4 juillet 2019

Les Damnés du coeur (1928) de Cecil B. DeMille

Titre original : « The Godless Girl »

Les damnés du coeurDans une école américaine, un groupe d’adolescents a fondé une société secrète qui prône l’athéisme. Lors d’un affrontement avec un autre groupe qui défend la religion, une jeune fille est tuée accidentellement. Les deux meneurs sont envoyés en maison de correction…
Dernier film muet de Cecil B. DeMille, The Godless Girl est un film vraiment étonnant. Si le début nous laisse présager d’une croisade contre l’athéisme, le film prend très rapidement une toute autre direction : quatre ans avant Mervyn LeRoy et son I Am a Fugitive from a Chain Gang (1932), DeMille dénonce avec une grande vigueur les traitements infligés dans les maisons de correction. Le réalisateur a enquêté plusieurs mois, envoyant même des espions dans les centres de détention (1). Autre surprise : DeMille (qui est un croyant fervent, rappelons-le) ne s’en prend pas vraiment aux athées mais fustige le radicalisme de chacune des deux parties en présence. Sa « morale » finale est explicite : il faut apprendre à tolérer les opinions divergentes des nôtres. Une fois de plus, l’histoire écrite par Jeanie Macpherson a beaucoup de force ; elle nous happe littéralement sans laisser de temps mort. Beaucoup de scènes sont puissantes et DeMille sait être audacieux dans sa façon de les tourner. Sorti quelques mois après l’arrivée du parlant, le film n’eut hélas aucun succès ; même le style ne convenait pas car, dans les premiers temps du parlant, ce sont des films joyeux et chantants qui magnétisaient le public.  Longtemps resté assez rare, The Godless Girl a été restauré en 2007.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lina Basquette, Marie Prevost, Tom Keene, Noah Beery, Eddie Quillan
Voir la fiche du film et la filmographie de Cecil B. DeMille sur le site IMDB.

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Les damnés du coeurLina Basquette est une Godless Girl dans Les damnés du coeur de Cecil B. DeMille.

Remarques :
* DeMille ayant décliné la proposition de Pathé de tourner deux nouvelles scènes en parlant, la sonorisation d’une version parlante de 90mn fut confiée à l’acteur Fritz Feld.

* Lisa Basquette est alors âgée de 20 ans (mais paraît beaucoup plus). L’actrice avait épousé deux ans auparavant Sam Warner, l’un des frères fondateurs du studio Warner Bros. Sam Warner est crédité pour avoir apporté la technologie qui permit au studio de produire le premier long-métrage parlant de l’industrie du cinéma, Le Chanteur de jazz, dont il ne verra pas la première triomphale en octobre 1927. Il est décédé la veille à l’âge de 40 ans des suites d’une grave maladie du cerveau. Lorsque débute le tournage de The Godless Girl trois mois plus tard, Lisa Basquette était donc toujours en deuil.

* Noah Beery (le garde sadique) est le frère de Wallace Beery.

* Lorsque Cecil B. DeMille s’est rendu en Union Soviétique en 1931, il a découvert qu’il y était très populaire grâce à The Godless Girl. Il ne comprenait pas pourquoi, vue l’importance de la religion à la fin. Il a alors découvert que la dernière bobine n’était tout simplement pas projetée et que le film ainsi amputé était devenu un outil de propagande sur la brutalité des américains envers leur jeunesse.

(1) Dans un encart en début de seconde partie, le réalisateur tient à nous préciser que tout ce qui est décrit est bien réel. Il ajoute toutefois que certains centres accomplissent un travail plus humain pour réinsérer les jeunes délinquants.

Les damnés du coeurMarie Prevost et Lina Basquette dans Les damnés du coeur de Cecil B. DeMille.

Les damnés du coeurPour la scène de l’escalier dans Les damnés du coeur, Cecil B. DeMille a placé sa caméra sur un ascenseur spécialement construit (à l’époque, les grues étaient encore à inventer…) A noter que tout le film a été tourné avec une seule caméra.

Les damnés du coeurPour la scène de la chute dans Les damnés du coeur, la caméra, le chef opérateur J. Peverell Marley et Cecil B. DeMille sont juchés sur une nacelle rudimentaire qui tombe du plafond. La scène est en outre tournée en double exposition (superposition). La vision subjective de la chute fait bien entendu penser à l’ahurissant traveling de Marcel L’Herbier qui utilise à peu près au même moment une méthode encore plus audacieuse dans L’Argent (1928).

The Godless Girl

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