Titre original : « Dial M for Murder »
Ayant découvert que sa femme le trompe, un ancien champion de tennis a projeté de la tuer. Il a mis au point un plan qui lui permet d’avoir un alibi parfait et pour lequel il recrute les services d’un ancien camarade de collège au passé trouble… Bien qu’il soit l’un des films les plus connus d’Alfred Hitchcock, Le crime était presque parfait n’est guère apprécié du cinéaste (1). En panne sur un nouveau scénario alors qu’il devait un film à la Warner, il n’a en effet choisi de faire cette adaptation d’une pièce de théâtre que par défaut. Plutôt que d’en gommer les origines théâtrales, il les accentue : il situe tout le film dans une seule et unique pièce et va jusqu’à utiliser un plancher en bois pour garder l’impression d’une scène. Le plus extraordinaire est que l’on ne ressent jamais cet espace limité tant le scénario se déroule à la perfection. Le crime était presque parfait est un film de dialogues. La scène où Ray Milland prend au piège son ancien camarade de collège pour le forcer à exécuter son plan est assez remarquable : très longue et extrêmement passionnante, on ne raterait une phrase pour rien au monde. Le crime était presque parfait est sans aucun doute l’une des plus belles réussites de « théâtre filmé ». Il se revoit toujours avec le même plaisir.
Elle:
Lui :
Acteurs: Ray Milland, Grace Kelly, Robert Cummings, John Williams, Anthony Dawson
Voir la fiche du film et la filmographie de Alfred Hitchcock sur le site IMDB.
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Remarques :
* La pièce originale a été écrite par Frederick Knott. Elle a été jouée 552 fois (10/1952 – 02/1954) ce qui en fait un franc succès. John Williams (le policier) et Anthony Dawson (le tueur) y tenaient le même rôle.
* Alfred Hitchcock a quelque peu modifié l’histoire : sans doute pour la rendre plus troublante, le cinéaste a rendu le mari plus sympathique que dans la pièce où il tuait sa femme surtout pour l’argent, la liaison de sa femme avec son amant étant terminée. De plus, le personnage de l’amant paraît ici bien superficiel et moins intelligent que le mari. La femme est particulièrement hypocrite. Sans doute, Hitchcock voulait-il faire germer en nous l’idée troublante que le mari méritait peut-être de réussir un plan si bien préparé…
* Cameo : Alfred Hitchcock est visible sur la photographie du banquet (environ à 12’30). A noter qu’il est assez net que les visages de Ray Milland, d’Anthony Dawson et d’Alfred Hitchcock ont été collés après coup sur une photo…
* Hitchcock souligne que les robes portées par Grace Kelly sont de couleurs vives au début du film et deviennent de plus en plus foncées au fur et à mesure que l’intrigue devient plus sombre.
* Dans certaines scènes, Hitchcock a placé la caméra dans une fosse pour accentuer l’effet de contre-plongée.
* Le crime était presque parfait a été tourné en 3D, version qui fut peu visible avant qu’elle ressorte en 1980.
Remake :
Meurtre parfait (A Perfect Murder) de Andrew Davis (1998) avec Michael Douglas et Gwyneth Paltrow.
Homonyme :
Le crime était presque parfait (The Unsuspected) de Michael Curtiz (1947) avec Claude Rains, Joan Caulfield et Audrey Totter.
(1) Lors de ses entretiens avec François Truffaut, Alfred Hitchcock dit « Nous pouvons passer rapidement sur ce film car il n’y a pas grand-chose à en dire » et ce n’est qu’à l’insistance de Truffaut qu’il consent à en parler un peu.
La scène la plus célèbre du film Le Crime était presque parfait d’Alfred Hitchcock (de g. à d.: Anthony Dawson et Grace Kelly)
La pièce de Frederick Knott a été portée à l’écran une deuxième fois en 1998 sous le titre « A Perfect Murder » – « Meurtre parfait ». Réalisé par Andrew Davis, les rôles principaux sont tenus par Michael Douglas, Gwyneth Paltrow et Viggo Mortensen. Cette nouvelle mouture s’écarte sensiblement de la pièce et se base principalement sur l’adaptation qu’en avait faite Alfred Hitchcock dont c’est presque un ‘remake’…
Merci bien de m’avoir signalé ce point qui m’avait échappé… J’ai ajouté cette information.
Mais que signifie donc le titre original : « Dial M for Murder » ?
Merci !
JC
Cela peut se traduire par « Composez M pour un Meurtre »
(« composer » dans le sens « faire un numéro sur un cadran de téléphone »)
Maintenant, on pourrait traduire par « Pressez M pour un Meurtre » mais à l’époque, les cadrans de téléphone à touches n’existaient pas encore.
Cela fait donc référence à la façon dont le mari utilise le téléphone pour créer à distance la situation permettant le meurtre (déplacement de sa femme). A noter que c’était le titre original de la pièce.
Le film se déroule à Londres où, du moins à cette époque, il fallait introduire sur le cadran circulaire un préfixe d’une lettre avant de composer le numéro du correspondant. Ces lettres définissaient le central auquel était connecté le numéro appelé. Ici l’auteur a joué sur la lettre « M » pour faire un sorte de jeu de mots : « Préfixe ‘M’ pour meurtre ».
J’ajoute qu’il y a un jeu de mot.
Certes, la base est que « Dial M for Murder » fait référence aux lettres qui composaient à l’époque les numéros de téléphone (les téléphones à cadran rotatif portaient toujours les lettres à côté des numéros, et cela s’est d’ailleurs transféré sur les premiers téléphones à touches, avant que les smartphones n’aient leur clavier alphabétique spécifique).
Mais la formule « M for Murder » ne veut dire « M pour un meurtre » qu’au second degré, et c’est justement ce double-sens qui est amusant : le sens premier n’est pas « pour » mais « comme ».
Le premier degré (qui rend le titre ironique) c’est qu’il est d’usage de dérouler un mot entier pour sécuriser les lettres lorsqu’on épèle au téléphone.
Donc, au départ, « M for Murder » renvoie à la formule « M comme Marcel, O comme Odile, etc. » En anglais, cela se dit « M for Mike », par exemple.
On part donc de « composer M comme meurtre » pour sous-entendre « composez M si vous voulez commettre un meurtre », grâce à la polysémie de « for ».
Très juste! C’est encore meilleur comme cela !
Je n’avais jamais pensé à cette interprétation…
Au sujet du tournage en 3D, plusieurs plans sont composés de manière à mettre en relief un objet situé au premier plan. Lors de l’agression de Grace Kelly, celle-ci vient notamment saisir une paire de ciseaux comme si elle se trouvait dans le public.
Le premier plan du générique, qui illustre justement le titre, et où l’on voit un doigt composer un numéro sur un cadran tournant, a dû être tourné au moyen d’un énorme doigt factice, car la caméra 3D était trop contraignante pour faire un gros plan de cette nature…
Je n’ai malheureusement jamais eu l’occasion de voir le film en 3D mais j’en serais curieux ! Comme vous, j’en aime beaucoup l’atmosphère resserrée et théâtrale. Je crois que c’est dans ses entretiens avec Truffaut que Hitchcock explique avoir choisi de tourner les scènes de procès sans décor, filmant seulement Grace Kelly sur un fond coloré, pour éviter que le public ne pense assister au début d’un autre pan de l’histoire et de relâcher ainsi la tension.
Sur un plan thématique, enfin, il me semble que Patrick Brion fait un parallèle entre ce film et « Strangers on a Train » (L’inconnu du nord-express) : le personnage de Ray Milland est ici un ancien joueur de tennis qui a épousé une femme fortunée, ce à quoi aspirait celui joué par Farley Granger dans le premier film.
La variation est que c’est ici le mari qui va convaincre (avec succès) un autre homme d’assassiner sa femme, et non l’inverse.
Je n’ai jamais vu non plus le film en 3D. A propos des effets 3D, dans le livre Hitchcock/Truffaut, Hitchcock parle également d’un gros plan sur la clef. Oui, c’est bien lors de ces entretiens qu’il mentionne avoir voulu tourner les scènes de procès sans décor (personnellement, je ne trouve pas que ce soit très réussi, cela évoque plus un rêve).
Oui, c’est juste.
Peut-être est-ce aussi un choix dicté par des raisons budgétaires : il aurait sinon fallu construire ou trouver un décor de tribunal, autant de costumes que d’intervenants, etc.
La pièce originale a été adaptée par Roger Féral en France sous le titre de Crime Parfait
Elle a été jouée des milliers de fois à Paris
Merci pour cette précision que, personnellement, j’ignorais.
Je n’arrive pas à situer la fenêtre qui se trouve dans la chambre. La fenêtre est munie de rideaux clair imprimés , l’inspecteur Hubbard et Tony regardent la porte d’entrée de l’immeuble par cette fenêtre. Pas de fenêtre sur le mur de gauche , du fond…Les différentes vues de la chambre ne montrent pas de fenêtre et les plans avec la fenêtre ne montrent pas ce qui l’entoure.
Ha ha… Je pense que cet article vous intéressera :
http://www.davidbordwell.net/blog/2012/09/07/dial-m-for-murder-hitchcock-frets-not-at-his-narrow-room/
(c’est en anglais, vous avez un plan de l’appartement au milieu de l’article)
A noter que les les fenêtres sont des bow windows, très courantes en Angleterre, ce qui permet d’avoir une bonne vue sur la porte d’entrée.
Merci , on voit bien le Bow window de la chambre sur le plan. Au pied du lit de Margot qui longe le mur se trouve la baie vitrée . Sur les vues de l ’ extérieur ce Bow window est visible. Curieusement lorsque la caméra filme la chambre elle évite cette baie vitrée. Lors de la scène de crime alors que Margot est réveillée par la sonnerie du téléphone, , lorsque l’inspecteur Hubbard inspecte l’appartement pour savoir d’où Swann a pu venir, il visite la chambre qui donne accès à la salle de bain » pas par la salle de bain » dit il, mais n’évoque pas la fenêtre et on ne la voit pas . Ce n’est qu’à la fin du film lorsque l’inspecteur Hubbard va dans la chambre plongée dans l’obscurité que l’on voit ce Bow window et très rapidement sa position dans la chambre. Il observe alors L’entrée de l’immeuble.
L’un des avantages de reconstituer un appartement en studio est de pouvoir enlever un mur selon ses besoins (car il faut de place, il y a du monde derrière la caméra, surtout à cette époque). Donc, si Hitchcock n’avait pas besoin de plans vers ce mur, je suppose que ce mur n’était tout bonnement pas là pendant la majorité du tournage.
C’est souvent le mur de la fenêtre qui est enlevé car une fenêtre dans le champ rend l’éclairage bien plus complexe.
Un film à voir et à revoir