4 août 2021

Une vie violente (2017) de Thierry de Peretti

Une Vie ViolenteMalgré la menace de mort qui pèse sur sa tête, Stéphane décide de retourner en Corse pour assister à l’enterrement de Christophe, son ami d’enfance et compagnon de lutte, assassiné la veille. C’est l’occasion pour lui de se rappeler les évènements qui l’ont vu passer, petit bourgeois cultivé de Bastia, de la délinquance au radicalisme politique et du radicalisme politique à la clandestinité…
Une vie violente est réalisé par Thierry de Peretti, cinéaste corse. Le film est librement inspiré de l’histoire de Nicolas Montigny, jeune militant nationaliste corse de Armata Corsa assassiné à Bastia en 2001. Hormis quelques lignes rapides au tout début du film, le cinéaste n’explique rien. Le récit est donc assez obscur, on ne comprend pas bien qui sont les personnages et encore moins leurs motivations. Les discussions dérapent sans que l’on comprenne pourquoi et, lors des réunions, on est rapidement perdu. Pour comprendre pourquoi ces nationalistes se tuent entre eux, il est nécessaire d’aller lire l’article Wikipédia sur Armata Corsa. Confus sur le fond, le film de Thierry de Peretti est plus remarquable dans sa forme, donnant souvent l’impression de se trouver au beau milieu des personnages. Le cinéaste a trouvé un équilibre subtil entre fiction et documentaire. Les acteurs, tous corses, sonnent tous très juste.
Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean Michelangeli, Henri-Noël Tabary, Cédric Appietto, Marie-Pierre Nouveau
Voir la fiche du film et la filmographie de Thierry de Peretti sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Une Vie ViolenteUne vie violente de Thierry de Peretti.

Homonyme :
Une vie violente (Una Vita violenta) de Paolo Heusch et Brunello Rondi (1962) d’après un roman de Pier Paolo Pasolini.

17 avril 2017

Mishima – une vie en quatre chapitres (1985) de Paul Schrader

Titre original : « Mishima: A Life in Four Chapters »

Mishima - une vie en quatre chapitresYukio Mishima est un célèbre écrivain japonais qui, au nom d’un nationalisme radical et meurtri, s’est donné la mort par seppuku, après avoir pris en otage un général et donné un discours aux soldats d’une caserne pour les exhorter à se soulever, le 25 novembre 1970. Ce film de Paul Schrader, issu des studios Zoetrope de Coppola et de LucasFilm de George Lucas, nous retrace son parcours pour tenter d’expliquer son geste dont la signification reste assez obscure et ouverte à interprétations. Il est, en tous cas, plus complexe que l’œuvre d’un simple illuminé d’extrême-droite. S’agit-il d’un geste purement artistique ? Quelle est l’influence de son homosexualité et de son masochisme ? D’où lui viennent ce désir obsessionnel d’agir et cette aspiration à harmoniser action et beauté ? Il faut bien avouer que, en tant qu’occidentaux, certains aspects nous échappent quelque peu (1). Le film offre seulement des pistes. Si l’on peut être déçu de l’absence d’explication, le film est indéniablement enthousiasmant par sa forme. La construction, tout d’abord : quatre chapitres explorant un thème précis, et largement constitués par la mise en scène de trois de ses livres les plus marquants. La photographie ensuite, notamment dans les passages littéraires qui jouissent d’une mise en scène épurée avec de magnifiques décors stylisés créés par Eiko Ishioka. Toute l’équipe artistique est en effet japonaise. Et enfin la musique de Philip Glass, très belle, envoutante dès les premières notes du générique de début. Tous ces éléments contribuent à faire de Mishima – une vie en quatre chapitres un film assez unique en son genre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ken Ogata
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Voir les autres films de Paul Schrader chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Palettes de couleurs :
– Les scènes de 1970 sont en couleurs faiblement saturées.
– Les flashbacks réels sont en noir et blanc.
– Les mises en scène des livres sont en couleurs vives :
– – dominante vert et or pour Temple of the Golden Pavilion
– – dominante rose et grise pour Koko’s House
– – dominante orange/rouge et noir pour Runaway Horses
* La musique :
– Scènes de 1970 : cordes et percussions
– Flashbacks réels : cordes
– Mise en scène des livres : orchestre
* Le film a ouvert le Festival de Cannes 1985 où il fut récompensé du Prix de la meilleure contribution artistique. Malgré ce prix, le film fut un échec commercial.

Mishima
Ken Ogata dans Mishima – une vie en quatre chapitres de Paul Schrader.

Mishima
Le Temple du Pavillon d’or : l’un des décors créés Eiko Ishioka pour dans Mishima – une vie en quatre chapitres de Paul Schrader.

Mishima
Chishû Ryû dans Mishima – une vie en quatre chapitres de Paul Schrader. La courte scène avec l’acteur fétiche d’Ozu avait été coupée de la version distribuée en 1985. Elle a été rétablie dans la version « director’s cut » apparue en 2008.

* Quelques éléments historiques :
– L’empereur Hirohito a renoncé à sa « nature divine » en 1946, au lendemain de la défaite du Japon.
– Depuis 1945, le Japon n’a officiellement plus d’armée mais des « forces d’autodéfense » (il faudra attendre les années 2000 pour voir des militaires japonais engagés dans des actions offensives internationales).
– L’organisation paramilitaire créée par Mishima en 1968, le Takenokai (Société du Bouclier), aspirait au rétablissement de l’empereur et de l’armée. Sa milice a compté jusqu’à 300 hommes, essentiellement des étudiants nationalistes (aujourd’hui, on dit « souverainistes »…) De façon totalement inhabituelle, ils ont pu bénéficier des facilités des forces officielles pour s’entraîner.

* Autre film sur le même sujet :
25 novembre 1970: Le jour où Mishima choisit son destin (2012) de Kôji Wakamatsu. Le cinéaste (plutôt sympathisant des mouvements d’extrême-gauche) analyse le geste de Mishima essentiellement sur le plan de l’engagement politique.

(1) La rapport de Mishima à la beauté est notamment très étrange : le héros de son livre Le Temple du Pavillon d’or veut détruire la beauté car elle le rabaisse, il est incapable de s’élever. Pour Mishima, la beauté est en effet une élévation. Il la mêle avec l’action, pour former l’aspiration ultime. D’où cette étrange fascination pour les corps et pour le sang versé. Faut-il avoir des ancêtres samouraï pour appréhender pleinement cette harmonie entre beauté et action ?