6 août 2007

Au hasard Balthazar (1966) de Robert Bresson

Au hasard BalthazarElle :
Je me suis plongée dans l’univers dépouillé et émouvant de Bresson suite à la lecture du très beau roman « Jeune Fille » d’Anne Wiazemsky dans lequel elle raconte le tournage de « Au Hasard Balthazar » et son passage dans le monde des adultes durant cette même période. Nous suivons en parallèle la vie de Marie qui va quitter le monde de l’enfance pour devenir femme et la vie de l’âne Balthazar qui est témoin de la vie des humains qui se vengent de leurs désespoirs sur lui. Balthazar traverse avec courage toutes les épreuves qu’on lui fait subir. Les personnages paraissent soit impassibles comme dans un rêve soit hantés par leurs désirs et perversions; les gros plans sur les objets font passer beaucoup de sensualité. Le regard de Bresson est distancié comme pour mieux approcher la vérité de ses personnages.
Note : 3 étoiles

Lui :
Tout comme les autres films de Bresson, Au Hasard Balthazar est un film assez à part et il est donc difficile de le juger selon les mêmes critères que les autres films. Bresson est avant un styliste, qui s’intéresse surtout à la forme et recherche une certaine pureté et un certain dépouillement dans son cinéma. Le résultat peut dérouter ou provoquer l’enthousiasme… Personnellement, ce n’est pas le cinéma qui m’attire le plus même si je trouve qu’il y a dans Au Hasard Balthazar une utilisation des objets accessoires assez fascinante (à commencer par le personnage principal, l’âne) et une efficacité certaine des plans que Robert Bresson ramène à l’essentiel.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Anne Wiazemsky, François Lafarge
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Bresson sur le site imdb.com.

8 réflexions sur « Au hasard Balthazar (1966) de Robert Bresson »

  1. Tout comme vous madame, c’est la lecture de ce roman qui m’a donné envie de me plonger dans l’univers mystérieux que semble être celui de Bresson. N’ayant pas encore sauté le pas je pense que votre critique m’y entourage et il est fort probable que je m’y mette, grâce à vous dès ce soir !

  2. Je crain que la phrase « une utilisation des objets accessoires assez fascinante (à commencer par le personnage principal, l’âne) » ne dénote tout de même une incompréhension fondamentale, l’âne n’étant un « objet » qu’aux yeux de certains protagonistes, mais au moins l’égal des hommes, voire à bien des égards leur supérieur en termes moraux, aux yeux de Bresson.

  3. C’est vrai que c’est dommage de se focaliser sur les gros plans sur les objets lorsque le film est justement très humain, comme dit Jacques , pour moi Balthazar est égal aux hommes dans ce film, et il est même souvent traité comme un humain! ce film est très charnel et émotionnel, et il est si riche de pistes que moi je lui donne sans hésiter 5 étoiles. je n’ai pas lu « jeune fille » et c’est après avoir vu le film que j’ai envie de le lire! J’ai moi-même écrit une modeste critique de Au hasard Balthazar, je serais ravie si vous en avez envie, que vous la lisiez!

  4. Bresson soigne la forme mais cela n’en fait nullement un formaliste. C’est un film d’une très grande noirceur en tout cas et très singulier de par l’utilisation de l’animal en parallèle avec le destin de cette fille. Il n’y en a pas des masses dans le cinéma.
    L’émotion ne naît pas d’un désir de la susciter – comme c’est souvent le cas – elle est plus douloureuse, du fait du dépouillement. Et plus profonde. C’est une film de questionnement aussi, un film catholique, mais d’un catholicisme plus pasolinien que papal.
    J’ai eu envie de le revoir après « Jeune fille » que j’ai beaucoup aimé – mais cette lecture n’altère en rien ce film et ne lui ôte rien de son mystère – si ce n’est de savoir que la queue de cheval est postiche ! Le livre d’autre part est bien davantage qu’un recueil d’anecdotes ou de souvenirs, c’est de la littérature à part entière – ce pourrait même être de la fiction si l’on avait changé tous ces noms prestigieux : François Mauriac – Robert Bresson – Pierre Klossowsky – Jean-Luc Godard – Pierre Lazareff – Guislain Cloquet (le chef opérateur) – Antoine Gallimard et si en cachant le titre du film tourné – on parvenait à se figurer un film avec âne autre que Balthazar. Un style racé et simple, qui s’attache à l’essentiel tout en finesse pour relater une expérience singulière représentant un tournant décisif dans une vie.

  5. MEMOIRES D’UN ANE
    S’il pouvait raconter son ressenti cet âne Balthazar au prénom de roi mage qui voit et entend tout, acteur et témoin!. La parabole cinématographique limpide de Bresson suit les déambulations de l’âne qui passe de main en main, de maître en maître, de caresses en coups de fouet, du prologue où il n’est encore qu’un ânon dans le vert paradis idyllique des amours enfantines jusqu’au monde moins romantique et poétique des adultes « Les promesses enfantines que nous nous étions faites étaient dans un monde imaginaire, pas dans la réalité », où il se retrouve souvent utilisé pour de mauvaises actions. L’oeil de Balthazar a tout le temps de rencontrer le spectacle de la bêtise humaine et d’en faire les frais. L’âne Balthazar est donc à l’image des protagonistes (humains) habituels des films de Bresson qu’il filme au gré des rencontres, de ci de là, avec des ellipses, étapes d’une vie humaine jusqu’au chemin de croix du « héros » neutre et solitaire qui le fera mourir tout aussi bêtement, abattu par hasard, pauvre Balthazar!.
    A ses cotés le temps de plusieurs allers retours il y a Marie (!) jeune fille de l’instituteur du village à qui Anne Wiazemsky (18 ans) pour ses débuts au cinéma prêtait ses traits. Elle a fort bien raconté cette première aventure déroulée l’été 65 dans la campagne française dans son essai autobiographique paru en 2007 « Jeune fille ». Marie est un personnage en point d’interrogation, jeune corps adolescent en beauté, prisonnière plus ou moins volontaire de sa situation.
    Au hasard Balthazar est à nouveau pour la seconde fois après Pickpocket un scénario original de l’auteur, et le monde moderne, jusqu’ici assez absent du monde bressonnien y entre pour la première fois : les chansons de l’époque (yé yé), mobylettes et 2cv, blousons noirs et baskets…)
    Schubert autant que Jean Wiener accompagnent musicalement ce chemin.
    Le film sort le 25/05/66 et totalise 120 000 entrées pendant les 24 semaines parisiennes de son exclusivité, ce qui est a peu près identique à Pickpocket et confirme une importante et régulière chapelle Bresson.

  6. Je pense que c’est dans ce film que l’on trouve le mechant/mauvais le plus epouvantable de tous les films que j’ai vus, je n’ose ecrire de l’histoire du cinema, ce serait pretentieux de ma part car je n’ai pas vu tous les films qui la compose.

    Le personnage de Gerard est une veritable teigne et personnifie le Mal. Il est d’autant plus terrifiant que c’est d’un homme d’une banalite extraordinaire, il n’est pas a la tete d’une organisation qui veut dominer le monde, il ne tue pas tout le monde pour s’emparer d’un quelconque butin. Il pourrai tetre le voisin de quiconque. Il est mauvais, un point c’est tout et rien ne peut le racheter. A cote de lui, Darth Vador, Blofeld et consorts font pale figure.

    Je n’ai pas encore vu tous les Bresson mais celui-la est definitivement mon prefere. C’est un film admirable, c’est a dire que l’on ne peut qu’admirer tellement il est superbe.

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