Adrien et son ami Daniel passent le mois de juillet dans la propriété prêtée par un ami commun, isolée en bord de mer. Une inconnue, invitée également, finit par occuper l’essentiel de leurs pensées, les troublant autant par sa beauté que par son indépendance et sortant en ville chaque soir avec un nouvel inconnu. Chacun cherche à la dominer à sa manière, sous un détachement feint, par des jugements prétentieux et définitifs sur la vanité de son attitude…
La Collectionneuse est un film français réalisé par Éric Rohmer, son premier film en couleurs. C’est le quatrième des Six Contes moraux mais il a été réalisé avant le troisième (Ma nuit chez Maud). Le film est assez difficile à regarder tant il est empreint des explorations pseudo-intellectuelles de son époque. L’anticonformisme ostentatoire qu’affichent les personnages paraît extrêmement daté aujourd’hui, il s’est mué en superficialité. Le fort égocentrisme des personnages masculins et surtout leur vision dégradante des femmes provoquent même un certain malaise. Malgré la voix-off à la première personne du personnage principal (1), il est difficile de deviner la position du cinéaste tant il reste réservé, en retrait, dans son regard sur ces dandys « modernes ». Il ne cherche pas à provoquer la sympathie (ni l’antipathie), il observe avec précision et nous fait partager les réflexions de ses personnages. Le film bénéficie d’une certaine aura, celle des Six Contes moraux.
Elle:
Lui :
Acteurs: Patrick Bauchau, Haydée Politoff, Daniel Pommereulle
Voir la fiche du film et la filmographie de Eric Rohmer sur le site IMDB.
Voir les autres films de Eric Rohmer chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Éric Rohmer…
Remarque :
* Rohmer a imaginé pour ce film un nouveau principe de fonctionnement : de longues répétitions où les acteurs improvisent dans un premier temps (ce qui a poussé à les créditer au générique pour avoir collaboré à l’écriture des dialogues) suivies de très peu de prises, en longs plans, non intrusifs.
(1) Rohmer a reconnu s’être inspiré de Paul Gégauff, scénariste de Claude Chabrol et dandy réputé, pour concevoir son film.
Patrick Bauchau et Haydée Politoff dans La Collectionneuse de Éric Rohmer.
Six Contes moraux d’Eric Rohmer :
1963 : La Boulangère de Monceau
1963 : La Carrière de Suzanne
1967 : La Collectionneuse
1969 : Ma nuit chez Maud
1970 : Le Genou de Claire
1972 : L’Amour l’après-midi
isolée en bord de …. Lac d’Annecy il me semble
Apprécié il y a très longtemps, je veux bien croire que le film soit daté aujourd’hui
Merci pour ce blog 🙂
Mmmh.. non, la maison en question est à Ramatuelle. Il y a quelques plans sur le port de Saint-Tropez, encore peu fréquenté à cette époque. A noter que Saint-Tropez n’avait pas la connotation négative qu’il peut avoir aujourd’hui (pas pour tout le monde, je sais, mais pour beaucoup). Je viens de lire sur Wikipedia que le « lieu était apprécié des réalisateurs de la Nouvelle Vague ». Je ne sais pas ce qui permet une telle affirmation car, à part La Collectionneuse, je ne pourrais citer spontanément un film de la Nouvelle Vague tourné à Saint-Trop…
Ok
J’avais le souvenir que c’était au bord d’un lac…mais certainement un souvenir trompeur.
Je confonds peut etre avec un autre film, d’ailleurs maintenant que j’y repense je vois Gérard Blain à coté d’un lac, il faut que j’approfondisse !
Peut-être aviez vous à l’esprit Le Genou de Claire de Rohmer avec Jean-Claude Brialy… C’est le film le plus célèbre tourné sur les bords du lac d’Annecy (mais il y en a d’autres bien entendu).
C’est probablement ça.
En revanche de quel film j’ai pu sortir Gérard Blain près d’un lac !
Ça reste un mystère !!
Ca y est, j’ai trouvé 🙂
Donc effectivement j’ai d’abord confondu La Collectionneuse avec Le Genou de Claire, et ensuite j’ai mélangé ce dernier avec Le Pélican de Gérard Blain qui se passe bien au bord d’un lac, mais celui de Lugano.
Du coup je regarde les films de Blain chroniqués ici.
Il n’y a que Ainsi soit-il, que je n’ai pas vu, et je remarque cette phrase finale : »A mes yeux, Gérard Blain était sans doute meilleur acteur que réalisateur ».
Je suggère au moins de voir Pierre et Djemila, le seul dont je me souviens assez bien, et qui est un beau film sur un amour entre 2 ados
Je sais je suis un peu hors sujet 😉
Merci pour ce conseil. Je ne pense pas l’avoir vu…
Vous oubliez l’essentiel : l’idée fondamentale du film est de montrer combien les hommes sont pris dans le déni de ce qu’ils veulent vraiment, et combien la parole leur sert à masquer les raisons profondes de leur impuissance. Haydée, la « collectionneuse », est vraiment libre, et cette liberté est insupportable aux personnages masculins qui en sont incapables : imbus d’eux-mêmes, envieux, ils se leurrent, se payent de mots, tournent en rond. Rohmer, grand cinéaste de la parole, n’est pas « en retrait », au contraire son regard (celui d’un moraliste, d’un passionné de La Bruyère) est acéré.
Quant au « Pélican » de Gérard Blain, c’est un film extraordinaire.
Concernant les films tournés à Saint-Tropez à peu près à l’époque de la Nouvelle Vague, le plus célèbre est « Et Dieu créa la femme » de Roger Vadim (1956), qui a révélé Brigitte Bardot (film d’abord dénigré par les Cahiers du Cinéma avant, dans un second temps, d’être cité comme un contre-exemple bienvenu du « cinéma de la Qualité »). Plus anecdotique, il y a aussi « Saint-Tropez Blues » de Marcel Moussy (1961, avec Marie Laforêt, Jacques Higelin, et Claude Chabrol dans le petit rôle d’un cinéaste en repérages si je me souviens bien). Moussy avait collaboré plusieurs fois avec François Truffaut, notamment pour le scénario des « Quatre cent coups ».
Oui, il y a bien évidemment le film de Vadim qui a créé le mythe Saint-Tropez…. mais je m’interrogeais seulement (dans un esprit de curiosité, pas pour faire polémique) sur la phrase Wikipedia affirmant que le « lieu était apprécié des réalisateurs de la Nouvelle Vague ».
Ranger Roger Vadim dans les réalisateurs de la Nouvelle Vague est, comme vous le sous-entendez, assez acrobatique 🙂
Marcel Moussy en revanche peut l’être (du moins pour ce film) mais, comme vous le dites, c’est « plus anecdotique ». 😉
Sur le fond du propos de « La Collectionneuse », il est effectivement possible de supposer que l’intention de Rohmer était souligner les contradictions des personnages masculins. C’est la position la plus satisfaisante pour nous qui connaissons le parcours ultérieur du cinéaste. Mais personnellement, cela ne me semble pas évident. J’ai trouvé le regard du cinéaste plutôt neutre.