Titre français : « Tom Jones : de l’alcôve à la potence »
Dans la campagne de l’ouest de l’Angleterre du XVIIIe siècle, Tom Jones est un enfant trouvé qu’un noble propriétaire terrien a élevé comme son propre fils. Beau garçon, il a beaucoup de succès auprès des femmes et suscite la jalousie mais lui est amoureux de sa jolie voisine Sophie Western qui a les mêmes sentiments en retour. Hélas, l’absence de nobles origines est un obstacle à leur amour d’autant plus que des esprits malveillants cherchent à l’écarter… Le scénario est tiré de l’Histoire de Tom Jones, enfant trouvé, célèbre roman d’Henry Fielding paru en 1749 et adapté par John Osborne, auteur de théâtre de premier plan. Le réalisateur Tony Richardson est surtout connu pour être l’un des fondateurs du Free Cinema qui occupa en Angleterre la même place que la Nouvelle Vague en France. La mordante satire sociale du roman a semble t-il été quelque peu adoucie mais l’écriture est assez brillante. L’ensemble est très vivant, soutenu par des dialogues relevés et des rebondissements permanents. La réalisation est assez riche, Richardson n’hésitant pas à prendre des libertés comme utiliser un hélicoptère pour certains plans (ce qui est rare pour les films « en costumes »). Certaines scènes sont vraiment étonnantes, comme cette partie de chasse immersive ou comme ces séquences accélérées, clins d’oeil au cinéma muet slapstick. Mais c’est surtout la truculence et la gaillardise qui rendent le film assez inhabituel dans la production du début des années soixante. La scène restée la plus célèbre du film est ainsi celle du repas dans la chambre de l’auberge où les deux amants se dévorent des yeux en avalant rôti et volailles, une scène très chargée sexuellement. Servi en outre par une interprétation de qualité jusque dans les plus petits rôles, Tom Jones est un film très cinématographique, toujours aussi plaisant à regarder. Ce fut un énorme succès, en Angleterre mais aussi et surtout aux Etats-Unis, à tel point qu’il reçu pas moins de quatre Oscars.
Elle:
Lui :
Acteurs: Albert Finney, Susannah York, Hugh Griffith, Edith Evans, Joan Greenwood, David Warner
Voir la fiche du film et la filmographie de Tony Richardson sur le site IMDB.
Remarques :
* Le chanteur Tom Jones (qui est d’origine galloise) a choisi son nom de scène après avoir vu ce film.
* L’acteur Hugh Griffith (qui joue le père de Sophie Western) a causé beaucoup de problèmes pendant le tournage : il était en permanence ivre (ce qui contribue, ceci dit, à rendre son personnage si particulier).
Albert Finney et Susannah York dans Tom Jones: de l’alcôve à la potence de Tony Richardson.
Vous comme moi avons remarque la scene filmee d’un helicoptere. Par contre, je trouve ce choix du metteur en scene de filmer la scene de cette maniere tres discutable a cause du fait que la camera n’aurait jamais du quitter le sol car l’helicoptere n’existait pas au 18e Siecle. Kubrick n’a pas commis la meme erreur pour Barry Lyndon. Pour le reste, je suis entierement d’accord avec vous, ce film est remarquable et est d’une drolerie irresistible. Il resiste tres bien a l’usure du temps.
Une derniere remarque, l’enorme succes de ce film tua le mouvement anglais des « Jeunes Cineastes en colere » dont Tony Richardson etait l’un de ses plus eminents representants.
Je trouve très amusantes les remarques du type » la camera n’aurait jamais du quitter le sol car l’helicoptere n’existait pas au 18e Siecle » (Henry, ci-dessus).
Vous savez, Henry, au 18e siècle la caméra n’existait pas non plus ! Elle n’aurait donc certainement pas pu filmer non plus à hauteur d’homme, et j’espère que Kubrick n’avait pas ce type de lubie absurde.
Il n’y a strictement aucun sens et aucune cohérence à filmer « comme à l’époque »… pour une époque où l’on ne filmait pas. Par définition, un film restitue une histoire. Il n’est ni plus ni moins justifié de filmer depuis un hélicoptère pour un film contemporain que pour un film en costumes : dans les deux cas, c’est un changement de regard qu’un spectateur ne pourrait pas avoir dans la vraie vie ni au théâtre, dans les deux cas, c’est un outil très utile au cinéma pour réaliser une mise en scène, dans les deux cas c’est parfaitement justifié et légitime si cela correspond à un point de vue nécessaire pour le réalisateur.
Vous prenez souvent l’hélicoptère pour regarder le déplacement d’une personne que vous venez de quitter, vous, dans la vraie vie ? Vous prenez souvent l’hélicoptère pour regarder d’en haut les mouvements de foule des villes où vous vous promenez, vous, dans la vraie vie ? Moi pas. Et donc pour moi, l’hélicoptère n’a absolument pas plus de naturel ou de légitimité dans un film contemporain. Mais, quel que soit le film, il a une légitimité s’il sert le propos. Tout simplement.
Oui, cette scène en vues d’hélicoptère se remarque… Est-ce par son éventuel anachronisme ou parce qu’elle est assez belle (les cavaliers en file se faufilent entre les buissons en une belle arabesque fluide… très joli).
Comme Jacques C le souligne, tout cela est discutable mais je dirais que l’anachronisme est bien là si l’on considère que la fonction du cinéma est de nous immerger dans une scène et nous faire croire que nous sommes un spectateur passif de et *dans* la scène. Or, à cette époque, aucun observateur ne pouvait avoir ce point de vue (sauf peut-être en montgolfière… ah non même pas… Wikipedia m’annonce env. 1780 pour les premiers vols… mais même une montgolfière, il eut peut-être fallu voir un plan d’une personne qui monte dans la nacelle pour que cela fonctionne.) C’est pour cette raison que je citais cette scène comme une liberté que prend Richardson par rapport aux codes classiques de narration.
Jacques C, je comprends vos arguments mais il me semble que le problème ne soit pas tant « est-ce je prend moi-même un hélicoptère? » que « est-il possible pour quelqu’un de prendre un hélicoptère? »
Vous me direz que l’on devrait avoir le même problème avec les grues mais je ne pense pas… ne serait-ce parce que les grues montent rarement plus haut qu’une fenêtre au dernier étage d’une (hypothétique) maison.
Bon, en tous cas, c’est une discussion intéressante…
Cette scène filmée d’un hélicoptère mérite-t-elle qu’on en fasse tout un plat ? Henry me pardonnera si je trouve que son argument de l’hélicoptère qui n’existait pas au XVIIIe siècle me semble un peu niais… Le cinéma est un spectacle et peu importe comment sont tournés les films s’ils sont réussis…
Pas plus qu’à l’époque où se situe l’action de « Tom Jones », l’hélicoptère n’existait en 1815, et pourtant Sergueï Bondartchouk a filmé la bataille de Waterloo vue du ciel… Et plus tard, en 1868, toujours pas d’avion ou d’hélicoptère mais dans « La Conquête de l’Ouest » George Marshall a filmé de très haut une panique de bisons … A force de vouloir tout décortiquer on sombre dans un byzantinisme primaire !