13 janvier 2009

L’ennemi intime (2007) de Florent Emilio Siri

L'Ennemi intimeElle :
Un peu de mal à me plonger dans le film que je trouve un peu trop « grand spectacle » au départ… Puis, peu à peu, on se laisse gagner par l’ambiance photographique qui évoque le passé, par les ambiances contrastées, la beauté des paysages qui s’entrechoque avec les horreurs de la Guerre d’Algérie. Ce film âpre et brut a le mérite de porter au grand jour les atrocités commises par l’armée française, et aussi par le FLN, pendant cette guerre. Benoît Magimel et Patrick Rotman (en tant que scénariste) se sont fortement impliqués pour qu’il voie le jour. Les scènes de combats et de torture sont violentes, presque insupportables mais reflètent la vérité historique. Cette période honteuse et mal reconnue par les autorités politiques fut peu explorée par les cinéastes, mis à part par exemple René Vautier qui se fit interdire son film Avoir 20 ans dans les Aurès il y a quelque 30 ans. Au delà de la guerre d’Algérie, L’ennemi intime est aussi un regard porté sur toutes les guerres, montrant comment elles transforment peu à peu les hommes les plus idéalistes et les plus humanistes en machines à tuer.
Note : 3 étoiles

Lui :
L’ennemi intime est le premier film français à grand spectacle sur la Guerre d’Algérie. Pour les films précédents sur ce sujet, qui est comme banni de nos mémoires, il faut remonter aux films militants des années 70 comme R.A.S. ou Avoir 20 ans dans les Aurès. Basé sur le livre de Patrick Rotman (qui a participé à l’écriture du scénario), le film décrit cette guerre dans sa réalité la plus brute et la plus dure, nous faisant suivre l’évolution d’un jeune lieutenant qui va se trouver transformé par l’horreur quotidienne de la guerre. Comme l’indique le titre L’ennemi intime, l’ennemi dans une guerre est autant soi-même que celui d’en face ; ce jeune lieutenant sera autant transformé par les erreurs qu’il fait que par la barbarie de la guerre. Si le fond apparaît louable, L’ennemi intime est hélas plus critiquable sur sa forme : la démonstration est bien trop appuyée et beaucoup de scènes veulent visiblement marquer nos esprits. Le traitement photographique, appliqué pour vieillir l’image, est inutile. Etait-ce nécessaire pour accroître sa portée ? C’est difficile à dire mais quoi qu’il en soit le film de Florent Siri est à voir : c’est avant tout un plaidoyer efficace contre la guerre.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Benoît Magimel, Albert Dupontel, Aurélien Recoing,  Mohamed Fellag, Lounès Tazairt
Voir la fiche du film et la filmographie de Florent Emilio Siri sur le site IMDB.

Les autres films français sur la Guerre d’Algérie :
Avoir 20 ans dans les Aurès de René Vautier (1972) avec Philippe Léotard
R.A.S. d’Yves Boisset (1973) avec Jacques Speisser et Jacques Villeret
La question de Laurent Heynemann (1977)
A noter également :
La Bataille d’Alger (1966), le film italien de Gillo Pontecorvo (La Battaglia di Algeri)

6 réflexions sur « L’ennemi intime (2007) de Florent Emilio Siri »

  1. Ce film fut un temps dans ma liste de films « à voir », car j’aime beaucoup Albert Dupontel, et j’étais curieux de savoir ce qu’il allait proposer sur cette base historique. Je n’ai pas renoncé à le voir un jour, mais je ne sais pas quand.

    Une question: avez-vous les Roseaux sauvages, d’André Téchiné ? On m’en a dit grand bien et je crois qu’il parle aussi – même si probablement différemment – de la guerre d’Algérie.

    Bonne journée.

  2. Le jeu d’Albert Dupontel est un peu à l’image du film dans son ensemble : par certains côtés, comme le jeu excessif de ses yeux, il fait un peu psychopathe, par d’autres, il fait très censé et humain.

    Sinon, pour les roseaux sauvages, nous en parlons ici : Les Roseaux Sauvages
    Ce n’est pas à proprement parler un film sur la guerre d’Algérie mais plutôt un film sur fond de Guerre d’Algérie.

  3. Vous oubliez dans les films sur la guerre d’Algérie « Mon colonel » de Laurent Herbiet en 2006.
    http://www.cinemovies.fr/fiche_film.php?IDfilm=13650
    Je ne l’ai pas vu mais à l’époque je crois me souvenir qu’il avait eu de bonnes critiques. Malheureusement il a eu une distribution désastreuse et surtout black-out de la part des médias.

    Les 4 films que vous citez sont effectivement important surtout « la bataille d’Alger .
    Si vous pensez que ce film « L’ennemi intime » est trop manichéen, il en est de même de R.A.S et pourtant si on lit la littérature relatif à cette époque, on voit que les scènes décrites dans R.A.S ont eu lieu dans différents régiments, casernes, sites parfois éloignés les uns des autres ; donc oui il en fait « trop » car il rassemble tous ces faits dans un seul lieu mais c’est le parti pris de Boisset de monter toutes les situations.
    Autre film qui a pour arrière fond même assez vague la guerre d’Algérie et souvent nous l’oublions c’est les « Parapluies de Cherbourg » où la guerre d’Algérie est évoquée alors que dans les « Roseaux Sauvages » elle est élément du récit et c’est un très beau film sur cette période et sur la conscience que pouvaient avoir les militants opposants à cette guerre – la prof qui ne soutient pas la désertion d’un des frères de ses élèves -.

    Merci pour vos critiques qui nous font regarder autrement les films.

  4. bonjour, sur ce film je suis assez mitigé j’ai vu bcp de films sur la guerre d’Algérie pour tenter de comprendre ce que mon père avait pu vivre la bas pour ne jamais vouloir en parler.
    l’intérêt est beaucoup plus dans le documentaire de rotman qui accompagne certaines versions dvd et qui porte le même titre laissant parler des acteurs de cette guerre même aussarés c’est dire !!
    On retrouve dans ce documentaire des témoignages mis en images dans certaines séquences du film.
    Voila ce commentaire est peu axé cinéma mais plutôt sur l’homme confronté a des choses par nature inhumaines

  5. Un film coup de poing !
    Le récit d’une guerre perdue d’avance : pas sur le terrain, mais concernant sa justification même.
    Le thème des Harkis est habilement abordé, pour certains « chiens de guerre » de la France en Italie jusqu’en Allemagne, et qui retrouvent des compagnons de lutte dans le camp du FLN, ce qui n’exclue pas la haine entre les deux bords au sein d’une population ballotée entre les factions et qui ne semble rien avoir demandé à personne, son seul désir semblant être de vivre en paix.
    Il n’y a ici aucun angélisme, et les méthodes du FLN, comme les comportements déviants des troupes françaises (tortures et massacres), sont abordés sans ambages. Ainsi, la scène de l’emploi des « bidons spéciaux » est terrifiante, mais tellement réaliste. Effectivement, il y avait de quoi devenir littéralement fou ! Et cette folie est parfaitement retranscrite. Un film à dédier à toutes la âmes brisées qu’a entraîné ce conflit totalement inutile, mais qui pourra également être abordé comme une manière très haletante de western ultra violent sous le soleil, au travers du jeu du chat et de la souris entre le leader local du FLN et la troupe française et son chef. Plusieurs niveaux de lecture, donc, pour un film à recommander très chaleureusement.

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