21 juin 2020

Ad Astra (2019) de James Gray

Ad AstraDans un futur proche, de très fortes surcharges électromagnétiques occasionnent des dégâts sur Terre et dans les bases lunaires. La source des ces surcharges serait une station installée près de Neptune par Clifford McBride, héros de la conquête spatiale disparu seize ans auparavant lors de cette mission. Son fils, l’ingénieur et astronaute de la NASA Roy McBride, est envoyé en mission secrète sur la lune pour tenter de le contacter…
James Gray fait ses premiers pas dans l’univers de la science-fiction avec Ad Astra, qu’il a conçu, coécrit (avec Ethan Gross) et réalisé. Son film s’inscrit dans la veine classique du genre tout en ayant une personnalité très forte. Pour simplifier, on pourrait le présenter comme un croisement entre 2001, l’odyssée de l’espace et Apocalypse Now (1), une forme de voyage initiatique en milieu hostile. C’est un très beau film, lent, plutôt introspectif (avec la voix off de Roy qui nous communique ses pensées), suivant une trame narrative forte avec quelques scènes d’action fulgurantes. Au cours du récit pointe la lutte entre le devoir, les aspirations à œuvrer pour le bien de l’humanité et la filiation, l’attachement au père. Les images sont de toute beauté. Brad Pitt est de (presque) tous les plans, l’acteur a également produit le film. Ad Astra ne répond pas aux canons de la science-fiction moderne devenue un sous-genre du film d’action. Est-ce pour cette raison que, malgré de bonnes critiques, le film a été un échec commercial ? Ad Astra est pourtant un film superbe.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Brad Pitt, Tommy Lee Jones, Donald Sutherland, Loren Dean
Voir la fiche du film et la filmographie de James Gray sur le site IMDB.
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Remarque :
* Ad Astra signifie « vers les étoiles » en latin. C’est une partie de la locution latine « Ad astra per aspera » (« Vers les étoiles à travers les difficultés ») souvent associée à la conquête de l’espace.

(1) James Gray dit avoir été inspiré par le roman Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad, le même qui avait fortement inspiré Coppola.

 Ad AstraAd Astra de James Gray.

 Ad AstraBrad Pitt dans Ad Astra de James Gray.

 Ad AstraAd Astra de James Gray.

 Ad AstraAd Astra de James Gray.

 Ad AstraAd Astra de James Gray.

4 réflexions sur « Ad Astra (2019) de James Gray »

  1. Hhhhm.

    Je sors perplexe.

    Je vous rejoins sur l’intérêt d’un film de SF construit de façon atypique *, introspectif plutôt que d’action.

    Mais l’introspection en question me paraît bien convenue, et le personnage sans grand intérêt. J’avoue m’être dit à la fin : tout ça pour ça ? Bon, OK, après tout, le principe du « grand voyage » qui symbolise le cheminement intérieur pour se trouver n’est pas nouveau, et le fait qu’ici le voyage soit le plus long jamais imaginé et envisageable n’est qu’un détail qui ne devrait pas différencier Ad Astra des chefs-d’œuvres basés sur ce cliché. Sauf que justement, le choix de la démesure doit être justifié, devrait s’incarner d’une manière ou d’une autre, or bof. Même les retrouvailles qui auraient dû constituer l’apogée du récit sont fades, bâclées, molles. En fait : désincarnées.

    Voilà ce qui me gêne dans ce film : les personnages sont tous désincarnés. Le héros. Son ex-femme **. Son père. La dirigeante de la colonie martienne. Les militaires. Personne n’a d’épaisseur humaine. Ni personnellement, ni dans leurs relations les uns avec les autres. Que le personnage principal soit inexpressif, sans doute neuro-atypique (ce que le langage commun désigne généralement sous le terme d’autisme), OK, pas de souci, c’est même en soi vraiment intéressant. Mais qu’aucun personnage n’ait la moindre épaisseur rend le film trop froid, trop vide.

    Alors oui, plein de bonnes choses aussi. De belles images, vous avez raison ***. Un rythme bien mené qui permet de créer des micro-tensions constantes ****. Un pied de nez à la mode des films de SF trépignants, en choisissant au contraire un angle minimaliste, un récit épuré.

    Le fil de l’épure est toujours ténu. Apparemment pour vous l’équilibre était parfait. Pour moi, le fil s’est trop étiré. Cela reste un film vraiment intéressant à voir, mais j’en sors sans votre enthousiasme.

    * Cela dit, la construction ne fait pas l’économie de tics scénaristiques contemporains inutiles. L’espèce de boucle flash-back entre les images du début et la fin, le choix d’insérer d’autres mini-flash-back, sont des maniérisme très datés, très à la mode actuellement. Pas trop lourds, ça va, mais présents : le film ne s’est pas totalement extrait des clichés actuels du genre.

    ** À la décharge de la désincarnation de son ex-femme, elle n’est vue que comme une silhouette muette et onirique, sauf une courte vidéo où elle parle. La place qui lui est donnée ne permet pas qu’elle soit incarnée, et c’est un choix cohérent et compréhensif. Si elle était la seule, ce ne serait pas signifiant en soi. Mais comme c’est le cas de tous les personnages pour des raisons différentes voire sans raison précise, ça devient un système, un choix fondamental.

    *** Certaines de ces belles images m’ont hélas fait sortir du film. Scientifique et amateur d’astronomie, je n’ai pas pu m’empêcher de grogner quand le héros passe successivement à côté de Jupiter puis de Saturne puis d’Uranus. C’est juste totalement n’importe quoi. Car si les missions Voyager ont pu sauter de planète en planète, c’est d’une part parce qu’elles avançaient lentement ce qui laissait largement le temps de choisir le tempo permettant de quitter l’une au moment permettant d’atteindre l’autre au bon point de son orbite, et d’autre part parce que ces missions avaient été lancées précisément pour permettre ce timing précis en fonction des orbites. Ici, le Cepheus réalise le voyage de Mars à Neptune en 79 jours (clin d’œil à Jules Verne ?), ce qui implique que par pur hasard (la date de départ ne peut pas avoir été choisie, elle est lié à l’urgence des surtensions meurtrières) ce voyage serait réalisé précisément à un moment absolument exceptionnel où Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune sont alignées ! C’est totalement délirant pour qui connaît un peu l’astronomie, et je n’ai pas pu m’empêcher d’en être déconcentré. Il y a plusieurs autres incohérences scientifiques, mais pas gênantes.

    **** J’ai trouvé plutôt amusant le choix de transposer à un futur spatial des détails typiques de voyages terrestres. Ainsi le vol commercial vers la Lune où il faut payer (cher !) pour disposer d’un kit couverture-oreiller, à la manière de l’avation low-cost. Ainsi les « pirates » sur la Lune, qui permettent de créer une micro-tension rythmant le récit. Ainsi le déroutement du vol Lune-Mars pour répondre à un appel de détresse, comme cela peut se produire en mer (et créant une autre micro-tension utile au ryhme général, permettant de nous garder en éveil tout en déroulant finalement un lent voyage).

    Quoi qu’il en soit, c’est toujours un plaisir de découvrir des films : même si j’ai moins aimé Ad Astra que vous, vos « billets » m’aident à choisir et je ne le regrette pas.

  2. Désolé que ce film ne vous ai pas plus enthousiasmé… 🙂
    J’ai trouvé votre remarque sur l’alignement des planètes amusante. Je dois avouer que je n’avais pas noté cette bizarrerie. Vous avez bien-sûr raison, la probabilité d’un alignement style Voyager 2 est extrêmement faible (mais elle n’est pas nulle donc ce n’est pas une contre-vérité scientifique 😉 ). Je ne me souviens plus si le vaisseau du film utilisait les planètes comme tremplin gravitationnel : si oui, c’est effectivement tiré par les cheveux ; si non, [mode bon public on] on peut pardonner au scénariste d’avoir « habillé » ces moments où le vaisseau croise les orbites planétaires successives. [mode bon public off]

    P.S. Je viens de lire que la configuration des 4 planètes géantes de Voyager 2 ne se reproduit que tous les 176 ans. Hum…

  3. Il ne semble pas les utiliser comme tremplin gravitationnel (il passe simplement à côté ; et rien ne laisse penser qu’il les utilise). Vous avez raison d’être « bon public », c’est juste que c’est un peu too much quand on y prête attention et ça m’a fait sortir du film à ce moment-là (qui est en plus un moment plus calme, on sait qu’il y a 79 jours à attendre). Ma remarque était sévère, un tel film n’est pas fait pour être réaliste.

    Avec deux jours de recul, ce qui me frappe plus dans ce passage à côté de toutes les planètes, c’est que ça confirme une impression qu’Ad Astra cherche à être le film de SF ultime qui synthétise tous les autres. On a droit :
    – au voyage vers la Lune et à la sortie en rover sur la Lune, avec la Terre dans le ciel (c’est magnifique bien sûr, mais c’est aussi un cliché)*,
    – au voyage vers Mars et une sortie sur et sous la planète (avec, ce qui n’est pas un cliché, l’idée originale du lac souterrain — toutefois audacieuse scientifiquement mais pas totalement impossible),
    – au passage dans une station spatiale permanente (celle qui a lancé l’appel à l’aide),
    – au voyage au long cours vers les confins du système solaire par un homme seul dans un vaisseau*,
    – à Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune.
    Si on faisait un bingo du film de SF « dans les limites du système solaire », Ad Astra cocherait toutes les cases.

    Et comme le film ajoute de bonnes idées qu’on ne retrouve pas ailleurs (les immenses stations-antennes montant jusqu’à l’exosphère), ça devient une « liste » assez considérable. C’est un choix qui se défend : après tout, le voyage d’Ulysse faisait également le tour de tous les lieux (mythiques et parfois imaginaires) de la Méditerranée de l’époque grecque ancienne. Mais c’est clairement un choix, qui ici (= le fait de croiser toutes ces planètes) est un peu forcé.

    * Ces deux éléments (Lune + voyageur seul dans un vaisseaux du côté de Jupiter puis Saturne) font furieusement penser à 2001. Il pourrait être amusant de chercher les références **, comme celle que je pense avoir dénichées à Jules Verne. J’en vois une autre : quand Roy revient sur son vaisseau en se propulsant avec son scaphandre et qu’il le percute, glisse à toute vitesse et doit urgemment aggriper n’importe quoi, l’allusion à Gravity saute aux yeux également.

    ** Et ce n’est pas du tout une critique de ma part ! Beaucoup de grandes œuvres font références à d’autres œuvres antérieures, un clin d’œil n’est pas un plagiat et il est normal voire intéressant de parsemer un film ou un livre de « liens » vers des films ou livres antérieurs.

  4. Oui, faire des clins d’oeil n’est pas blâmable. Tant que cela ne cache pas une pâle copie (comme par exemple dans le film La Mort aux enchères que j’ai chroniqué il y a quelques jours), cela enrichit même le propos.
    Je ne sais si on peut dire qu’Astra cherche à être le film de SF ultime… Il reprend certes plusieurs thèmes ou images du genre mais c’est un peu inévitable. Là aussi tant que l’on ne sombre pas dans la copie et le mimétisme, cela me va.
    De plus, on ne peut reprocher à des auteurs d’être ambitieux. 😉

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