14 mars 2015

Rue sans issue (1937) de William Wyler

Titre original : Dead End

Dead EndDans le New York des années trente, une rue en cul-de-sac qui se termine sur le fleuve voit un immeuble de standing s’immiscer dans le quartier très pauvre. Une bande de gamins qui traîne toute la journée dans la rue, un architecte sans emploi dont deux femmes sont amoureuses, l’une riche, l’autre pauvre, un gangster qui est revenu dans le quartier pour voir sa mère et son ancien grand amour, tels sont les personnages de cette rue sans issue… Les origines théâtrales de Dead End sont clairement visibles dans cette production de Samuel Goldwyn : le petit nombre de lieux, l’atmosphère de studio, la manière de poser les dialogues les mettent en évidence. La pièce a d’ailleurs été transposée pratiquement sans adaptation. L’ensemble peut sembler un peu artificiel et le jeu de certains acteurs trop affecté. Ce n’est toutefois pas le cas de la bande des Dead End Kids qui jouent grand naturel. Les personnages sont vraiment très typés et le scénario joue de manière un peu exagérée sur les contrastes. Humphrey Bogart est l’élément le plus remarquable de ce film : son personnage est le plus complexe et il parvient parfaitement à le restituer à l’écran. Après La Forêt pétrifiée de l’année précédente, c’est le film qui contribuera à asseoir son personnage de gangster en cette fin des années trente. Dead End sera un très grand succès. Il bénéficie encore aujourd’hui d’une excellente réputation, sans doute un peu excessive.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sylvia Sidney, Joel McCrea, Humphrey Bogart, Wendy Barrie, Claire Trevor, Allen Jenkins
Voir la fiche du film et la filmographie de William Wyler sur le site IMDB.

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Dead End de William Wyler
Joel McCrea, Allen Jenkins et Humphrey Bogart dans Dead End de William Wyler

Remarques :
Dead End* Dead End est adapté d’une pièce à succès de Sidney Kingsley.
* Pour des raisons de censure, le nom de la profession de Francey n’est jamais prononcé. On la devine bien. En revanche, ce que nos yeux modernes comprennent moins, ce sont les marques qu’elle montre à son ancien amant horrifié : ce sont les marques de la syphilis (dont le nom n’est également pas prononcé).
* Toujours à propos de Francey : bien que sa présence à l’écran ne totalise que cinq minutes, Claire Trevor a été nominée pour l’Oscar du meilleur second rôle… Eût-elle gagné, cela aurait certainement constitué un record (un « supporting role » avec dix lignes de texte…)
* Dead End voit la première apparition du groupe d’adolescents qui se sont appelés les Dead End Kids. Ils jouaient les mêmes rôles dans la pièce. Samuel Goldwyn s’est empressé de se débarrasser de cette bande trop turbulente pour les revendre à la Warner. Ils apparaitront ensemble dans six films (soit sept en tout avec celui-ci) et ils feront ensuite une longue carrière  d’acteur, le plus souvent ensemble (sous le nom East Side Kids puis Bowery Boys) mais aussi séparément parfois. La légende propagée par les studios qui affirmait que les Dead End Kids avaient été découverts dans la rue, était bien évidemment fausse… Parmi les six, Billy Halop, Bobby Jordan, Huntz Hall, Leo Gorcey, Gabriel Dell, Bernard Punsly, seul le dernier était un débutant, les autres étaient déjà des acteurs confirmés. Punsly n’a d’ailleurs jamais été totalement intégré dans la bande et c’est le seul qui n’ait pas eu de longue carrière.

Les Dead End Kids dans Dead End de William Wyler
Les Dead End Kids dans Dead End de William Wyler.
(de g. à dr.) Bobby Jordan, Billy Halop, Huntz Hall, Gabriel Dell et Leo Gorcey.

10 avril 2010

L’école du crime (1938) de Lewis Seiler

Titre original : « Crime School »

L'école du crimeLui :
Le titre peut paraître désuet et faire sourire, il n’en est pas moins approprié. L’école du crime est en effet un film plutôt social où l’idée de base est de démontrer que les maisons de correction trop dures et rigides peuvent engendrer des criminels plutôt que de les réinsérer. Nous suivons donc une petite bande d’adolescents délinquants (interprétés par les Dead End Kids) qui est envoyée dans une maison de correction. Un nouveau directeur (Humphrey Bogart) est nommé pour mettre un frein aux pratiques brutales et carcérales employées jusque là. Il va tenter de gagner la confiance des enfants. Le film est donc pavé de bonnes intentions et la démonstration est quelque peu idyllique. L’école du crime serait probablement plus oublié qu’il ne l’est s’il n’avait Humphrey Bogart à l’affiche. L’acteur montre déjà un peu de présence mais la performance la plus remarquable est celle des Dead End Kids qui, pour leur deuxième long métrage, ont un rôle de tout premier plan. Leur interprétation est pleine d’authenticité. Cela ne suffit pas pour que le film soit remarquable, l’ensemble manque un peu de caractère. A noter que Lewis Seiler refera le même film un an plus tard, toujours avec les Dead End Kids mais aussi, cette fois, avec Ronald Reagan : Hell’s Kitchen
Note : 2 étoiles

Acteurs: Humphrey Bogart, Gale Page, Billy Halop, Bobby Jordan, Huntz Hall, Leo Gorcey, Bernard Punsly, Gabriel Dell
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Remarques :
1) La bande des six adolescents s’appelle Dead End Kids car ils se sont fait connaître dans une pièce intitulée Dead End, pièce qui eut un grand succès à Broadway. Elle fut ensuite adaptée au cinéma par William Wyler en 1937 avec Humphrey Bogart dans l’un des rôles principaux. Leur meilleur film est sans aucun doute Les anges aux figures sales qu’ils tournèrent quelques mois plus tard.
Dead End Kids = Billy Halop, Bobby Jordan, Huntz Hall, Leo Gorcey, Bernard Punsly, Gabriel Dell.
2) Le film est également très proche d’un autre film, toujours de la Warner :
The Mayor of Hell de Archie Mayo (1933) avec James Cagney.

18 septembre 2009

Je suis un criminel (1939) de Busby Berkeley

Titre original : « They made me a criminal »

Je suis un criminelLui :
Je suis un criminel est un film franchement inattendu de la part de Busby Berkeley. Bien plus connu pour ses chorégraphies fastueuses et ses ballets aquatiques dansés par des centaines de girls, il signe en effet ici un film plutôt à connotation sociale (et sans aucun numéro musical)… Un jeune boxer new-yorkais promis à un brillant avenir pense avoir tué un homme à la suite d’un enchaînement de circonstances. Sous une autre identité et cachant soigneusement ses capacités de boxeur, il s’enfuit vers l’ouest sans un sou en poche. Ce fugitif est interprété par le jeune et séduisant John Garfield, dont c’est le second film et qui n’a pas encore l’énorme popularité qu’il connaîtra par la suite (1). Je suis un criminel L’acteur vient d’ailleurs lui-même d’un milieu simple et a même été boxeur, donc il peut donner beaucoup de crédibilité à son rôle. A ses côtés, il faut noter la présence des Dead End Kids, le groupe de jeunes acteurs que l’on avait déjà vu dans Les anges aux figures sales avec lequel ce film a quelque analogie ; c’est par leurs personnages de gamins difficiles que le film prend d’ailleurs un certain aspect social. Les valeurs véhiculées ont beau être à la gloire de l’american way of life, elles n’en sont pas moins assez nobles et le film est plutôt fort. Il est aussi assez prenant. Dans la filmographie de Busky Berkeley, Je suis un criminel est rarement cité, totalement éclipsé par ses films musicaux. Il mérite pourtant mieux que cela.
Note : 3 étoiles

Acteurs: John Garfield, Gloria Dickson, Claude Rains, Ann Sheridan, May Robson
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Le film est le remake de
The life of Jimmy Dolan d’Archie Mayo (1933) avec Douglas Fairbanks Jr. et Loretta Young adapté d’une pièce de Beulah Marie Dix (« Sucker« ), pièce qui ne fut jouée à Broadway qu’en 1933, peu avant la sortie du film.

(1) John Garfield deviendra durant les années quarante l’une des plus grandes stars de la Warner. Quand il succombera à la suite d’un crise cardiaque à l’âge de 39 ans en 1952, ses funérailles attireront la plus grosse foule jamais vue à Hollywood depuis l’enterrement de Rudolph Valentino.

19 octobre 2008

Les anges aux figures sales (1938) de Michael Curtiz

Titre original : « Angels with dirty faces »

Les anges aux figures salesElle :
(pas vu)

Lui :
Deux gamins chapardeurs d’un quartier très populaire de New-York se retrouvent 15 ans plus tard. L’un est devenu prêtre alors que l’autre est un petit caïd admiré par une bande de gamins du quartier. Le scénario de Les anges aux figures sales n’est franchement pas novateur en cette fin des années 30 mais le traitement que Curtiz en fait est néanmoins remarquable. Si le film connut un franc succès au moment de sa sortie, il est généralement moins bien considéré aujourd’hui où il est de bon ton de railler les films un tant soit peu moralisateurs. C’est dommage car la réalisation de Michael Curtiz est irréprochable : un rythme très bien enlevé avec un joli mélange de scènes d’action et de scènes de réalisme social, une belle photographie jouant avec les ombres et surtout une parfaite interprétation, James Cagney en tête qui fait à nouveau tandem avec Pat O’Brien. Les anges aux figures sales propulsa la carrière d’Ann Sheridan et celle des Dead End Kids qui interprètent ici la petite bande de gamins. Bogart est ici dans un second rôle, plutôt effacé.
Note : 4 étoiles

Acteurs: James Cagney, Pat O’Brien, Humphrey Bogart, Ann Sheridan, George Bancroft
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Pour capitaliser sur le succès de Les anges aux figures sales, la Warner sortit un  an plus tard Angels Wash Their Faces (cela ne s’invente pas!) avec Ann Sheridan, Ronald Reagan et les Dead End Kids. Ce n’est pas une suite mais plutôt un film sur le même thème. Un film hélas de bien moindre intérêt.