Alexandre, jeune oisif, vit avec (et aux crochets de) Marie, boutiquière sensiblement plus âgée que lui. Il aime encore Gilberte, étudiante qui refuse la demande en mariage qu’il lui fait en forme d’expiation. Il accoste ensuite une autre jeune femme, Veronika, interne à l’Hôpital Laennec…
La Maman et la putain est un film français écrit et réalisé par Jean Eustache. C’est un film assez novateur ou, du moins, qui va plus loin que les autres films de son époque. On peut le situer dans le sillage de la Nouvelle Vague dans le sens où il capte l’esprit d’une génération, mais il est plus que cela. Jean Eustache s’inspire de sa vie personnelle, il tourne dans l’appartement de sa compagne qui est costumière et maquilleuse sur le tournage et dont le rôle est tenu par Bernadette Lafont (qui est amie avec elle dans la vraie vie). Bien que son personnage de dandy un peu précieux soit loin d’être admirable, les monologues de Jean-Pierre Léaud sont passionnants à écouter, remarquablement bien écrits et admirablement bien restitués (1). C’est magnifique. Les textes des personnages féminins sont plus restreints et (à mon humble avis… qui ne semble pas être partagé) moins brillants ; le long monologue final de Veronika paraît même assez laborieux dans sa forme (l’expérience de Françoise Lebrun en tant qu’actrice était bien plus réduite que celles de J.-P. Léaud ou Bernadette Lafont). Il capte néanmoins l’esprit d’une époque (post-Mai 68) quant à une conception désinhibée de l’amour même si Eustache débouche finalement sur une position qui paraît bien conventionnelle (le véritable amour est celui où on fait des enfants) (mais il serait injuste de réduire sa position à cela). Le film est très long (3h40), trop long certainement, mais cela fait partie de sa personnalité. A sa sortie, le film divisa la critique et le public.
Elle:
Lui :
Acteurs: Bernadette Lafont, Jean-Pierre Léaud, Françoise Lebrun, Isabelle Weingarten, Jacques Renard
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Eustache sur le site IMDB.
Voir les livres sur Jean Eustache…
(1) Jean Eustache était intraitable sur le respect à la virgule près du texte qu’il avait écrit. Et, du fait du budget très réduit, il était hors de question de faire plus de deux prises. Bernadette Lafont raconte que Jean-Pierre Léaud se bourrait de cachets au phosphore pour mémoriser le texte (Bernadette Lafont, une vie de cinéma par Bernard Bastide, éditions Atelier Baie 2013).
Remarque :
* Dans les rôles de figuration, on remarque (non crédités au générique) :
les réalisateurs Jean-Claude Biette et André Téchiné, le producteur Pierre Cottrell (créateur des Films du Losange), les critiques et historiens du cinéma Jean Douchet, Bernard Eisenschitz et Noël Simsolo. Jean Eustache fait une courte apparition (le mari de Gilberte dans le supermarché).
Jean-Pierre Léaud et Bernadette Lafont dans La Maman et la putain de Jean Eustache.
Bravo pour ce que vous faites, tout simplement! Le format de votre blog me semble très satisfaisant: texte de qualité, assez dense mais pas trop long (un élément important pour parvenir à capter l’attention des internautes..) ; suffisamment long cependant pour que l’on ait le sentiment de pouvoir prendre le temps de lire, même en surfant sur internet (ce qui semble être de nos jours de plus en plus compliqué..).
Concernant ce film, je suis ravi d’en avoir lu votre recension: à la fois parce que j’avais tant aimé le voir à l’époque (il y a environ 8 ans ; j’en ai maintenant 36), et parce que, cela fait naître un violent sentiment de nostalgie en moi..
À l’époque de la découverte de ce film, j’habitais une chambre de bonne sous les toits à Paris, et je découvrais des trésors du cinéma sous la houlette de mon maître de l’époque (un intellectuel maoïste junkie.. un maoïste! Au XXIe siècle. Qui l’eut cru?!)
J’avais phantasmé et envié cette vie de Bohème immortalisée par Eustache, et pourtant, je ne me doutais pas que, moi aussi, à ma façon, je la vivais également..
Cela me semble en tous cas flagrant, vu de ma nouvelle vie Niçoise, plus sereine, plus douce, plus solaire, aussi moins inquiète, moins jeune, moins passionnée peut-être..
C’est ainsi!
La nostalgie de Paris m’étreint récemment, et vous avez accompagné ce sentiment, l’approche du Printemps aidant.
Merci!
Reynald Joris
PS: en quelque sorte, je dirais que vous alliez la qualité à la façon du journal Le Monde, à un format technologique moderne.
Je suis heureux de reprendre le temps de vous lire, plusieurs années après, et alors que le flot numérique ne cesse de rugir.
Merci encore pour ce moment!
Merci pour ce commentaire… et d’avoir partagé vos souvenirs à propos de ce film.