3 décembre 2020

A couteaux tirés (2019) de Rian Johnson

Titre original : « Knives Out »

À couteaux tirés (Knives Out)Le romancier Harlan Thrombey est retrouvé mort la gorge tranchée, le lendemain de son 85e anniversaire alors que toute la famille était réunie dans son vaste manoir. Tout indique un suicide mais le détective privé Benoit Blanc s’invite dans l’enquête de l’inspecteur Elliott et commence à suspecter un meurtre…
À couteaux tirés est un film américain écrit et réalisé par Rian Johnson, dont le nom est maintenant associé à Star Wars. Mais il est ici dans un tout autre registre : une énigme à (presque) huis clos dans le pur style d’Agatha Christie. Bien que le lieu et les personnages puissent paraître habituels, une riche famille avec des grandes tensions sous-jacentes entre ses membres, l’intrigue est assez originale dans son déroulement, rendue plutôt inhabituelle par l’insertion d’un personnage extérieur (interprété par l’actrice cubaine Ana de Armas). L’histoire est captivante et on ne devine guère la solution avant la fin. Rian Johnson s’est assuré d’une belle distribution et tous les rôles sont bien tenus. Tout au plus, peut-on regretter cet accent du Sud un peu forcé pris par Daniel Craig (1). L’ensemble est assez intelligent et élégant. Un excellent divertissement. Gros succès en salles.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Daniel Craig, Chris Evans, Ana de Armas, Jamie Lee Curtis, Michael Shannon, Don Johnson, Toni Collette, Christopher Plummer
Voir la fiche du film et la filmographie de Rian Johnson sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Voir les autres films de Rian Johnson chroniqués sur ce blog…

(1) L’acteur Daniel Craig a calqué sa voix sur celle traînante de Shelby Foote, célèbre romancier et historien du Sud américain. (Extrait du dossier de presse)
Si, comme moi, vous ne connaissez pas Shelby Foote (1916-2005), sachez qu’il est considéré comme l’héritier spirituel de Faulkner. Parmi ses cinq romans, on peut citer L’Amour en saison sèche (1951) ou encore Shiloh (1952).

À couteaux tirés (Knives Out)Ana de Armas et Daniel Craig dans À couteaux tirés (Knives Out) de Rian Johnson.

À couteaux tirés (Knives Out)La famille Thrombey au grand complet : (de g. à d.) Don Johnson, Jamie Lee Curtis, Chris Evans, K Callan, Ana de Armas, Christopher Plummer, Michael Shannon, Jaeden Martell, Katherine Langford, Toni Collette et Riki Lindhome dans À couteaux tirés (Knives Out) de Rian Johnson.

3 réflexions sur « A couteaux tirés (2019) de Rian Johnson »

  1. J’avoue que le début du film m’a un peu inquiété :
    — on entre directement dans le vif de l’enquête, froidement, à la façon d’un cluedo (la première demi-heure me faisait vraiment craindre que ce soit une sorte « d’adaptation cinématographique du cluedo »), sans exposition de la situation ni des personnages (et il faut un moment pour repérer précisément qui est qui),
    — Daniel Craig cabotine franchement, avec son accent du Sud certes mais plus globalement une attitude qui fait penser qu’il « joue à l’inspecteur Colombo », avec sa fausse désinvolture et son côté décalé trop étudié.

    À ce titre, j’aurais gagné en sérénité si j’avais lu votre critique et le résumé de l’intrigue, car la situation simple et claire que vous décrivez n’est explicitée qu’au fil de la première demi-heure (la scène de découverte du corps laisse penser à un manoir vide : rien ne permettait de savoir que toute la famille était présente dans diverses chambres, qu’il y avait eu une fête la veille, etc.).

    Une fois passée cette période de flottement, c’est-à-dire une fois que :
    — la situation de départ est plus claire (le suicide ou le meurtre s’est déroulé dans la nuit suivant la fête des 85 ans du défunt),
    — l’organigramme compliqué de cette grande famille se précise,
    — on sort de la première séquence d’enquête où le personnage de Daniel Craig est mis en scène (par les policiers et lui-même) de façon exagérément mystérieuse,
    … alors le film se stabilise, et l’ensemble (y compris le début bizarre) trouve un bel équilibre. Finalement, tout le procédé conduit à nous saisir de la première à la dernière seconde, sans temps morts, et malgré peu de scènes « d’action » (quelques-unes quand même).

    Le procédé qui m’a dérouté a permis en fin de compte d’assurer une tension et une « attention » tout au long du film, ce qui est une gageure pour un film d’enquête de type « wodunit » (typique d’Agatha Christie). Sans le début étrangement construit, cette attention n’aurait sans doute pas pu être aussi constante.

    Et au bout du compte, un bon wodunit, avec des techniques certes classiques (fausses pistes, tensions familiales, quelques coups de théâtre) mais bien fichu et distrayant.

    NB : Un étonnement tout-de-même, celui de voir tous les sites présentants le film mettre Daniel Craig en « premier rôle » et même parfois Chris Evans en deuxième (comme vous ici), alors qu’en termes de présence à l’écran il est évident que c’est, de très loin, Ana de Armas qui tient réellement le premier rôle. À l’exception des micro-flashs-backs récurrents liés aux récits successifs des personnes interrogées, Ana de Armas est quasiment de tous les plans, et c’est par ses yeux que nous vivons l’enquête (bien plus que par ceux de Daniel Craig). Son effacement relatif dans la hiérarchie de la distribution officielle est-il dû au fait qu’elle soit une femme (à rôles équivalents les hommes sont presque toujours mis en premier), au fait qu’elle soit moins connue, ou au fait que le personnage joué par Daniel Craig est prévu pour une « franchise » de plusieurs films (ce qui n’explique pas de placer Chris Evans en deuxième alors qu’il est au maximum troisième ou quatrième rôle du film) ? Sans doute les trois cumulés. Mais c’est gênant et dommage. Le premier rôle de ce film s’appelle Ana de Armas.

  2. NB 2 :

    Même si cela reste léger et en pointillé, le film distille quelques sérieux coups de griffe envers la grande bourgeoisie. Tout le monde est assez odieux (y compris par certains aspects le patriarche), il est rappellé que celle et celui qui ont « monté leur propre affaire » ont aidé sacrément aidé pour ça par les millions du patriarche (joli rappel de la situation réelle des prétendus « milliardaires entrepreneurs » actuels, qui sont tous des héritiers en réalité), et le racisme et le classisme est palpable.

    Des minuscules détails m’ont bien plu : le fils aîné qui professe un progressisme et une affection pour l’infirmière (Ana de Armas)… mais lui tend machinalement son assiette vide comme si elle était une domestique (alors qu’il vient précisément de tancer son fils ou son neveu qui la traite comme une domestique) ; le fait que les différents membres de la famille attribuent à chaque fois une origine géographique différente pour ladite infirmière (pour l’un·e elle vient d’Équateur, pour un·e autre de Bolivie, pour encore un·e autre d’Argentine [ou du Pérou, je ne me souviens plus mais c’était un troisième pays différent], pour un quatrième elle est d’origine brésilienne !) ce qui résume parfaitement à la fois leur indifférence humaine et leur racisme insidieux. Ces gens sont délicieusement odieux, et les petites touches imperceptibles qui dessinent ce qu’ils ont d’antipathique témoignent d’une conscience intéressante de la part du réalisateur-scénariste. Il dénonce très très légèrement, sans insister, mais cliniquement.

  3. Pour lister les acteurs, je reprends généralement l’ordre du générique (visible sur IMDB), sauf lorsqu’il est « par ordre d’apparition à l’écran », auquel cas je le fais moi-même (mais ce ne fut pas le cas ici). Le fait qu’Ana de Armas soit en 3e position est certainement dû au fait qu’elle n’est pas très connue et son nom n’a pas l’attrait commercial que peuvent avoir les autres. Sur ce plan, le raisonnement des producteurs/distributeurs a le mérite d’être simple…!

    Vous avez raison de dire que son rôle est prépondérant car, quand je disais qu’un élément extérieur à la famille apporte à l’histoire son originalité, c’est bien à elle que je pensais (et non au détective, je vais ajouter une mention pour que ce soit plus clair d’ailleurs car, en me relisant, j’ai d’abord pensé au détective).

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