22 octobre 2010

Excursion dans la lune (1908) de Segundo de Chomón

Excursion dans la luneLui :
(Muet 8 minutes) Le succès considérable du Voyage dans la Lune de Georges Méliès entraina l’apparition de nombreuses imitations. Le fait que Pathé décide, 6 ans plus tard, d’en tourner une copie montre bien l’ampleur du succès du film de Méliès. Car cette Excursion dans la Lune n’est pas un remake encore moins une suite, non c’est une pâle copie, un plagiat destiné à profiter de la notoriété d’un autre film. On retrouve ainsi la plupart des scènes-clés du film de Méliès mais tout est bâclé, simplifié, écourté afin d’avoir une durée moindre et donc un prix de vente inférieur à l’original. Les différences les plus visibles sont au niveau de l’alunissage (dans le bouche au lieu de l’œil, l’effet perdant d’ailleurs tout son humour), et au niveau de la partie sur la Lune qui est l’objet d’un petit ballet de danseurs et d’acrobates. Le film reste très intéressant à regarder, ne serait-ce que pour sa valeur historique et c’est une bonne chose de pouvoir le voir aujourd’hui joliment restauré dans une version en couleurs.
Note : 2 étoiles

Acteurs: 
Voir la fiche du film et la filmographie de Segundo de Chomón sur le site imdb.com.

21 octobre 2010

L’agonie de Byzance (1913) de Louis Feuillade

L'agonie de ByzanceLui :
(Muet 29 mn) Louis Feuillade met en scène l’un des évènements les plus importants de l’Histoire : la chute de Constantinople en 1453 par laquelle les Ottomans mirent fin à la domination chrétienne. Le film est particulièrement ambitieux pour l’époque : certaines scènes comportent des centaines de figurants, plusieurs décors sont utilisés et les costumes sont très travaillés. Une musique symphonique avait même été composée par Henri Février pour être jouée par un orchestre de cent musiciens et de grandes orgues pendant la projection au Gaumont Palace (1). Feuillade parvient parfaitement à maitriser cette grande production, y compris dans les scènes de combat. Tout est filmé à hauteur d’homme et en caméra fixe (principale limitation technique à cette époque) ce qui forçait à utiliser beaucoup d’astuces afin que toute l’action se déroule dans le cadre. Certains points historiques importants sont présents comme ces gigantesques canons (dont on ne voit que l’extrémité) qui permirent aux assaillants de percer les murailles. L’Agonie de Byzance est l’un des films historiques les plus fastueux de son époque.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Luitz-Morat, Georges Melchior, Albert Reusy, Renée Carl
Voir la fiche du film et la filmographie de Louis Feuillade sur le site IMDB.

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(1) Pour en savoir plus sur les orchestres au Gaumont Palace :
voir cette page sur le site de la Cinémathèque Française

18 octobre 2010

Bellamy (2009) de Claude Chabrol

BellamyLui :
Comme nous le savons maintenant, Bellamy restera hélas toujours le dernier film de Claude Chabrol. Un commissaire de police en vacances se retrouve à enquêter dans une affaire assez confuse de disparition. L’histoire est inspirée d’un fait divers aussi authentique qu’invraisemblable. Bellamy marque la rencontre deux figures du cinéma français, Gérard Depardieu et Claude Chabrol, rencontre qui, il faut bien l’avouer, déçoit quelque peu. Devenu un véritable colosse, l’acteur adopte ici un jeu assez terne, certes parfaitement contenu pour une fois par son réalisateur, mais devenu étrangement atone. Les tentatives d’introduire un peu de sensualité entre lui et sa femme plus jeune d’une vingtaine d’années ajoute un peu d’improbabilité qui tend à déteindre sur tout le film. Bellamy n’est en tous cas pas idéal pour découvrir, ou mieux connaître, Claude Chabrol.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Gérard Depardieu, Clovis Cornillac, Jacques Gamblin, Marie Bunel, Vahina Giocante
Voir la fiche du film et la filmographie de Claude Chabrol sur le site IMDB.

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14 octobre 2010

Volpone (1941) de Maurice Tourneur

Titre parfois utilisé : Volpone ou l’amour de l’or

Volpone ou l'amour de l'orLui :
Volpone est la transcription au grand écran d’une pièce de théâtre créée par l’anglais Ben Jonson en 1606 puis adaptée par Jules Romains dans les années 1920. A Venise, un riche armateur (Harry Baur) victime d’un revers momentané de fortune, voit ses amis le lâcher et même le faire emprisonner. Libéré et renfloué, il décide de se venger en leur faisant croire qu’il est à l’article de la mort dans le but d’attirer les prétendants à sa succession. Volpone ou l'amour de l'or Pour mener à bien sa tromperie, il se fait aider par son valet, ex-compagnon de cellule (Louis Jouvet). Le film de Maurice Tourneur est remarquable par son interprétation : Harry Baur est plutôt exubérant mais sans excès, Charles Dullin crée de manière expressive un usurier vraiment abominable et Louis Jouvet fait une interprétation très juste, assez retenue, de ce valet rusé. L’histoire est très amusante et plusieurs décors sont utilisés ce qui permet d’atténuer, et même d’éviter, la sensation de théâtre filmé.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Harry Baur, Louis Jouvet, Charles Dullin, Jean Témerson, Fernand Ledoux, Jacqueline Delubac
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Remarques :
1) Les personnages principaux ont des noms d’animaux qui en disent long sur leur caractère : Volpone = renard en italien, le serviteur Mosca = la mouche, l’usurier Corbaccio = corneille nécrophage, le marchand Corvino = le corbeau, le notaire/avocat Voltore = le vautour.
2) Jacques de Baroncelli a débuté le tournage en juin 1938 et dut l’interrompre rapidement pour raisons financières. Il fut repris avec les mêmes acteurs par Maurice Tourneur en mars 1940. Quelques scènes tournées en 38 sont présentes dans le montage final.

Autres versions :
Guêpier pour trois abeilles (The Honey Pot) de Joseph L. Mankiewicz (1967) avec Rex Harrison et Susan Hayward.
Volpone, pièce filmée par Pierre Sabbagh (1978) pour l’émission télévisée Au théâtre ce soir avec Jean Le Poulain et Francis Huster (à noter que Pierre Sabbagh a un rôle de figuration dans le film de Maurice Tourneur : c’est le page qui se trouve derrière l’usurier dans la scène du banquet, on ne l’aperçoit que très fugitivement).
Volpone, film TV pour TF1 de Frédéric Auburtin (2003) avec Gérard Depardieu, Daniel Prévost et Gérard Jugnot.

2 octobre 2010

Remorques (1941) de Jean Grémillon

RemorquesLui :
Le capitaine d’un remorqueur de sauvetage a une vraie passion pour métier. Lors d’une opération de sauvetage, il recueille une jeune femme qui cherche à fuir son mari. Adaptation d’un roman de Roger Vercel par Jacques Prévert qui a également écrit tous les dialogues, Remorques est une histoire d’amour fou avec ce dilemme entre la passion et l’amour sage avec une troisième prétendante : la mer. Le côté documentaire du film était prévu pour être plus développé (comme toujours avec Grémillon) mais le tournage fut interrompu par le début de la Seconde Guerre Mondiale. Les scènes de tempête ne furent donc tournées qu’un an plus tard, plus modestement, avec des maquettes en studio. Le film est l’occasion que réunir à nouveau le couple de Quai des Brumes, Michèle Morgan et Jean Gabin. Remorques contient de très belles scènes, notamment celle sur la grande plage déserte (1) et dans la grande maison vide ou encore celles situées dans la salle des machines du remorqueur. Un film au lyrisme sobre.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Madeleine Renaud, Michèle Morgan, Fernand Ledoux
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Remarques :
Jacques Prévert n’a guère apprécié que Jean Grémillon mette une musique assez religieuse sur le texte qui clôt le film. Il lui en a voulu et ne souhaitait plus retravailler avec lui. Il écrira néanmoins le scénario de Lumière d’été deux ans plus tard, mais ce sera leur dernière collaboration.

(1) La plage du Vougot à Guissény dans le Finistère.

29 septembre 2010

Providence (1977) de Alain Resnais

ProvidenceLui :
En proie à l’insomnie et aux douleurs, un écrivain septuagénaire passe une mauvaise nuit tout en imaginant les scènes de son prochain roman. Peu à peu, il construit son histoire autour d’un procureur cynique et insensible, de sa femme qui aspire à une autre vie et d’un apathique doux rêveur. Providence est un film à plusieurs facettes : c’est en premier un film sur les mécanismes, parfois douloureux, de la création : cet écrivain puise dans ses proches pour créer des personnages en les transformant pour qu’ils deviennent tels qu’il les voit ; il place aussi ses propres terreurs, ses angoisses, sa propre culpabilité. C’est aussi un film sur l’imaginaire, un imaginaire qui n’est pas sans éviquer celui de Lovecraft (1). C’est un film sur l’autorité et le despotisme avec ce climat de guerre et de junte militaire directement issu des angoisses mêlés de souvenirs de l’écrivain. C’est un film sur la mort, omniprésente par la menace de son imminence. C’est un film sur la personnalité, celle qui est visible et celle qui est enfouie. Le retour à la réalité à la fin du film avec son déjeuner en plein air est à la fois éclairant et même amusant, car il nous donne les clés de son imaginaire de la nuit. Providence est ainsi un film très riche, qui peut dérouter, certes, mais qui s’inscrit indéniablement parmi les plus grands films d’auteur du cinéma français.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Dirk Bogarde, Ellen Burstyn, John Gielgud, David Warner, Elaine Stritch
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(1) Alain Resnais a très probablement nommé la maison de l’écrivain Providence en hommage à H.P. Lovecraft. Lovecraft a en effet vécu toute sa vie dans la ville de Providence (Rhode Island) aux Etats Unis.

21 septembre 2010

Tokyo! (2008) de Michel Gondry, Leos Carax et Joon-ho Bong

Tokyo!Lui :
De ces trois courts-métrages sur la mégapole de Tokyo, c’est sans aucun doute celui de Leos Carax qui est la plus marquant : un laideron humain qui semble avoir jailli des entrailles de la terre sème la panique et la mort dans les rues de Tokyo en courant comme un dératé. Les médias le surnomment « la créature des égouts ». Leos Carax crée un personnage assez étonnant, sorte de croisement entre Nosferatu et Quasimodo, au langage et au comportement incompréhensif, un être totalement déplacé. Avant cela, Michel Gondry met en scène un jeune couple qui tente de s’installer à Tokyo. Le thème est celui de la difficulté de s’insérer, l’histoire se recentrant essentiellement sur la jeune femme qui opère une métamorphose inattendue, d’abord fantastique mais qui devient poétique. Le dernier court-métrage, celui du coréen Bong Joon-ho, aborde le même sujet sous angle totalement différent : un « hikikomori », c’est-à-dire un jeune qui vit cloîtré chez lui avec le minimum de contact avec l’extérieur, va voir sa vie chamboulée lorsqu’une jeune livreuse de pizza s’évanouit à sa porte lors d’un tremblement de terre. Cette fable traite de façon amusante de l’incommunicabilité.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Ayako Fujitani, Ryo Kase, Denis Lavant, Jean-François Balmer, Teruyuki Kagawa, Yû Aoi
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Les trois courts-métrages qui composent Tokyo! :
Interior Design de Michel Gondry
Merde de Leos Carax
Shaking Tokyo de Bong Joon-ho

20 septembre 2010

Le récit du colonel (1907) de Louis Feuillade

Le récit du colonelLui :
(Muet, 4mn) Le récit du Colonel est une fantaisie particulièrement débridée. Lors d’un dîner mondain, un colonel se voit prié de raconter une bataille où il s’est illustré. Se laissant emporter par son récit, il commence à mimer l’action avec tant d’ardeur que la salle du dîner se retrouve rapidement mise à sac. Sur le plan cinématographique, il n’y a sans doute rien d’exceptionnel, la caméra reste en place, mais c’est le jeu des acteurs qui rend ce petit film vraiment très drôle : ils sursautent tout d’abord, ensuite la peur les gagne, puis la terreur… Leurs réactions sont parfaitement réglées ; une bonne troupe de comédiens. De plus, il est toujours amusant de voir que l’humour à cette époque pouvait aller assez loin dans l’absurde et même dans une certaine violence : la salle du dîner est en effet totalement dévastée.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Alice Tissot, Maurice Vinot, Renée Carl
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17 septembre 2010

L’orgie romaine (1911) de Louis Feuillade

HéliogabaleLui :
(Muet, 8 mn) Entre 1908 et 1913, Louis Feuillade a réalisé un certain nombre de petits films historiques et cette Orgie Romaine en est un bon exemple. En 218 après J.C., l’empereur romain Elagabal mène une vie décadente qui va se retourner contre lui. Précisons tout de suite que l’érotisme promis implicitement par le titre (si on le lit dans le sens moderne du terme) est totalement absent, les danseuses restent très habillées pendant la fameuse orgie. Cependant pour l’époque, la vision de cette vie de plaisirs avait de quoi choquer les esprits par ce qu’elle évoque et sous-entend… Le film est intéressant par ses costumes, nombreux et très travaillés, et aussi par l’utilisation de lions, d’abord dans une fosse où l’on jette un maladroit puis… en liberté dans la scène de l’orgie et donc sur le plateau(!) Etonnant. On peut noter aussi l’évidente cruauté de l’ensemble, même si les scènes dures se déroulent juste en dehors du champ de la caméra. A cette époque, le cinéma français (et aussi, dans une certaine mesure, italien) était bien en avance sur le cinéma américain, en particulier dans le genre du film historique.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean Aymé, Louise Lagrange, Luitz-Morat
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16 septembre 2010

Le coeur et l’argent (1912) de Louis Feuillade

Le coeur et l'argentLui :
(Muet, 18mn) Bien qu’elle soit amoureuse d’un jeune batelier sans le sou, une jeune femme accepte d’épouser un homme riche et âgé sous la pression de sa mère. Le Cœur et l’Argent présente quelques particularité intéressantes : il a été tournée presqu’entièrement en extérieurs en banlieue (qui était encore très champêtre à cette époque), l’image est assez travaillée dans sa composition, Suzanne Grandais dans Le coeur et l'argent il présente une belle utilisation de l’écran partagé (ou split-screen, certainement obtenu ici à l’aide d’une double exposition avec cache) et il nous montre la jeune et fraîche Suzanne Grandais âgée de 19 ans, actrice qui allait devenir une grande vedette avant de périr tragiquement, à l’âge de 27 ans, dans un accident automobile pendant un tournage.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Suzanne Grandais, Renée Carl, Paul Manson
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