ephron chroniqués sur ce blog…

Adaptations de la pièce Parfumerie de Miklós László :
Shop around the corner (Rendez-Vous) d’Ernst Lubitsch (1940) avec James Stewart
In the Good Old Summertime (Amour poste restante) de Robert Z. Leonard (1949) avec Judy Garland et Van Johnson
You’ve got mail (Vous avez un message) de Nora Ephron avec Tom Hanks et Meg Ryan.

30 août 2008

The two Jakes (1990) de Jack Nicholson

Titre canadien  : « Piège pour un privé »

The two JakesElle :
(pas vu)

Lui :
Jack Nicholson se met lui-même en scène pour cette suite (16 ans après) à Chinatown. Hélas Nicholson n’est pas Polanski et sa mise en scène, tout en étant techniquement sans défaut majeur, nous paraît sans âme et The Two Jakes n’a pas cette atmosphère qui aurait pu le sublimer. Il ne reste donc que l’histoire, embrouillée à souhait mais finalement assez simple et pas bien passionnante, impression qui tourne à la déception vers la fin du film. Jack Nicholson est pourtant convaincant dans son rôle de privé, l’acteur étant certainement l’un des plus aptes à prolonger l’esprit des films noirs des années 40. Assez mal définis, les seconds rôles sont plus fades, nous sommes par exemple loin des meilleures prestations d’Harvey Keitel. Un troisième film était prévu : Chinatown traitait de l’eau dans les années 30, The Two Jakes des forages de pétrole dans les années 40, Cloverleaf aurait du traiter des dégâts dus à la construction des autoroutes dans les années 50. Le film ne vit jamais le jour.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Jack Nicholson, Harvey Keitel, Meg Tilly, Madeleine Stowe, Eli Wallach
Voir la fiche du film et la filmographie de Jack Nicholson sur le site IMDB.

29 août 2008

Agence Cupidon (1951) de George Cukor

Titre original : « The Model and the Marriage Broker »

La croisée des destinsElle :
(pas vu)

Lui :
George Cukor est connu pour ses portraits de femmes et ce film n’échappe pas à la règle. Agence Cupidon est plus profond que le titre français ne le laisse supposer. Mae Swasey, une énergique quadragénaire que la vie n’a pas toujours épargnée, tente de maintenir à flot sa petite agence matrimoniale. Elle organise des rencontres, conseille, donne un coup de pouce à des personnes qui n’ont pas tous les atouts pour y parvenir seuls. Un hasard va mettre une jeune et jolie femme-mannequin sur sa route. Tout le film repose sur la performance de Thelma Ritter, actrice de grand talent, éternellement vouée aux seconds rôles du fait de son physique trop « ordinaire », une sorte de Pauline Carton américaine. Thelma Ritter Le fait que son nom ne figure qu’en 3e position au générique d’Agence Cupidon montre bien toute l’injustice du physique pour les acteurs : Jeanne Crain n’a pour travail que de montrer son joli minois, et elle n’en fait pas beaucoup plus d’ailleurs… mais elle se retrouve en tête d’affiche. Quoiqu’il en soit, le rôle principal est bien tenu par Thelma Ritter et elle ne laisse pas passer cette occasion hélas trop rare : avec son accent new-yorkais, elle se donne totalement pour donner vie à ce personnage au grand cœur. Elle sait apporter à la fois une dimension dramatique et beaucoup d’humour, parfois dans la même scène. Sa performance permet à Agence Cupidon d’être assez relevé et plaisant à regarder.
Note : 3 eacute;toiles

Acteurs: Jeanne Crain, Scott Brady, Thelma Ritter
Voir la fiche du film et la filmographie de George Cukor sur le site IMDB.

Voir les autres films de George Cukor chroniqués sur ce blog…

18 août 2008

Trust the man (2005) de Bart Freundlich

Autre titre (dvd) : Chassé-croisé à Manhattan

Trust the ManElle :
Un film à oublier très vite sur le sujet ultra rabâché des déboires amoureux de deux couples new-yorkais. Le réalisateur ne fait pas dans la subtilité et préfère s’enfoncer dans la mièvrerie. On est très loin du charme des comédies romantiques de Woody Allen. Que vient faire Julianne Moore dans ce film inconsistant ?
Note : 2 étoiles

Lui :
Si Trust The Man semble plutôt bien démarrer avec un ton léger, quoiqu’un peu gras, le film tourne assez rapidement en rond, donnant l’impression que les scénaristes ne savent plus que faire du capital sympathie qu’ils ont engrangés, pour finir de façon épouvantable dans la guimauve hollywoodienne. Il y a pourtant quelques traits d’humour plutôt réussis (comme ces séances chez le psy, clins d’œil à Woody Allen) mais l’ensemble manque de profondeur et de punch. Trust the man reste au niveau de la comédie gentillette insignifiante. Que vient faire Julianne Moore dans cette galère ? C’est très simple : la réalisateur est son mari…
Note : 2 étoiles

Acteurs: Julianne Moore, David Duchovny, Maggie Gyllenhaal, Billy Crudup
Voir la fiche du film et la filmographie de Bart Freundlich sur le site imdb.com.

16 août 2008

La croisée des destins (1956) de George Cukor

Titre original : « Bhowani Junction »

La croisée des destinsElle :
(pas vu)

Lui :
Avec La Croisée des Destins, George Cukor nous montre qu’il est tout aussi à l’aise avec une grande production utilisant des milliers de figurants qu’avec une comédie plus intimiste. La scène se passe en Inde en 1947, à la veille du départ des Anglais. Victoria Jones (Ava Gardner), à moitié indienne et à moitié anglaise, est partagée entre son amour pour l’Inde en train de gagner son indépendance et son amour pour un officier anglais. Comme toujours avec Cukor, c’est donc une femme qui occupe le point central du film, rôle qu’Ava Gardner remplit merveilleusement bien en donnant une réelle étoffe à son personnage. La croisée des destins Les scènes de foule sont impressionnantes par ces milliers de figurants qui forment de véritables marées humaines. Cukor a tourné presque toutes les scènes au Pakistan. La photographie est superbe, y compris dans les scènes assez tragiques. Les producteurs ont exigé que les personnages importants soient tenus par des acteurs anglais ou américains, ce qui choque un peu pour au moins un ou deux cas. Ce parti-pris est d’ailleurs assez paradoxal puisque La Croisée des Destins traite aussi d’un certain racisme envers les « sang-mêlés ».
Note : 3 eacute;toiles

Acteurs: Ava Gardner, Stewart Granger, Bill Travers, Abraham Sofaer, Francis Matthews
Voir la fiche du film et la filmographie de George Cukor sur le site imdb.com.

Voir les autres films de George Cukor chroniqués sur ce blog…

8 août 2008

Adieu Cuba (2005) de Andy Garcia

Titre original : « The Lost City »

Adieu CubaElle :
Certes, Andy Garcia nous offre de belles images d’un Cuba de carte postale… mais cela ne suffit pas à rendre le film intéressant. Le scénario de cette saga familiale située au moment de l’arrivée de Fidel Castro est particulièrement confus avec des digressions interminables et souvent un peu mièvres. La multiplicité des morceaux de musique composés par l’acteur-réalisateur est agaçante car ils prennent beaucoup trop de place. La présence inutile de Bill Murray et Dustin Hoffman ne fait qu’alourdir l’ensemble. Bref, on s’ennuie ferme.
Note : 1 étoiles

Lui :
Pour son premier long métrage, l’acteur Andy Garcia a tenu à rendre hommage à son pays natal. Adieu Cuba retrace le passage de la révolution castriste vue des yeux d’un directeur de club qui tente de préserver l’intégrité de sa famille et son amour pour une femme. Le projet était ambitieux, peut-être trop car Andy Garcia tombe indéniablement dans l’écueil de vouloir trop en faire. Certains effets de montage sont très maladroits telle cette attaque du palais présidentiel entrecoupée de flashs de show musical, le tout sur fond de musique tonitruante. La musique, justement, est extrêmement présente, insistante et au final embarrassante au point de provoquer un sentiment d’overdose. Andy Garcia a lui-même composé et assemblé pas moins de 40 morceaux ! Le film est très long (2h19) et il est difficile de dire si le scénario, mieux traité, aurait pu se révéler être un tant soit peu intéressant.
Note : 1 étoiles

Acteurs: Andy Garcia, Inés Sastre, Bill Murray, Nestor Carbonell, Dustin Hoffman
Voir la fiche du film et la filmographie de Andy Garcia sur le site IMDB.

6 août 2008

Le paradis des mauvais garçons (1952) de Josef von Sternberg et Nicholas Ray

Titre original : « Macao »

Le paradis des mauvais garçonsElle :
(pas vu)

Lui :
C’est contraint et forcé que Josef von Sternberg a accepté de tourner Macao, Le Paradis des mauvais garçons et son manque d’enthousiasme se perçoit dans le film. Il n’avait pas participé à l’écriture du scénario comme à son habitude. On peut considérer qu’il s’agit plutôt d’un film de producteur, en l’occurrence Howard Hughes, qui imposa également les deux acteurs vedettes : Robert Mitchum et Jane Russell, « sa » création, actrice qui le fascinait toujours autant. Sternberg n’aimait ni l’un ni l’autre… Quant à Gloria Grahame, elle ne voulait pas tourner dans ce film et fut forcée par Hughes. Josef von Sternberg fut remercié avant la fin du tournage et le film fut terminé par Nicholas Ray (alors en procédure de divorce d’avec… Gloria Grahame) qui assura également le montage, sans toutefois être mentionné au générique. L’histoire, purement policière, ne parvient pas à s’envoler réellement malgré l’exotisme du lieu sauf dans quelques scènes comme celle de poursuite au tout début et à la fin. Comme ordonné par le producteur, Le Paradis des Mauvais Garçons met très bien en valeur Jane Russell sans toutefois exploiter beaucoup son personnage. Au final, le film se laisse regarder avec plaisir mais sans être enthousiasmant comme purent l’être d’autres créations de Sternberg.
Note : 3 eacute;toiles

Acteurs: Robert Mitchum, Jane Russell, William Bendix, Gloria Grahame, Brad Dexter
Voir la fiche du film et la filmographie de Josef von Sternberg sur le site imdb.com.
Voir les autres films de Josef von Sternberg chroniqués sur ce blog…
Voir les autres films de Nicholas Ray chroniqués sur ce blog…

Ne pas confondre ce film avec :
Macao, l’enfer du jeu de Jean Delannoy (1942) avec Eric von Stroheim

5 août 2008

Guerre au crime (1936) de William Keighley

Titre original : « Bullets or ballots »

Guerre au crime Elle :
(pas vu)

Lui :
Guerre au crime est inspiré des exploits d’un policier de l’époque, John Broderick, qui d’après Edward G. Robinson était tout comme lui fort mécontent du scénario. En fait, il s’agissait surtout pour la Warner de faire jouer à l’acteur un rôle à biface (policier/truand) et donc de respecter les nouvelles règles du Code Hays qui interdisaient de glorifier les truands. Guerre au crime Humphrey Bogart tient le rôle de second couteau, impulsif et borné comme souvent dans ses films des années 30. Sans être vraiment remarquable, Guerre au crime (le titre anglais, Bullets or Ballots, « des balles ou des votes », est soit dit-en passant bien plus représentatif du film) est de bonne facture, bien enlevé par un rythme assez soutenu. Edward G. Robinson est toutefois un peu plus retenu que dans certains de ses autres rôles.
Note : 3 eacute;toiles

Acteurs: Edward G. Robinson, Joan Blondell, Barton MacLane, Humphrey Bogart
Voir la fiche du film et la filmographie de William Keighley sur le site imdb.com.