17 février 2008

Babel (2006) de Alejandro González Iñárritu

BabelElle :
Dernier volet de la trilogie après Amours chiennes et 21 grammes, Babel est un très beau film, d’une grande force. Un simple coup de fusil accidentel tiré par un petit marocain tisse un lien très fort entre quatre histoires universelles, fortes de solitude et d’incommunicabilité au Mexique, aux Etats-Unis, au Maroc et à Tokyo. Le cinéma d’Iñárritu est planétaire. Il met en scène avec une grande beauté visuelle, humaine et émotionnelle des personnages au bord de la rupture tout en leur laissant une issue pour renaître et se retrouver. Le scénario est très bien équilibré et ne laisse jamais la sensation d’être manipulé par les effets faciles liés à l’émotion. On passe subtilement d’une histoire à l’autre et à aucun moment, on ne ressent l’artifice ou l’ennui. Iñárritu émaille son film de toute la palette des sentiments. On peut passer d’un seul coup de la plus grande douceur à la crudité la plus violente. Son cinéma ne peut laisser insensible ; on en ressort bouleversé. C’est en plus un incontestable maître de l’image, de la composition et de l’éclairage. Il filme les paysages et les villes avec une rare beauté qui touche profondément. Les plans d’un Tokyo uniformisé et déshumanisé sont absolument somptueux.
Note : 5 étoiles

Lui :
Babel du réalisateur mexicain Alejandro González Iñárritu nous dévoile quatre histoires, très éloignées géographiquement puisqu’elles se déroulent sur trois continents. C’est un incident tragique qui relie ces histoires entre elles. Babel nous plonge dans des fragments de vie qui révèlent beaucoup, dressant des portraits empreints d’une profonde humanité. Mis en scène sans esbroufe, Babel est un très beau film dont le titre reflète la hauteur de l’ambition du réalisateur : mettre toute l’humanité dans un film… Certes, le but est trop élevé pour être atteint mais c’est incontestablement une réussite.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Brad Pitt, Cate Blanchett, Adriana Barraza, Gael García Bernal, Rinko Kikuchi, Kôji Yakusho
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26 octobre 2007

La méthode (2005) de Marcelo Piñeyro

Titre original : El método

La méthodeElle :
Marcelo Piñeyro nous convie à un jeu de massacre édifiant et cruel entre sept cadres qui postulent pour le même poste. Pour les départager, il les enferme dans un bocal et observe par l’intermédiaire de caméras, leurs comportements et confidences comme des rats de laboratoire tandis qu’une manifestation alter mondialiste se déchaîne au pied de l’immeuble de verre. Tests, présence d’une taupe, mensonges, ruses diaboliques tout est bon pour éliminer son prochain. Les réticences de départ font peu à peu place à la stratégie. Les noirceurs humaines se révèlent. Le réalisateur nous livre un film sociologique d’une grande intensité psychologique. Il y dénonce un type de société où la compétition, l’argent, l’individualisme forcené sont rois. Il met peu à peu à jour les failles des uns et des autres et parvient à nous perdre sur les motivations de chacun.
Note : 4 étoiles

Lui :
Film argentin, La Méthode est un huis clos assez original : sept candidats à un poste de cadre supérieur sont réunis dans une pièce pour être soumis à des tests psychologiques en groupe. C’est donc à une étude comportementale que nous convie le réalisateur argentin Marcelo Pineyro puisque ces tests vont révéler certains aspects de la personnalité de chacun. Malgré le trait un peu grossi et la présence de certains éléments racoleurs (par exemple le fait que les candidats d’éliminent eux-mêmes à la façon d’une émission de télé-réalité), l’ensemble est très crédible grâce à la qualité de l’interprétation qui donne une réelle force dans les échanges. Le propos de fond semble être de fustiger l’individualisme qui prend inévitablement le dessus dans ce genre de compétition, un individualisme encouragé par le durcissement des méthodes de recrutement.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Eduardo Noriega, Najwa Nimri, Eduard Fernández, Pablo Echarri
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5 octobre 2007

El Aura (2005) de Fabián Bielinsky

El AuraElle :
(pas vu)

Lui :
Un taxidermiste argentin, doté d’une mémoire visuelle peu commune, a pour passion d’imaginer des holdups dans sa tête et de prévoir leur déroulement précis. A la faveur d’un concours de circonstances, il va mettre le doigt dans une équipée bien réelle. El Aura est un film extrêmement original par son scénario et il est rare de voir une telle créativité dans un thriller. En tant que spectateur, on s’associe pleinement au héros et on tente avec lui d’assembler le vaste puzzle qui s’offre à lui. Fabián Bielinsky réussit là un film brillant dans lequel il parvient à maintenir la tension de façon constante. El Aura est son second et hélas ultime long-métrage puisque ce cinéaste argentin a succombé à une crise cardiaque en 2006.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Ricardo Darín, Dolores Fonzi, Pablo Cedrón
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20 décembre 2006

Bombón el perro (2004) de Carlos Sorin

Titre original : « El perro »

Bombon el perroElle :
Beaucoup de mal à m’immerger dans ce film. Un montage très heurté et nerveux pour commencer et tout au long du film une bande son assez pénible. Je ne comprends pas bien les raisons de ce choix d’imposer un bruit de fond permanent. L’histoire de cet employé de garage au chômage a des côtés touchants. Le chien qu’il récupère lui apporte notoriété et une vie transformée sans qu’il le cherche. Cependant, je ne trouve pas les personnages qui l’accompagnent spécialement attachants. D’autre part, l’histoire traîne en longueur et manque un peu de profondeur. En revanche, un bon point pour Carlos Sorin : un vrai sens de la photographie, des cadrages, de l’utilisation de la couleur dans des superbes paysages.
Note : 2 étoiles

Lui :
Au-delà de cette histoire amusante d’un quinquagénaire sans emploi qui voit sa vie changer grâce à un chien, le réalisateur argentin Carlos Sorin veut nous montrer la réalité économique de son pays. Sur fond de grands paysages désolés qu’il filme avec talent dans des plans très graphiques, il nous montre la vie de cet homme placide, un peu résigné, qui accueille avec une imperturbable bonhomie les évènements qui lui arrivent. Le début du film est assez pénible, avec une caméra à l’épaule placée à 10 cm des visages mais heureusement le réalisateur se recule un peu plus par la suite. Les bruits de fond, notamment le vent, sont mixés assez forts : point de quiétude donc. Les acteurs, tous non professionnels, jouent avec beaucoup de naturel et l’ensemble reste très original et assez amusant. Une belle façon pour Carlos Sorin de nous montrer l’Argentine actuelle.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Juan Villegas, Walter Donado
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20 octobre 2006

« Nordeste » (2005) de Juan Diego Solanas

NordesteElle :
De bonnes choses dans ce premier long métrage argentin mais un scénario inégal. La première partie du film met beaucoup de temps à se mettre en place. L’ennui a tendance à s’installer malgré la gravité du sujet. On suit en parallèle les vies solitaires d’une française privilégiée (Carole Bouquet) qui veut adopter un enfant et celle d’une jeune argentine pauvre qui peine à survivre. Le film retrouve son intérêt à partir du moment où les deux femmes se rencontrent. Le mérite du réalisateur est de pointer du doigt les carences de la société argentine. D’un côté les riches propriétaires, de l’autre les démunis qui n’ont d’autres ressources que de vendre leurs enfants et de faire du trafic d’organes ou de drogue et enfin les occidentaux qui sous prétexte de mal d’enfant, entretiennent cet état de fait et se rendent complice de ces trafics.
Note : 3 étoiles

Lui :
« Nordeste » fait un parallèle assez terrible entre le portrait de 2 femmes : l’une se débat dans le nord-est de l’Argentine pour parvenir à survivre avec son enfant de 13 ans, l’autre est une française aisée venue dans ce même pays pour tenter d’adopter illégalement un enfant. Il est bien entendu difficile de critiquer ce film qui dénonce la misère et le trafic d’enfants mais il est regrettable que le rythme vraiment trop lent du film nous fasse décrocher, surtout dans sa première moitié. Carole Bouquet s’est visiblement beaucoup impliquée dans son rôle qu’elle interprète avec beaucoup d’authenticité, sans fard.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Carole Bouquet, Aymará Rovera
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9 juin 2006

Kamchatka (2002) de Marcelo Piñeyro

Kamchatka Elle :
Un film argentin d’une grande intensité et à la mise en scène dépouillée. 1976, à Buenos Aires, le général Videla prend le pouvoir par la force. Marcelo Piñeyro nous fait vivre le drame d’une famille chaleureuse par les yeux d’un enfant qui tente de comprendre l’univers et les mensonges des adultes. A l’écart du monde, la famille doit se cacher et tente malgré tout de vivre normalement malgré la lourde menace d’être arrêtée et de disparaître à jamais. La force du film est de créer ce climat d’attente et d’angoisse entrecoupé de grands moments de bonheur. Des liens très forts unissent les parents et les enfants. La dictature rôde mais on ne la voit et on ne l’entend pas. Tout est suggéré par des regards, des silences, le souffle du vent. On sent peu à peu que le destin des parents est inéluctable. Kamchatka est un film très émouvant qui fait ressurgir les fantômes des dictatures.
Note : 5 étoiles

Lui :
Aucune scène de violence ni de torture dans ce film qui témoigne de l’après-coup d’état militaire de 1976 en Argentine. C’est tout juste si l’on entrevoit des militaires dans une scène. Non, tout est vu depuis les yeux d’un enfant de 10 ans dont les parents fuient une menace qui reste invisible mais bien réelle. Le film traite surtout de la relation parents/enfants dans cette situation d’urgence, où tout peut basculer d’un moment à l’autre. Filmé avec délicatesse, en accordant une grande place à ces petites choses qui remplissent l’univers d’un enfant, Kamchatka est un film assez attachant mais qui pêche parfois par un certain académisme. L’interprétation des acteurs, les deux parents tout comme les deux enfants, est vraiment remarquable.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Ricardo Darín, Cecilia Roth, Matías Del Pozo
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2 juin 2006

Amours chiennes (2000) de Alejandro González Iñárritu

Titre original : « Amores perros »

Amours Chiennes Elle :
Une belle découverte avec ce film mexicain d’une grande dextérité et intensité dramatique. Il nous montre trois destins qui se croisent au même endroit, lors d’un accident de voiture à Mexico. Le réalisateur nous dévoile peu à peu ces trois histoires d’amour qui se déroulent en compagnie de chiens, présents tout au long du film. Chiens de combat pour faire gagner de l’argent à un jeune couple sans le sou, chien de riche qui tient compagnie à une jeune femme accidentée, chiens errants avec un vagabond grisonnant qui rêve de retrouver la fille qu’il a lâchement abandonnée. Alejandro González Iñárritu nous plonge dans un monde de violence, de pauvreté, d’amour déçu et de rêves avortés. Le montage du film est incisif, nerveux et inventif; les personnages laissent passer sur leurs visages beaucoup d’émotion. Un film plein d’humanité.
Note : 5 étoiles

Lui :
Amour chiennes : Il se dégage une grande force de ce film, que ce soit sur le plan du scénario qui fait se croiser trois histoires se déroulant dans un monde totalement différent, ou sur le plan de la mise en scène : Alejandro González Iñárritu utilise parfaitement une camera très vive, avec une bonne utilisation des gros plans et surtout un montage très dynamique qui donne des images que l’on a parfois l’impression de recevoir comme un coup de poing. La scène qui ouvre le film nous met d’ailleurs tout de suite dans le bain, elle nous attrape pour ne plus nous lâcher ensuite. L’ensemble est très réussi, assez sombre dans son propos et sur le monde qu’il nous décrit, avec seulement quelques faiblesses en milieu de film sur la deuxième histoire.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Emilio Echevarría, Gael García Bernal, Goya Toledo
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1 décembre 2005

La Cité de Dieu (2002) de Fernando Meirelles et Kátia Lund

Titre original : « Cidade de Deus »

La Cité de Dieu Elle :
Quel film fascinant et quel cinéma ! Du grand art. Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu un film si fort de par son sujet, ses interprètes et ses images. Une réelle expérience forte en émotions. C’est à travers la voix off d’un gosse de la favella de la Cité de Dieu qu’on voit de l’intérieur la vie et l’évolution de la favella sur une période de vingt ans. Un montage savant dont aucune image n’est gratuite rythme en accélérés, ralentis, pauses, fondus le coeur de la cité avec tout son lot de malheurs, de pauvreté et de crimes commis par des enfants et adolescents. On est happé par la brutalité et crudité des situations sans jamais voir une goutte de sang. C’est dans ce choix réaliste de montrer la violence sans jamais tomber dans le voyeurisme sanguinolent que les deux réalisateurs excellent. La bande-son mâtinée de rythmes brésiliens et de percussions ponctue sourdement tous ces destins sans avenir. Un film à ne manquer sous aucun prétexte.
Note : 5 étoiles

Lui :
La cité de Dieu La Cité de Dieu est un film assez étonnant qui parvient à nous plonger dans l’univers d’une favella brésilienne et de la guerre des gangs qui y perdure. La mise en scène est très innovante, que ce soit dans le déroulement narratif, avec ses flash-back tout en douceur, ou dans le jeu de caméra, une caméra qui se fait très véloce ou avec de brusques accélérations ; ces effets, loin d’être gratuits, viennent accentuer le climat créé. La mise en scène est aussi extrêmement réaliste, authentique même. Un film vraiment convaincant.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Alexandre Rodrigues, Leandro Firmino, Phellipe Haagensen
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14 novembre 2005

Les Neuf Reines (2000) de Fabián Bielinsky

Titre original : « Nueve reinas »

Les Neuf Reines Elle :
Malgré de bonnes choses et de bons acteurs dans ce film argentin, on n’adhère pas complètement et même on s’ennuie parfois. Deux hommes s’associent pour escroquer les gens. Leurs confrontations sont assez longues. Nous sommes au royaume de l’arnaque, des combines foireuses et de la débrouille. La crise économique est là et le système D est roi. On ne peut se fier à personne et tout le monde manipule ou se fait manipuler. La fin est excellente avec un retournement de situation inattendu.
Note : 3 étoiles

Lui :
Dans le style « escroqueries et manipulations », le film Les Neuf Reines est plutôt réussi : les apparences sont trompeuses, tout relève de la manipulation et la fin n’est pas celle que l’on imaginait. Le film dresse un portrait assez amer de l’Argentine, portrait où les magouilles et corruptions sont omniprésentes. Les Neuf Reines se laisse regarder, assez plaisant avec de bonnes notes d’humour, mais que l’on oubliera sans doute trop vite.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Gastón Pauls, Ricardo Darín, Leticia Brédice
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8 octobre 2005

Carnets de voyage (2004) de Walter Salles

Titre original : « Diarios de motocicleta »

Carnets de voyage Elle :
Je sais que je risque de choquer mais je n’ai beaucoup accroché au film de Walter Salles. Je dirais même que j’ai trouvé ces Carnets de voyage assez ennuyeux. Je trouve les intentions louables mais je n’ai pas été touchée et happée par le traitement de cette histoire qui je trouve manquer de souffle et d’émotion. Le réalisateur semble avoir du mal à remplir ce périple. Ces deux jeunes bourgeois, dont le futur Che, voyagent à travers l’Amérique latine pour le plaisir mais finissent par se rendre compte de la réalité de la misère et de l’injustice qui accablent les pays traversés. Le mythe du Che suffit-il à nous tenir en haleine ?
Note : 2 étoiles

Lui :
Le film de Walter Salles est plutôt agréable à regarder mais on peut lui reprocher son côté consensuel : le sujet est plutôt dans l’air du temps, les images sont belles et le réalisateur a choisi de se concentrer sur les relations entre nos deux voyageurs… l’ensemble paraît trop poli, arrondi aux entournures. Bien sûr, il y a la misère sous-jacente, celle qui doit entraîner une certaine prise de conscience chez le futur Che Guevara mais, même elle, parait trop esthétique. Ceci engendre un manque de force émotionnelle au film et ce n’est que dans la dernière partie, à la léproserie, que le film est plus convaincant. C’est toutefois un film qui se laisse regarder, mais sans franchement déclencher d’enthousiasme.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Gael García Bernal, Rodrigo de La Serna
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